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Declarative: rhetorical response > WHAT HAS HAPPENED TO ME?


Les hommes étaient cruels. Je m'en rendais compte maintenant. Pietro et Wanda m'avaient épargné la dure réalité de la vie et de la nature humaine en ne m'offrant que compréhension, affection et amour. Parmi les Avengers aussi, je n'avais été qu'admiré et choyé et apprécié; je le sentais, dans leurs regards et leurs sourires, cette satisfaction heureuse et simple de me voir avec eux et non contre eux. Évidemment, ça avait beaucoup évolué après cela. J'avais noué avec le dieu d'Asgard Thor de véritables liens d'amitié. Clinton Barton était un homme bien, toujours sympathique quoiqu'un peu maladroit. Le docteur Banner avait une conversation passionnante et Tony était Tony — mon père et mon repère et mon roc et mon modèle. Je n'avais ressenti que bienveillance et affection parmi eux.
Là, dans le vrai monde, même si je déteste cette expression, tout est différent. Au début, ce n'est jamais de la peur, dans leurs regards. Jamais. C'est toujours quelque chose de différent et de plus étrange: une curiosité surprise et incompréhensible, alors qu'ils tendent la main, alors que les plus âgés reculent sans pouvoir détacher leurs regards de mon corps, alors que les plus jeunes me demandent, débordant d'une innocence que j'ai moi-même perdu après deux ans d'existence: “ qu'es-tu? ” Que suis-je? “ Je suis un synthézoïde anthropomorphique nommé Vision. C'est quoi, un synthozéïde anthromor- anthropo- anthrophique? C'est un robot. ” Au final, je ne suis qu'un robot. Un robot avec un circuit électrique et des composants et des commandes et des systèmes. Je ne suis qu'un robot avec des données, des fichiers, des dossiers; rien de plus, rien de moins. Je suis une carcasse vide dénuée d'âme et de sentiments, de ressentis, d'émotions. Le docteur Cho est une femme impressionnante, mais même elle n'a pas pu créer la vie.
Il y a la curiosité, donc. Puis, il y a la peur.
Au début, je ne faisais que la regarder depuis l'écran que les hommes appellent télé. Un écran. Une protection et un bouclier contre la dure réalité des nouveautés et de la vie. J'observais des manifestations et des soulèvements et des horreurs. On y parlait de mutants et de martyrs, de dieux ancestraux et de rois aquatiques. On y parlait de Cause, d'idéologies archaïques, de peur sociétale. Je voyais des discours de haine, jamais d'amour. Des discours issus de la peur et de l'incompréhension d'une monde confronté à un autre plus fort que lui. Wanda n'avait pas peur. Elle n'utilisait presque plus ses pouvoirs et puis... elle était en sécurité avec moi et Pietro, disait-elle en souriant. Je sais qu'elle est en sécurité avec Pietro. Je ne me fais pas de souci pour elle. Je ne pense pas à elle.
Cet écran de télévision me protégeait. Je voyais la violence mais elle n'avait aucun sens pour moi.
Je la comprends maintenant.

Les hommes en jaune m'ont pris par surprise.

J'avais lu que Detroit était une ville pauvre et en ruines et je m'y étais rendu pour... aider, j'imagine. Faire de mon mieux et faire ce que les héros font de mieux: aider autrui. Les habitants de la ville s'étaient regroupés à la base de l'entrepôt et m'avaient regardé faire sans un mot, me pointant du doigt, chuchotant les uns aux autres. Je soudais avec des rayons d'énergie des barres métalliques, soulevaient des gravats de mille fois mon poids comme s'ils ne pesaient pas plus lourds qu'une plume. Je devais m'assurer que la construction en s'effondre pas en attendant la suite des matériaux.
L'attroupement m'avait rendu curieux. J'étais descendu parmi eux pour les observer de plus près, et répondre à leurs questions. Toujours les mêmes. Qui êtes vous? Qu'êtes vous? D'où venez-vous? Que nous voulez vous? Que faites-vous? Pourquoi? Pourquoi? Je ne suis pas un qui. Je suis un synthézoïde anthropomorphique appelé Vision. Je viens de New York City, New York. JE veux vous aider. Je répare cet entrepôt. Parce que. Parce que.
Et après la curiosité, la peur et avec la peur la colère et avec la colère la violence. Ils essayèrent de me toucher, de me battre, de m'envoyer des pierres. Mais j'étais immatériel et intangible, un mirage plus qu'un robot. Leurs poings et leurs armes me passaient à travers sans mal. Jusqu'à ce qu'un homme soit jeté à mes pieds; je l'avais aidé à se relever, me rendant tangible le temps d'un instant, pour m'assurer qu'ils soient stables et-
l'instant suivant je me réveillais autre part et-
une nouvelle phase d'oubli et d'inconscience et-
la douleur.

