Quand Dylan se réveille, elle a l'impression de ne pas avoir si bien dormi depuis des siècles. C'est comme si son corps avait eu son quota de repos pour les mois à venir. Elle se sent parfaitement relaxée, et ne stresse même pas (comme elle le fait tous les matins) quand son regard se pose sur le réveil, sur la table de nuit. Elle baille, calme et prête pour une nouvelle journée tranquille… Puis elle se rend compte qu'elle n'est pas dans son lit. Un petit coup dans la poitrine la surprend, et tout à coup, tout lui revient comme une énorme vague à laquelle on ne peut échapper. Elle s'assoit si précipitamment dans le lit qu'elle en a le tournis. Autour d'elle, la chambre est baignée dans une lumière solaire, qui s'échappe des volets encore fermés. Il y a des vêtements par terre. La chambre dans laquelle elle se trouve ne lui est pas familière, même si elle reconnaît certaines paires de chaussures, et une jolie veste sur laquelle elle lorgne depuis des semaines à chaque fois qu'Heather la porte au travail. La brune reste là, interdite, pendant une bonne longue minute, à essayer de remettre ses souvenirs en place. Sa tête lui fait un mal de chien, signe qu'elle a un peu trop bu la veille, mais ce n'est pas pour autant qu'elle a tout oublié. Oh, ça non, elle n'a rien oublié du tout. Elle se souvient de tout comme si c'était hier. Bordel, c'était hier. Le dîner, les burgers, les rires. L'atmosphère qui se détend petit à petit entre elle et Heather. Les blagues pourries de la blonde, puis ce moment où Dylan a compris que tout ça n'était pas juste une tentative de bien s'entendre avec ses collègues. Les verres qu'elles se sont enfilées dans ce bar qui était loin d'être un bar hétéro, leurs danses endiablées sur la piste. Elle se revoit repousser une fille qui essayait de la coller un peu trop, puis aller danser avec sa collègue pour lui éviter de subir la même chose avec une fille très moche qui essayait de se coller un peu trop derrière elle. Elle revoit leur proximité, leurs corps qui s'effleurent, les mains d'Heather sur sa taille tandis qu'elles chantaient à tue-tête les chansons diffusées par le club. Elle se souvient de ce moment, où leurs visages se sont retrouvés si proches que le monde a semblé disparaître autour d'elles. Elle se souvient d'Heather qui l'entraîne hors du club, de leurs rires sur le chemin de son appartement, des derniers verres qu'elles ont pris dans son salon. Puis elle se souvient de la musique, qui passait en fond. De la magnifique blonde, un peu trop près de ses lèvres. De son incapacité à résister. De son envie de se coller contre elle et de ne plus jamais partir. Elle se souvient du baiser. Des baisers. D'Heather qui la prend par la main et l'emmène jusqu'à sa chambre, qui commence à se déshabiller devant elle, qui prend l'initiative de lui enlever ses vêtements à elle. Elle se rappelle du moment où elle lui a dit qu'elle n'avait jamais fait ça avec une fille, et du fait que la blonde a balayé ça d'un revers de main comme si c'était un détail insignifiant. Elle se rappelle de…
Dylan se sent rougir, les draps relevés sur sa poitrine nue. Elle a couché avec une fille. Nan, mieux, elle a couché avec une femme. Bordel, elle a couché avec une femme. Et c'était mieux que tout ce qu'elle aurait pu imaginer. C'est impossible. Elle ne peut pas le croire. Les premières fois ne sont jamais des parties de plaisir, normalement. Mais Heather… Alors Dylan commence à pleurer, à la fois de joie et de soulagement, sur ce lit qui n'est pas le sien. Elle pleure à n'en plus finir alors que, très franchement, c'est pas son genre de pleurer. Mais cette nuit, c'est un tournant, et elle le sent. Elle le sait. Quelque chose qu'elle a attendu, redouté. Maintenant que cette étape est passée, elle a l'impression qu'un nouveau monde s'offre à elle, qu'elle a enfin trouvé sa place, qu'elle s'est enfin trouvée, et ça… C'est bouleversant. Littéralement bouleversant. Elle rit nerveusement, entre quelques larmes, heureuse. Puis elle sèche ses larmes, et elle part à la recherche de ses vêtements de la veille. Elle ouvre les rideaux pour laisser passer plus de lumière. Heather doit être dans la cuisine. Ou partie. Mais Dylan n'imagine pas que la blonde ait pu filer en espérant qu'elle ne serait plus là à son retour. Étrangement, cette peur ne lui effleure même pas l'esprit. Elle s'habille et consulte les quelques messages laissés sur son portable. Deux de son père. Quatre de Johnny. Merde, elle a oublié de le prévenir hier soir. Eh bien.. Il ne sera pas déçu. Elle ne lui donnera aucun détail, bien sûr. C'est son jardin secret, et elle en est trop fière pour le partager. Elle fourre son téléphone dans sa poche, et respire un bon coup. Quand elle ouvre la porte de la chambre, elle trouve Heather, en peignoir, une tasse de café à la main, en train de lire, accoudée à l'îlot de sa petite cuisine. Elle est si belle que Dylan a l'impression qu'on lui fout un coup de poing dans l'estomac. Elle n'arrive pas à croire qu'elle a couché avec cette fille-là. C'est le paradis. C'est le paradis sur terre. Une douce chaleur la traverse de partout. C'est si étrange, tous ces sentiments. Elle prend son courage à deux mains, et avance, pour s'accouder elle aussi au comptoir, en face de son amante. Quand Heather lève les yeux verre elle, elle lui offre un sourire radieux, sa tête soutenue par l'un de ses poings. « Salut » lance-t-elle, malicieuse.
Elle a une constellation dans le dos. Elle s'écrit sur un ciel spatial. Elle est belle comme un soleil. Heather a envie de relier chaque grain de beauté du bout du doigt, juste pour voir, pour voir son échine frissonner, pour voir à quoi elle ressemble quand elle est agacée dans son sommeil, pour essayer de la réveiller juste pour plonger une dernière fois dans ses yeux. Ses doigts s'arrêtent à quelques centimètres de sa peau et ils retombent finalement sur le matelas. Il doit être quoi? Huit heures? Elle n'a pas assez dormi, elle a trop bu, pas assez mangé. Mais pour autant, elle n'a pas envie de quitter son lit. Elle n'a pas envie de partir. Elle a envie de se réfugier dans les bras de Dylan Blackstone et de ne pas les quitter de toute la journée.
