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La nuit était tombée. Dans l'air de New York on entendait encore le son des sirènes et les lueurs clignotantes dans la fumée et les nuages. Rykers était un champs de bataille mais on y avait survécu. En tout cas j'y avais survécu. Je préférais voir ça comme une victoire mais j'étais épuisé. J'avais pris mon temps. J'avais été prudent. J'avais patienté, attentif. Car toutes les forces de l'ordre étaient sur le qui vive... Mais je m'inquiétais moins. Parce qu'avec ce qui s'était passé à Rykers, ils ne s'attendaient certainement pas à ce qu'on s'éternise dans le coin. Ils ne s'attendaient pas à ce que je revienne en arrière. J'avais aidé mes amis et collègues, j'avais participé à les sortir de ce bordel et une fois hors de danger, une fois tranquille, j'avais fais demi tour. J'avais prévenu Cap bien sur, j'avais prévenu Wanda avant de filer. Il était plus prudent de rentrer, se mettre à l'abri, là où on ne nous trouverait pas, mais je ne pouvais pas faire ça. La simple idée d'être à New york et mon esprit me bombardait des images des deux hommes de ma vie. Et si je comptais bien voir Warren, on devait discuter c'était clair, ce n'était pas vers lui que je me dirigeais. Cette nuit, ma tête était ailleurs, mon esprit focalisé sur l'autre. Celui avec lequel je n'avais pas de connexion psychique pour conserver un lien, celui dont les bras me manquait atrocement.

Je ne voulais pas voler, trop voyant même en pleine nuit, mais je ne pouvais pas décemment me balader dans les rues. Alors je sautais de toit en toit, discret et silencieux, évitant les lumières et les caméras. Oh, je savais comment m'y prendre, depuis bien longtemps je pouvais disparaitre dés que je le voulais. Cette fois je voulais seulement passer. Et lorsque je voyais l'immeuble de mon désir, je me laisser retomber sur le trottoir d'une ruelle sombre, avisant la rue pour finalement traverser. Je ne sentais aucun danger, rien ne menaçait ma vie, alors je rejoignais la porte, tête baissée et entrais. La serrure se déverrouillait à mon arrivée et je ne faisais que passer la porte avant de descendre une volée de marches. Elles étaient rares les fois où j'étais venu ici, je pouvais littéralement les compter sur les doigts de ma main. Mais plus le choix, plus maintenant. Mais peu importe, déjà avant, encore plus maintenant. J'aurais préféré dormir sur le sol d'une décharge pour pouvoir le voir. Le couloir qui menait à sa porte était sombre mais je n'allumais aucune lumière, mon regard habitué à la pénombre, et une fois à la porte je ne toquais pas. Je déverrouillais la porte comme je l'avais fais avec celle de l'immeuble.

J'entrais et refermais, soupirant discrètement, avant de faire quelques pas. Était-il absent? La lumière bleutée d'un écran illuminait la pièce sombre et je le trouvais, enfoncé dans son canapé. Je n'étais même pas surpris qu'il ne m'ait pas remarqué, j'étais bon dans mon genre après tout. - Même en déchet dans ton canapé t'es parfait. - J'esquissais un sourire et perdais le contrôle de mes jambes, manquant de tomber avant de me rattraper à une chaise. A la lumière de l’exiguë appartement il pourrait me redécouvrir. Pâle, sale, un impact sur le côté du crâne nimbé de sang séché qui avait coulé le long de mon visage, mes vêtements abîmés... Mais il était déjà sur moi, m'emprisonnant dans ses bras, et je l'embrassais, je l'embrassais encore et encore avant d'enfouir ma tête en me laissant aller contre lui. - Tu m'as tellement manqué... - Je resserrais mon étreinte, comme s'il était ma dernière ancre sur Terre, comme si j'allais flancher et je sentais quelques larmes incontrôlées épongées par son t-shirt. Je ne voulais pas les contrôler. Je ne voulais pas être en contrôle. J'étais là, contre lui, pour cette raison. Parce que je n'en avais pas besoin.

