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 HEARON † I AM BECOME DEATH, THE DESTROYER OF WORLDS

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I AM BECOME DEATH, THE DESTROYER OF WORLDS
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Elle est seule maintenant.
AGENT HEATHER BOLTON. CLEARANCE 06. ACCÈS AUTORISÉ. ” Avec un petit sourire charmant à l'adresse de l'agent de sécurité qui surveille le portique, Heather passe la sécurité du Hub et range sa carte d'agente dans la poche de sa veste. Elle a un naturel à toutes épreuves, un masque qui résiste à tous les mensonges: elle sourit à tous, salue quelques personnes qu'elle connait et personne ne la regarde deux fois. Elle n'est qu'une agente parmi les autres, une opératrice avec une mission en tête qu'elle n'a pas le droit de faillir. On lui a dit: récupère des informations. Très bien. Des informations sur quoi? Les instructions ont été vagues, pas la deadline. HYDRA veut les données avant la fin de la semaine, ou bien ils la tueront. Super.
Ah oui et on lui a dit, si possible, il faut qu'elle tue l'agent Sharon Carter. Sa chef d'équipe. Encore plus super. Heather a passé toute la soirée sur les dossiers du S.H.I.E.L.D. a remonté la source qu'on lui a confié jusqu'à trouver l'emplacement des données tant désirées: au Hub, quelque part dans le Vermont, à des kilomètres de New York où se trouve hypothétiquement Carter. Aucune raison qu'elle se trouve sur son chemin aujourd'hui et aucune raison que Heather soit obligée de la tuer pour sauver sa tête. Parfait, non?

Avec la défection de la moitié de l'organisation lors du big HYDRA reveal, le Hub a été majoritairement détruit puis abandonné jusqu'à ces derniers mois, où certains agents de confiance ont été tentativement récupérer des vieux dossiers et des vieilles données. Maintenant, tout le bâtiment fonctionne plus ou moins même si c'est à personnel réduit: Heather croise peu de gens, peu d'agents, peu de sécurité. C'est un avantage mais aussi un inconvénient: ça veut dire qu'elle a moins de chance de se fondre dans la foule comme elle pourrait le faire au QG du S.H.I.E.L.D. Ceci dit, si tout se passe correctement, elle n'aura aucun besoin de se fondre dans la foule et aucun besoin de s'enfuir en courant. Pas même besoin d'accélérer le pas: juste sourire, et faire comme si de rien n'était.
Heather slalome entre les agents en s'excusant, un petit sourire distrait sur les lèvres alors qu'elle fait mine de consulter sa tablette d'un oeil attentif. Personne ne la retient. Elle reste au rez-de-chaussée, se glisse dans les sous-sols. Il n'y a personne dans les couloirs. Parfait. Sharon Carter lui renvoie un regard un peu déçu quand elle sorte sa carte d'agente de sa poche: mademoiselle Carter est de clearance 07 et elle ne pourra jamais passer cette porte autrement. “ AGENT SHARON CARTER. CLEARANCE 07. ACCÈS AUTORISÉ. ”
Tout va bien. Elle est toute seule. Tout va bien.

Ça fait maintenant deux petites heures qu'elle se trouve avec sa tablette et son ordinateur dans cette pièce entièrement remplie d'appareil informatique. L'ordinateur branché à l'un des imposants serveur qui grésille et bipe dans la pièce, Heather mange une pomme en regardant la barre de chargement progresser lentement sur l'écran de l'ordinateur. Le transfert est presque complet sur la clef USB qui est elle-même reliée à un réseau extérieur où toutes les données s'inscrivent en temps réel sur un ordinateur à Panama qui relaie à un ordinateur se trouvant à Paris qui relaie à un ordinateur de l'HYDRA se trouvant à des kilomètres de là. Tout se déroule pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu'à ce que la porte de la pièce s'ouvre.
AGENT SHARON CARTER. CLEARANCE 07. ACCÈS AUTORISÉ.
Ça, c'est mauvais.
Comment a-t-elle reçu le message lui indiquant que sa carte était utilisée dans un endroit où elle n'était pas affiliée de quelconque manière? Heather pensait l'avoir effacé. Que fait-elle dans le Hub? C'est dans le putain de Vermont. Pourquoi est-elle venue en personne? Elle aurait pu envoyer quelqu'un. Comment s'est-elle procurée une autre carte aussi vite? Heather n'a jamais vu une administration aussi efficace. Est-ce réellement elle? Heather repousse toutes ces questions. Au même moment où la porte a grincé en s'ouvrant, elle s'est levée, s'est emparée de son arme de service qu'elle avait déjà sorti d'un air prévoyant, et a arraché la clef USB de l'ordinateur. C'est la seule chose la liant à l'HYDRA. Elle doit la garder avec elle.
Heather reste silencieuse. Il y a quelqu'un dans la pièce, elle le sait. A fortiori, Sharon Carter. Que fait-elle là? Heather est chanceuse: elle sait que les caméras ne sont pas opérationnelles aux Hub, tout simplement parce qu'ils n'ont pas encore eu le temps de les installer. Il n'y a que les portiques et les portes sécurisées, multiples et trop présentes, qui s'additionnent partout. C'est le seul putain d'obstacle. Heather range la carte USB dans sa poche et lève son arme. Elle est foutue. Complètement foutue. Elle n'entend pas l'autre personne se déplacer dans la pièce et procède elle-même lentement... jusqu'à entendre des pas s'arrêter pile devant sa tablette, l'ordinateur et le trognon de pomme qu'elle a laissés en plan dans un coin. La personne ne dit rien. La communication par ondes radio est impossible dans les sous-sols. Ça veut dire qu'elle est seule.
Heather fait sauter la sécurité de son arme en même temps qu'elle contourne une colonne de serveurs du S.H.I.E.L.D., prenant la silhouette reconnaissable entre toutes de Sharon Carter en joue. Elle lui tourne le dos mais ça n'empêche pas Heather de trembler de sa présence. Trembler du fait qu'elle la menace de mort. “ Pose ton arme parterre, Carter, ” dit-elle pourtant d'un ton assuré.
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Reprendre du service doucement, lui a-t-on dit. Lui permettre de se reposer tout en étant active, a-t-on prétexté. Mais elle aurait bien voulu retourner auprès de son équipe directement. Elle n’a rien à faire à plus de deux cent miles du QG. Mais Hill a ordonné, en présence de Coulson, qu’elle aille au Hub. Elle n’a pas eu d’autre choix que de préparer ses affaires pour un court séjour dans le Vermont. Elle a fini par se faire une raison. Par trouver une motivation. Elle trouvera peut-être quelque chose sur l’HYDRA. Elle trouvera peut-être un moyen d’aider Kayden. Peut-être. Ou peut-être que ce sera une perte de temps totale. Elle regrette d’avoir dû laisser Riley à l’appartement, si peu de temps après avoir failli la perdre dans l’incendie. Elle s’est attachée rapidement à sa soeur. Un peu trop rapidement, au point de devenir étourdissant. Elle en est là dans ses pensées quand un agent se poste juste à côté de son bureau. “Agent Carter ? Il me semblait bien vous avoir vu ici.” Elle lève les yeux de son dossier. Cinq minutes qu’elle fixe les lettres sans qu’elles ne s’imprègnent dans son cerveau. Il est rare qu’elle soit si peu concentrée, si peu efficace. Les quelques jours de convalescence lui ont ramolli le cerveau. Elle dévisage l’homme. Elle a croisé son visage un instant plus tôt. Un informaticien ou un agent chargé de la sécurité, quelque chose dans le genre. “Oui, pourquoi ?” L’agent est muni d’une tablette qu’il pianote. Il a l’air perturbé, préoccupé. Il ne la regarde plus, trop absorbé par ses pianotages sur l’écran. Il y a quelque chose dans son comportement qui éveille l’instinct de Sharon. Déjà, elle n’a plus en tête les dossiers, Kayden, Hill, Coulson et Riley. Elle est pleinement concentrée. “Nous avons reçu un signal indiquant que vous êtes dans la salle des serveurs. J’ai cru que c’était une erreur, j’ai perdu l’information entre temps…” Perdu l’information ? Comment peut-on perdre une information pareille ? Elle s’efforce de ne pas s’agacer contre l’agent. Elle se focalise plutôt sur la signification de ses paroles. Elle n’a pas mis les pieds au sous-sol. Elle n’a pas consulté les serveurs. Un problème de sécurité, sûrement. Il faut espérer. “Mais encore...?” Son ton se fait pressant. Il peut s’agir d’un problème de sécurité, oui. Mais aussi d’une infiltration dans le Hub. D’une attaque d’une organisation quelconque. L’agent hésite. Il consulte une dernière fois sa tablette. Son doigt reste en suspens au-dessus de l’écran. Il finit par échanger un regard avec Sharon. “Il n’y a aucun moyen d’être sûr, nous avons encore des problèmes de sécurité, mais je pense que quelqu’un s’est introduit en utilisant votre accréditation et a effacé ses traces pour ne pas qu’on le repère.” Et merde. Voilà ce qu’elle pense à ce moment précis. Elle se lève aussitôt. Heureuse d’avoir son arme à ses côtés. Heureuse d’être sur place. Finalement, sa journée ne sera pas aussi tranquille et pépère que l’espéraient les directeurs.