Mais dans un soupir, elle se lève, balance ses pieds en dehors du lit, prend son téléphone et sans prendre la peine de se rhabiller, commence à répondre aux textos effrayés de Darcy tout en ramassant les cadavres de bouteille qui traînent encore dans le salon. ›› EST-CE QUE JE PEUX RENTRER CHEZ MOI??? ›› QUI ES-TU EN TRAIN DE LUTINER??? ›› HEATHER ›› HEATHER JE MEURS ›› TU ME DÉGOÛTES ›› QUIIIIIII Elle n'essaie dene pas sourire, elle essaie réellement. Mais il y a trop de trucs parfaits dans ce début de journée pour se contenir trop longtemps.
Cinq minutes plus tard, elle adresse un jolie sourire à la serveuse du diner en bas de chez elle, qui lève les yeux en la voyant ici pour la troisième fois cette semaine. “ Sacrée soirée? ” Heather sourit mystérieusement. Elle a les yeux gonflés et les cheveux fous et le sweatshirt universitaire délavé qu'elle a enfilé ne ressemble à rien. Elle n'a même pas pris la peine de troquer ses chaussons rembourrés pour quelque chose de plus confortable et chaud. “ Sacrée soirée, ” dit-elle simplement et pourquoi est-ce que ça lui donne autant envie de sourire? C'est débile. Dylan n'est qu'une fille. Une femme. Une autre, une énième, une parfaite (elles le sont toujours. Elles le sont toujours au début, quand tout est simple, quand elle ne leur fait pas peur, trop nécessiteuse, trop terrible, trop nulle, trop maladroite. Elles le sont toujours).
Elle revoit ses doigts tremblants, ses hésitations tendres, ses lèvres brûlantes. Il y a quelque chose qui tord son estomac mais pour une fois, ce n'est pas le désir ardent et brûlant et terrible qu'elle ressent normalement quand elle pense à ce genre de truc; c'est quelque chose comme de la peur de tout faire capoter encore une fois.
Elle pose la nourriture à emporter sur l'ilôt de la cuisine et glisse sous la douche et elle fait partir tous ses regrets, toutes ses hésitations, toutes ses peurs avec l'eau. Elle respire profondément. Elle compte jusqu'à cent, à l'endroit et à l'envers, avec une patience méthodique. Ses épaules se détendent. La simplicité avec laquelle elle prétend que tout va bien lui fait un peu peur alors elle augmente la chaleur de l'eau et son flux et tout est noyé autour d'elle.
Elle ressort de la salle de bains avec un peignoir et un sourire. Heather se fait du café et prend le livre qu'elle est en train de lire. Elle s'assied sur le tabouret et s'accoude et se met à lire et sirote; elle respire et elle vit simplement et tout est normal. Alors pourquoi la culpabilité lui ronge le coeur? S'en veut-elle d'avoir l'air d'offrir à Dylan tout ce qu'elle n'est pas — équilibre, normalité, simplicité, sincérité — ou s'en veut-elle de foutre en l'air sa vie et celles de ses proches comme son père dirait si bien? Elle ne sait pas trop. Elle ne sait rien. Elle aurait dû rester dans le lit avec Dylan.
La silhouette de Dylan dans l'encadrement de la porte de la cuisine lui fait relever les yeux et aussi simplement que ça, elle sourit et balaye ses doutes et ses hésitations et ses peurs et ses fautes. « Salut, » lui dit-elle en se rapprochant et Heather ferme son livre en souriant. “ Salut. ” Et pour un peu plus, elle pourrait se mettre à rire. “ Je suis allée chercher de quoi manger. Je suis une catastrophe en cuisine, m'a-t-on dit, j'ai décidé de ne pas te faire paniquer dès ton réveil avec une alarme incendie. Pain perdu, bacon et oeufs brouillés, ça te dit? ” En parlant, elle attrape le paquet en papier qu'elle est allée achetée et en sort les boîtes qui ont un peu refroidies, les ouvrant pour les montrer à Dylan. Ça a l'air gras, ça a l'air sucré, ça a l'air parfait d'après Heather. “ J'ai fait du café, j'ai encore un peu de jus d'orange, je peux éventuellement te cuisiner un thé vert mais je ne promets rien, ” s'esclaffe-t-elle. “ Désolée, je n'ai rien de fancy comme des burgers Black Widow et tout! ” Elle n'a rien de fancy du tout.
Elle observe Dylan, ses vêtements d'hier soir, ses yeux un peu rouges, un peu gonflés et aussitôt, toute couleur déserte son visage. “ Dylan? Est-ce que tout va bien? ” Et c'est la panique, l'inquiétude, l'incompréhension alors qu'elle saute sur ses pieds et contourne l'ilôt pour se rapprocher d'elle, les pans de son peignoir volant dans sa précipitation. D'autorité, elle prend son visage entre ses mains — peau douce, peau parfaite, elle a envie d'en embrasser chaque recoin — pour la regarder droit dans les yeux. “ J'ai fait quelque chose de mal? Mon dieu, tu me stresses là, qu'est-ce qui se passe? Tu n'aimes pas le bacon? ” On dirait qu'elle est au bord des larmes. Heather, quant à elle, tremble.
