Fraîcheur nocturne, nuit noire, enfin aussi noire que possible en plein New York, rue pas déserte mais encore une fois, on est à New York. Bref, il faisait nuit, il faisait bon, y'avait pas trop de monde dehors et j'étais toujours à New York. Le SHIELD ne m'avait envoyé nulle part ailleurs depuis cette surveillance de mutant taré et je commençais à trouver le temps long. Comprenez bien, je disais pas non à un peu de calme en terme de déplacement, mais l'inactivité n'était pas mon fort, surtout quand je n'étais jamais inactif. Une habitude de vie, appelez ça comme vous voulez, toujours est-il que je tournais en rond. Par chance cela dit, on m'avait envoyé ce soir-là en repérage. Ils allaient monter une opération et quelqu'un devait aller jeter un œil pour rapporter les infos utiles. J'étais disponible, j'avais presque supplié pour qu'on me donne quelque chose à faire, bref, j'étais là.

Les mains fourrées dans mon manteau, je me tenais sur le trottoir d'en face, observant avec attention chaque fenêtres du bâtiment. Trois étages, murs typiques en brique, une double porte à l'avant et probablement une porte à l'arrière. C'était un immeuble à but résidentiel donc il y avait fort à parier que les étages étaient des appartements séparés. Des plans? Oui, le SHIELD en avait, ils avaient accès aux plans de construction, aux plans des architectes... Même aux plans des rénovations menées quelques années plus tôt pour la mise à niveau du système électrique. Ce que le SHIELD voulait c'était un repérage détaillé des lieux: nouvelles installations, nombre d'occupants, armement, informatique... L'endroit était un centre de rassemblement pour HYDRA, l'organisation avait eu cette information la veille et voulait à tout prix investir les lieux avant que les informations et effectifs ne s'évaporent. Je ne pouvais pas tout faire seul, et on ne m'avait pas demandé ça. En attendant j'avais rejoins un coin sombre entre une cabine téléphonique et un transformateur électrique pour retirer mes vêtements. Une chose que j'avais vite compris dans la montagne: le fluide n’influençait que mon corps, c'était immuable. Aussi mon invisibilité était tributaire de ma nudité. Bref? J'allais me peller les couilles.

Je laissais mes vêtements dans l'ombre et traversait la rue rapidement pour entrer. Quelque soit le son que je pouvais bien produire, je l'étouffais et devenais aussi inaudible qu'invisible. Le tour du bâtiment me pris environ une heure avant de comprendre que le centre névralgique de mon intérêt se trouvait bien au second: un bureau dans lequel deux hommes parlaient. Le reste du bâtiment était vide à cette heure et seules quelques pièces avaient été utilisé: les chambres dans lesquelles quelques hommes dormaient. Hydra. Les deux hommes que j'épiais sans gène discutaient du dernier match de Football et je passais ma main invisible dans mes cheveux invisibles par ennui. J'observais la pièce et cherchais du regard un papier où quoi que ce soit pouvant m'apprendre quelque chose sans succès. En fait j'allais repartir en arrière quand le téléphona sonna. - « Allo? ... Oui, on est en place. ... Pardon?! ... Mais comment... Je vous rappelle! » - Je tournais mon regard vers l'homme qui venait de raccrocher avant qu'il ne se lève d'un bond. - « Le SHIELD sait où nous sommes, il faut qu'on vide les lieux! Réveille les autres! »

Une seconde de battement. Je me décalais pour ne pas obstruer la porte et fixait le téléphone silencieusement. Et merde! Qui avait appelé? Comment pouvaient-ils être au courant? Comment était-ce seulement... Je devais alerter le SHIELD, les prévenir que leur opération était compromise. Téléphone. Tout nu. Je devais sortir de là avant tout. J'attendais que le gars dégage et je sortais sur le pallier pour le voir disparaître dans l'une des chambres, beuglant comme si le SHIELD était déjà là. Je dévalais les escaliers et traversait la rue vers mes vêtements toujours planqué avant de me saisir de mon téléphone, dans la poche de mon pantalon. Je composais le numéro et tout en enfilant mon boxer j'entendais l'opératrice au bout du fil. - Code 63567, je dois parler à un responsable immédiatement! - Un son continue se fit entendre alors que j'enfilais mon pantalon, le téléphone calé entre mon oreille et mon épaule, jusqu'à ce qu'une voix d'homme se fasse entendre cette fois. - « Qu'est-ce qui se passe? » - Opération compromise, ils savent que vous venez. - « Comment?! » - J'enfilais mon t-shirt, difficilement d'ailleurs sans faire tomber le téléphone. - J'en sais rien, il a eu quelqu'un au téléphone, ils sont entrain de vider les lieux. - Ces questions ne nous menaient nulle part et j'enfilais mes derniers vêtements pendant que le gars m'avait mis en attente.