La douleur était une sensation étrange. Je ne pensais pas pouvoir la ressentir: après tout, je ne ressentais rien, au sens émotionnel mais aussi physique du terme. Mais la douleur, chez moi, se traduisait par le manque. Le manque d'informations et de compréhension. Mon esprit, ma mémoire, mes souvenirs — un manque. Un manque. Qui étais-je? Et que faisais-je ici? Il n'y avait qu'une seule chose que je savais et que je connaissais, et c'était la douleur.
Les hommes en jaune m'avaient retiré mon processeur général, confectionné par Tony Stark, qui aidaient mes pensées (oserais-je utiliser le terme? Non, disons plutôt: ondes magiques et magnétiques provoquées par la Pierre de l'Infini encastrée dans mon front) organiques à prendre une forme logique et factuelle. Ce processeur m'aidait. La Pierre seule me rendait fou. La Pierre de l'Esprit était une chose terrible. Une chose énorme et horrible et incroyable qui me donnait des pouvoirs insoupçonnés quand elle était seule, quand elle régissait le moindre de mes gestes. La Pierre de l'Esprit...
Je suis faible et je souffre. Mon corps ne me répond plus. Il n'existe que ce Pierre dans mon monde, qui luit en projetant sur les murs de ma cellule sa lumière jaune. Le plein potentiel de la Pierre se libère et me libère, et moi je projette ma forme astrale sur la Terre et ailleurs, pour oublier mon corps brisé et douloureux.
Peut-être aurais-je dû garder le conseil de Tony et rester à la maison.

Qui est Tony?

Je suis ramené à ma carcasse brisée quand on me secoue brusquement. Je le sens. Je le sens. Je sens.
Un homme me fait face. Je ne l'ai jamais vu avant. C'est le premier homme que je vois. J'ai envie de tendre la main pour le toucher mais je ne peux pas: mon corps ne me répond plus. Il n'y a que la Pierre qui luit et qui brille, baigne le visage de l'homme d'une lueur jaune. Non. Pas un homme. Pas tout à fait. Trop jeune. “ Qui es-tu et que me veux-tu? ” Je ne m'en rends pas compte mais ma voix est plus robotique, plus métallique et grave que jamais. Comme si le processeur avait été mon humanité depuis tout ce temps.
À moins que je me sois séparé d'autre chose. Autre chose qui aurait été mon humanité.
Mais ça, je ne m'en souviens pas.
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Billy Kaplan
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vision & billy

Quand il reçoit l’alerte d’Overwatch accompagnée d’un extrait de vidéo surveillance lui montrant Vision visiblement inconscient traîné par des types de l’AIM, le cœur de Billy manque un battement. Il ne comprend pas. Que fait son père à Detroit ? Pourquoi est-il seul là-bas ? Ça fait longtemps qu’il n’a pas observé ses parents et son oncle. Trop pris par les Young Avengers, par ses recherches, alors il ne comprend pas. Il reste planté là un moment, les yeux ronds, la main qui tient son téléphone tremblante. Ce n’est que lorsque Doreen agite sa main devant ses yeux qu’il réalise qu’on était en train de lui parler et qu’il n’a rien écouté. Wiccan relève la tête et croise les regards des autres. « Je-- » commence-t-il d’une voix rauque. Il déglutit, secoue la tête. « Je dois y aller, » déclare-t-il. Il se relève sous les sourcils froncés des autres. « Je dois y aller, » répète-t-il. Il pourrait leur demander de l’accompagner, ce serait probablement plus sûr. Mais il peut largement s’occuper de quelques hommes de l’AIM et surtout, il ne veut pas que les Young Avengers rencontrent Vision.
Ce n’est pas qu’il a honte d’eux, ou de son père. Jamais. Mais il est cet unique petit bout de famille que Billy a pu récupérer et il veut le préserver. Le garder pour lui, en espérant que plus jamais on ne vienne lui arracher cela. Alors Wiccan sort de la pièce et d’un geste de la main, ses vêtements normaux sont remplacés par sa tenue et sa cape rouge. Seul, il se met à réciter son mantra et quand il ouvre les yeux, il n’est plus au QG des Young Avengers, mais au beau milieu d’un entrepôt de l’AIM. Les employés se tournent tous vers lui quand ils remarquent enfin sa présence mais Billy ne leur laisse pas le temps de poser la moindre question. Le bout de ses doigts crépite, ses yeux deviennent bleus et d’un geste de la main, il les renverse tous dans une onde de choc brutale. Peut-être un peu trop. Mais il ne pense pas à leur bien-être, il s’en fiche complètement.