C'est bizarre. Dylan se sent complètement ancrée dans la réalité. Elle sait que ce moment n'est pas une illusion, qu'il n'est pas un rêve. Qu'Heather est bel et bien devant elle en peignoir dans son appartement, qu'elles ont bel et bien passé la nuit ensemble alors que ce n'était pas du tout ce qui était prévu. Mais en même temps, la brune a l'impression de vivre dans un rêve. Tout est si parfait qu'on dirait que quelqu'un a formaté toutes les secondes, tous les détails pour qu'elles soient les plus mémorables possibles. Il fait beau, et l'appartement est baigné du soleil doux du matin, celui qui donne l'impression qu'on peut déplacer des montagnes, que tout reste à faire. Il fait bon dans la cuisine, et l'odeur des petits sacs posés sur l’îlot vient lui chatouiller les narines. Heather sort tout juste de sa douche, ses cheveux sont encore mouillés, mais elle est toujours aussi jolie, c'est comme si rien ne pouvait venir entacher la beauté de ses traits. Tout est si chaleureux, agréable ici. Dylan a un peu l'impression d'être sur un petit nuage. Elle passerait bien toute sa semaine ici, des mois même, seule avec Heather, dans cet appartement de Manhattan. Elle serait bien. “ Salut. ” fait Heather quand elle s'approche d'elle et se plante en face d'elle sur l’îlot de la cuisine. Dylan sourit, comme une gamine, mais tout va bien, parce que la blonde sourit aussi. Elles ont l'air malignes toutes les deux, avec leurs sourires heureux. “ Je suis allée chercher de quoi manger. Je suis une catastrophe en cuisine, m'a-t-on dit, j'ai décidé de ne pas te faire paniquer dès ton réveil avec une alarme incendie. Pain perdu, bacon et oeufs brouillés, ça te dit? ” La brune penche la tête sur le côté, les yeux brillants. Il ne faut jamais la lancer sur les petits-déjeuners composés de bacon et œufs brouillés. Elle jette un coup d’œil vers les sacs une nouvelle fois, mais n'ose pas les ouvrir tant qu'Heather ne l'a pas fait elle-même. Heureusement, la blonde lit dans ses pensées et commence à déballer les plats. Toutes les boîtes donnent l'eau à la bouche, et le parfum du déjeuner rappelle à Dylan qu'elle n'a pas mangé depuis de nombreuses heures… “ J'ai fait du café, j'ai encore un peu de jus d'orange, je peux éventuellement te cuisiner un thé vert mais je ne promets rien, désolée, je n'ai rien de fancy comme des burgers Black Widow et tout! ” Cette fille est parfaite, cette fille est une déesse. Elle est déjà allée chercher de quoi manger, et ça… C'est déjà parfait. Pour conquérir une femme… Toujours passer par son estomac.
Puis alors qu'elle tend la main vers les œufs brouillés, Heather l'interrompt, d'une voix soudain plus concernée. “ Dylan? Est-ce que tout va bien? ” La blonde quitte son siège pour se rapprocher d'elle. D'abord, la brune fronce les sourcils, avant de se rappeler qu'elle a pleuré quelques minutes plus tôt. Elle ne doit pas être très belle à voir, dans ses fringues de la veille, avec ses cheveux pas coiffés et ses yeux légèrement gonflés. Et maintenant il faut qu'elle trouve une raison au fait qu'elle a cette tête-là alors qu'Heather semble fraîche comme la rosée du matin. Et voilà que maintenant la blonde prend son visage dans ses mains, comme pour mieux l'observer, ou peut-être pour la forcer à dire la vérité. Dylan ne peut s'empêcher d'esquisser un sourire, tout en hésitant encore à dire la vérité à son amante. “ J'ai fait quelque chose de mal? Mon dieu, tu me stresses là, qu'est-ce qui se passe? Tu n'aimes pas le bacon? ” La brune lève les yeux au ciel. Puis elle prend les mains d'Heather, posées sur ses joues, et les prend dans les siennes. Elle entrelace leurs doigts et lâche un petit rire avant de poser son front sur celui de sa collègue. « Tout va bien. » Nouveau petit rire. « Oui, c'est vraiment ça, tout va bien. » Elle le dit d'un ton si convaincu qu'Heather ne peut que comprendre qu'il s'agit de la vérité. « Et j'adore le bacon. Vraiment, genre, vraiment beaucoup. Tu m'as apporté mon petit-déjeuner préféré sans savoir que j'adorais ça, t'es vraiment géniale. » Elle décolle son front de celui de la blonde, et lui sourit. « Merci. » D'abord, elle le dit pour le petit-déjeuner. Et puis après, elle redit : « Merci. » Mais cette fois, c'est pour autre chose. Elle espère qu'Heather comprend. « Merci, merci. » Elle ne rencontre même pas les yeux d'Heather, un poil gênée. Mais ses joues sont rouges désormais. Et au milieu, il y a un grand sourire. Et des petites larmes qui perlent dans ses cils. « T'es trop… parfaite. »
« Tout va bien. » Mais tout semble aller mal: elle a des grands yeux et une mine fatiguée et Heather a juste envie de l'embrasser jusqu'à ce que toute tristesse déserte ses traits. Elle n'en fait rien — comment oserait-elle? — et se contente de lui sourire lentement, un peu difficilement. Dylan a accroché ses doigts aux siens et ça la maintient au sol, sur terre, avec elle, juste elle. Elles sont si proches, maintenant, front contre front. Heather sent la chaleur émaner de son corps et machinalement, son estomac se tord et elle doit faire appel à tout son self-control pour ne pas l'embrasser à nouveau, sur le champ. Dylan rit légèrement, son rire est comme une nuée d'oiseaux qui creuse des trous dans le coeur d'Heather. Dieu. Cette fille est trop charmante, trop trop trop charmante. D'habitude, Heather n'est pas si sensible aux femmes, vraiment. D'habitude, elle ne s'attache pas si aisément. Mais là... « Oui, c'est vraiment ça, tout va bien. » Elle a l'air convaincue et Heather, qui avait les lèvres légèrement pincées malgré son léger sourire, fronce les sourcils avant de se détendre sensiblement. « Et j'adore le bacon. Vraiment, genre, vraiment beaucoup. Tu m'as apporté mon petit-déjeuner préféré sans savoir que j'adorais ça, t'es vraiment géniale. » Le compliment lui va droit au coeur; ses joues se colorent légèrement de rose, ses yeux s'agrandissent. Elle ouvre la bouche pour lui dire que, vraiment, elle n'est pas si géniale que ça mais- - « Merci. »
« Merci. »
« Merci, merci. »
Elle a l'air timide, avec les larmes qui s'accrochent encore dans ses cils et ses joues un peu rouges. Et son grand grand grand sourire plus grand que le monde. L'estomac d'Heather est toujours tordu dans tous les sens et, dans un soupir, elle relâche une respiration qu'elle ne se souvenait pas d'avoir retenu. Il y a une petite distance entre elle et Dylan, maintenant, mais leurs mains sont toujours accrochées et quand elle est perdue comme ça dans ses yeux, Heather arrive presque à prétendre qu'elle a le droit de se faire une (petite minuscule ridicule) place dans son coeur. « T'es trop… parfaite, » lâche finalement son amante, et Heather reprend un peu de contenance en levant les yeux au ciel. “ I try really hard, ” précise-t-elle néanmoins, pour pas qu'elle pense qu'elle est parfaite au point de ne même pas le faire exprès. Heather fait vraiment de son mieux mais elle a appris depuis longtemps que parfois, ça ne suffit pas. Souvent, même. “ C'est toi qui est parfaite. Qui t'a dit le contraire? ” sourit-elle en se mettant sur la pointe des pieds pour embrasser la joue de Dylan. Une fois. Et puis une deuxième fois, juste pour voir, sur sa pomette. Et une troisième fois, sur l'autre. Et une dernière fois (promis), sur le menton, juste comme ça. Elle revient sur le plat de ses pieds, défait doucement ses doigts de ceux de Dylan. Son regard, pourtant, brille de quelque chose comme de l'impatience avide ou un attachement plein de regret.