Je rivais mon regard sur le bâtiment et voyait des ombres passer et repasser devant les fenêtres, agitées. Ca faisait cinq minutes que j'attendais et je perdais tout espoir que l'on puisse trouver une quelconque information utile désormais. Il ne restait que la ressource humaine. - « Arrêtez les... » - Le téléphone produisait à nous du son et je le ramenais à mon oreille. - Pardon? - « Arrêtez les! » - Y'a une quinzaine de gars là-dedans! - « Faites au mieux, une équipe sera là au plus vite! » - ... Et il raccrochait. - Connard! - Avais-je crié dans le téléphone déjà éteint avant de reporter mon attention sur le bâtiment. Pas le temps de revenir à l'invisibilité, ils allaient sortir d'une seconde à l'autre. Je n'avais sur moi qu'un couteau et un flingue chargé, ça allait être funky. La porte s'ouvrait et je posais mon regard sur le premier type qui sortait. La gueule enfarinée, il descendait les marches de ciment et derrière lui d'autres suivaient. Chacun portait une boite ou une mallette, des dossiers importants peut être?

Je faisais quelques pas sur le trottoir en face, toujours visiblement innocent. Comment faire? Comment les arrêter, comment en garder au moins un là? Comment récupérer cette mallette ou cette boite? Seul contre quinze sans renforts immédiat ni véritable appuie. - Et merde... Hey! - Je les interpellais et ils se retournaient tous sur moi comme des chiens enragés. Mauvaise approche, surtout en sachant qu'ils étaient conscients d'avoir le SHIELD sur le dos. J'avais jamais été doué pour la finesse, c'était dans mon dossier. Enfin je crois. - Pourquoi tant de... - Hâte. Pas le temps de finir que l'un des gars me coupait. - « ILS SONT LÀ! » - Le reflet de mon flingue dans son holster m'avait trahis. Je me jetais à terre alors que les premières balles fusaient et rampait jusqu'à l'abri d'une voiture garée là. Au moins je les occupais.

La tête rentrée entre mes épaules, adossé à la voiture au niveau des pneus arrières, je sortais mon arme de son étui et en retirait le cran de sécurité. J'étais pas illimité en munition alors j'allais devoir faire ça bien. Bon dieu je devais en garder en vie sans mourir moi-même, en les empêchant de partir mais sans les tuer non plus. Ils étaient où les renforts! Je m’apprêtais à me retourner pour tirer lorsqu'une masse rapide et forte me tomba sur le coin de la gueule, me plaquant violemment au sol. - « Ne vous en faites pas, j'ai l'affaire bien en main ! » - Mais.. Mais.. - C'est quoi ton problème! - Une voiture déboulait de nulle part et s'arrêtait dans un crissement strident devant l'immeuble. - C'est eux qu'il faut arrêter! - Je me débattais en vain. - Lâche moi! - J'entendais les portes de la voiture s'ouvrir et parvenait à dégager mon bras pour viser par dessous mon abris les pneus du véhicule et tirer. J’explosais deux des roues, les empêchant de partir comme ça. - Je suis du SHIELD, ils sont HYDRA, LÂCHE MOI BORDEL!