Deux heures. Le signal a été détecté il y a deux heures. Ils s’inquiètent seulement maintenant. L’intrus a déjà pu récupérer toutes les informations dont il a besoin et s’enfuir. Il peut encore être présent dans les locaux. Mais pas moyen d’avoir son image. Pas moyen de savoir de qui il s’agit. Elle se presse dans les couloirs. Les pas s’enchaînent, se succèdent. Elle qui, quelques jours plus tôt, étaient incapables de marcher se retrouve à parcourir les couloirs au pas de course. Quelqu’un a usé de son identité pour s’introduire dans les serveurs du Hub et du S.H.I.E.L.D. Elle le voit comme une attaque personnelle. Elle le considère comme une faute de sa part. Elle n’a pas été assez assidue pour assurer la sécurité de l’organisation. Elle n’a pas été assez vigilante. Dans sa main, elle tient fermement la carte qui lui a été attribuée le temps de son séjour au Hub. Elle arrive devant la porte des serveurs. Elle marque une pause pour reprendre sa respiration et prendre son FNX-45 Tactical. Arme de prédilection qui ne la quitte plus depuis qu’elle l’a découverte. La carte est passée sur le scanner. “AGENT SHARON CARTER. CLEARANCE 07. ACCÈS AUTORISÉ.” On ne fait pas mieux pour annoncer sa présence. Elle ouvre doucement la porte, les sens en alerte. Au premier coup d’oeil, il n’y a personne qui l’attend à l’entrée. Elle poursuit son chemin à travers les serveurs. L’endroit parfait pour se planquer. L’endroit parfait pour tendre un piège. Elle déteste cela. Mais elle continue d’avancer. Chaque pas est calculé. Chaque pied est posé en douceur. Chaque couloir est inspecté. Jusqu’à trouver un ordinateur, une tablette et un reste de pomme. Visiblement, elle a interrompu l’intrus. Ses doigts se resserrent autour de la crosse de son arme. Elle se penche au-dessus des écrans. Un message d’alerte clignote sur l’un d’eux. Un périphérique a été retiré sans respecter la procédure de sécurité. Mauvais signe. Quelque part, au milieu des serveurs, il y a un cliquetis. Il résonne dans le silence. Elle reconnaît ce bruit. Celui d’une arme dont on retire le cran de sûreté. Elle a la confirmation qu’elle n’est pas seule. Elle n’en a jamais douté. Elle se redresse. Garde le dos tourné. Ecoute. Il y a une personne ici. Une personne qu’elle tente de détecter en faisant confiance à son instinct. Elle n’a pas besoin d’attendre longtemps pour la localiser et même pour l’identifier. “[color:4d2f=”darkslategrey”]Pose ton arme parterre, Carter.” Des deux, Sharon est celle qui donne les ordres habituellement. Pas cette fois. Elle a reconnu sa voix. Celle d’Heather. Une voix qu’elle entend depuis l’époque de l’Académie. Une voix qu’elle écoute tous les jours. Elle ne se trompe pas sur l’identité de la menace.

Le coup est dur. Un coup de poignard. Une confiance jetée à la poubelle. Une manipulation impossible à détecter. Elle revit la révélation de l’HYDRA. Souvenir qui la hante. Souvenir qui l’a poussée à choisir minutieusement chaque membre de son équipe. Pas assez minutieusement, apparemment. Ses mains se lèvent de part et d’autre de sa tête. Son arme toujours dans l’une d’entre elles. Sharon ne va sûrement pas s’en débarrasser. Hors de question. Elle se sait rouiller après ces jours d’inactivité. Elle se doute qu’en combat à mains nues contre Heather, elle pourrait être en difficulté. Son seul atout se trouve dans sa paume. Elle se retourne doucement. Sans gestes brusques. Sans précipitation. “Agent Bolton. Heather.” Elle l’a reconnue et pourtant, lorsqu’elle croise son regard, la trahison est encore plus douloureuse. Une arme est pointée sur elle. Elle a envie de lui laisser le bénéfice du doute. Heather a sûrement une bonne raison de la menacer, de s’introduire ici. Mais les faits sont là. Elle a abusé de la confiance du S.H.I.E.L.D., elle a subtilisé sa carte et elle est venue récupérer on ne sait quelles données. Une trahison. Ceci n’est pas une simulation ou un exercice. Ceci n’est pas un entraînement. Ceci est la réalité. A moins que Coulson et Hill aient un humour de mauvais goût. Si c’est le cas, elle ne manquerait pas de leur exposer sa manière de penser. “Je n’ai pas envie de faire ça et je ne pense que ça te fasse plaisir.” Le tremblement ne lui échappe pas. Heather a la voix sûre, mais le corps tremblant. Menacer et tuer sont deux choses différentes. En particulier lorsque l’on vise une personne que l’on connaît depuis des années. Les sentiments sont parfois plus forts que les ordres ou que la raison. Un avantage que Sharon compte bien mettre à profit. Elle a toujours les mains en l’air, mais elle ne quitte pas Heather du regard. Les yeux bien ancrés dans les siens. “Alors, est-ce que tu peux m’expliquer ce qu’il se passe ici ?” Lui donner une chance de s’expliquer, de s’en sortir, d’éviter de tirer. Lui donner une opportunité de ne pas finir abattue par les autres agents du Hub. Ils savent maintenant. Ils ont connaissance de cette brèche. Elle n’a pas voulu attendre l’équipe d’intervention, consciente que cela aurait pris trop de temps. Elle y est allée, tête baissée, sans se préoccuper du nombre d’intrus ou du danger de la situation. Elle ignore combien de temps il faudra pour rassembler les agents et organiser une quelconque intervention. Et elle s’en fiche. Pour l’instant, seul son agent compte.