Heather se détourne trop vite. Sa tête lui fait un peu mal. Elle retourne s'asseoir de l'autre côté de la table — frontière naturelle entre elles — en face de Dylan, ouvre d'un air tentateur les boîtes avec le bacon encore frémissant d'huile et les oeufs brouillés qui mériteraient bien de passer au micro-ondes. Machinalement, elle resserre les pans du peignoir autour de son corps trop frêle, sirote une gorgée de café glacial, fait mine de s'occuper les mains en disposant deux assiettes et deux sets de couverts sur la table — mais il y a une nervosité dans le bout de ses doigts tremblants, une hésitation quand elle se tourne vers Dylan pour lui parler sans jamais formuler quoique ce soit, un trouble dans le fond de ses yeux. “ Dylan, dis moi? ” finit-elle par dire d'un air vaguement dégagé, quand elle a regroupé assez de courage pour lui tourner le dos, faisant réchauffer les oeufs au micro-ondes. Lâche lâche lâche lâche, lui crie son coeur de menteuse, son coeur traître de traîtresse. “ Est-ce que... est-ce que c'était ta première fois avec une femme? ” Heather a une idée plutôt précise de la chose, mais elle préfère demander. Cette fois, elle trouve le vrai courage de lever la tête pour la tourner légèrement, afin de darder la jeune femme d'un regard gentiment moqueur par-dessus son épaule. “ Not that I'm complaining or anything. ” Et puis ses sourcils se mettent à jouer sur son front d'un air presque lubrique, et elle éclate de rire en se retournant tout à fait vers Dylan. (Peignoir un peu défait and all) (elle fait mine de ne pas le remarquer) (c'est plus fort qu'elle) (elle n'a jamais appris à se faire des amis sans séduire) (veut-elle vraiment que Dylan soit son amie?) (non.) (mais il vaut mieux pour elles deux). “ Alors, ce bacon? ”
Elle n'a jamais dit ça à quelqu'un avant aujourd'hui. C'est une preuve qu'elle le pense vraiment, que la blonde est parfaite. Dylan n'est pas vraiment le genre de fille à étaler ce genre de sentiments. Seuls son père et son meilleur ami ont le droit à ce genre de compliments en temps normaux. Mais il faut croire que ce moment sort de toute normalité. « I try really hard, » fait Heather, ce qui arrache un nouveau joli sourire à la brune malgré son air gêné. Elle est persuadée qu'elle n'a même pas besoin d'essayer. Ce sont les petits défauts qui font qu'une personne devient unique, et qu'on peut ressentir ce petit quelque chose pour elle. Heather est si maladroite que Dylan n'a pu trouver ça que mignon. « C'est toi qui est parfaite. Qui t'a dit le contraire? » lance sa collègue avec un enthousiasme certain, et la jeune Blackstone a l'impression qu'elle va s'évanouir tant ce moment est parfait. Puis la blonde embrasse ses joues réchauffées par les sentiments et la gêne, et son menton, le plus naturellement du monde, et la hackeuse n'a aucune idée de comment elle fait pour ne pas mourir d'émotion, là tout de suite. Elles ne sont pas vraiment ensemble, elles n'ont pas parlé de sentiments, mais Dylan se sent encore mieux que si elles avaient vécu une histoire d'amour légendaire. Elle a eu des petits copains quand elle était plus jeune, avant de comprendre qu'elle préférait l'autre côté de la force. Ils l'embrassaient aussi, certains avec beaucoup d'amour. Mais jamais elle n'a ressenti quelque chose d'aussi incroyable, et Heather n'est même pas sa copine. Bordel de merde.