De l'autre côté de la rue les tirs avaient repris, toujours dans la voiture qui tenait le coup, mais des voix s'élevèrent aussi. - « Les pneus sont morts! » - « Faut qu'on dégage de là! » - « Vite! » - « Dans le parc, faut qu'on les sème! » - « Bougez vous bordel! » - Je continuais de me débattre et voyait les pieds des hommes traverser la rue pour s'aventurer dans central parc, utilisant le couvert de la nuit et des arbres pour tenter de disparaître. Les armes automatiques, le nombre, les boites et mallettes suspectes, la hâte, tout ça ne lui paraissait pas plus suspect que moi tout seul en face qui me fait canarder? C'était quoi son problème à cette gamine?! Elle avait de la force, je la subissais assez pour m'en rendre compte, mais j'en avais aussi. Sans prévenir je la repoussais violemment et me dégageait assez pour me relever totalement. Plus un chat dans la rue. - C'est malin! Merci! - Je me saisissais de mon téléphone et contactais à nouveau le standard. Je donnais pas de code cette fois, je m'attendais à raison à ce que ma ligne soit déjà surveillée. - Ils se sont échappés dans central parc! Envoyez vos putains de renforts immédiatement! - La femme à l'autre bout du film me répondait que c'était en court mais en fond, grâce à mon ouïe, j'entendais à mi-voix le responsable râler sur mon échec. - Et dites lui que s'il est pas content, la prochaine fois il a qu'à venir lui-même!

Je raccrochais sans attendre une seule réponse et rivais mon regard sur la jeune femme. J'avisais sa queue touffue, sans discrétion aucun, et revenait à sa tête. - Tu comptes m'attaquer encore ou tu m'aide à rattraper ta connerie? - Je l'ai jamais dis? Je suis un connard sans finesse. De toute façon j'attendais pas sa réponse non plus et je sautais d'un bond, nanites à l'appui, par dessus la grille qui entourait le parc pour me mettre en chasse.

A peine retombé sur mes pieds je me mettais à courir en direction des arbres les plus proches, là où ils avaient dû s'engouffrer. Pas de lune, pas d'étoiles, pas de lampadaires sous ces arbres. Seule la lueur ambiante éclairait mon chemin et je manipulais les bâtonnets de mes yeux pour qu'ils captent le maximum de lumière, me donnant une meilleure vision nocturne. C'était pas parfait, mais je savais au moins où je mettais les pieds et si quelque chose bougeait, je le voyais: les autres pouvaient probablement pas en dire autant et ils se dirigeraient à la lumière. Enfin c'était une hypothèse. Je commençais à marcher entre les arbres, avançant à vitesse moyenne sans courir pour autant. Je cherchais le moindre mouvement suspect dans la lumière que je percevais, la moindre silhouette, et lorsque j'entendais le craquement d'une brindille je me figeait. Tout près... Je bondissais dans la pénombre, atterrissant sur le dos d'un homme plutôt grand. Il se débattait mais j'étais plus rapide et passais mon bras autour de sa gorge, toujours agrippé à son dos, et serrais pour l'étouffer. Entre ma vitesse et ma force il ne fallait que quelques instants pour qu'il lâche prise et s'écroule sous mon poids. Un de moins. Il était pas mort celui-là. Cela dit j'avais rien sur moi pour l'attacher alors je devais espérer qu'il ne se réveille pas trop vite.

Le tirant pour l'appuyer contre un gros arbre reconnaissable, je le laissais là et reprenais ma marche vers les autres. - « ATTENDEZ! » - Ce cri me vrillait les oreilles alors que je venais tout juste d'en augmenter les capacités et me retournait vers la fille écureuil qui arrivait à toute vitesse vers moi. - Moins fort, c'est bien aussi. - Lui avais-je dit froidement alors qu'elle continuait sur sa lancée. Elle plaidait sa cause et je ne répondait rien. J'étais jamais vraiment partant pour travailler en équipe. Je ne la connaissais pas et en prime elle était responsable de leur fuite massive, ça n'aidait pas à me mettre en confiance. J'étais perplexe, très, mais lorsqu'elle me donna cette "carte", mon attention était attisée. C'était quoi ça? Un glossaire de méchants? Comment pouvait-elle posséder un truc pareil? J'éclairais la carte avec mon téléphone et lisait ce qu'elle disait: le grand chauve à côté duquel je me tenais à l'intérieur du bâtiment, c'était lui. Pas le gars au téléphone, l'autre, son second. Il était un des cobayes d'Extremis. Celle-là je m'y attendais pas et j'en étais à me demander si le SHIELD le savait ou non. Ces gars là étaient incroyablement résistant en plus d'avoir des capacités.. disons brûlantes. - Quelle merde...