On lui a enlevé son père.

C’est plus fort que lui, il revoit son père démembré, la Pierre brisée, le rendant irréparable. Mort. Ça ne peut pas arriver à nouveau, il ne le permettra pas. Alors peut-être qu’il y va trop fort, mais il est incapable de conserver son calme. Une fois qu’il s’est débarrassé d’eux, il n’attend pas avant de dévaler les escaliers, traverser les couloirs. La Pierre de l’Esprit laisse une trace magique qu’il a appris à reconnaître et à suivre très tôt. Il a l’impression qu’elle l’appelle, qu’elle le guide jusqu’à son père. Il se débarrasse des derniers gardes qui se tiennent devant une porte et l’ouvre d’un geste avant d’entrer. Il est là. Etendu sur une chaise munie de différents capteurs, cette vue arrache une grimace et un grondement à Billy. Le scientifique qui s’avance vers lui en poussant un cri est immédiatement envoyé contre le mur le plus proche. Son crâne entre en contact avec le béton un peu trop fort, il se retrouve étendu au sol, inconscient, mais Billy ne le regarde déjà plus.
Il ne fixe que Vision, la gorge nouée, le cœur battant si fort dans sa poitrine que c’en est douloureux. Alors il s’avance et d’un geste de la main, arrache les différents capteurs reliés aux machines de l’AIM. Il ne bouge pas et Wiccan fronce les sourcils. Il ne peut pas réellement être inconscient, déconnecté oui, mais son père ne dort pas. Mais la Pierre émet des ondes magiques qu’il finit par reconnaître, il ne bouge pas parce qu’il n’est pas vraiment là.

Billy saisit une épaule de Vision et le secoue légèrement, de son autre main s’échappe une lueur bleue qui effleure la Pierre, rappelle son père jusqu’à lui. Enfin, il ouvre les yeux et Wiccan lâche un soupir tremblant de soulagement. « QUI ES-TU ET QUE ME VEUX-TU? » demande-t-il et le jeune homme écarquille les yeux. Il ne le reconnaît pas, pourquoi ? Il ne s’est pas trompé, quand il lui a retiré ses souvenirs, il a seulement effacé ceux qui lui en montraient trop sur l’avenir possible de ce monde, il ne s’est pas effacé lui, il le sait. Mais sa voix… Sa voix est étrange. Sa voix n’est pas vraiment sa voix. Il connaît et déteste cette voix, c’est celle du Vision qui n’a plus de souvenirs, du Vision qui n’est plus son père. Il l’a entendue une fois et la seule chose qui est pire que d’entendre son père parler ainsi, c’est voir sa mère tuer tous ceux qu’il aime. Sa main serre l’épaule de l’androïde et il plonge son regard dans le sien. « C’est William, » dit-il d’une voix rauque. Son père ne l’a jamais appelé Billy, ce surnom le rend confus, il n’a jamais vraiment réussi à faire le lien entre William et Billy, c’est une habitude humaine qui le dépasse. « Qu’est-ce qu’ils ont fait ? J’ai besoin de savoir, qu’est-ce qu’ils ont fait ? » poursuit-il et il est incapable de ne pas avoir l’air paniqué. « Pa—Vision, qu’est-ce qu’ils ont pris ? » insiste-t-il, pressant.
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Declarative: rhetorical response > WHAT HAS HAPPENED TO ME?