La blonde reprend sa place de l'autre côté de la table, laissant Dylan hystérique intérieurement. La brune observe son amante ouvrir les œufs et le bacon, puis sortir des couverts pour qu'elles puissent déguster leur petit déjeuner (dylan a tellement faim qu'elle pourrait bouffer un ours). « Dylan, dis moi? » fait-elle alors, tandis que la hackeuse prend place sur l'un des tabourets de son côté de la table, toujours un peu tremblante et maladroite. « Est-ce que... est-ce que c'était ta première fois avec une femme? » lance-t-elle là encore avec le plus grand naturel du monde, le genre de naturel qui désarçonne complètement la brune pour qui tout cela est très nouveau. Elle se dit tout de suite qu'elle est bien contente que sa collègue lui tourne le dos (elle est en train de faire réchauffer les œufs dans le micro-ondes), parce que comme ça, elle ne voit pas à quel point ses joues sont de nouveau rouges. Dylan fait retomber ses cheveux sur ses oreilles afin que la blonde ne puisse pas voir à quel point elles sont écarlates elles aussi. Elle prend le temps de respirer un peu pour calmer ses émotions et elle se sent un peu mieux, quand Heather la regarde par dessus son épaule avec un petit sourire amusé. « Not that I'm complaining or anything. » Dylan sourit, un peu malgré elle, elle se sent super gênée mais elle ne peut pas s'empêcher de sourire parce que… voilà. Heather, quoi. La blonde se met à rire et à jouer des sourcils de manière perverse et cela suffit pour dérider la brune qui éclate aussi de rire à son tour. Son amante se retourne, son peignoir légèrement défait et bien sûr, Dylan ne retient pas son regard parce que c'est impossible, surtout après la nuit qu'elles ont passé. Bien sûr, qu'elle serait prête à recommencer. Mille fois même. Alors il ne faut pas que la blonde la tente. Pas comme ça. « Alors, ce bacon? » Dylan hausse les sourcils, et baisse une nouvelle fois les yeux sur le décolleté de son amante, volontairement sans discrétion, pour lui faire remarquer qu'elle est plutôt exposée, là tout de suite. Puis avec un sourire malicieux elle se sert du bacon et des œufs. « Je te dis ça tout de suite, pour le bacon. » Puis elle se sert un verre de jus d'orange. « Quant à ton autre question... » Elle lève légèrement les yeux au ciel. « Je suppose que tu as déjà la réponse. » dit-elle, déclarant par là, parce que oui, en effet, c'est sa première fois. « Et j'assume, je n'ai pas du être ta meilleure… expérience. » Puis elle lève les yeux vers la blonde, enfin prête à prendre confiance. « Mais… ça peut s'arranger. » Son visage s'emplit de malice. « Il suffit de s'entraîner… On peut toujours s'améliorer, surtout quand on va à bonne école... »
Dylan rit légèrement, et ça rassure un peu Heather. Celle-ci a aussi remarqué, par ailleurs, le regard aventureux de son amante. Elle n'irait pas jusqu'à dire que ça la dérange — elle l'a vue, après tout, dans un plus petit appareil que ça —, loin de là, c'est juste que... rah, pourquoi est-ce qu'elle se met à rougir? Elle ne devrait pas rougir. Dylan devrait rougir. Dylan devrait rougir parce qu'elle est super belle avec sa couleur naturelle de cheveux et ses grands yeux et son sourire qui flotte sur ses lèvres, encore et toujours. S'appuyant toujours contre le plan de travail dans son dos, sa jambe bougeant presque imperceptiblement pour oh comme par hasard ouvrir un peu plus l'échancrage de son peignoir, Heather observe patiemment son amante se servir à manger, son satané sourire dévorant encore son visage, alors qu'elle semble réfléchir à sa question. « Je te dis ça tout de suite, pour le bacon, lui dit-elle. Quant à ton autre question... » Petit silence. Heather l'observe toujours sans mieux dire, avec une attention presque chirurgicale. Elle a bien une idée de sa réponse, pour ne pas dire qu'elle assume complètement que c'était la première fois de Dylan avec une femme. Elle se demande bien revanche ce qui a bien pu lui passer par la tête... peut-être juste une expérience? trois petits coups et puis s'en va? Quelque chose comme ça fait tordre l'estomac d'Heather et elle essaie de repousser cette pensée.
(Elle pense toujours à ses remerciements. Ses yeux gonflés de larmes. Peut-être qu'elle regrette? Peut-être que cette nuit n'était pas aussi bien qu'elle l'imaginait et qu'elle va retourner dans les bras de son copain dans quelques heures, rassurée dans son hétérosexualité?)
« Je suppose que tu as déjà la réponse. » Génial. Merci pour le mystère. Heather fait vaguement la moue, avant d'esquisser un petit sourire en coin amusé et vaguement moqueur, comme toujours. « Et j'assume, je n'ai pas du être ta meilleure… expérience. » Encore une fois, Heather éclate d'un petit rire nerveux. Elle ouvre la bouche déjà pour répondre, amusée, prête à lui dire que étonnament non c'était clairement pas sa pire expérience (peut-être pas la meilleure non plus; Heather gardait toujours dans le creux de son coeur le souvenir doux-amer d'Amelia Douglas, sa colocataire de l'université) parce que la palme revenait à- - « Mais… ça peut s'arranger. » Pardon? Pardon? Pardon? La petite phrase de Dylan a comme l'effet d'un éclair sur le corps d'Heather qui se redresse brusquement en déglutissant difficilement. Pathétique. Mais c'est plus fort qu'elle, elle peut pas s'en empêcher. Et avec son satané sourire sur les lèvres, là... « Il suffit de s'entraîner… On peut toujours s'améliorer, surtout quand on va à bonne école... » Le sourcil d'Heather se hisse sur son front et son sourire s'affine. Tout micro-onde et nourriture oubliés, elle se détache brusquement du plan de travail et contourne l'ilôt sur lequel mange Dylan pour aller s'asseoir à côté d'elle, posant d'un mouvement languide son coude sur la table puis son menton au creux de sa paume. “ Oh vraiment? ” souffle-t-elle, faussement séductrice, avant de s'étouffer de rire machinalement devant le visage de Dylan.