Je rendais la carte à la jeune femme et tournait mon regard vers la pénombre de la forêt tout en rangeant mon téléphone. Quatorze hommes donc un Extremis, du moins un seul jusqu'à preuve du contraire. Je pouvais pas faire tout ça seul et l'équipe en renfort ne serait pas là immédiatement. Je revenais à elle, un air contrains sur le visage. - Ok. Je les veux vivants, peu importe dans quel état. - J'allais repartir mais une dernier chose me ramena à elle. - Et si tu tombes sur ce type... - Je désignais la carte du doigt. - ... Tu n'engages pas le combat seule. Tu m'appelles, je t'entendrais. - Elle avait beau être forte, probablement plus forte que ce qu'elle avait démontré, les Extremis n'étaient pas à prendre à la légère. Moi je pouvais faire repousser mes membres et guérir rapidement, mais eux c'était un niveau bien au dessus. Cet homme là... Je doutais qu'on puisse le garder vivant et l'emmener. Le problème c'est que je ne savais pas si on serait capable de le tuer. - Allé.

Je perdais de vu ma coéquipière de fortune et m'enfonçait dans le bois, augmentant au maximum mes capacités auditives pour percevoir un maximum de son, que ce soit pour l'entendre elle si elle trouvait l'Extremis, ou pour percevoir les menaces proches. A vitesse rapide, sans courir, j'avançais entre les arbres à la recherche des autres connards d'Hydra encore dans le coin. Je doutais qu'on puisse tous les retrouver mais on pouvait bien en capturer quelques uns. Lorsque j'entendais des pas précipités j'utilisais ma force pour me hisser d'un bond dans un arbre et m'agenouillait sur une épaisse branche. Ça faisait très assassin des forêts mais après tout pourquoi pas. Un type partait dans le sens où j'arrivais, probablement s'était il désorienté tout seul en courant dans la pénombre, et je lui tombais dessus de tout mon poids, étouffant son cri de mon genoux sur sa cage thoracique. - Toi, ta gueule. - Je lui assénais un violent coup de poing qui l'assommais et balayais du regard mon environnement immédiat pour être sûr que nous étions seuls. - Tu vas rester gentiment ici... - De toute façon, assommé comme il l'était, il allait pas se réveiller avant un petit moment.

Toujours assit sur ma victime, des tirs rapides et saccadés parvinrent à mes oreilles et je levais immédiatement la tête pour en discerner la provenance. Bordel. Elle avait dû en trouver d'autres mais ça c'était passé moins... calmement. En même temps vu comment elle m'avait sauté dessus dans la rue, j'étais à moitié étonné. Discrétion était peut être un mot qu'elle ne connaissait pas, mais qu'est-ce qu'on leur apprend comme conneries à l'école de nos jours. Je calais l'homme inconscient contre un arbre, comme l'autre en fait, et me dirigeais vers l'origine des tirs. Ils avaient cessé d'ailleurs mais mais je ne ralentissais pas la cadence, ça puait. Tant que cet Extremis était dans le coin, c'était pas bon pour nous. Je percevais l'orée du bois et la luminosité grandissante, aussi je laissais à mes yeux leurs capacités naturelles et me plaquait contre un arbre au moment où mes oreilles percevaient quelques mots. - "Heu… A l'aide ?" - Et merde... Je penchais la tête et observais les trois hommes, deux avec leurs armes baissées, l'autre tenant l'écureuil par le bras, dans son dos. Elle était cernée... Et l'homme qui la tenait était le chauve au sang chaud. A quoi jouait-il avec elle? Armant mon flingue, je laissais aux nanites le soin de calculer la trajectoire de la balle et placer mon bras dans le bon alignement avant d'appuyer sur la détente.

La balle fusait dans un bruit sonore et allait se loger dans le cou du chauve, traversant de part et d'autre dans une éclaboussure rouge, laissant à Doreen l'opportunité de se libérer de lui. Il n'allait pas en mourir, certainement pas, et d'ailleurs sa chair devenait déjà rouge braise. - SORT DE LA! - Je dirigeais mes tirs vers les deux hommes qui me noyaient déjà sous les balles et finissais par arrêter de tirer au bout de quelques balles envoyées, absorbant les sons que je produisais pour me déplacer dans l'ombre, les laissant vider leurs chargeurs sur une zone vide pendant que je contournais la place pour aller me planquer à l'abri d'un muret. Je n'avais touché aucun des deux autres hommes, ce n'étaient que des tirs de couverture, mais au moins ma diversion avait fonctionné. Maintenant, j'étais dans une position bien plus avantageuse et j'avais les yeux sur la mallette que le chauve avait avec lui. Si c'est lui qui avait ça, alors ça devait être important.