Je sentais ses bras serrer aussi et je grimaçais en grognant. Il me libérait et je plaçais ma main contre mon flanc. - Et merde... - Du sang. Un reste des débris de métal que j'avais manipulé. Quelques fragments douloureux toujours logés là. Je posais mon regard sur lui, tentant d'être joueur et drôle mais ne faisant que relever mon épuisement. - T'as pas envie de jouer au docteur, mon cœur?
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La soirée ne passait pas, comme les précédentes. Je me suis remis à feuilleter les pages de la rubrique nécrologique, à la recherche d'un nom que je connaîtrais. Je les feuillette avec un peu de fatigue accrochée aux paupières mais l'oeil vide, je me prépare à ce que ça puisse arriver. Je ne le souhaite pas mais je m'y prépare, pour que rien de ce qui pourrait arriver ne puisse me briser. Pour rester vivant et aussi fort que possible pour ceux qui resteront auprès de moi. Comme la soirée ne passait pas, je suis sorti prendre un verre avec quelques collègues. Ils ont parlé des Thunderbolts et des activités d'Oscorp mais je n'ai pas réussi à me joindre à leur conversation, à commenter les allers et retours douteux de certaines personnes qu'on doit laisser passer aveuglément, de ceux qu'on ne doit pas voir. Le nez plongé dans une bière, j'ai juste pensé que je ne regarde plus mon téléphone qu'en rentrant à l'appartement. Je n'attends plus d'appels, alors il m'arrive de l'oublier. Et chaque journée gagnée pour eux est une sorte de victoire pour moi.

La soirée ne passait pas, comme les précédentes. Au final, je ne suis pas rentré seul, tombant sur mon jeune voisin sur le chemin. On a échangé des banalités, on a parlé de voitures, je n'en ai rien à foutre des voitures et à un moment donné, je l'ai vu frissonner sous sa veste bien fermée jusqu'au dernier bouton. J'ai fait semblant de ne pas remarquer et finalement, il a arrêté de me parler de voitures jusqu'à l'entrée de l'immeuble. Il avait la tête de celui qui ne veut pas dormir chez son vieux ce soir, je ne sais pas pourquoi. J'ai seulement jamais entendu ce dernier gueuler sur son fils, et pourtant les murs sont fins, même de l'autre côté du couloir je l'aurais entendu. Je me suis séparé de lui alors qu'il luttait pour retrouver ses clefs et l'ai abandonné quand il a disparu dans l'appartement déjà endormi.

La soirée ne passait pas, comme les précédentes. Je me suis calé sur le canapé, l'assiette du midi poussée négligemment sur le côté de la table basse. J'ai ouvert une nouvelle bière, ne travaillant pas demain et n'ayant pas le « plaisir » de voir Jay ou l'un de ses... clients non-plus. J'ai zappé sur une connerie, et ai laissé ma silhouette disparaître dans l'obscurité, percée ponctuellement selon la luminosité des images de l'écran. De temps à autres, comme un ancien réflexe qui ne veut pas se perdre, j'ai jeté un œil sur l'écran de mon téléphone sans voir le nom que je voudrais voir apparaître. J'ai essayé de me dire que pas de nouvelles, bonne nouvelle. Mais je me le suis trop répété pour vraiment y croire maintenant. Pas de nouvelles, ça craint en fait. Quand je suis arrivé au bout de ma bière, je l'ai laissée tomber près du canapé et ai posé mes pieds sur la table basse. Mes yeux cherchent à se fermer de temps à autres. Je retarde le moment de m'endormir, pour profiter d'un sommeil plus profond, d'un sommeil sans rêves.