J'observe les alentours, en écoutant distraitement sa réponse. Je remarque qu'il n'a pas lâché mon épaule. Il y a... quelque chose à propos de cet enfant. C'est un enfant, n'est-ce pas? Il ressemble à l'idée que je me fais d'un enfant. Mes yeux tombent sur le corps inconscient qui git au sol, tout habillé de jaune. Oui, définitivement, il y a quelque chose de différent chez « C’est William. » William. Je tourne à nouveau mon regard dans le sien. Il m'observe avec prudence et avidité, et une sorte d'incompréhension, et je lui renvoie un regard froid et détaché. Le nom doit-il m'évoquer quelque chose? William. Guillaume. Wil. Help. Volonté et casque. William, Will, Willy, Willie, Bill, Billy, Billie, Bee.
« Qu’est-ce qu’ils ont fait ? J’ai besoin de savoir, qu’est-ce qu’ils ont fait ? » Il est... apeuré. Non. Ce n'est pas exactement cela: il est inquiet et paniqué brusquement, son rythme cardiaque s'accélère, les mots s'entrelacent trop vite sur le bout de sa langue. Il me regarde toujours droit dans les yeux, il a ses doigts qui s'enfoncent dans mon épaule. « Pa—Vision, qu’est-ce qu’ils ont pris ? » Pa? Je ne lui ai pas dit mon nom. Il me connait d'avant. “ Le processeur, ” je dis simplement. Mes yeux balaient à nouveau les environs. Mes bras... j'ai envie de les lever, de bouger, de m'en aller mais c'est si dur, ça fait si mal... je suis si faible. Le manque d'énergie et de compréhension me fait du mal. Toutes les données s'impriment en moi, sans queue ni tête, dans tous les sens: mes ressentis, ce que je vois, ce que je comprends... mais rien ne reste, tout s'évade. Je dois regarder William toutes les trois secondes pour me souvenir de sa présence; sinon, la Pierre de l'Esprit m'envoie aux limites de l'inconscience, me rappellent toutes les choses qui se trouvent visuellement et sensoriellement autour de moi.
C'est une impression étrange. Lentement, je parviens à bouger: je baisse la tête et en même temps, je tourne le bras jusqu'à ce que ma paume soit tournée vers le plafond. Je déplie lentement les doigts, observe le tremblement dans mes phalanges, le dénouement des articulations. Il y a toute une histoire à écrire dans une main qui s'ouvre. Mais je serai bien incapable de la comprendre, cette histoire. “ William. ” Je lève le regard vers lui. “ J'ai besoin du processeur. ” Son visage... me rappelle quelque chose. Quelqu'un. Des pensées effleurent la limite de mon esprit mais sont repoussées brutalement, brusquement, douloureusement. Je ne m'en m'émeus pas. Je sais que la Pierre agit selon son bon vouloir; peut-être ces pensées sont-elles désagréables ou alors ne sont pas utiles à ce que Nous devons accomplir ici et maintenant, avec William. “ La Pierre, elle- - ” est trop puissante. Je ne peux pas m'en occuper seul, je comprends brusquement. Helen Cho m'a donné un corps et ULTRON m'a donné une âme. Mais à quel prix? Tony Stark m'a donné le moyen de trier tout cela. Les émotions et les pensées et les données. Mais à quel prix?
Et qui sont ces gens? Pourquoi est-ce que je peux invoquer leurs noms mais pas leurs visages? Peut-être que leurs visages ne sont pas importants. Peut-être que je n'ai pas besoin de Tony Stark, finalement. Peut-être... peut-être que Nous pouvons être seuls, Vision et la Pierre, seuls. Nous sommes si puissants, ainsi... le processeur... triait trop... muselait nos capacités... regarde où il nous a menés. “ Billy. Le processeur, ” je lâche finalement, mes yeux déjà dans le lointain alors que je sens lentement ma conscience se détacher de mon corps, mon corps astral déjà repartir explorer d'autres contrées.
La douleur revient mais cette fois, ce n'est pas du manque. C'est une douleur honnête et franche, celle que je n'ai jamais compris jusqu'à maintenant. Comme un chalumeau qu'on allume derrière mes yeux, comme des millions d'aiguille qu'on enfonce sur mon épiderme en mode sensible, comme un feu grec dans ma carcasse.Je suis trop faible, je ne peux pas je ne peux pas je ne peux pas gérer tout cela, tout ce pouvoir, toutes ces informations, toutes ces émotions, toute cette âme, tout cet esprit sans le processeur. Et lentement, la Pierre... me consume.
Alors je hurle de douleur, plus fort que j'aurais jamais pensé pouvoir le faire.
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vision & billy