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Lentement, Sharon se retourne. Heather aimerait ne pas en arriver à là mais elle sait, elle sait qu'elle n'a pas le choix. Elle risque sa tête, elle risque le poste politique de son père, elle risque la vie de sa soeur, de sa mère, de son cercle de connaissances... elle sait qu'HYDRA ne ment pas quand ils menacent de tout cela. Ils ont largement le budget pour faire tout ça sans même arquer un sourcil. Quand Heather croise le regard de sa chef d'équipe, elle sent son coeur s'accélérer dans sa poitrine et son emprise sur son arme se resserre imperceptiblement. Elle fait le tri dans ses pensées, calme son esprit, jumelle sa peur: ce n'est pas le temps d'être faible, pas le temps de douter. Tout se déroule comme dans un rêve, comme dans un film. Heather n'a pas l'impression que c'est sa vie, que c'est en train d'arriver à cause d'elle, avec elle.
Agent Bolton. Heather, ” dit-elle, sans pour autant lâcher sa propre arme. Heather. Autant de couteaux dans son coeur. Sharon n'a jamais été quelqu'un de mauvais, ou quelqu'un qu'Heather n'a jamais apprécié. Capitaine juste quoique dure et exigeante, amie sympathique quoiqu'un peu distante... Heather doit repousser ces pensées. Elle doit se concentrer sur l'instant présent. Sa mission. “ Je n’ai pas envie de faire ça et je ne pense que ça te fasse plaisir. ” Évidemment. Heather a presque un petit sourire ironique qui lui chatouille la lippe. “ Alors, est-ce que tu peux m’expliquer ce qu’il se passe ici ?
La voix de Sharon est calme et mesurée. Rassurante, presque, si Heather n'était pas en train de pointer son arme sur elle. En temps normal, au corps-à-corps, Heather sait qu'elle n'a aucune chance — sauf que Sharon a été blessé et l'est encore, d'où une convalescence forcée qui n'a pas dû lui plaire. Le problème, c'est que Sharon a une vraie arme. Après avoir laissé la sienne au poste de police, Heather n'a qu'un night night gun, qui ne tire pas des "vraies" balles mais simplement de quoi assommer quelqu'un pendant plusieurs heures. Rien de létal, à part en grosse quantité.
Heather fait un pas en avant, son autre main rejoignant la première sur l'arme qu'elle tient un peu plus fermement, dirigée vers la tête de Sharon. De quoi la faire tomber dans le coma — au pire — si besoin. “ Je ne suis pas là pour discuter, Sharon. Pose l'arme parterre et fais la glisser vers moi. Tu sais que je n'hésiterais pas à tirer. ” Oh, elle sait. Heather n'aime pas utiliser son arme de service mais ce n'est qu'un night night gun, quelque chose d'incapacitant. Au pire, Carter se réveillera avec un mal de tête horrible demain. Peut-être qu'elle n'est pas obligée de tuer Sharon, si? Non, sans doute pas. Elle peut essayer- - elle peut se débrouiller sans la tuer. Oui. Elle va faire ça. HYDRA n'a jamais besoin de savoir.
Sharon ne semble pas prête à se désarmer, toutefois, et Heather fronce les sourcils. Avec un léger soupir, elle lève l'arme et tire trois fois dans le mur derrière Sharon, évitant sa tête d'un cheveu seulement. Même si Heather n'aime pas forcément l'expérience de terrain, Heather aime bien s'entraîner au tir — réminiscences de ses jeunes années où elle était passionnée de chasse, sport qu'elle pratiquait avec père et soeur il y a quelques années seulement. Elle se souvient de son entraînement intensif à la CIA puis celui du S.H.I.E.L.D.: elle est une abonnée du champ de tir et chacune des balles fait mouche, répandant comme de la peinture bleue sur le mur du fond. Elle fait un nouveau pas en avant, et s'arrête. Elle n'ira pas plus loin. Elle sait que si elle est trop proche, Sharon a plus de chance d'engager le combat et même si elle est blessée, Heather n'est pas persuadée de gagner. En revanche, si Carter fait un pas, elle tirera. Sans hésiter: en plein coeur. “ Sois raisonnable, Sharon. S'il te plait, ” dit-elle, l'implore-t-elle presque avec ses grands yeux bleus, troquant l'usage distant de son nom de famille pour son prénom sans vraiment s'en rendre compte. Elle aimerait que ce soit plus simple. Elle aimerait pouvoir se dire qu'elle attendait ce jour, qu'elle attendait ce moment depuis le début; mais c'est plus dur que prévu. Elle pense à Sharon, elle pense à Dylan, elle pense au reste de l'équipe. Elle ne reviendra jamais au S.H.I.E.L.D. Jamais.

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Il y a quelques mois, elle pointait son arme sur la tête de Brock. Elle n’a jamais apprécié de collègue, le trouvant trop sexiste et irrespectueux. Elle n’avait eu aucun remord, aucune hésitation, au moment de tirer. Rien ne la retenait. Cette fois, c’est Heather qui lui fait face et qui menace la sécurité du S.H.I.E.L.D. Sa propre agente. Celle qu’elle a minutieusement choisi, en se disant qu’elle ne pourrait pas être trahie. A croire que Sharon n’est pas douée pour déterminer qui sont les personnes dignes de confiance. Elle a le talent pour s’entourer d’agents infiltrés. Après cette rencontre - parce qu’il y aura un après - elle compte bien revoir tous les dossiers de son équipe et s’assurer qu’aucun ne va lui planter un couteau dans le dos. Elle en a assez des trahisons. Elle en a assez des déceptions. Elle va devenir intransigeante. Pointilleuse. Encore plus tyrannique. Elle n’a pas le choix. Elle n’a plus le choix. Elle pensait que le nouveau S.H.I.E.L.D. serait sûr et composé d’agents fidèles. Grossière erreur. Elle ignore encore tout des raisons d’Heather. Elle ignore pour qui elle travaille. Elle ignore ce qu’elle est venue chercher ici. Elle compte bien le découvrir, même si elle a déjà sa petite idée. Il n’y a que l’HYDRA pour tenter de court-circuiter une organisation secrète de leur ampleur. Heather se rapproche. Un pas dans sa direction. Cette proximité accentue la menace, mais Sharon ne s’en émeut pas. Elle n’a pas le temps, elle tente plutôt d’évaluer la détermination de l’agente. Sa détermination à aller au bout. Sa détermination à tirer. “Je ne suis pas là pour discuter, Sharon. Pose l'arme parterre et fais la glisser vers moi. Tu sais que je n'hésiterais pas à tirer.” Elle en est consciente. Mais elle ne bouge pas. Elle ne fait pas un geste pour déposer son arme à terre. Elle la garde fermement dans sa main. Tous les agents sont entraînés à tirer. Ils sont tous prêts à défendre leurs valeurs et leur vie. Il n’y a que ceux qui passent leur carrière derrière un bureau plutôt que sur le terrain qui pourraient hésiter. Ce n’est pas le cas d’Heather. La jeune femme est entraînée, habituée, experte. Elle sait viser parfaitement et précisément. Si elle veut tuer Sharon, elle y arrivera. Pas avec l’arme qu’elle possède, cependant. Arme inoffensive comparée à celle que Sharon tient. Raison de plus pour ne pas lui donner le sienne.