La soirée ne passait pas, comme les précédentes. Et maintenant, elle s'est arrêtée. J'ai regardé vers l'écran toujours assombri, me redressant machinalement, ne l'imaginant pas ici. Et un image de... une sorte de gros poisson à la télé, a illuminé ses traits de loin. Mais même dans la pénombre de mon appartement minuscule, avec quelques bières dans le nez et un manque de sommeil évident, je ne peux que le reconnaître. Je ne suis pas sentimental, je ne cours pas dans les bras des hommes avec qui je couche, je ne les prends pas contre moi dès qu'ils réapparaissent. Et bien sur Kayden ne fait pas partie de ces hommes, il est davantage. Tout mon corps ne réclame que de sentir le sien, de le toucher, l'ancrer dans la réalité de cette soirée sans fin. Je me précipite vers lui et si un peu de délicatesse voudrait que je m'arrête d'abord sur son état, ma brusquerie habituelle veut juste le serrer fort tout contre moi. Je veux sentir le parfum de la nuit contre lui, sentir sa nuque contre le bout de mes doigts, sentir sa tempe, sa joue et ses lèvres contre les miennes comme si j'avais eu peur de perdre cette sensation, cette chaleur et ce plaisir. « Tu m'as tellement manqué... » Oh toi aussi, tu n'imagines pas... Je profite de notre étreinte avant de le détacher silencieusement de moi, baissant mon regard dans la même direction que le sien.

Je le relâche, juste le temps d'allumer la lumière. Je baisse les yeux une seconde, le temps de me réhabituer à la lumière, comme si je venais de me réveiller. Mes doigts s'approchent de sa blessure sans y toucher. Sa boutade, je n'y réponds pas, ce n'est pas drôle et je lui désigne le canapé d'un mouvement du menton avant de l'y conduire. Je le laisse y tomber et m'accroupis devant lui, entre ses genoux que j'écarte de mes mains. Mon regard croise le sien : « Je vais chercher ce qu'il faut. » Parce que j'ai forcément ce qu'il faut. En m'éloignant, je commente : « À croire qu'on pourra jamais se retrouver ici sans que l'un d'entre nous ne soit amoché », faisant référence à la fois où il m'avait ramené ici, quand j'étais tombé sur plus forts – et plus nombreux aussi, accessoirement – que moi. Je prépare du désinfectant et éventuellement ce qu'il faudrait pour sortir de petits éclats de... j'en sais rien. Des bandages. Et je chope une bouteille d'alcool sous l'évier. Ouais, rangée entre la javel et le gel bleu pour les chiottes. Un scotch dégueulasse mais dont on se contentera. Je la pose près de l'assiette vide : « T'as mal, tu veux boire un coup ? » lui dis-je avant de m'installer près de lui pour lever son t-shirt. Mes doigts frôlent sa peau, plus fort que moi, et s'approchent de la blessure. « J'imagine que l'hôpital, c'est pas envisageable ? Parce que je suis pas un excellent docteur tu sais... »
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A l'évidence j'étais pas drôle, mais je ne pouvais pas vraiment le blâmer. Il me guidait vers le canapé, sérieux, presque grave. J'avais savouré chaque seconde de notre étreinte mais d'une manière un peu égoïste je le trouvais un peu distant. Je n'avais rien imaginé, je ne m'étais pas fais d'idées préconçues sur ces retrouvailles, mais j'aurais probablement aimé plus de... chaleur? Un sourire, Certes je n'avais pas vu son visage lorsqu'il était venu m’accueillir, mais maintenant que je le voyais accroupi face à moi, je l'observais et... - « Je vais chercher ce qu'il faut. » - Et j'avais acquiescé en laissant ma tête tomber lourdement en arrière contre le canapé en soupirant. - « À croire qu'on pourra jamais se retrouver ici sans que l'un d'entre nous ne soit amoché » - Mieux vaut moi que toi... - Et je le pensais. Stupidement. Lui, comme Warren, comme Maddy ou même Alec, je préférais de loin prendre leur place plutôt que les voir souffrir. Pourtant j'étais bien incapable de prendre la place d'Alan en ayant fuit. Il était seul ici, abandonné de sa sœur, de moi, forcés de nous cacher pour survivre dans un semblant de liberté.

