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 Everything has changed... Or has it ? ✖ Stephen

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Clea & Stephen


Elle glisse ses doigts dans ses cheveux courts. Cela fait quelques semaines que Clea a troqué ses longues boucles argentées pour un carré brun touchant ses épaules et elle n’arrive pas à s’y habituer. Non vraiment, c’est comme si quelque chose manquait et la couleur… Le blond aurait sûrement été moins radical mais vu les conditions… Dans un soupir, elle passe des gants à ses mains pour s’emparer du petit sécateur posé sur le plan de travail devant elle. La petite boutique de fleurs est vide, pas un chat pour venir acheter ne serait-ce qu’une pauvre tulipe. Avec rapidité, Clea découpe les tiges de quelques pivoines blanches avant de les ajouter au bouquet à demi composé d’une dizaine de pivoines d’un rose poudré dont Clea apprécie énormément la couleur. Finalement, travailler, ce n’est pas si terrible que ça et ça occupe drôlement les journées de Clea. Puis ça lui permet de se tenir au courant en écoutant les gens, de s’intégrer dans cette société américaine qu’elle n’a plus fréquentée depuis vingt longues années. Distraitement, elle écoute la musique qui émane du radio de poste dans son dos et sa tête se balance doucement de droite à gauche tandis que son pied gauche marque le rythme de la chanson. L’air entêtant et dynamique de « Galway Girl » va probablement lui rester en tête jusqu’à la fin de la journée ; la chanson est à peine terminée que la sorcière sifflote déjà sans trop faire attention à la radio qui continue de fonctionner. Le bouquet est prêt, d’un oeil inquisiteur, Clea l’inspecte sous toutes les coutures avant de décider qu’il lui convient et va le déposer dans un vase sur l’une des étagères de présentation. Si cela ne tenait qu’à elle, si elle n’avait pas des guerres à mener, cela ne la dérangerait pas de passer le restant de ses jours à vendre des fleurs. Ce serait drôlement reposant, quand elle y pense. Plus de sang sur ses mains, plus cette inquiétude qui la ronge de l’intérieur en pensant à sa Dimension à feu et à sang. L’amnésie doit être quelque chose d’agréable parfois. Vérifier l’heure ; il est déjà temps de fermer la petite boutique puis de ranger l’intégralité du lieu. Honnêtement, si il n’y avait pas une caméra, Clea utiliserait la magie pour que l’endroit soit impeccable et ce en une seconde. Quelle perte de temps !

Le magasin est bouclé, Clea glisse ses écouteurs dans ses oreilles et range son téléphone dans la poche arrière de son short en jean délavé. Lunette de soleil sur le nez, elle n’a aucun mal à se fondre parmi les autres personnes qui s’engouffrent dans la bouche de métro New-Yorkaise. Rien ne la différencie des passagers du wagon, de ces hommes et femmes qui rentrent chez eux après une longue journée. C’est bizarre, la brune s’est toujours sentie à part des autres êtres humains, ne vivant absolument pas un quotidien pouvant s’apparenter au commun des mortels. Mais quand pour un court laps de temps, elle oublie que tout ceci n’est qu’une couverture temporaire, elle se dit qu’une vie normale est loin d’être désagréable. Néanmoins, ne pas pouvoir utiliser ses pouvoirs comme ça lui chante, ça l’ennuie considérablement. Elle gravit les escaliers du petit immeuble quatre à quatre, saluant au passage l’un des voisins d’un grand sourire amical.
Enfin dans l’intimité de son appartement. Il est petit, sous les toits mais Clea l’aime beaucoup. C’est la première fois qu’elle possède un endroit juste à elle, que personne n’a choisi à sa place et qui lui appartient entièrement. D’un geste distrait, Clea accroche son sac au petit porte-manteau de l’entrée, retire ses écouteurs pour les ranger à l’intérieur puis attrape le vase sur le guéridon dans lequel repose un bouquet de tulipes aux multiples couleurs. L’eau est changée avant que les fleurs ne retrouvent leur place ; nouveau rituel quotidien à chaque fois qu’elle rentre. D’un mouvement de l’index, les épais rideaux turquoises viennent recouvrir les fenêtres : précaution lorsqu’elle compte utiliser la magie. Une seconde plus tard, un portail s’est ouvert en plein milieu du salon dans lequel Clea s’engouffre à toute vitesse.