A peine arrivé derrière mon muret que les tirs cessaient et que le chauve criait de "la tuer". Prit d'un coup de chaud/froid, je relevais la tête pour vérifier que tout aille bien et observer un gars assommé par terre, l'autre entrain de viser la fille avec son flingue pendant que le chauve guérissait un peu trop vite à mon gout. Elle sautait par dessus le muret et se mettait à l'abris à peut être un mètre ou deux de moi. Les tirs reprenaient mais nous étions tranquille pour quelques secondes. Non, c'était pas grand chose. Elle demandait ce qu'on faisait maintenant et moi je tournais la tête pour observer l'orée des bois, cherchant une solution. Mon flingue ne ferait que chatouiller ce connard chauve et j'avais pas de ligne haute tension à proximité. Je me souvenais du gars, un autre chauve tiens, tué par Stark dans Air force one. Lorsque le SHIELD l'avait sorti de là, enfin des décombres de l'avion, il avait un énorme trou dans le sternum, rien qu'un accident d'avion puisse provoquer. Fallait lui arracher le cœur de la poitrine comme dans une mauvaise série de vampires? J'en avais la force, mais était-ce la solution? Je veux dire je pouvais le faire, sans sourciller, mais c'était un peu l'attaque unique du "ça marche ou tu meurs", parce que si ça ne marchait pas, j'étais coincé, mon bras dans son corps, sans image douteuse, et lui à portée de me défoncer la tronche.

« J'ai un plan. » - Elle a un plan. Je tournais la tête vers elle et la fixais une seconde. Ce qu'elle avait en tête? Pas le temps de le lui demander. Elle avait un plan, j'avais pas de plan, c'était simple. - Ouais. - Ouais je pouvais faire diversion. Je savais pas encore comment mais généralement, ce genre de diversion, c'était à l'improvisation. C'est comme les explosions de mines quand il faut faire des claquettes, on improvise. J'attendrais donc le signal. Pas besoin de demander ce que c'était, j'en avais aucune idée, mais là encore comment toujours, ce genre de signal se révélait toujours évident. Elle bondissait à une hauteur presque démente pour ses jambes et je la regardais sans sortir ma tête de derrière mon muret. Au moins, en faisant ça, elle me donnait quelques secondes de calme avant que ça ne revienne à moi. - « Alors finalement t'es tout seul? » - Thérapie de groupe sans groupe. - « C'est bête, entre un tout seul et une fuyarde, je vais commencer à m'ennuyer. » - C'est plus intime au moins. Tous les trois, seuls au clair de lune... - Un petit écureuil aux lunettes d'aviateurs - Pardon?! - Venait de courir jusqu'à moi, me faisant un signe de la tête avant de déguerpir. Signal. Je sortais de ma cachette et visais instinctivement l'autre homme avant de lui tirer dessus, une balle, il tombait au sol en gémissant. - A deux c'est encore mieux.

Le ton de ma voix trahissait clairement mon cynisme, mon précieux cynisme d'amour, et je pointais mon flingue sur le chauve, scrutant chacun de ses mouvements. Il portait toujours la mallette à sa main gauche, la droite libre de tout mouvement. - « Sale petit... » - Furet? Non, c'est des écureuils, imbécile. On t'as pas offert le cerveau qui va avec la modification génétique? - Il grognait. Je devais l’entraîner vers le pont. Il n'avait aucune raison de me suivre sur ce pont. Il allait en avoir une. Les filles? - « Je vais te... » - Ta gueule. - Mon bras visait de lui même, tirant une balle parfaite au beau milieu du poignet gauche de l'Extremis alors que je piquais un sprint pour travers les quelques mètres qui nous séparaient et prendre la mallette qu'il venait de lâcher. Trop près pourtant, c'était un risque je suppose, ou même sans supposer d'ailleurs, il me décollait un revers du bras qui me faisait décoller du sol et voler en arrière sur les quelques mètres que je venais de parcourir. Retour au point de départ et je roulais par terre, du sang dans la bouche et la mâchoire rougie. - « Rend-moi ça! » - Va te faire foutre. - Et je détalais, direction le pont, sentant en fait ma jambe douloureuse dû à l’atterrissage pas contrôlé. Le plan de Doreen avait intérêt à être prêt et efficace parce que j'avais un Extremis en colère au cul.