Lorsqu'il revenait, équipé de désinfectant, de bandages et d'une pince, je voyais la bouteille qu'il posait sur la table et souriait. J'avais déjà retiré le pull fin noir que je portais jusque là et était entrain de galérer à retirer mon t-shirt, entre douleur et sang séché. Il m'aidait et je grimaçais avant de poser mon dos nu contre le canapé. - « T'as mal, tu veux boire un coup ? » - Malpoli de refuser... - Ça ne me ferait aucun effet. Le gout était le seul point positif. Il le savait mais je ne disais rien, mettant ça sur le compte de la situation pour le moins stressante. Je tendais le bras et il me passait la bouteille dont le bouchon en aluminium sautait avant que je ne porte le goulot à mes lèvres. Amer. Suffisant. Deux gouttes du liquide ambré fuyait sur mon torse et j'essuyais ma bouche maladroitement avant de poser la bouteille et de lever mon bras gauche pour le poser sur le sommet du canapé. - « J'imagine que l'hôpital, c'est pas envisageable ? Parce que je suis pas un excellent docteur tu sais... » - L’hôpital est trop dangereux et... Tous les médecins et vétérinaires que je connais ne sont pas toi. - Au cas où c'était pas clair.

Je le voyais prendre la pince et lui lançais un sourire fatigué avant de poser ma main gauche sur la sienne. - Rassure toi, cette partie est pour moi. - C'était imprudent, douloureux et stupide, mais c'était nécessaire. Je tournais la tête et attirais dans ma main une boite en métal posée un peu plus loin avant de la lui donner. - Je veux que tu approches ça de la blessure, ça va attirer les fragments. - Je le fixais dans les yeux, voyant sans mal sa perplexité. J'allais polariser la boite de façon à ce qu'elle fonctionne comme un super aimant, qui attirerait les fragments hors de mon corps. Je les sentais en moi et je pouvais dire à presque 100% qu'ils étaient en surface, rien de profond ni de réellement dangereux. Le truc ennuyeux? Je ne pouvais pas me prémunir contre la douleur, seulement serrer les dents. - Quand tu veux. - Avais-je dis en concentrant mon pouvoir sur la boite en métal. Je fermais les yeux, préférant ne pas voir pour ne pas diminuer l'intensité de la magnétisation en ayant peur de la douleur. Pour que ce soit efficace, il fallait que ce soit rapide et du premier coup. Sinon autant y aller à la pince.

Lorsqu'il approchait finalement la boite je ne pouvais retenir un cri de douleur, bref, avant de serrer les dents, crispant mon corps entier pour ne pas bouger. Le son des fragments qui avaient quitté mes chairs avait été dérangeant, la douleur vive et forte avant de s’atténuer presque immédiatement. L'anesthésie par la souffrance. Je retombais en arrière, sentant le sang couleur sur mon flanc sans avoir la force de m'en préoccuper. Je retombais en arrière, assommé par la douleur mais toujours conscient. Je le sentais s'affairer à désinfecter, à éponger, à bander la blessure mais mon corps refusait de sentir la brûlure du produit ou la pression du bandage. Seulement le contact de ses mains, la chaleur de ses doigts. Mes yeux mi-clos je ne pouvais le quitter du regard pendant qu'il travaillait. J'en étais tout bonnement incapable et le silence qui régnait n'était brisé que par le son baissé au minimum de la télé encore allumée. La blessure était superficielle. Désinfectée et protégée par le bandage, elle n'était plus un problème. La douleur était supportable, même si de toute façon je n'avais pas tant le choix, et lorsqu'Alan avait enfin terminé de poser le large pansement je me redressais sur le canapé pour me rapprocher de lui, assis sur la table basse.