Un bunker souterrain ; loin d’être l’endroit dans lequel Clea aimerait passer son temps à longueur de journée. Elle n’a pas eu de mal, un peu après son retour, à trouver les Secret Avengers menés par le Captain America mais ce n’est que la seconde fois qu’elle pénètre dans le QG souterrain. Durant son temps sur Terre, Clea se souvenait avoir entendu son mari en parler, de ce fameux Captain America. Son mari. Ugh. Oui. Alors c’est sûrement le point le plus épineux de la situation étant donné que la brune ne sait toujours ce qu’elle est censée faire. Le contacter ou attendre toujours plus ? Si au tout début elle ignorait sa position sur le Registration Act et toute la politique actuelle, elle ne peut plus vraiment se voiler la face : ils sont du même côté. Ce qui signifie qu’ils finiront forcément par se croiser et est-ce une bonne idée que le Sorcier Suprême tombe par hasard sur sa chère épouse qui l’a délaissé pendant vingt ans ? Non. Il est là, pas loin, Clea peut sentir sa magie sans grand effort. Et lui ? Sent-il la présence de Clea ? Ou leur lien s’est entièrement étiolé ? Un sentiment de nervosité envahit la sorcière ; elle sait qu’elle a fait ce qu’elle devait faire. Après tout, Clea se souvient d’un Stephen pour qui son rôle de Suprême passait avant tout. C’est ce qu’elle a fait. Elle a respecté ses enseignements. A la lettre. Peut-être un peu trop, pour le coup. Il est à quelques pas, dans une pièce dont la porte est entrouverte. Seul. Sa main frappe doucement contre la porte pour prévenir de sa présence avant de s’avancer, les mains enfoncées dans les poches de son short.

« Bonjour, Stephen.»

Si Clea s’est parfois imaginé ce moment, elle était loin de se douter que ce serait ainsi. Mais aujourd’hui elle ne sait plus trop, ne sait plus vraiment ce qu’ils sont l’un pour l’autre et si leur mariage a toujours lieu d’être.

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❝Everything has changed
   ...or has it?❞
   Clea & Stephen
Il revient juste de sa petite balade, une qui ne lui a pas véritablement dégourdi les jambes. Il ne pouvait plus vraiment sortir. Il n'était pas classé Vigilante, il n'était pas un super-héros. Mais cela ne voulait pas dire qu'on ne risquait pas de venir voir celui qu'on appelait Sorcier Suprême. Au contraire, la magie avait toujours fait peur aux gens et le titre de Suprême pouvait en effrayer plus d'un. Stephen n'avait jamais eu le moindre soucis avec cette aversion. Il avait appris à faire avec. Ses propres voisins n'avaient jamais accepté qu'un magicien soit à côté de leur maison, à se demander pourquoi ils n'avaient jamais déménagé. Stephen n'avait jamais eu rien à craindre d'eux, il savait qu'il n'avait rien à se reprocher et que peu de monde les croirait de toute façon. Mais plus maintenant, après tout. Il savait comment ça se passait. Il ne l'avait pas vécu lui-même, mais il avait vécu à cette époque où l'Europe n'avait pas été un lieu sûr. Les voisins se dénonçaient entre eux. Et il sentait finalement que c'est ce que ses propres voisins feraient un jour ou l'autre, maintenant que les lois d'enregistrement étaient passées. Stephen ne se recenserait pas, quelque part ses voisins le savaient. Et il n'y avait pas que ses voisins. Il avait rencontré de nombreuses personnes au cours de sa longue vie, pire un livre avait été publié sur lui dans les années 80. Beaucoup avaient pensé à une fiction, mais Morgana Blessing qui l'avait écrit avait toujours clamé que cela avait été vrai. Et cela l'avait été. Le livre n'avait pas été un tel succès, et les gens l'avaient oublié. Mais ça devait bien encore traîner dans un coin.