Courir, toujours courir. Ça me rappelait le camp d'entrainement à Boston et... Non en fait. Le seul chauve qui nous courrait derrière à l'époque c'était l'instructeur qu'on avait un peu trop emmerdé. Bon, trêve de nostalgie douteuse, je courrais, vite. Pas trop vite, je ne voulais pas décourager l'Extremis quoi que je doutais d’ébranler sa motivation avec si peu alors que je tenais au bout de mon bras sa précieuse mallette. Si à l'intérieur je n'y trouvais que ses petites culottes j'allais être très déçu. Pas le temps de tirer, je ne voulais pas non plus le ralentir et compte tenu du revers que je m'étais mangé, ma fuite semblait plausible. J'avais de la chance cela dit, il fonçait droit devant et n'avait pas d'armes. D'un autre côté, son corps même était une arme, donc pourquoi s'encombrer d'un flingue quand on peut faire fondre votre chair avec deux doigts, ou la pénétrer d'un seul. Je prenais mes jambes à mon cou, pas aussi littéralement que j'aurais pu le faire en Irak, mais très métaphoriquement parlant. J'allais atteindre le pont dans les secondes à venir et j'étais toujours entrain de me demander en quoi consistait ce plan secret vers lequel je courrais et surtout est-ce qu'il allait marcher ou est-ce qu'il allait me retomber sur la gueule, encore.

Le pont était à portée de vue, j'entendais les pas du chauve dans mon dos se rapprochant, je percevais chaque impact de ses chaussures sur le sable gravillonneux. Je rivais mon regard sur le pont: je n'y voyais pas Doreen. Où était-elle? Avait-elle quitté le navire comme l'Extremis l'avait dit? J'en doutais, mes les gens sont parfois surprenant, généralement pas dans le bon sens du terme. Je passais les premiers rebords métalliques du pont et traversait à tout allure, mon regard cherchant désespérément l'écureuil avant de voir une silhouette bondir du coin de l’œil. A peine l'avais-je perçu que je stoppais ma course en une glissade presque contrôlée et me retournait pour la voir sur le dos de l'Extremis, deux gros câbles noirs plantés dans ses épaules, une lueur pulsant le long de son corps, électrique. Les lumières du parc vacillèrent violemment avant de s'éteindre, un laps de temps durant lequel la seule lueur à proximité, sinon les lueurs de la ville, fut l'électricité choquant le chauve tombé à genoux sur le pont. Ça dura quelques secondes. L'homme convulsait au sol, vivant, neutralisé, et puis les lumières revinrent, probablement alimentée par un circuit de secours. Je serrais la poignée de la mallette dans ma main et finissait par lever les yeux au ciel, exaspéré, en voyant Doreen faire son V de la victoire et exclamer son slogan mensonger. Ou au mieux exagéré.

C'était trop tard pour partir à la poursuite des autres agents d'Hydra mais nous avions une mallette d'un important intérêt, et un agent tout aussi précieux. Possiblement le second de cette cellule active. - La prochaine fois, j'embarque un taser. - Un mega taser de la taille d'un flingue. Si, on avait ça au SHIELD. Sans plus de cérémonie je saisissais mon téléphone et contactais le standard. - Agent en attente de renforts. - « Les renforts sont sur place. A votre position dans deux minutes. » - J'ai sécurisé une mallette et ce que je pense être le second de la cellule. - « Patientez pour l'équipe d'intervention. » - Je soupirais. Patienter n'avait jamais été mon fort. Je tournais la tête vers l'écureuil. - Ils arrivent. - Mes oreilles percevaient déjà les pas précipités des bottes militaires qui battaient le sol du parc. Ils étaient là. Une équipe de dix hommes, armées, en tenues, avançaient vers nous et traversaient le pont. J'avançais vers eux et vers notre prisonnier, leur faisant signe de la main.