Ce n'est pas tant qu'elle est risible. Juste qu'elle est absolument adorable. Comme pour la rassurer, pour la convaincre qu'elle ne se moque pas d'elle, Heather se penche un peu en avant et pose sa main sur le genou qu'elle tapote maladroitement une fois ou deux. “ Mange, va, je vois bien que t'es affamée. ” Se serait-elle achetée une conscience? “ Et puis... je n'ai pas envie de t'incliner à faire des choses dont tu n'aurais pas envie. Te sens pas forcée, quoi. ” Elle adresse à la jeune femme un petit sourire maladroit et timide, qu'elle cache derrière une mèche de cheveux blonds sauvage. Avec un soupir, Heather décolle lentement sa paume du genou de Dylan avant de se pencher en avant pour récupérer sa tasse de café, après avoir rajusté un peu le peignoir sur ses épaules. “ Au moins je peux me vanter que j'ai été ta meilleure expérience pour l'instant, ” s'esclaffe-t-elle à moitié dans sa tasse. “ Avec une femme, je veux dire. Quoique, tu savais que le sexe avec les femmes étaient vachement satisfaisant? Boom. Science fact. You have been blessed. ” Elle parle trop. Le micro-ondes sonne et Heather saute sur ses pieds pour aller en récupérer les oeufs réchauffés, qu'elle fait glisser vers Dylan. Elle est toujours plus ou moins persuadée que Dylan ne fait que plaisanter. Que pour elle c'est qu'une... expérience. Ça ne peut pas être autrement. Pourtant, dans ses souvenirs devenus nébuleux à cause de l'alcool de la journée précédente, de la soirée qu'elles ont passé ensemble... Heather semble se souvenir qu'elle lui a dit que c'était sa première fois avec une femme. Mentir le lendemain c'est pas la même chose que mentir le soir-même, si? Putain. Elle se fait trop de souci. “ Si tu veux, je peux te prêter des vêtements, ” dit-elle, les yeux dans le vague, en pleine réflexion avant de les tourner vers Dylan avec un petit sourire. “ Et non, je ne dis pas ça pour que tu te déshabilles. Juste que je sais que c'est pas tout le temps agréable de porter les mêmes vêtements pendant deux jours. ”
Bon, Dylan a toujours été du genre à ne pas hésiter. Les gens qui la connaissent le savent très bien. Elle ne tergiverse pas, et agit même souvent avant d'avoir réfléchi. Mais pour le coup, son audace la surprend elle-même. Ce sujet a toujours été un peu plus compliqué que les autres, mais voilà qu'elle balance des trucs comme ça avec une assurance à toute épreuve. Eh bien, ça aussi c'est nouveau. Ou alors sa nuit avec Heather lui a permis de ne plus avoir peur d'en parler aussi frontalement. La blonde a l'air si à l'aise avec tout ça que ça déteint sur la jeune Blackstone, qui en prend de la graine, visiblement. En tous cas, ses messages lancés pas si innocemment font leur petit effet sur la jolie opératrice, qui, après avoir ouvert des yeux grands comme des soucoupes et haussé les sourcils, contourne une nouvelle fois l'îlot pour se poster à côté d'elle. « Oh vraiment? » fait-elle après ça, son menton dans sa paume. Dylan hausse légèrement les sourcils avec un sourire. Heather rit de nouveau et la brune a envie de faire la même chose, mais elle tente de se contrôler, pour ne pas passer pour une hystérique devant la première fille qui a bien voulu coucher avec elle. En tous cas, Heather a l'air de bien prendre le tout, de voir ça d'un air plutôt bienveillant. C'est déjà un bon point, pas vrai ? Dylan est de plus en plus rassurée à mesure que les minutes passent. La nuit n'avait pas du être si horrible pour sa collègue, si l'atmosphère était si détendue ce matin. Et puis elle était allée lui chercher le petit déjeuner, ça prouvait bien que ça n'avait pas été si catastrophique, pas vrai ? En tous cas, elle se plaisait à le croire.
La main de la blonde vient trouver son genoux. « Mange, va, je vois bien que t'es affamée. » Dylan ne peut pas le nier… Tant d'émotions, ça creuse. Elle regarde le temps qu'il reste sur le micro-ondes jusqu'à ce que les œufs soient enfin prêts, tandis que Heather ajoute : « Et puis... je n'ai pas envie de t'incliner à faire des choses dont tu n'aurais pas envie. Te sens pas forcée, quoi. » La brune lève les yeux des œufs et tourne un regard gentiment exaspéré vers sa collègue. Elle vient vraiment de lui dire ça, alors que quelques secondes plus tôt, la hackeuse lui a fait des avances plus ou moins détournées ? Elle se demande soudain si Heather pense qu'il s'agissait juste d'une expérience. Si c'est le cas, il va falloir qu'elle lui fasse comprendre le contraire, parce qu'elle détesterait que la blonde se méprenne sur ses intentions… pas tout à fait innocentes. « Au moins je peux me vanter que j'ai été ta meilleure expérience pour l'instant, » annonce presque fièrement Heather ensuite. Dylan lâche un nouveau sourire, oubliant le doute qu'elle a ressenti une seconde plus tôt sur les pensées de son amante. « Avec une femme, je veux dire. Quoique, tu savais que le sexe avec les femmes étaient vachement satisfaisant? Boom. Science fact. You have been blessed. » Dylan sourit de nouveau. Elle trouve à la fois mignon et drôle qu'Heather voit tout ça comme un grand secret universel, dont les personnes qui ne testeront jamais n'auront jamais vent. C'est comme si elle détenait désormais la clé d'un grand mystère. Elle lève les yeux au ciel quand la blonde se précipite vers le micro-ondes pour prendre les œufs enfin prêts.
« Si tu veux, je peux te prêter des vêtements » fait la blonde après avoir déposé les œufs brouillés devant elle. « Et non, je ne dis pas ça pour que tu te déshabilles. Juste que je sais que c'est pas tout le temps agréable de porter les mêmes vêtements pendant deux jours. » Les yeux de Dylan pétillent. Elle lance un regard amusé à la blonde et finit par dire : « C'est vrai que j'aimerais bien, si ça ne te dérange pas... » L'idée de ramener un sweat ou un t-shirt appartenant à Heather en rentrant chez elle lui plaît beaucoup, mais bon, ça, elle ne le dit pas. Elle a peut d'effrayer la blonde en avouant des choses pareilles. Puis elle ajoute, un poil gênée… « Et si je peux utiliser ta douche aussi... » Elle rougit légèrement. Elle n'aurait jamais du être si audacieuse tout à l'heure. Maintenant, la moindre parole lui fait penser à une proposition cachée. Elle se demande si Heather y pense aussi, ou si c'est juste elle. Soudain un poil embarrassée que tant de choses se passent dans sa tête, Dylan fait : « Ou alors… Je peux rentrer chez moi, si tu en as marre de voir ma tête. Je.. Je ne veux pas te déranger, tu as peut-être des choses de prévues. » Elle se mord la lèvre, puis arrête immédiatement après avoir commencé. Le mordillage de lèvre, c'est ce que fait la meuf de cinquante nuance de grey quand elle veut insinuer des choses sexy, ou chauffer son mec. Hors de question qu'elle passe pour une fille comme ça auprès de Heather.