Il ne peut pas perdre son père, pas encore, pas dans ce monde aussi. Il sait que ce n’est pas vraiment lui, que ce n’est pas le Vision qui l’a élevé, entraîné, qui a pris soin de lui et lui a appris tant de choses. Il sait que ce n’est pas celui qui a appris à devenir plus humain que machine aux côtés de Wanda et de ses deux enfants. Il a conscience qu’il n’est pas celui qui le prenait sur ses genoux pour lui raconter des histoires en faisant toutes les voix à la perfection. Mais il a beau savoir qu’il n’est pas vraiment cet être-là, il reste son père, peu importe les dimensions, peu importe les souvenirs. Tous les Vision de tous les univers sont son père et rien ne changera jamais cela. Et Billy a juré qu’il ne perdrait plus jamais un autre parent, que ce soit son père, sa mère, son frère, son grand-père, il fera tout pour ne plus jamais avoir à poser le regard sur leur cadavre. Ils ne sont pas exactement sa famille, parce qu’ils n’ont pas les souvenirs des autres, ils n’ont aucune idée de l’amour qu’ils se portaient tous, mais ils restent ceux qu’il aime le plus dans tous les univers confondus. « LE PROCESSEUR, » dit-il alors et Wiccan cligne des yeux plusieurs fois, hébété. « William. J’ai besoin du processeur. » Alors ça fait tilt et l’horreur se dessine sur les traits du brun. Ils ont osé. Le sangler à cette table et le décortiquer, le mettre en pièces comme on le ferait d’une vulgaire machine. Vision n’est pas une machine. Son père n’a jamais été une machine. Il est cette entité extraordinaire et foncièrement bonne, cet être vivant bien supérieur à tous les hommes qui a pourtant choisi de les protéger et de les défendre, même lorsqu’ils se montrent cruels. Il est celui qui ne comprend pas toujours l’humanité, mais qui ne la juge pas pour autant. Celui qui pourrait tous les balayer sans efforts, mais qui n’a jamais eu la cruauté d’agir ainsi, même lorsque tout aurait pu justifier un tel acte.
Et ils ont osé le traiter comme un bout de métal, un amas de puces et de circuits. « La pierre, elle-- » Oui, bien sûr qu’il ne peut pas gérer une telle puissance sans son processeur, bien sûr qu’il n’arrive pas à se contrôler ni à se souvenir. Bien malgré lui, le bout de ses doigts crépite et ses yeux prennent cette lueur bleue qui n’augure rien de bon. Il y a le bleu qui hypnotise, parce qu’il est presque apaisant, ce bleu qui l’englobe lorsque Billy fait quelque chose de bien, quand il soigne quelqu’un, quand il veut aider. Il y a le bleu profond, chancelant, fragile, quand il est triste, confus, quand il ne sait plus trop ce qui est bien ou mal. Il y a tout un tas de bleus, qui dépendant de ce qu’il éprouve, de ce qu’il cherche à faire. Et puis il y a ce bleu électrique, les éclairs qui craquent et qui font dresser les cheveux et les poils, ce bleu qui signifie que Billy est fou de rage, qu’il a envie de tout détruire sur son chemin, de faire payer à ceux qui ont osé s’en prendre aux siens, qu’il— « BILLY. LE PROCESSEUR, » La redescente est brutale, douloureuse, il cligne des yeux, son regard se pose à nouveau sur les traits familiers de son père et les étincelles semblent presque honteuses.

Le hurlement de douleur lui perce les tympans, le cœur, l’âme. Billy jure, lève les mains et ferme les yeux, il tente de se concentrer mais c’est dur quand son père souffre ainsi. Il redouble d’efforts et la litanie s’élève, tente de couvrir les hurlements, tandis qu’il cherche désespérément le processeur.
Jeveuxleprocesseurdepapa.
Jeveuxleprocesseurdepapa.
Jeveuxleprocesseurdepapa.

Lorsqu’enfin, il apparaît sous ses yeux, le jeune homme n’attend pas avant d’agiter un peu plus les mains, pour qu’il aille retrouver sa place, reprendre le contrôle, apaiser la souffrance. Le cri cesse et il reste planté là, le cœur battant la chamade, douloureux, ses yeux guettent le visage de son père à la recherche de la moindre trace de souffrance, d’une erreur qu’il aurait pu commettre, en espérant qu’ils n’aient rien fait au processeur, rien endommagé.
Finalement les yeux s’ouvrent, les pupilles tournent, encore et encore, recalibrage. Pendant ce temps-là, Billy a peur. Peur qu’ils aient effacé ce qui compte le plus, peur qu’il ne se souvienne pas de qui il est vraiment, peur qu’il soit trop tard et que la pierre ait déjà pris le contrôle. Alors c’est plus fort que lui, il s’approche, s’empare de sa main entre ses doigts tremblants, pose les autres sur sa joue. « Papa ? » Une voix lui rappelle que ce n’est pas vraiment lui, mais il l’ignore. Il s’en fiche, il s’en fiche complètement, lui tout ce qu’il veut, c’est l’entendre l’appeler par son prénom, c’est voir dans son regard qu’il se souvient de lui.