« Est-ce que tout va bien, monsieur? » - Monsieur... Je détestais ça. - Ouais. Faut... - « HAIL HYDRA! » - Le chauve se relevait, telle une bête immortelle, toujours lié par les câbles électriques qui semblaient ne l'avoir qu'endormis. Je lâchais la mallette et me précipitais immédiatement sur lui. Il avait une arme. Oh le con. Pourquoi ne la sortait-il que maintenant? Il se relevait en criant et pointait son flingue sur Doreen mais ma vitesse me donna l'avantage. Je plongeais mon poing dans sa poitrine au moment où une détonation faisait vibrer le pont et ses occupants et l'en ressortait, mes doigts refermés sur son cœur encore chaud, le laissant s'écrouler. Je laissais tomber le cœur qui rebondissait deux fois par terre en sentant le frisson parcourir mon torse et la brûlure vriller mon flanc. - Connard... - « Monsieur! » - Ça suffit les monsieur! Ça va! - J'avais été cassant. Je pourrais dire que je ne voulais pas l'être, mais en réalité je m'en fichais un peu. Et ça allait vraiment. Les nanites étaient déjà entrain de travailler à ma guérison et je n'aurais plus une trace d'ici une dizaine de minutes. La balle avait traversé et l'hémorragie était déjà endiguée. C'était juste... douloureux.

Je posais mon regard sur ma main couverte de sang et grognait en revenant vers la mallette et Doreen. - Dégueulasse... - Je levais mon regard vers Doreen alors que l'équipe d'intervention était déjà entrain de sécuriser la zone et coordonner le nettoyage. - Est-ce que tout va bien?

La main posée sur la zone où se trouvait ma blessure par balle, là où les nanites étaient déjà entrain de s'activer, je revenais vers Doreen et me baissais pour reprendre la mallette, esquissant une légère grimace de douleur. Je pouvais ne plus la ressentir mais je préférais être patient, c'était rien de grave, ça allait vite passer. J’acquiesçais lorsque la jeune écureuil me répondais qu'elle allait bien et finissais de traverser la distance jusqu'à elle, suivit de prêt par le soldat qui s’inquiétait de ma condition. Il ne me connaissait pas, c'était normal, et avec la guérison avançant, je reprenais quelques couleurs et perdais mon ton cassant. Je tournais la tête vers lui. - Je vais bien, arrêtez de vous inquiéter et allez plutôt vous occuper du nettoyage. - « L'équipe est en route. » - Bah allez jouer aux cartes, qu'est-ce que j'en sais.

Je finissais par rejoindre Doreen qui me tendait une main timide, se présentant, et je... passais la mallette dans celle couverte de sang pour éviter de partager les fluides rouges de l'extremis. Personne n'avait besoin de ça. - Liam. - Et je tournais mon regard vers le petit rongeur sur son épaule, et sur l'exact même ton je lui disais... - Bonsoir Joe. - Je revenais finalement à elle et à sa question sur la mallette que je soulevais un peu pour l'observer. - Aucune idée, mais l'extremis est le second de la cellule, il devait forcément garder sur lui des choses importantes. Je vais juste pas ouvrir ça maintenant... On sait jamais que ça exploserait cette saloperie. - J'esquissais un léger sourire, la pression retombant. La douleur à mon flanc s'estompait doucement et si j'avais passé mes doigts sur la plaie, j'aurais probablement sentis une surface fragile et chaude, la cicatrice se formant doucement, encore renfoncée dans ma chair.

Une camionnette noire débarquait d'on ne sait où, ayant probablement emprunté l'un des nombreux chemins d'entretient du parc pour venir jusque là. Un gars de l'équipe d'intervention captait mon regard et me confirmait depuis l'autre bout du pont. - « L'équipe de nettoyage est là! » - J'acquiesçais et revenait à Doreen. - Et bien il est temps de filer. Ils vont remettre les lieux à neuf. Il n'y aura plus une trace dans quelques heures. - Je regardais rapidement la mallette du démon. - Et moi je vais sécuriser ça immédiatement. - Je relevais un dernier regard vers eux, parodiant un salut militaire. - Squeak, Joe, à la prochaine. Ou pas. Débusquez pas un autre gars comme ça, je viendrais pas. - Et je tournais les talons. Il me fallait juste une minute pour refiler la mallette au soldat qui s'inquiétait un peu plus tôt avant de déguerpir.

Le SHIELD était noyauté, encore, mais j'avais tendance à faire confiance et ces gars-là: j'avais en ma possession une mallette supposément importante, s'ils avaient été corrompus, ils m'auraient tiré comme un pigeon.  Toute cette histoire allait avoir des répercutions et si le SHIELD avait encore des enfoirés de poulp dans leurs rangs, où la confiance allait-elle s'arrêter?