Pourtant, malgré ses pensées qui vont trop vite et son coeur qui bat à mille à l'heure, Heather n'arrive pas à s'empêcher de penser que Dylan était sincère. Elle a cet air, sur le visage, de sincérité, comme si elle ne pouvait pas mentir. Ou peut-être qu'elle l'idéalise trop? En tout cas, Heather a l'impression que Dylan est quelqu'un de bien, de doux, de parfait et de gentil et après réflexion, elle n'a pas l'air d'être le genre de fille à coucher avec quelqu'un juste comme ça. Parce c'est que c'est, non? Juste comme ça? Elles ne se sont quasiment jamais parlé auparavant — oh, évidemment, deux-trois conversations lors d'une mission, ou entre deux dossiers bien chargés. Elles ne sont pas étrangères l'unes à l'autre juste... distantes, peut-être. Il faut dire que Dylan est vraiment craquante, vraiment jolie et vraiment drôle, et que Sharon a bien pris Heather à part quand l'équipe a été formée: pas de mix vie professionnelle/vie personnelle, entendu? Bref. Heather n'arrête pas de penser que Dylan n'a fait que ça pour le fun, tout en pensant qu'elle n'a pas l'air d'être ce genre de fille. C'est un peu épuisant. « C'est vrai que j'aimerais bien, si ça ne te dérange pas... » Heather lui adresse un léger sourire, en s'emparant d'une fourchette qu'elle donne à Dylan. “ Pas du tout! ” lui dit-elle joyeusement, en la regardant manger avec toujours de l'amusement dans le regard. Dylan a l'air vaguement gênée, ce qu'Heather ne comprend pas; elle s'apprête à lui demander la source de son malaise mais la brune la prend de court en rajoutant: « Et si je peux utiliser ta douche aussi... » ce qui fait se arquer un des sourcils de Heather dans une expression suggestive.
C'est plus fort qu'elle. Putain de prédateur sexuel, ne peut-elle s'empêcher de penser, à tordre tout ce qu'elle lui dit en... quelque chose d'autre. Et dire que c'est elle qui était prête à être sage quelques minutes plus tôt! « Ou alors… Je peux rentrer chez moi, si tu en as marre de voir ma tête. Je.. Je ne veux pas te déranger, tu as peut-être des choses de prévues. » Et elle se mordille la lèvre, ce qui est très Anastasia Steele de sa part, et ce qui fait encore plus sourire Heather qui, au final, éclate d'un franc rire et séduit. “ Oh oui, miss Steele, j'ai une longue liste de choses à faire... et vous êtes dessus, ” dit-elle de sa voix la plus séduisante et rauque, l'air très sérieux, en faisant des vagues avec ses sourcils avant d'éclater de rire. “ Eh bien, disons que je n'ai pas assez vu de ta tête hier hier soir pour déjà en être lasse, ” rétorque-t-elle avec un autre gloussement insupportable. Que ce soit dans le clair-obscur du bar ou sous les draps- - “ Enfin bref. Vêtements, oui, douche, oui. Tu peux rester aussi longtemps que tu veux. Tu sais jouer à Call of Duty? On pourrait se faire une partie si tu veux. Et commander une pizza. Ou aller au cinéma. Et quand toi tu en auras marre, alors j'aurais rempli ta mission de te faire passer une journée, et une nuit, formidables! ” rajoute-t-elle en la regardant manger un morceau d'oeufs brouillés. Pourquoi c'est si sexy? Comment peut-on être sexy en mangeant des oeufs brouillés? Cette fille est fantastique sur tellement d'aspects qu'Heather a du mal à s'y faire.
À un moment où Dylan pose sa fourchette pour boire un peu de jus d'orange, Heather en profite pour la lui piquer et lui piquer un peu d'oeuf, lui adressant un clin d'oeil complice quand Dylan la regarde d'un air faussement choqué. Elle repose la fourchette, finit son café et se relève, toujours avec ce stupide sourire sur les lèvres. C'est idiot. C'est idiot mais c'est un peu une journée parfaite, avec une belle météo et une belle femme dans sa cuisine et encore son odeur sur sa peau, l'impression fantôme de ses doigts sur son corps. “ Je vais aller te préparer des fringues, ” dit-elle pensivement, toute perdue à revivre mentalement la soirée précédente — plus forte qu'elle — avant de la laisser seule dans la cuisine pour retourner dans sa chambre. Machinalement, elle ramasse ses propres affaires qui ont volé au point culminant de la soirée, les range dans le bac à linge sale avant de sortir un vieux t-shirt de baseball et un sweat bordeaux de la MIT. Elle va pour lui choisir un bas de sous-vêtement, hésite pendant deux bonnes minutes entre culotte et tanga et finit par revenir avec une jolie pile de vêtements et une serviette dans la cuisine. “ Je vais te déposer ça dans la douche, ” fait-elle avec un nouveau clin d'oeil à l'adresse de la jolie femme attablée dans sa cuisine, toujours avec ce putain de sourire, avant de disparaître à nouveau. Une fois dans la salle de bains, elle dépose les vêtements, entreprend de ramasser son maquillage et de nettoyer sommairement les rebords de son évier, et de lui sortir une brosse à dent. Wait. Avoir des brosse à dent en plus alors qu'on vit seul, ça fait un peu trop meuf à meufs non? Ouais. Elle range la brosse à dent en plus.