Les balles sont tirées. Sifflent. Passent à quelques millimètres de son oreille. Elle sent le mouvement dans l’air, frôler sa joue. Elles ne sont pas passées loin. Un novice penserait qu’Heather ne vise pas bien. Ce n’est pas ce que Sharon voit. Ces tirs sont la traduction de sa motivation. Heather est prête à exécuter sa menace. Sharon  n’a pas sursauté. Elle n’a pas bougé. Le sang-froid est de mise. Pour ne pas flancher. Pour ne pas ciller. Pour ne pas se décomposer. Quoiqu’il arrive, elle sait qu’elle s’en sortira. Elle sait qu’elle ne mourra pas. Mais son objectif n’est pas de se faire tirer dessus et de laisser la jeune femme s’enfuir tranquillement. Son objectif est de l’arrêter. De la stopper. Par tous les moyens possibles. On ne trahit pas le S.H.I.E.L.D. Encore moins en usant de son identité. Encore moins en étant dans son équipe. “Sois raisonnable, Sharon. S'il te plait,” Une prière. Une supplique. Être raisonnable. Elle ne peut l’être dans ce genre de situations. La trahison est l’un des pires crimes qui peut être commis. Heather le sait. Ils le savent tous. Mais peut-être est-ce de la faute de Carter. Après tout, Sharon est sa supérieure. Il est possible qu’elle ait agi d’une manière déplaisante. Il est possible qu’elle ait dit quelque chose à Heather. Il est possible qu’elle lui ait donné une motivation d’agir ainsi. Quelle que soit la raison, elle a forcément une part de responsabilité. Reste à déterminer laquelle. “Tu sais très bien que je ne peux pas.” Elle ne peut pas poser son arme. La laisser filer. Fermer les yeux. Lui pardonner. Elle ne peut pas. Heather est allée trop loin pour espérer une quelconque rédemption. Elle baisse ses bras. Elle les ramène le long de son corps, dans une lenteur toute calculée. Elle ne la vise toujours avec son arme. Elles sont suffisamment proches l’une de l’autre pour que Sharon fasse un pas et tente de la désarmer. Elles sont suffisamment proches pour qu’une balle atteigne sa cible à coup sûr. Mais elle ne compte pas en arriver là. Malgré ce canon pointé sur elle, elle n’oublie pas que Heather a été un bon élément dans l’équipe, un maillon indispensable à son bon fonctionnement. Elle mérite au moins d’être arrêtée, sans encombres. Toutefois, si Sharon est obligée, elle n’hésitera pas. Elle visera pile dans le coeur.

Nous ne sommes pas obligées d’en arriver là. Tu peux te rendre maintenant : tu poses ton arme et tout se termine. Si ce sont les répercussions de tes gestes qui t’inquiètent, on s’arrangera.” Ce serait tellement plus simple. Heather lui donnerait son arme. Elle accepterait de les renseigner sur le commanditaire. Elle leur donnerait les informations qu’elle a récupérées. Elle serait jugée, ne reviendrait plus au S.H.I.E.L.D., mais au moins, elle aurait une chance de sortir vivante du Hub et de s’expliquer. Elle aurait une chance de croiser le regard de ses coéquipiers et de s’excuser. Elle doit bien se douter que sa fuite va être compliquée. En tout cas, pas aussi facile que d’arriver jusqu’ici. Maintenant, le Hub est au courant. L’information a été transmise plus haut. Les décisionnaires du S.H.I.E.L.D. le sauront bientôt. Il serait plus intelligent de laisser tomber maintenant. De rendre son arme et de capituler. Mais la coopération ne semble pas faire partie de ses priorités. Alors, Sharon reprend la parole. Décidée à ne pas abandonner. Décidée à comprendre. “Qu’est-ce que tu es venue chercher, Heather ?” Elle parle toujours sur le même ton. Calme, posé. Il n’y a pas de jugement dans ses intonations. Il n’y pas de colère. Pas de déception. Pas de tristesse. Seulement, un ton maîtrisé. Derrière elle, le matériel informatique est encore en place. Si jamais la situation devait dégénérer, elle doit à tout prix récupérer la tablette et l’ordinateur. Les agents doivent récupérer le plus d’informations possibles sur ce que Heather a cherché et pour qui. C’est pour cela qu’elle ne bouge pas. Qu’elle ne tente pas d’avancer vers la jeune femme. Qu’elle fait office de protection. Une balle pourrait les endommager. Une balle pourrait détruire toutes les traces d’espionnage. Alors, elle ne bouge, mais elle se prépare. A se couvrir d’être une colonne de serveurs. A viser Heather. Toujours prête à toutes les éventualités.