L'enveloppe astrale regagna son corps. Voilà comment il sortait le plus récemment. Pour se faire un minimum discret. Pour pouvoir garder un œil sur sa maison, sur sa ville. Il n'avait rien pris avec lui de magique, trop dangereux. Il y avait trop de monde pour qu'il pense à prendre l'orbe d'Agamotto ou le livre des Vishanti. C'était un handicap, il fallait l'avouer. Il devait faire voyager sa forme astrale jusque New York pour les utiliser. Elle était heureusement très rapide, mais pas assez pour qu'il n'arrive pas quelque chose pendant qu'il n'est pas là. Quand il était dans la même ville que son corps, c'était plus facile, en cinq minutes c'était plié. Plus là. « Comment va la grande ville ? » Stephen n'est pas surpris d'entendre la voix, il a fini par s'y habituer. Il lui était arrivé de voir des fantômes, ou d'avoir des hallucinations. Souvent l'ennui et la fatigue forçait son esprit à se donner une compagnie qu'il n'avait pas. Il ne savait pas si c'était un véritable fantôme ou son esprit. Qu'importe. C'était souvent la même chose, quand on était sorcier. Il était habitué à parler à des choses ou personnes que les autres ne pouvaient voir. « On a vu mieux, mais ça n'a pas tant évolué jusqu'à maintenant. » Il n'a pas l'habitude de la voir elle. Elle n'a commencé à apparaître que lorsqu'il a décidé de briser son vœu de neutralité. Comme si elle venait hanter ou approuver son choix.  « T'en fais pas Stevie. Tu vas changer les choses, je le sais. » Le sourire des lèvres cyanosées lui retournerait presque l'estomac, s'il n'avait pas fini par s'y habituer. Malgré son éternelle allure de noyée, l'âme de Donna Strange restait telle qu'il l'avait connu vivante. Une enfant, une ado pleine de vie et d'entrain, telle qu'elle était juste avant d'être injustement arrachée à la vie.

« Bonjour, Stephen. » Un clignement d'yeux et voilà que Donna a disparu. Elle ne reste jamais quand il est accompagné. Comme si l'invisible ne voulait pas risquer d'être vu. Une preuve qu'il s'agit là plus d'un tour de son esprit que d'une réelle apparition surnaturelle. Il se tourne pour voir une silhouette qu'il connaît bien. Une autre de ses hallucinations à n'en pas douter. Donna est son esprit rebelle. Cléa elle, a toujours été la part de culpabilité en lui. Probablement parce qu'il regrettait tellement de choses vis à vis d'elle. Il soupira. « Je n'ai aucune idée de ce que j'essaie de me dire à moi-même, je suis perdu. Qu'est-ce que j'ai encore fait pour que tu apparaisses ? Ou est-ce que c'est encore ma dépression qui tente de revenir ? C'est pas trop le moment. » Etrange l'esprit d'un sorcier, surtout le sien. Certains le croiraient fou, il ne se voit que comme un homme qui a conscience de son propre psyché. « Et pourquoi les cheveux bruns ? » Question triviale, mais quitte à parler à son esprit autant tenter de se comprendre soi-même, non ? « Allez balance, qu'est-ce que tu fous là cette fois ? »

Il sent la magie de la jeune femme, mais il ne se rend pas compte que c'est vraiment elle, qu'elle est réellement là. Il ne croit plus au retour de sa femme. A quoi bon de toute façon ? Leur couple était mort lorsqu'il avait commis l'irréparable, tout ça parce qu'il n'était pas foutu de comprendre la situation dans laquelle elle se trouvait. Peut-être que c'était pour ça que sa culpabilité se manifestait. Parce qu'il avait maudit sa femme de mener des révoltes dans sa dimension, et voilà maintenant que cela semblait être ce dans quoi il s'engageait lui-même. Ca ne peut être que cela. Peut-être qu'il se rendait compte de sa propre hypocrisie.  

   
© Pando
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Clea & Stephen


Comme cela lui est étrange, de se retrouver ainsi devant son mari après longues vingt années. Sa magie l’électrise, fait bouillir la sienne dans ses veines mais Clea prend soin de l’ignorer. En temps normal, la sorcière se dit qu’elle se serait jetée au cou de son époux, comme à chaque fois qu’ils se retrouvaient après une séparation. Mais jamais celle-ci n’a été aussi longue. Quelques semaines tout au plus, mais des années ? Non, vraiment, c’est la première fois. Et si pour elle, elle n’a pas eu l’impression que le temps continuait à s’écouler, c’est pourtant le cas. Si le temps n’a pas d’emprise sur eux, l’un par son statut de Suprême et l’autre par son sang, tous deux le perçoivent différemment. Pour Clea, vingt ans, ce n’est rien, une poignée de secondes sur une vie déjà bien longue mais pour Stephen ? Ce n’est clairement pas la même chose. Il se retourne, Clea retient son souffle au moment où leurs regards se croisent. Il n’a pas changé, il est exactement le même que lorsque la sorcière s’en est allée dans sa dimension d’origine. Oh non, à l’exception de sa glorieuse moustache, remplacée par une barbe. Malgré elle, son coeur se serre douloureusement et toute la contenance dont elle faisait preuve s’étiole légèrement. Beaucoup de souvenirs viennent frapper son esprit, tous ces moments heureux et révolus… Sa voix lui parvient comme dans un rêve alors elle bat des paupières afin de ravoir les pieds sur Terre et écouter son époux. Ex-époux ? Stephen.