J'ignorais la douleur, la peau trouée qui tirait, et venais coller mes lèvres contre les siennes. Comme j'avais eu peur de ne plus jamais pouvoir faire ça... Je l'embrassais comme si c'était la dernière fois, ou la première fois. J'oubliais la douleur et la sensation du sang collant à mon visage. J'oubliais cette journée trop longuet. Pendant quelques secondes seulement, juste ça, je flottais en oubliant le monde autour avant de finalement rompre le contact. Mon front se posait contre le siens et je gardais les yeux fermés quelques instants encore, pinçant ma lèvre inférieure entre mes dents. - J'ai cru plus jamais pouvoir faire ça un jour...
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Le voir assis là sur mon canapé, ça a forcément quelque chose de profondément rassurant et je voudrais qu'il ne bouge plus ses fesses de là. Je voudrais qu'il me dise qu'on restera là indéfiniment, jusqu'à ce que ce merdier prenne fin. Jusqu'à ce qu'on se réveille. C'est ce que je voudrais mais je sais bien que le temps n'est plus aux rêves un peu stupide.

C'est peut-être pour ça que je pense d'abord qu'il doit être soigné avant de me laisser aller à quelque sentimentalisme. Alors que je récupère ce qu'il faut – et sans doute plus encore que nécessaire – j'essaie de ne pas penser à ce qui aurait pu arriver, j'essaie d'effacer les peurs qui guettaient comme des ombres. Mais je n'ai pas arrêté d'y croire, je ne voulais pas faire deux fois la même erreur et j'ai préféré faire confiance aveuglément dans la prudence et le bon sens, dans la force et la puissance de Kayden que de me rabâcher qu'on allait encore me convoquer pour prononcer ces mots.

C'était un réflexe, celui de lui proposer de l'alcool et puis, la plupart de nos mésententes ou de nos coups de gueule finissaient avec un verre, finissent comme ça. Peut-être que je lui demande mais je serai celui de nous deux qui a le plus besoin d'un verre. Je ne sors pas de verres, nous n'en sommes même plus là. J'attends qu'il ait bu une gorgée et ne peux m'empêcher d'observer les deux gouttes glisser contre son torse comme une sorte d'invitation involontaire. Je les regarde glisser doucement puis lève soudain les yeux sur lui, lui proposant quand même la solution médecine plutôt que la boucherie. La vérité c'est que je suis tellement nul pour m'occuper de moi que ça me semble assez inconcevable de m'occuper de quelqu'un d'autre. Après, je peux me dire que c'est comme retirer les plombs qu'un abruti de chasseur du coin avait foutu dans le flanc d'Albert... Kayden sera mon Albert du jour. Je ne vais peut-être pas lui dire, ça ne va pas le rassurer. Ni moi.

Ah, quand il cite les vétérinaires, je ne peux m'empêcher d'afficher un sourire en coin. Bon, j'aurai qu'à faire un bisou qui guérit tout après lui avoir accidentellement coupé un truc important, et voilà. Je prends la bouteille et en bois une rasade avant de faire une grimace. Je prends la pince, plein de bonne volonté. C'est moi ou c'est pas très lumineux quand même ? Quand il dit qu'il s'en occupe. Sérieusement, et comment ? Je fronce les sourcils et il attire une boîte qu'il me tend. « Je suis pas certain que ma boîte de sucres en morceaux puisse faire ça. » lui dis-je en agitant l'objet. Il me fixe... « Bah quoi ? » Et je n'ai pas de super aimant qui va arracher tout ce qui est enfoncé dans son corps donc l'idée, en plus d'être dangereuse, elle est pas un peu con... enfin impossible ?

Quand je veux, quand je veux... J'hésite entre lui donner des coups de boîte à sucres sur la tête ou véritablement l'approcher de sa blessure. Finalement, j'exécute sa requête étrange et vois les bouts de métal traverser la peau pour rejoindre le côté de la boîte. Quand le son métallique des fragments sur le métal s'achève, je réalise que je n'ai pas pris de quoi retenir le sang. Sur un réflexe débile – c'est vrai quoi, ma salle de bains est à quelques mètres – je retire mon t-shirt pour le coller contre le flanc de Kayden. Alors que je maintiens le tissu sur la plaie, j'ouvre le désinfectant et commence à m'occuper de la blessure. Il bouge beaucoup moins qu'Albert au moins. Entre deux, je lève les yeux sur lui puis lui souffle de bien respirer. Conseil stupide, mais je ne sais pas comment il pourrait gérer sa douleur autrement. Je n'ai absolument aucun médicament chez moi, et même si j'allais en chercher chez mon voisin, ils ne feraient rien à Kay.