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Tu sais très bien que je ne peux pas.
Oh oui. Heather sait. Elle a appris à connaître Sharon Carter, dans ses perfections discrètes et ses défauts injustes. Ça ne date pas seulement de l'Académie, mais aussi des longues soirées à la critiquer gentiment avec le reste de l'équipe autour d'un café; les longues soirées à s'envoyer des sms avec Dylan- - Dylan. Heather n'a pas réfléchi, Heather ne réfléchit plus: n'existe que la mission, que la mission, que la mission et la réalité de l'arme qu'elle pointe en direction de sa chef d'équipe. Mais soudainement, elle pense à Dylan et quelque chose se réveille au fond de son estomac et au fond de son coeur, quelque chose de grand mais surtout de douloureux se réveille, quelque chose qu'elle repousse tant par peur que par horreur. Elle ne peut pas être déconcentrée maintenant. Elle ne peut pas.
Elle a envie de lui hurler: moi aussi je ne peux pas. Je dois faire ceci, même si ça me rend malade. Je dois le faire, je n'ai pas le choix. Mais ses lèvres restent résolument fermées, contrairement à celles de Sharon qui ne s'arrêtent pas d'articulier: “ Nous ne sommes pas obligées d’en arriver là. Tu peux te rendre maintenant : tu poses ton arme et tout se termine. Si ce sont les répercussions de tes gestes qui t’inquiètent, on s’arrangera, ” qu'elle dit, avec un ton rassurant et posé et calme et Heather a presque envie de la croire mais elle sait, au fond d'elle, que Sharon ne sait rien sur sa situation tout comme elle sait qu'elle n'a aucune chance de s'en sortir. Pas sans finir de transférer les informations. Pas sans tuer Sharon Carter. “ Qu’est-ce que tu es venue chercher, Heather ? ” Elle parle pour la faire parler. Pour gagner du temps. Heather le voit — après tout, analyste qu'elle est, elle connait ce genre de situation par coeur — et elle est presque prête à rentrer dans le jeu juste pour s'abandonner, et pouvoir dire à HYDRA: j'ai fait ce que j'ai pu. Mais elle sait que si elle ne réussit pas, sa famille mourra. Si elle échoue, sa famille mourra.
Tu ne diras pas que je ne t'ai pas prévenue, ” est tout ce qu'elle répond. L'instant suivant, elle tire. Une fois tout d'abord, alors que Carter bouge déjà pour pointer sa propre arme vers elle; sous le choc, elle recule d'un pas et semble déséquilibrée et quand elle tend le bras pour tirer sur Heather, celle-ci peut la voir se ramollir alors que la puissante drogue élaborée par un ingénieur du S.H.I.E.L.D. fait déjà effet. Elle coure vers elle pour accompagner son corps qui chute au sol: elle la dépose avec la tendresse et la douceur d'une mère. D'une amie. Elle sait pourtant que, malgré tout, Sharon l'entendra aussi clair que de l'eau de roche. Ses yeux la suivent quand elle prend l'arme de la main de Sharon. La dernière génération de l'arme qu'utilise Heather permet même aux pauvres corps inconscients de s'exprimer, de parler d'une voix pâteuse et désagréable; elle espère que Sharon ne la fera pas souffrir ainsi. Elle n'a pas envie d'entendre sa voix. Elle fouille sommairement son corps, la débarasse de tous les objets électroniques qu'elle trouve et l'allonge avec soin sur le sol froid. “ Je suis désolée, dit-elle d'un ton dur. Mais je n'ai pas le choix. Ils ont ma famille. ” Elle espère que Sharon pensera qu'elle ne fait pas partie de l'HYDRA mais est juste une agente comme les autres qui s'est faite avoir pour ce coup-là mais elle sait que Carter est trop maligne pour se faire avoir. Si elle n'était qu'une agente soumise au chantage, Heather suivrait la procédure du S.H.I.E.L.D. et informerait ses supérieurs — elle. Sans un mot, Heather tire la tablette et l'ordinateur vers elle et y insère à nouveau la clef USB, lance à nouveau le logiciel pour que les données s'inscrivent et s'envoient. Ce sera fini dans cinq minutes.
Ils veulent que je te tue, ” finit-elle par lâcher du bout des lèvres, les yeux rivés sur l'écran. “ Je sais pas pourquoi mais ils m'ont ordonné de te tuer. Je ne sais pas ce que tu as fait, ou ce que tu fais, mais il vaudrait mieux pour toi que tu arrêtes. ” Elle fait mine de s'intéresser à ce qui se passe à l'écran, ses doigts flottant au-dessus des touches, tentatrices. Elle pourrait tout finir en un instant. Un seul instant, quelques lignes de code mais- - non. À la place, elle efface méticuleusement ses traces et déclenche une alarme dans le Hub à l'étage. En cet instant précis, tout le monde doit chercher Sharon Carter et ils doivent savoir qu'il y a une brèche dans la sécurité. En même temps, quelque part à New York dans le QG, une autre alarme se déclenche au troisième étage; puis à l'Académie dans le pavillon des Sciences. Rien de tel qu'une attaque organisée pour effrayer et éparpiller tout le monde. “ Je suis désolée, ” dit-elle une nouvelle fois. Elle n'évoquera pas ses commanditaires, elle n'évoquera pas sa mission. Elle n'évoquera rien. Elle n'est rien, ni personne; juste une agente, qui fait son boulot parce qu'elle n'a pas le choix.
Elle ne peut pas se permettre d'être quoique ce soit d'autre en cet instant précis.
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Tu ne diras pas que je ne t'ai pas prévenue,” Sharon a le réflexe de lever son arme, mais trop tard. La première balle la touche à l’épaule. Elle explose dans sa chair pour laisser sa drogue s’échapper. Elle tente de viser Heather, mais son bras n’est plus capable de se stabiliser. Il n’est qu’une extension de son corps qu’elle ne maîtrise pas. Elle sent ses jambes céder, son corps entier se ramollir. Elle n’est plus qu’un tas de muscles incapables de fonctionner. Impossible d’arrêter la chute. Impossible de se retenir à la table. Impossible de tirer. Sans l’intervention d’Heather, elle serait probablement tomber à terre, dans un manque total d’élégance. Les ordres fusent de son cerveau jusqu’à son système nerveux. Tirer. Frapper. Mais rien. Elle parvient mollement à bouger ses mains, ses pieds. Ses tentatives ne vont pas plus loin. Elle déteste ça. Elle déteste ne pas être maîtresse de ses mouvements. Elle déteste ne pas être capable de se défendre. Elle déteste sentir son arme quitter sa main pour celle d’Heather. Sentir son toucher, à la recherche d’une autre arme ou de tout appareil électronique. La prévenance avec laquelle la jeune femme la dépose sur le sol est presque drôle. Sharon aurait préféré qu’on la laisse tomber au sol, plutôt d’être manipulée avec soin. Elle aurait au moins eu la preuve qu’Heather n’a pas de regrets d’agir ainsi. Sauf que ce n’est pas le cas. Elle ne peut pas parler, ou du moins, pas intelligiblement. Alors, elle se contente de regard l’agente. Elle tente de capter son attention, de croiser son regard. Elle a envie de lui exprimer toute la colère et la déception qu’elle ressent. Elle s’empêche de parler. Pour ne pas rendre la scène encore plus pathétique. Pour ne pas lui rappeler son état. L’agent 13 est loin d’être impressionnante, une fois droguée. Tellement effrayante et forte. “Je suis désolée, Mais je n'ai pas le choix. Ils ont ma famille.” Elle n’est pas encore assez droguée pour éprouver une once de sympathie devant son mensonge. Le S.H.I.E.L.D. aurait pu l’aider. Sharon aurait pu l’écouter. Depuis l’infiltration de l’HYDRA, ils savent qu’ils peuvent compter l’un sur l’autre et qu’ils doivent être sincères entre eux. Heather a eu tout le temps de lui en parler. Mais non. Elle a préféré garder le silence. Elle a préféré mener sa petite infiltration de son côté. Bien. Elle en subira les conséquences le moment venu. Carter repère la clé USB, sortie tout droit d’une poche. Elle peut oublier l’ordinateur et la tablette. Son objectif est maintenant le périphérique. Si tant est qu’elle soit capable de se mettre debout.