(Ce qu’il veut vraiment, c’est qu’il l’appelle Mon fils, qu’il fasse courir ses doigts dans ses cheveux, qu’il le serre dans ses bras et lui dise qu’il est fier de lui et qu’il l’aime. Ce qu’il veut vraiment, c’est qu’il lui dise quoi faire et comment le faire, qu’il lui assure que tout ira bien et qu’il fait ce qu’il faut. Ce qu’il veut, c’est que son père lui promette qu’il ne finira pas comme le Billy de l’univers de Tommy, qu’il n’a pas ça en lui, qu’il ne pourrait jamais faire de mal à qui que ce soit. Ce qu’il veut, c’est qu’il lui promette qu’il veillera sur Maman pour qu’elle ne perde jamais son sourire. Ce qu’il veut, c’est son Papa.)

« C’est toi ? » qu’il murmure, la voix chevrotante. « S’il te plaît, dis-moi que c’est bien toi, » insiste-t-il. Ses doigts serrent ceux de Vision, un peu trop fort sûrement, mais il ne peut pas se résoudre à le lâcher, il ne peut pas se résoudre à imaginer qu’il l’a perdu, lui aussi.
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Soudainement- des milliers d'informations.
Tony Stark. William. Detroit. Wanda. Thomas. Pietro. Vision. Vision. Vision. SYNCHRONISATION — 05% m'indique le processeur grâce à William, et les milliers d'informations se trient d'elles-mêmes. Il va falloir que je fasse quelque chose, je réfléchis alors que le pourcentage de synchronisation augmente, parce que j'ai définitivement trop d'informations... et je peux, apparemment, ne pas vivre sans ce processeur. Et si je suis avec, alors je ne peux pas utiliser les pouvoirs de la pierre, en tout cas, pas au maximum de ses capacités. William a ses doigts contre les miens, entre les miens, et les serrent fort, très fort. C'est une preuve de compassion et d'affection, je le sais. Et bizarrement, je suis content qu'il soit là, qu'il me tienne, parce que j'ai l'impression que je pourrais exploser en mille milliards de morceaux si il me lâchait. Est-ce la douleur? Est-elle toujours ainsi? C'est tout bonnement horrible, je déteste ça. La douleur devrait être bannie de l'existence entière. « Papa ? » SYNCHRONISATION — 55%; mais je sais qui est William, Billy. Mon fils... mon fils d'une autre dimension. Le pourcentage s'élève rapidement, maintenant, et très vite, on m'indique que tout a été retéléchargé et que tout est synchronisé; je reçois même une notification de l'OVERWATCH qui me félicite d'être retourné en ligne. J'en rirai presque si j'avais de la place pour de l'humour parmi ces milliards de données. « C’est toi ? » Je tourne la tête vers lui. Il a les yeux humides, comme si il était sur le point de pleurer. Peut-être qu'il allait effectivement pleurer. Ça ne doit pas être très drôle de voir son père mourir une seconde fois. « S’il te plaît, dis-moi que c’est bien toi. » Je lui adresse un tout petit sourire, un doux petit sourire, en serrant un peu ses doigts. “ C'est moi, Billy, ” je dis lentement, parce que quand bien même je n'aime pas trop l'appeler Billy parce que je trouve ça stupide, je sais qu'il préfère se faire appeler comme ça. Je l'attire à moi le plus naturellement du monde et le serre contre mon torse, avant même d'avoir réfléchi pour arrêter mon geste.

