Souvent, elle se sentait prisonnière. Prisonnière d'une maison trop petite, prisonnière d'une planète trop étrange et prisonnière d'une mélancolie trop présente. Pourtant, elle était libre d'aller où elle voulait, mais il lui était impossible de rentrer chez elle, elle n'avait pas le droit. Elle avait décidé de fuir et elle devait en assumer les conséquences, elle n'avait pas d'autre choix que d'endurer cette vie nouvelle faite de libertés hasardeuses et d'anxiété troublante. Clea ne savait pas vraiment quoi faire, elle ne savait pas comment réagir face à toutes ces étrangetés alors elle avait pris pour habitude de vagabonder lorsqu'elle se posait trop de questions. Elle quittait le Sanctum Sanctorum pour quelques heures, parfois pour quelques jours et elle allait et venait, tel un spectre, mais aujourd'hui, c'était différent, on lui avait donné rendez-vous. Une brise hiémale faisait gracieusement voleter ses cheveux pales autour de son visage, cette nuit était tellement froide, l'hiver se faisait rude et semblait s'éterniser alors elle s'emmitoufla davantage dans son épais manteau de fourrure. Elle traversa plusieurs quartiers, ses pas étaient rythmés par le chant sinistre des bourrasque qui faisait trembler les tristes branches des arbres qui bordaient la route. Cela faisait un moment qu'elle n'avait croisé personne, les rues semblaient étrangement désertes, abandonnées par le temps. Il n'y avait personne. Elle jetait un coup d'oeil à droite, puis à gauche. Néant. Elle était terriblement seule, mais cela ne lui déplaisait guère, elle avait l'habitude. Elle accéléra simplement le pas, elle n'avait pas envie d'être en retard. Elle mourrait d'envie de voler jusqu'au lieu de rendez-vous, elle irait tellement plus vite ainsi, mais elle ne voulait pas sembler anormale, elle l'était déjà suffisamment. Cependant, les rues étaient vide, personne n'était là pour voir cela alors elle se mit à flotter sur plusieurs mètres, le vent venait lui fouetter le visage et elle se sentait libre.

Elle finit par arriver devant la majestueuse porte en fer forgé du Green-Wood Cemetery. Les détails de la devanture étaient somptueux, les volutes s'entremêlaient et les finissions des lettres métalliques étaient très travaillées. Clea était admirative, les humains étaient si doué pour bâtir, il était si tragique qu'ils fussent tout aussi doués pour détruire. La jeune femme ne posa pas les pieds au sol, néanmoins, elle vérifia si la rue était bel et bien vide avant de s'élever bien plus haut dans les airs. Elle retomba gracieusement et silencieusement de l'autre côté du mur. Elle tressaillit à la vue des tombes, l'atmosphère de ce cimetière était si sinistre et si paisible à la fois, à vrai dire, elle peinait presque à comprendre ces deux sensations pourtant si opposées. Elle secoua doucement la tête. Au loin, elle pouvait distinguer la silhouette de son ami. Il se tenait droitement sous l'arbre imposant qui trônait au beau milieu des sépultures. La vie et la mort cohabitaient. D'étranges plantes poussaient sur plusieurs tombes, sans doutes se nourrissaient-elles de ce qui restait des hommes et femmes enterrés quelques mètres en dessous. Elle avança vers son ami et lorsqu'elle arriva à sa hauteur, elle constata qu'il n'avait pas changé. Le temps n'avait aucune emprise sur lui. Il sourit alors elle fit la même chose. Elle était un peu gênée, elle savait ce qu'il avait tenté de faire quelques années auparavant. Elle était néanmoins heureuse de le revoir et de constater qu'il n'était pas un simple fantôme appartenant au passé. « Clea… C’est un plaisir de te revoir. » dit-il avant de se diriger vers un banc. Il s'assit alors elle fit la même chose et ne prononça pas un mot. Elle préférait le laisser dire ce qu'il avait à dire plutôt que de l’interrompre. « Comment vas-tu ? J’ai appris, il y a peu, que tu étais aussi sur Midgard. Que s’est-il passé, mon amie ? » demanda-t-il. À cette question, la sorcière se rendit compte qu'elle avait bien des choses à lui raconter. Sa vie avait été si mouvementée ces dernier temps ... À vrai dire, elle ne savait plus trop où elle en était. Elle était confuse et perdue. « Je vais aller droit au but. On a toujours eu l’habitude d’être franc l’un avec l’autre, non ? »  il semblait amusé. En effet, elle lui faisait confiance, aussi étrange que cela pût paraitre. Elle sourit. Il releva sa manche d'un mouvement assez vif et lui montra un bracelet finement décoré de runes. « J’ai besoin de ton aide. Mon frère… (il marqua une pause et sembla pensif) Thor m’a posé cet artefact, bridant mon pouvoir en grande partie. » révéla-t-il en fixant l'artefact. Clea comprit alors pourquoi elle était ici. Il avait besoin d'aide. Elle tenta de garder son calme. « J’aimerais que tu m’en débarrasses. » dit-il finalement. Elle avait tellement envie de l'aider, mais elle ne pouvait pas, elle n'avait pas le droit. Elle décida alors d'être honnête avec lui.

« Je suis heureuse de te revoir Loki. » commença-t-elle doucement. Il était son ami et il lui avait manqué. Elle se souvint avoir parlé de lui avec Stephen, leur amitié avait surpris ce dernier, mais au fond, la jeune femme trouvait que cela n'avait rien de surprenant, ils avaient beaucoup de points communs après tout. « Il s'est passé beaucoup de choses. Tellement de choses ... Le Sorcier Suprême de cette dimension a vaincu Dormammu, il m'a proposé de le suivre et j'ai accepté. » Elle évita de lui faire part de tous les détails, premièrement parce que ce serait beaucoup trop long à raconter, ensuite parce que cela n'avait rien de passionnant. Elle fixa le bracelet quelques instants. « J'aimerais tellement pouvoir t'aider Loki ... Elle marqua une pause et prit une profonde inspiration. Je ne suis pas sûre d'en être capable, je ne peux trahir le Sorcier Suprême. » Cela n'avait pas vraiment de sens. « On m'a raconté ce qu'il s'était passé à New York il y a quelques années. On m'a dit ce que tu avais fait ... Pourquoi ... ? » souffla-t-elle. Elle se sentait désolée. Elle brûlait d'envie de l'aider, elle savait ce qu'il ressentait : être privé de ses pouvoirs était une sensation terrible, on se sentait si vide. Elle le regarda en souriant timidement. « Je vais voir ce que je peux faire, mais je ne peux rien te promettre. »  ajouta-t-elle finalement. Elle ne voulait pas lui donner trop d'espoir et elle ne voulait pas l'agacer. Elle voulait simplement l'aider, mais elle se demandait si elle était prête à en payer le prix.