En focalisant toute son énergie, elle est capable de coordonner ses doigts. Relativement. Assez pour tenter d’atteindre la balle plantée dans son épaule. Assez pour essayer de la retirer. Plutôt elle l’enlèvera, moins la drogue aura le temps de s'immiscer dans son corps. Avec un peu de chance, elle se remettra plus rapidement. Avec beaucoup de chance, en fait. Le geste est lent, autant par discrétion que par obligation. Elle n’a pas la même rapidité qu’en temps normal. Elle n’a pas la même habilité, non plus. Une grimace plus tard, la balle est retirée. Heather a toujours le regard posé sur ses écrans. Elle baisse sa garde, probablement réconfortée par l’idée d’avoir une vraie arme de son côté. “Ils veulent que je te tue.” Elle a le regard fixé sur Bolton. Aucune émotion n’apparaît, alors qu’elle prononce ces paroles. A croire que la tuer ne représente rien pour elle. Mais Sharon sait. Si la jeune femme l’avait voulu, elle aurait déjà pu abattre sa chef. Elle aurait déjà pu remplir sa part du marché. Pourtant, l’agent 13 est seulement droguée, par terre. Désarmée, droguée, vivante. “Je sais pas pourquoi mais ils m'ont ordonné de te tuer. Je ne sais pas ce que tu as fait, ou ce que tu fais, mais il vaudrait mieux pour toi que tu arrêtes.” Elle a peut-être la réponse. L’infiltration de Kayden - il faudra le contacter dès que tout sera réglé ici - ou bien Braiden qui pourrait se venger des balles tirées par Zachariah. Mais quel intérêt ? Elle n’est même pas proche de l’agent. Il aurait visé plus juste en s’attaquant à Riley. Riley. Ils doivent la placer sous protection. Ils doivent s’assurer qu’elle ne risque rien. Dès qu’elle a su pour Zach et sa soeur, elle a senti les problèmes. Elle a senti qu’il la mettrait en danger. Dans sa colère, elle oublie qu’elle a encouragé sa cadette. On mettra sa mauvaise foi sur le compte de la drogue. Mais pour le moment, elle n’a qu’un objectif : bouger. Elle doit se relever. Elle doit arrêter Heather. Elle ne permet pas la mise en danger du S.H.I.E.L.D., encore moins de ses proches. Il est hors de question que la jeune femme sorte vivante d’ici, sans avoir dévoilé le nom de son contact et les vraies raisons de sa présence ici. “Je suis désolée.” Trop tard pour les excuses. Trop tard pour les remords. Heather est allée trop loin pour espérer un quelconque pardon de la part de Carter. La loyauté à l’organisation est une chose qui lui tient à coeur. Une chose qu’elle défend et qu’elle cultive. Tous le savent. Alors, ses excuses ne la touchent pas. Ne l’émeuvent pas. Elle en rirait presque, si la situation était moins grave.

Encore plus déterminée, elle parvient à trouver la force de soulever son torse. Sa main part à la recherche de l’arme cachée à sa cheville. La fouille trop rapide n’a pas permis à Heather de la trouver. Une chance pour Sharon. Entre ses doigts fermement serrés, un petit calibre. Assez discret pour ne pas être senti dans une fouille rapide. Assez petit pour ne pas se voir à travers le tissu. Elle a appris de son affrontement avec Brock. Il avait un poignard caché dans sa poche. Elle a retenu la leçon depuis. Elle s’assure d’avoir toujours une arme de secours. Au cas où. Calibre ridicule comparé à celui qu’elle possédait encore quelques minutes avant, mais son efficacité est la même. Elle n’essaye pas de se lever, consciente qu’elle en demanderait trop à son corps flasque. Consciente aussi que ses agitations vont bientôt être remarquées par Heather. Le maintien de ses bras n’est pas encore assez précis pour tirer dans un petit objet comme la clé USB, par contre ils le sont assez pour viser quelque chose de plus gros. Comme un ordinateur. Elle rassemble ses deux mains autour de la crosse pour assurer le tir. Elle tire. Deux balles. La première finit dans un mur. L’autre est plus précise : elle se fiche dans l’écran, dans une pluie d’étincelles. “Je ne te laisserai pas partir.” Voix insupportable. Voix d’ivrogne. Elle ne reconnaît pas ses propres intonations. Sa menace manque atrocement de crédibilité avec ce ton, mais Heather est assez intelligente pour savoir qu’elle ne ment pas. Toujours allongée, elle lutte pour garder le dos surélevé et les bras levés. Elle ne peut pas flancher maintenant. Son corps n’a pas le droit de la lâcher, encore moins son mental. Le sang-froid n’a jamais été aussi important. Elle pourrait s’affoler de ne pas avoir de plan. Elle pourrait être paniquée à l’idée de mourir. Elle pourrait. Pour autant, elle refuse de se laisser aller à l’inquiétude. Le professionnalisme d’abord. “Retire la clé USB et éloigne-toi de la table.” Si en tant normal, son ton autoritaire pouvait faire peur, ce n’est plus vraiment le cas aujourd’hui. Les mots s’enchaînent lentement. Les syllabes s’articulent difficilement. Sa voix laisse penser qu’elle a avalé toute la bouteille de tequila, mais son regard est, lui, beaucoup plus effrayant, menaçant. Elle l’encourage d’un mouvement du canon. Si Heather désobéit, une balle dans l’épaule devrait faire l’affaire. Si elle fait mine d’attraper une arme, une balle dans le coeur serait dissuasive. Si elle s’enfuit, une balle dans le genoux et la fuite serait difficile. Par contre, si Heather décide d’être raisonnable et d’obéir, elle aurait une chance de sortir saine et sauve d’ici. A elle de jouer.