Vaguement satisfaite, espérant secrètement que Dylan ne va pas la prendre pour une maniaque ou une psychopathe, Heather finit par soupirer en se regardant dans le miroir. Ok. Ok. Elle n'a pas pris le temps ni de se coiffer ni de se maquiller... ni même de se démaquiller. Super. Elle a dû faire bonne impression à la serveuse du dinner et Dylan a dû la trouver super moche. Machinalement, elle se défait de son maquillage de la soirée précédente, passe un doigt incrédule dans ses cheveux avant de soupirer — foutu pour foutu... Elle est surprise de tomber nez à nez avec Dylan en ouvrant la porte de la salle de bains, et ses yeux s'arondissent de stupeur avant qu'un nouveau sourire vienne déchirer sa bouche. “ Non, je ne suis pas tombée dans le trou, ” dit-elle doucement. “ Mais sinon, Dylan, je pensais à un truc. J'ai pas beaucoup d'eau chaude et j'ai déjà pris une douche ce matin. ” Elle a un petit sourire triste, penaud sur les lèvres en la regardant. Presque timide, quand elle baisse les yeux; tellement trompeur, alors qu'elle glisse avec circonspection sa main sur la taille de Dylan. Juste de quoi la faire un peu frissonner, juste de quoi effleurer son t-shirt et sentir la chaleur de son corps, vaguement. “ Mais je connais une bonne manière de ne pas avoir froid. ”
Bon, bien sûr, elle n'a pas envie de partir. Elle a demandé par politesse si Heather avait quelque chose de prévu, mais elle n'a pas du tout envie que ce soit le cas. Très franchement, elle passerait bien toute sa journée avec la blonde. Peut-être regarder un film, se moquer des mauvais acteurs à la télévision, cuisiner ensemble ce soir, pourquoi pas? Elle va peut-être un peu vite, mais elle n'a aucune envie de retourner chez elle et de laisser cette journée être terminée. En fait, elle ne sait pas trop ce qui va se passer par la suite, et l'idée que tout ça puisse être fini quand elle partira, ça la chagrine un peu. Elle ne sait pas quel est le sentiment de la blonde par rapport à tout ça, alors… Elle ne doit pas s'attendre à ce que ça signifie quelque chose. Mais tant qu'elle le peut, elle doit en profiter. Avoir des souvenirs qu'elle pourra se repasser avec un sourire sur les lèvres, même si ça ne doit jamais arriver une deuxième fois. Elle se demande aussi comment ça va se passer au boulot. Si elles vont prétendre que ça n'est jamais arrivé, ou si elles vont assumer, et continuer à travailler ensemble sans que ce qui vient de se passer ne devienne un tabou pour elles deux. Dylan a bien envie d'assumer, franchement. Mais elle ne sait pas quel genre de femme est Heather par rapport à tout ça. Elle semble si confiante, si… expérimentée, aussi. Quelque chose dit à la brune qu'elle n'est pas une adepte des… relations sérieuses. Mais peut-être qu'elle se trompe. Et d'ailleurs, pourquoi est-elle même en train d'espérer que la blonde soit le genre à se lancer dans une vraie relation? Ce n'était qu'une nuit, n'est-ce pas? Dylan ne peut nier le fait qu'Heather lui a tapé dans l’œil à la minute même où elle l'a rencontrée. Au fond, elle a espéré depuis le début que ça arrive, tout ça, même si elle a essayé de le repousser du mieux qu'elle pouvait à cause du fait qu'elles bossent ensemble. Heather était un fantasme, maintenant, c'est plus que ça. Et ce n'est peut-être pas une bonne chose. Dylan a cette drôle de sensation qui lui fait un peu peur.
« Oh oui, miss Steele, j'ai une longue liste de choses à faire... et vous êtes dessus, » Un énorme sourire s'étale sur le visage de Dylan, et elle baisse les yeux, alors que ses joues rougissent pour ce qui doit être la centième fois depuis hier soir. Finalement, il faut qu'elle arrête de réfléchir. Elle se pose beaucoup trop de question. Il faut qu'elle se laisse porter. Profiter du moment, elle a dit. « Eh bien, disons que je n'ai pas assez vu de ta tête hier hier soir pour déjà en être lasse. Enfin bref. Vêtements, oui, douche, oui. Tu peux rester aussi longtemps que tu veux. Tu sais jouer à Call of Duty? On pourrait se faire une partie si tu veux. Et commander une pizza. Ou aller au cinéma. Et quand toi tu en auras marre, alors j'aurais rempli ta mission de te faire passer une journée, et une nuit, formidables! » Elle veut bien passer la journée avec elle. Elle veut bien. Aller au cinéma, peut-être. Jouer aux jeux vidéos, manger des pizzas. C'est presque trop beau pour être vrai. Dylan lève ses yeux vers le ciel. Merci, dieu, d'avoir créé Heather Bolton. La blonde finit par annoncer : « Je vais aller te préparer des fringues, » et sans la moindre gène, miss Blackstone la regarde s'en aller vers sa chambre, habillée de ce peignoir qui laisse quand même grandement deviner ses formes. Dylan ne peut s'empêcher de revoir son corps là-dessous, c'est plus fort qu'elle. En temps normal, elle s'en serait voulue d'être aussi perverse, mais elle a dit qu'elle arrêtait de trop réfléchir. Alors voilà. « Je vais te déposer ça dans la douche, » dit Heather en revenant avec des vêtements, tandis que la brune est en train de finir ses œufs brouillés. Comme la blonde commence à prendre son temps dans la salle de bain, Dylan décide de s'y rendre aussi, au moins pour voir ce qu'elle fait. Elle s'apprête à toquer quand la porte s'ouvre sur la jolie opératrice, toujours dans son peignoir. « Non, je ne suis pas tombée dans le trou, Mais sinon, Dylan, je pensais à un truc. J'ai pas beaucoup d'eau chaude et j'ai déjà pris une douche ce matin. » La brune hausse les sourcils, un poil de malice dans les yeux. La main d'Heather glisse sur sa taille. « Mais je connais une bonne manière de ne pas avoir froid. » Dylan plante ses yeux dans ceux, très clairs, de la blonde. Pendant quelques secondes, elle la détaille, en silence, pendant qu'une envie irrépressible monte en elle. Puis elle se libère de ses dernières chaînes et sa main vient trouver la nuque de la jeune femme, remonte dans ses cheveux blonds. Et elle plante ses lèvres sur les siennes. C'est un baiser pressé, impatient. Passionné. Elle pousse Heather dans la salle de bain et défait le lien de son peignoir. Ne pas réfléchir.