C'est nouveau ça. Ce besoin de toucher l'autre, de lui montrer ma reconnaissance et mon affection, en une étreinte. C'est nouveau. Et ça me rassure, aussi, que mon fils réponde à mon étreinte et mon affection, qu'il enfouisse son nez contre mon épaule. Je me demande ce que ça fait, d'être aimé comme ça, tous les jours, tout le temps. D'avoir une fille, une femme, une fille et un fils. Un chien aussi, peut-être. Et une jolie maison.
Finalement je me détache, pour l'observer, les yeux dans les yeux, le tenant à bout de bras. “ Tu m'as sauvé la vie, William. Merci. J'ai sous-estimé le pouvoir de la Pierre, ” je fronce un peu les sourcils, tic nerveux humain, un peu malgré moi. “ J'ai ressenti... de la douleur. Étrange. ” Je le lâche pour regarder mes mains. Elles ne tremblent plus, les doigts se plient et se déplient sans mal, et j'observe mes poings se fermer, la tension augmenter dans mes paumes. “ Je me sens différent. Je crois que la Pierre... a changé quelque chose en moi.
Ou peut-être, m'a donné quelque chose. Quelque chose qui me donne envie d'en savoir plus, d'en voir plus. Peut-être que si j'enlevais le processeur... alors on ne serait plus qu'un, les plus puissants... peut-être que sans le processeur je pourrais-- “ J'ai beaucoup de travail à faire, ” je dis en relevant le regard vers William, puis en inspectant la pièce dans laquelle nous nous trouvons. “ J'alerte les autorités. Nous ferions mieux de partir loin d'ici, William, avant que quelqu'un n'arrive. ” Je lui adresse un petit sourire encourageant, rassurant. “ Dis-moi, par hasard... possèdes-tu toujours l'éclat de Pierre de ton père?
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« C’est moi, Billy, » dit-il enfin avec ce mince sourire qu’il reconnaît et un hoquet lui échappe quand les bras de son père l’entourent pour le ramener contre lui. Billy s’accroche à son cou, enfouit son visage dans le creux de son épaule et il voudrait ne pas encore pleurer comme il ne cesse de le faire à chaque fois qu’ils se voient mais—il avait besoin de ça, il a toujours besoin de ça. Depuis la mort de son père, il ne cesse de se répéter qu’il a vingt-cinq ans, qu’il est un adulte et que beaucoup de gens vivent sans leurs parents en étant beaucoup plus jeune que lui. Il se répète qu’il est grand et qu’il peut prendre ses décisions tout seul, qu’il peut le faire sans les conseils avisés de Vision. Il se répète qu’il n’a pas besoin de son père pour avancer mais c’est un horrible mensonge. Qu’importe qu’il ait cinq, quinze ou vingt-cinq ans, il aura toujours besoin de son père. Il l’a perdu une fois et c’était horrible, il ne le perdra à nouveau, c’est hors de question, il ne le supportera pas.
Lorsqu’il se détache, Billy a la gorge nouée et les yeux rougis. Il se mordille la lèvre inférieure, refusant d’admettre et de montrer que l’étreinte était trop courte à son goût, qu’il voudrait qu’il ne le lâche plus jamais parce que—

J’ai peur, papa.

Les mots restent bloqués dans sa gorge. « Tu m’as sauvé la vie, William. Merci. » Il n’a pas échoué alors, cette fois. « J’ai sous-estimé le pouvoir de la pierre. » Comme tout le monde. « J’ai ressenti… de la douleur. Étrange. » Wiccan penche la tête sur le côté. Il oublie à quel point ce Vision là est jeune, qu’il ignore encore tant de choses, qu’il est incroyablement sage et en même temps… en même temps d’une immaturité déconcertante. Il a oublié encore une fois, que ce Vision n’est pas réellement son père.

Mais c’est tout ce qui lui reste.

« Je me sens différent. Je crois que la pierre… a changé quelque chose en moi. » A cela, Billy fronce les sourcils. « Comment ça ? » demande-t-il, les lèvres un peu pincées. Il s’est toujours méfié de la pierre, parce que son père lui-même s’en méfiait. Il ne sait pas pourquoi, mais Vision était la pierre mais faisait tout pour ne pas l’être entièrement, il l’acceptait mais en avait peur en même temps. C’était étrange et son père ne lui en a jamais trop dit, mais naturellement, Billy se méfie lui aussi. « J’ai beaucoup de travail à faire. » De travail ? « J’alerte les autorités, nous ferions mieux de partir loin d’ici, William. Avant que quelqu’un n’arrive. » Le jeune homme hoche la tête. « Dis-moi, par hasard… possèdes-tu toujours l’éclat de pierre de ton père ? » demande-t-il alors et Wiccan se fige.
Il est probablement encore perturbé par ce qui vient d’arriver, ce n’est pas le genre de Vision d’oublier des choses. Délicatement, Billy lui attrape la main, et lui montre sa paume rouge, où un très faible éclat jaune peut être aperçu. « Tu l’as absorbé en le touchant, tu te rappelles ? » demande-t-il, les sourcils froncés par l’inquiétude.