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Stupide, stupide Heather. Elle est trop concentrée sur l'écran de l'ordinateur, ses doigts volant à la surface des touches silencieusement, alors qu'elle déclenche alarmes et alertes dans la plupart des facilités du S.H.I.E.L.D., tout en surveillant d'un oeil la progression des données s'inscrivant sur la clef USB et s'envoyant à l'autre bout du monde sur un ordinateur appartennant à l'HYDRA. Elle est si concentrée qu'elle sursaute et pousse un bref cri de surprise au premier tir; son choc est tel que Sharon a le temps de recharger le petit calibre et de tirer une seconde fois, dans l'ordinateur cette fois. Aussitôt, Heather se met à bouger pour s'échapper de sa ligne de mire mais Sharon a rechargé encore une fois, et pointe l'arme sur elle. “ Je ne te laisserai pas partir. ” Elle parle difficilement. Putain de bordel de merde, elle aurait dû tirer deux fois plutôt qu'une pour s'assurer qu'elle n'allait pas se relever. Elle l'a sous-estimée. De bonne foi, Heather lève les mains en signe d'impuissance et de paix. “ Retire la clé USB et éloigne-toi de la table. ”
Avec un haussement d'épaule un rien sarcastique, Heather retire la clef USB. De toutes manières, l'ordinateur est mort: inutile pour elle de faire mine de la garder. Elle aimerait mieux la détruire, comme les ordres préconisent en cas de prise, ou au mieux la donner à un supérieur évidemment. Bref. Elle la dépose sur la table, en gardant toujours une main en l'air. Il y a aussi son arme sur la table. Impossible de la récupérer. Heather voit bien que Sharon lutte pour la viser et elle se doute qu'elle n'hésitera pas. Elle a les bras tremblants mais les yeux fixes, déterminé. Elle ne sera jamais assez rapide pour prendre sa propre arme et lui tirer à nouveau dessus. En revanche, Heather n'a jamais vu Sharon manquer un tir et elle vient d'en louper un, comme témoigne la balle dans le mur. Elle n'est pas au maximum de ses capacités. Si elle bouge vite... “ OK, OK, d'accord, ” lâche-t-elle doucement, en relevant sa seconde main, désireuse de calmer sa supérieure. Son arme est un petit calibre, elle doit avoir maximum six balles dedans, plus que quatre maintenant, et il lui faut une seconde pour recharger, c'est certainement pas un automatique. Toutes ces données passent dans l'esprit étrangement calme d'Heather, maintenant que les coups de feu ont été tirés. Elle sait ce qu'elle doit faire.
Elle se relève lentement de la chaise sur laquelle elle était assise et tend la main à nouveau vers la clef USB, son regard plongé dans celui de Sharon. “ Je vais te la donner, ok? Personne n'a besoin d'être blessé. Je- je te laisse m'emmener en salle d'interrogatoire, ok? S'il te plaît, Sharon, je- - ” sa voix s'étrangle d'émotion. Elle est raisonnable, et douce. Elle prend la clef USB, la lance à Sharon après s'être penchée au-dessus de la table.
Son autre main s'est glissée sous la table, en a attrapé le rebord si bien que quand elle s'en écarte à nouveau, elle l'envoie valser d'un geste brusque avant de se précipiter à genoux, ignorant le bruit des coups de feu qui lui scinde les oreilles. La table ne fera qu'office de diversion — à peine une protection — destinée à perturber Sharon et a l'empêcher d'avoir un tir clair sur Heather, qui se carapate sur le sol glissant pour aller se réfugier derrière une tour de serveurs. Elles ne sont plus que séparées par des serveurs, parallèles l'une à l'autre, et Heather n'a pas exactement envie de vérifier qu'une balle de petit calibre est capable de passer à travers sans problème alors sans même réfléchir, elle se remet debout et s'appuie contre la tour. “ JE SUIS DÉSOLÉE, SHARON, ” hurle-t-elle, en s'appuyant de tout son poids sur la tour, comptant faire tomber les pesants serveurs sur sa supérieure. Brutalement, une alarme résonne dans le S.H.I.E.L.D. Les fausses alarmes qu'elle a déclenché ou les coups de feu? Le temps presse. Après un dernier effort, dans un grognement de douleur, Heather parvient à faire basculer les serveurs; au même moment, une énième balle est tirée et Heather la sent frôler sa jambe, à deux doigts de la pénétrer, laissant derrière elle une impression de brûlure et une douleur absolument insupportable. Elle étouffe un bref cri de douleur, assourdi par le bruit des cinq serveurs tombant sur Sharon, et boîtille pour prendre refuge vers une autre tour, tendant l'oreille malgré l'alarme du S.H.I.E.L.D. en essayant d'entendre le souffle de sa supérieure. Oui, elle devrait s'en aller, quitter la pièce et s'enfuir en courant mais... quelque chose la retient. Un pincement au coeur, la douleur dans sa jambe, ses tripes nouées: elle n'est pas trop sûre. “ Sha-Sharon? ” appelle-t-elle tentativement, un peu effrayée d'avoir tuer sa supérieure à coup de matériel informatique.
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Elle lutte. Elle lutte contre la drogue. Elle sent qu’elle peut sombrer à n’importe quel moment. Elle sent qu’elle perd le contrôle de ses pensées, de ses gestes. Elle aurait déjà s’effondrer par terre. Elle aurait déjà dû rejoindre le monde des songes. Elle aurait dû se réveiller quelques heures plus tard, le corps endormi, les souvenirs flous. Tout ce qui la retient éveillée est la colère. Moteur suffisant pour qu’elle parvienne à un minimum de contrôle. Dans son état, elle ne peut pas se lancer dans une course-poursuite ou dans des échanges de tirs. Alors, elle a deux choix : retenir Heather assez longtemps pour que les agents arrivent ou croiser les doigts pour que la jeune femme obéisse sagement. Si la deuxième possibilité n’est pas celle sur laquelle elle compte, elle espère bien voir la première se réaliser. Les agents devraient bientôt arriver. Ils devraient bientôt entrer dans la salle et intervenir. Espérons. Dans cette situation, Sharon est également son propre ennemi. Elle doit lutter contre la drogue. Elle doit tenir fermement son arme. Elle doit dépasser l’endormissement pour rester efficace. Elle pourrait tout aussi bien s’endormir au milieu d’une phrase. Elle le sait. Elle ne contrôle pas la tonicité de ses bras, pourtant elle tient bon. Et ses pensées qui s’embrouille de plus en plus. Ses pensées ne sont plus très claires. Chaque phrase est réfléchie, pesée, lente, mâchée. Chaque phrase est le résultat d’une forte concentration. Mais sous ses yeux, Heather coopère. En tout cas, elle semble coopérer. La clé USB est retirée. Déposée sur la table. A quelques centimètres des armes. Sharon se redresse, s’assure de bien avoir la jeune femme dans sa ligne de mire. Hors de question de la louper cette fois. Au moindre geste suspect, son doigt laissera échapper une nouvelle balle. Celle-ci aura intérêt à atteindre son cerveau. Ou son coeur. Tout dépendra de sa capacité à bien viser et à accuser le recul de l’arme. “OK, OK, d'accord” Son nouveau comportement à de quoi éveiller les soupçons. Dans cette situation, la jeune femme a clairement l’avantage. Elle est en pleine possession de ses moyens. Elle est debout. Elle a deux armes à sa portée. Elle pourrait être plus rapide. Alors, Sharon ne se laisse pas abuser par une petite voix calme. Elle ne se laisse pas avoir par des apparences. Elle se tient prête. Prête à décider si Heather doit vivre ou mourir. Son regard ne quitte pas l’agente, consciente de chacun de ses mouvements. “Je vais te la donner, ok? Personne n'a besoin d'être blessé. Je- je te laisse m'emmener en salle d'interrogatoire, ok? S'il te plaît, Sharon, je- - ” Elle a presque envie de la croire. Elle a presque envie d’essuyer une petite larme. Elle a presque envie de la rassurer. Sauf qu’elle ne le fait pas. Elle s’est laissée manipuler depuis des mois, elle a appris la leçon. Heather a dévoilé un nouveau visage, la rendant suspecte au moindre mot, au moindre geste, à la moindre émotion. Elle a grillé toutes ses chances d’être crédible.

Mais Sharon ne voit pas la suite arriver. La clé USB est lancée dans sa direction. Elle ne peut s’empêcher de la suivre du regard pour essayer de la récupérer. Vain espoir. Elle n’est pas assez rapide. Elle n’est pas assez preste. Elle déteste cette foutue drogue. Son attention est vite reportée sur Heather et la table qui vient de se renverser comme par magie. Elle allait se rendre, hein ? Une méthode plutôt originale pour le faire. Sharon tire à travers la table. Elle tire de chaque côté. Les balles ne sont pas précises, malgré ses tentatives. Elle tente de se déplacer pour avoir une meilleure vue, un meilleur angle. Alors, elle rampe laborieusement sur quelques centimètres. Au moment où elle se rend compte qu’il n’y a plus personne derrière la table, la voix d’Heather s’élève. “JE SUIS DÉSOLÉE, SHARON,” L’infiltrée est là, quelque part derrière les serveurs. Sharon ne saurait dire où. A ce moment, elle ne sait plus grand chose. Son cerveau décide de se mettre en pause. La drogue. Encore. Si elle parvient à attraper Heather, elle compte bien lui infliger deux-trois balles de drogue pour qu’elle découvre les effets. Une alarme du S.H.I.E.L.D. retentit. Impossible de savoir si c’est un appel au rassemblement pour tous les agents capables de tirer sur une espionne d’HYDRA ou si c’est une diversion. Sharon ne s’en préoccupe pas. L’alarme a au moins eu l’avantage de la réveiller. Quelques secondes. Assez pour qu’elle voit la tour de serveurs tomber. Lentement. Dangereusement. Elle roule. Elle roule sur le côté pour échapper à l’avalanche informatique. Les serveurs s’effondrent dans un bruit infernal, soulevant un souffle d’air. Sharon grimace. Elle se retourne. Elle a échappé à l’effondrement. Pas son pied. Elle va tuer Heather. Elle va l’étrangler. Elle va l’étriper. Elle va… elle ne va rien faire. Parce qu’elle fait la différence entre les ressentiments personnels et le professionnalisme. Elle prend une inspiration. La douleur parvient à dissiper davantage les effets de la drogue. Elle a perdu son arme dans la chute. Elle ne la voit nulle part. Elle ne voit pas non plus Heather. Elle aurait aimé que l’agente se montre aussi audacieuse et déterminée dans son travail, elle aurait été plus que douée. “Sha-Sharon?” Sa voix inquiète s’élève. Réelle inquiétude ou feinte, Sharon s’en fiche. Elle n’en est plus au stade de pardonner. Il ne s’agit pas d’une erreur dans un rapport ou dans une information fournie. Il s’agit d’une trahison. On ne peut pas pardonner ce genre de choses. Alors qu’Heather s’inquiète réellement ou pas ne change rien. Sharon pose son pied libre contre la tour de serveur et y concentre toute sa force pour tenter de libérer le deuxième. Son pied n’a pas bougé de plus de quelques centimètres.