Je passe le bandage autour de lui, serrant assez fort pour comprimer la blessure. J'attends de voir si le sang passe au travers et il me faut renouveler l'opération, avec un peu de gaze pour qu'enfin le rouge ne traverse plus le blanc du bandage. Je m'assieds et passe simplement mon avant-bras sur mon front, lui soufflant que ça devrait tenir. Je maintiens, elle était nulle son idée. Mais maintenant qu'il est là, en face de moi, et en un seul morceau, un sourire vient se glisser sur mon visage. Je pose une main sur son genou et il se penche vers moi. J'aime le contact de ses lèvres contre les miennes, de sa langue contre la mienne et mes doigts enserrent son genou. Il vient poser son front contre le mien et mes mains sales viennent glisser contre son cou, mes pouces caressant sa mâchoire. « J'ai cru plus jamais pouvoir faire ça un jour... » Ma main passe contre sa nuque et mon visage passe contre le sien, je me rapproche, me tenant sur le tout-bord de la table. « Je savais que tu reviendrais. » Bon d'accord, je ne suis pas un bisounours un peu idiot qui me dis que rien ne peut arriver, mais cette fois, cette fois... j'ai préféré garder espoir. Je ne les ai pas condamnés avant qu'ils ne reviennent.

Finalement, je me lève pour venir m'asseoir près de lui. Ma main se pose contre sa cuisse et j'amène son visage au mien, le temps de profiter à nouveau de ses lèvres. « Tu m'as... enfin, tu m'as manqué aussi honey. » Je regarde le bandage, machinalement. « Tu restes ici, n'est-ce pas ? » lui demandé-je, craignant qu'il soit contraint de repartir rapidement. « Je peux commander un truc à manger si tu veux. J'aimerais vraiment que tu restes. » Mes mains viennent à nouveau se caler contre ses joues. Je lui caresse le visage de gestes d'une douceur qui ne me ressemble pas, en général : « Et je t'en ai foutu partout... » avoué-je en abandonnant ses joues. Je me lève pour aller chercher de quoi le débarbouiller.
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« Je savais que tu reviendrais. » - Bien sur... - Bien sur que je serais revenu. Bien sur qu'il savait. Je sentais sa main sur ma nuque, gardais mon front contre le sien, son souffle rencontrant le mien. Il bougeait pour se lever et je me redressais pour l'observer s'asseoir avec moi, m'adossant plus confortablement avant qu'il ne m'embrasse, encore, sans jamais me lasser. - « Tu restes ici, n'est-ce pas ? » - J'esquissais un sourire fané par la douleur. - J'ai pas prévu de repartir en tout cas. - Je sentais ses mains sur mon visage et fermais presque les yeux alors qu'il proposait de commander de quoi manger. - Si tu ve... - « Et je t'en ai foutu partout... » - Je le sentais se lever et ouvrais les yeux pour le voir se diriger vers la salle de bain. Que croyait-il? Que j'étais en sucre? J'oubliais qu'il ne m'avait jamais connu comme un combattant, comme ce que j'étais là, devant lui. Il l'avait su sans le voir, sans que je ne le montre, mais j'étais bien forcé désormais de le lui imposer. D'une façon ou d'une autre. J'attrapais son t-shirt de toute façon déjà souillé pour essuyer les traces de mon visage humidifié par la transpiration due à la douleur et je me levais en grognant.