Il a des questions, plein de choses à dire, mais Vision a raison, ils doivent sortir d’ici. Alors il garde sa main dans la sienne et ses yeux prennent leur lueur bleue habituelle. La seconde d’après, ils ont quitté le sous-sol de l’entrepôt et se retrouvent un peu à l’extérieur de Détroit, à côté d’un Dinner.  « Qu’est-ce que tu—qu’est-ce que tu entends, par beaucoup de travail ? » demande-t-il alors. « Tu ne rentres pas à New-York ? » Ses sourcils se froncent. « Maman—Wanda sait que tu es là ? » s’inquiète-t-il alors.
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« Tu l’as absorbé en le touchant, tu te rappelles ? »
Pendant un instant, je ne dis rien, suis le regard de William pour observer ma main. La peau est rouge mais, au centre de ma paume, il y a cette petite tâche jaune vif, similaire à la pierre incrustée dans mon fond. Il a raison, je l'ai absorbée, comme si elle m'avait toujours appartenue. Il y a pourtant quelque chose d'étrange, je sens quelque chose d'étrange. Comme si cette pierre, qui n'est pas la mienne dans cette dimension actuelle, me cachait quelque chose. Des évènements passés, ou à venir, capitaux. Je ne sais pas pourquoi, ni comment, et le processeur tourne, tourne, tourne dans le vide. “ Bien entendu, ” je dis simplement, parce qu'un androïde n'oublie rien, et je ne veux pas que William s'inquiète. “ Ne t'inquiète pas, ” je rajoute, avec suffisamment de chaleur pour que, pendant un instant, ses traits se détendent; quand ils se froncent de nouveau, c'est en invoquant sa magie et pour nous emmener en dehors de l'entrepôt. Je suis soulagé d'être sous le soleil, d'être dehors, même si c'est pour être confronté au regard d'une humanité qui ne veut pas des gens comme moi, ou comme William.
Je le lâche quand nous arrivons, gardant toujours mes bras levés et levant ensuite le visage, observant le ciel, un avion qui le pourfend au loin. J'aimerais pouvoir modifier mon apparence pour me fondre dans la foule mais heureusement, il n'y a personne pour l'instant. Je ne sais pas si je me complais dans ma différence ou si j'ai envie de m'intégrer; je ne comprends pas pourquoi ces deux concepts me semblent impossibles à relier ensemble.
« Qu’est-ce que tu—qu’est-ce que tu entends, par beaucoup de travail ? »
Tellement, tellement de travail, ” je dis, sans savoir si c'est la Pierre qui parle ou moi-même.

Je souris d'un vrai sourire, pourtant. « Tu ne rentres pas à New-York ? Maman—Wanda sait que tu es là ? » Je lève lentement le bras pour poser ma main sur son épaule, la serrant très légèrement, pour le rassurer. Je ne suis pas son mère et Wanda n'est pas sa mère, quand comprendra-t-il cela? Mais pauvre William, il a tout perdu et il a l'impression d'avoir tout retrouvé. Je n'ose pas imaginer ce qu'il ressent. “ William, je sais que tu es dans une situation douloureuse et compliquée. Tu sais aussi que je ne suis pas ton père, et que Wanda n'est pas ta mère. Pas dans ce monde, pas dans cette situation. Notre relation est différente aussi, ce monde tout entier est différent. C'est une réalisation dure à accepter, et je veux que tu saches que je serai toujours là pour toi. Mais que je ne peux pas être ce que je ne suis pas. ” Je lâche son épaule, mon bras retombe le long de mon corps. “ Il y a tant de choses à faire et tant de choses à sauver dans ce monde, William. Et certaines choses qui ne méritent pas d'arriver. Wanda ne sait pas que je suis là. Mais tu dois comprendre quelque chose, William. ” Lentement, je réduis la masse de mon corps et mes pieds se détachent du sol, centimètre par centimètre, jusqu'à complètement quitter la surface de la terre. “ Tout ne se déroule pas toujours comme on le désire ou comme on l'imagine. Ne va pas la voir. Retrouve Teddy. Reconstruis ta vie avec lui. Mais ne va pas la voir. ” Et mes yeux brillent, un bref instant, fixés sur lui. “ Je te l'interdis. ” Ton père te l'interdit, dit mon regard fixe.

Mon regard s'attarde un peu sur lui. Je devrais lui dire quelque chose mais je me retiens, hochant la tête comme remerciement avant de me détourner et d'accélérer dans les airs, quittant rapidement la ville et sa présence, sans me retourner.
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