Après quelques jours passés sans marcher, elle va sûrement enchaîner avec une entorse. Génial. Magnifique. Merci Heather pour ce cadeau de bon rétablissement. “Bien joué. Tu as presque failli me tuer.” Presque. Après ce coup, Sharon n'a plus aucune pitié, plus aucuane retenue. Elle ne la ratera pas. Encore faut-il qu’elle parvienne à retirer son pied. Elle a encore le corps trop mou pour y parvenir. Encore trop drogué. Elle prend quelques secondes pour analyser la situation. Elle est coincée par ce foutu serveur. Elle n’a même pas d’armes. La clé USB ? Merde. Quelque part là, en-dessous. Au moins, aucune des deux organisations n’aura les informations. Vague réconfort. Tout n’est pas perdu. Sharon joint ses mains contre la colonne de serveur pour tenter de la repousser. Le pied est retiré. Elle doit se relever. Elle doit se mettre debout. Elle n’a pas le choix. Sa tentative est maladroite, ridicule. A la manière de Bambi, elle tente d’accorder ses membres pour se mettre debout. Elle y parvient. La cheville est douloureuse, mais pas plus que la douleur de la trahison. “T’as conscience que tu n’arranges pas ta situation, entre l’espionnage et la tentative de meurtre sur agent ? Tu ne vas jamais sortir de là vivante.” Elle cherche la jeune femme. Elle tente de déceler sa présence. Une respiration. Une ombre. Un mouvement. Un bruit. Mais l’alarme l’empêche d’entendre quoi que ce soit. Elle ne peut compter que sur son instinct et sur sa vue. Les deux sont encore embrumés par la drogue. Autrement dit, elle est foutue.

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Bien joué. Tu as presque failli me tuer. ” Le soulagement ne devrait pas être là. Elle ne devrait pas être soulagée, elle devrait être déterminée à la tuer, elle devrait sortir et l'achever — mais Heather sait qu'elle en est tout bonnement incapable. HYDRA va la tuer, va peut-être retomber sur sa famille, son père, sa mère, Evelyn mais... elle ne peut pas se résoudre à ça. Dans un moment terrifiant, elle repense à ce moment dans le commissariat, avec le mutant et Hansen-Wright, elle se souvient de son envie de la tuer, elle se souvient de l'envie de sang, de la rage, de la frénésie, de l'adrénaline dans ses veines comme du feu, comme de la glace. Elle se souvient aussi des cauchemars qui ont suivi, des larmes qui se sont taries en s'écrasant sur les paumes patientes de Dylan — oh, Dylan. Heather repousse la jeune femme de ses pensées. Elle va devoir faire profil bas pendant un temps, ne pas se faire remarquer. À l'heure qu'il est, son appartemment est presque vide et le restera — elle en reste propriétaire et il restera désert, sans doute pendant des mois. Elle a des faux papiers, elle ira peut-être au Mexique ou au Canada dans la famille de sa mère, à moins qu'elle retourne même à Boston... Elle ne sait pas. Elle n'a pas envie de penser à ça, une vie solitaire, une vie de traîtresse, une vie de parjurée, une vie d'exilée. Elle n'a pas envie.
L'alarme hurle toujours et Heather musèle ses émotions, calme les battements effrénés de son coeur. “ T’as conscience que tu n’arranges pas ta situation, entre l’espionnage et la tentative de meurtre sur agent ? Tu ne vas jamais sortir de là vivante. ” Elle reste silencieuse. Puis elle prend une profonde inspiration et contourne la tour de serveurs. Sharon est debout. Debout, ce qui est normalement physiquement impossible dans son état. Mais Heather n'est pas plus surprise que ça: Carter senior a de la trempe, après tout. Il y a le petit amoncellement d'imposants serveurs entre elle et Heather la voit bien hésiter sur ses jambes, trembler. Elle ne pourra pas la rejoindre, ça, Heather le sait. Il ne doit pas lui rester beaucoup de balles dans le magasin de son arme. Et pour une fois, Heather sait qu'elle gagnerait face à elle au corps-à-corps.
Pendant un instant terrible, elles se font face. Juste le temps pour leurs regards de se croiser. Heather est terrifiée. Terrifiée de faire face à sa supérieure, qui a le regard déterminé, dur, fixé, presque froid, et haineux aussi. Elle est terrifiée à l'idée de ce qu'elle vient de faire, pourquoi elle vient de le faire, pour qui elle vient de le faire. Elle est terrifiée, elle est malade, elle est dégoûtée. Elle a envie de dire à Sharon: parle à Dylan pour moi. Parle-lui pour toutes les fois où je n'ai pas pu. Dis-lui quelque chose. Elle aimerait lui dire: explique-lui. Mais elle sait que c'est stupide. Il n'y a rien à expliquer, si ce n'est qu'elle est terrifiée.
Alors sans lui laisser une seconde de plus pour tendre le bras et lui tirer dessus, Heather se met à courir et se planque derrière la colonne de serveurs à sa gauche, continue de courir à travers la salle, laisse derrière elle la clef USB, la tablette, l'ordinateur et Sharon. Et Sharon, et le S.H.I.E.L.D. et ce qu'elle y a construit. Sa jambe lui fait un mal de chien mais c'est une douleur bénéfique. Rassurante. Elle est sensée avoir mal et non pas ressentir cette étrange apathie, ce sentiment froid et cruel qui s'infiltre dans ses poumons et sa poitrine. Il y a tant de choses à faire, rien n'est gagné. Il faut qu'elle fuit et qu'elle s'échappe. Qu'elle laisse tout ça dans son dos. Pourquoi n'est-elle pas plus amère? Plus triste? “ AGENT SHARON CARTER. CLEARANCE 07. ACCÈS AUTORISÉ. ” Elle referme la porte derrière elle, brise le panneau qui en contrôle l'ouverture et la fermeture en espérant y retenir Sharon un peu plus longtemps sans vraiment y croire. L'alarme hurle toujours. Des agents ne vont pas tarder à débarquer. Elle n'a plus le temps de penser à Sharon. Elle n'a plus le temps de penser à quoique ce soit. Il ne lui reste plus qu'une chose en tête: fuir. Courir. Et ne jamais se retourner, à moins de se perdre.
Et ça, Heather ne peut pas se le permettre.

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