Le t-shirt me glissait de la main une fois debout et je faisais quelques pas vers la salle de bain, vers sa silhouette qui en sortait avec une serviette humide à la main. Il n'aurait pas le temps de l'utiliser. Mes mains se posaient sans douceur sur son torse et je le poussais contre le mur, plaquant mon bassin contre le sien avant d'emprisonner ses lèvres. J'ignorais la douleur, la brûlure cuisante des tissus meurtris et déchirés. J'ignorais la sensation désagréable du bandage sur ma peau humide ou la quantité de muscles courbaturés qui vrillaient mon corps. Je l'embrassais seulement, avec passion, avec une certaine forme d'animosité. Une animosité due à la frustration. Au manque. Au besoin. Comme ce soir là. Ce premier soir. Je le piégeais contre le mur, laissais mon bassin l'animer, mes lèvres l'arpenter et déviais doucement mais surement vers sa mâchoire et sa gorge. Embrassant. Mordillant. Je forçais sa tête en arrière d'une main dans ses cheveux pour mieux explorer les angles et mystères de son cou, mes lèvres glissant sur sa peau, mon autre main contre ses reins. Mon bassin comme fusionnant avec le sien, mouvant comme je savais si bien le faire. Piège torride témoin d'une ardeur enivrante étouffée par la fuite et la traque.

Mes mains se réunissaient sur ses reins pour descendre sous son pantalon et venir prendre possession de ses fesses, mes lèvres descendant un peu plus bas pour s'attarder sur son torse et plus je me baissais, plus mes mains forçaient le pantalon à descendre lui aussi mais lorsque mes lèvres embrassaient son nombril, avant de pouvoir descendre plus bas encore, la douleur vrillait mes sens et je me tétanisais une seconde. Une longue seconde. La position était trop inconfortable pour ma blessure et mes chairs me le faisaient savoir. Pressé, impatient, maladroit, j'en avais oublié mon état et ce rappel à l'ordre était trop vif pour être apprécié. Je reculais de quelques pas le temps que la douleur passe, tombant lourdement sur le canapé avant de lever mon regard sur lui, la respiration saccadée. La douleur était devenue un quotidien impossible à repousser, j'allais devoir m'y faire. J'avais mal. J'avais faim. J'avais soif. Mais tout ce que mon corps désirait, tout ce que mon regard dévorait, c'était ce qui se trouvait juste là. Lui. Une nécessité.

[EDIT]

Je le voyais, habité de cette même chaleur, le visage rougit dans la pénombre de l'appartement éclairé par l'écran de télévision, le pantalon aux chevilles. Et si la scène aurait pu être comique, je n'avais d'yeux que pour les siens. La douleur demeurait mais cette vision m'aidait à l'ignorer, à la reléguer au second plan car mon plan à moi était tellement plus intéressant. Mon plan se déroulait sous mes yeux comme s'il lisait dans mes pensées. Il retirait son t-shirt, laissait glisser son pantalon, abandonnait toute pudeur s'il en avait jamais eu et se dirigeait vers moi, moi l'immobile, moi l'attendant, moi prêt à le recevoir lorsqu'il s'installait sur moi, les jambes de part et d'autres de mon bassin, pour venir m'embrasser. Embrasser mes lèvres, embrasser mes joues, longer ma mâchoire et ma gorge. Sentir le sang pulser en moi le long de mon cou et à travers mon pantalon. Sentir le frottement de son corps contre le mien, rendant mes vêtements plus douloureux au fil des secondes, jusqu'au point brûlant où je faisais appel à mes pouvoirs pour faire sauter ma ceinture, déboutonner chaque point de métal. Me libérer d'une couche pour mieux l'étreindre et le rejoindre. Lui faciliter la tâche alors qu'il était celui qui descendait désormais, celui qui lançait les festivités et qui me tirer le premier gémissement soufflé entre mes lèvres.

Le premier d'une longue lignée qu'il compléterait lui-même. Le premier d'une nuit que j'avais attendu trop longtemps. Que je savourais sans retenue car elle ne durerait qu'une nuit et la réalité nous rattraperait bien assez toi pour ne pas en profiter.
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