« Je n’ai aucune idée de ce que j’essaie de me dire à moi-même, je suis perdu. Qu’est-ce que j’ai encore fait pour que tu apparaisses ? Ou est-ce que c’est encore ma dépression qui tente de revenir ? C’est pas trop le moment. Et pourquoi les cheveux bruns ? Allez balance, qu’est-ce que tu fous là cette fois ? »

La bouche de la brune s’entrouvre légèrement et une moue perplexe se dessine sur son visage alors qu’elle essaie de remettre en ordre ce qu’il vient de dire. L’analyser. Clea a presque envie de se retourner pour vérifier qu’il s’adresse bien à elle et non une tierce personne. Elle pense à s’insinuer dans l’esprit de Stephen, juste pour voir ce qu’il se passe, comprendre sa réaction et savoir comment réagir sans trop le brusquer. C’est ce qu’elle fait, brièvement, avant vite en sortir en sentant un vif pique de culpabilité la frapper de plein fouet. Mauvaise idée. Bien sûr qu’une partie d’elle se sent coupable d’avoir disparu sans laisser de traces aussi longtemps. Mais putain, elle ne faisait que son devoir et elle ne compte pas s’écraser face à ce sentiment de culpabilité. Et si les places avaient été inversées ? Si ça avait été à Stephen de partir dans sa dimension pour sauver son peuple, qu’aurait-il fait ? Aurait-il fait passer leur couple avant ? Bien sûr que non. Il ne le faisait déjà pas avant alors en cas d’une guerre civile, Clea le voyait mal le faire.

« Je ne suis pas une hallucination, Stephen. » Dit-elle sur un ton calme bien qu’un peu ferme.

Pour la peine, elle fait quelques pas vers Strange. Néanmoins, elle s’arrête à une distance qu’elle trouve à peu près raisonnable, elle n’a pas envie de trop s’approcher de lui. Ses sentiments sont encore confus et entre l’agacement et l’envie de violemment l’embrasser, c’est compliqué. Ses doigts viennent entortiller une mèche de ses courts cheveux bruns, elle vient de se souvenir qu’il s’est demandé pourquoi ce brutal changement. Ah ! Un peu plus et il ne la reconnaissait pas ou quoi ? Aurait-il oublié son visage après toutes les autres qu’il a mis dans leur lit ? Enfin, son lit.

« Avant que tu ne dises quoi que ce soit et que cela ne se termine en dispute : je ne suis pas venue ici pour justifier mon absence, ni même pour m’excuser. J’ai fait mon devoir et tu serais extrêmement mal placé pour me le reprocher vu que tu as toujours fait passer ton rôle de Sorcier Suprême devant tout le reste. »

Les mots tranchent, violemment et jamais Clea ne se serait pensé capable d’autant d’amertume face à son mari. Mais elle n’a pas envie qu’il l’accable, qu’il lui fasse le numéro du pauvre mari abandonné et malheureux. Clea n’a pas envie de s’occuper de ses états d’âme, pas pour l’instant. Peut-être plus jamais, d’ailleurs.

« Je suis là pour vous aider. Je n’ai pas besoin de vivre sous la surface de la terre pour le moment alors si je peux être d’une quelconque assistance. Je resterai le temps que vous aurez besoin d’aide ou moins, rien n’est encore réglé dans ma dimension. »

Voilà. Pas là pour lui, pas là pour ramasser les morceaux de leur couple brisé. Elle n’a pas envie d’y penser ; au pire elle pleurera seule, dans l’intimité de sa chambre mais ce sera tout.


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