La tête haute, les bras croisés sur sa poitrine, Dylan attend, sur le banc devant le bureau du proviseur. Le lycée est vide à cette heure-ci. Quand elle entend des pas dans le couloir, elle sait immédiatement que ce sont ses parents. Elle se lève, et voit d'abord sa mère qui avance d'un pas décidé, et qui la regarde en fronçant les sourcils. « Bon dieu Dylan, qu'est-ce que tu as encore fait ? » demande-t-elle, visiblement énervée. La jeune fille se contente de laisser retomber ses bras et de lever les yeux au ciel. Ses parents y sont habitués. Dylan est brillante, mais elle est aussi la reine de l'insolence. Son père suit derrière, mais il ne dit rien. Ce n'est pas la première fois qu'ils sont là, alors il a sûrement commencé à comprendre les codes. Il sait que malgré tous les reproches, sa fille continuera à croire qu'elle a fait ce qui est juste, ou qu'elle est dans son bon droit. « Monsieur et Madame Blackstone... » fait le proviseur en sortant de son bureau, et en frappant dans ses mains. « Je vous en prie... » Il fait entrer toute la famille dans son bureau et pince les lèvres, de la même manière qu'il le fait toujours. Ce tic a tendance à irriter Dylan, qui se retient de lever une fois de plus les yeux au ciel. « Votre fille a commis un crime que je ne peux laisser sans punition. » commence-t-il. Il a l'air d'adorer ça. Dylan a encore plus envie de lui foutre un coup de poing dans la figure. Crime. Ce mec aime beaucoup trop le drama. D'un air indifférent, elle observe les rangées de livres à droite du bureau, et feint un bâillement. Sa mère fronce les sourcils. « Il se trouve que nous avons découvert un petit jeu auquel elle s'adonne depuis déjà quelques mois. » Il aime faire monter le suspense. Ce mec aurait du être présentateur télé. Il scrute les visages des parents de la jeune fille avec un air un peu trop satisfait. « Je ne vais pas y aller par quatre chemins. » Bah oui, c'est ça, il est temps. « Dylan a réussi à s'infiltrer dans nos logiciels et à modifier les notes de ses camarades tout au long du semestre. » La jeune fille a un petit sourire heureux. Bien sûr, elle n'est pas ravie de se faire prendre. Mais sa prouesse la rend plus joyeuse qu'inquiète pour sa situation. Elle voit son père retomber contre le dossier de son siège, et poser une main sur ses yeux, qu'il commence à masser. Il n'est même plus surpris, ce que Dylan apprécie peu. Sa mère en revanche, a une réaction plus explosive : ses yeux lancent des éclairs, elle a l'air furieuse, et commence à crier sur sa fille qui elle, reste muette, toujours ce petit sourire satisfait aux lèvres. « Elle sera expulsée pendant un mois de notre établissement, et passera le reste de l'année à faire des travaux d'intérêt généraux dans le lycée. » Il pose les yeux sur la jeune fille. « Tu as de la chance que nous ne portions pas plainte, alors il est dans ton intérêt d'accepter cet arrangement. » Dylan a comme l'impression que cette décision n'est pas la sienne. Le mot arrangement le débecte, visiblement. Mais bon, elle va accepter, parce que sa mère va la forcer, et que de toute manière, elle ne compte pas particulièrement finir son année de première devant un tribunal.

« La plainte contre votre fille a été retirée, madame. » Mrs. Blackstone ouvre de grands yeux et interroge sa fille, qui est toujours assise sur l'une des chaises du commissariat, du regard. Dylan hausse les épaules, et pas seulement pour embêter sa mère : elle ne sait pas pourquoi elle s'en sort aussi facilement. Cela fait vingt-quatre heures qu'elle est au commissariat en garde à vue suite à son infiltration dans les fichiers secrets de la police de San Francisco. Ils n'ont pas vraiment réussi à lui faire cracher ce qu'elle y cherchait. D'ailleurs, elle non plus ne sait pas très bien. Elle testait juste ses limites. Dylan a toujours été comme ça, à pousser les choses de plus en plus loin, jusqu'à ce qu'on la stoppe. Et encore, ça ne suffit pas toujours à l'arrêter. La police n'était qu'une petite proie, elle a déjà fait mieux. C'est pour ça qu'elle se demande pourquoi ils ont réussi à la tracer aujourd'hui, alors qu'il y a une semaine, elle a réussi à cracker les codes d'entrée de plusieurs bâtiments officiels sous le nez de tout le monde. « Vous pouvez rentrer chez vous. » fait l'officier de police, avec un sourire. Pas difficile de savoir que c'est la première fois qu'il est confronté à un cas comme ça. Même s'il est censé faire régner la loi, il y a une sorte d'admiration dans son regard pour cette lycéenne qui a réussi ce que beaucoup de professionnels de son district n'arriveraient pas à faire. En tous cas, Dylan ne se fait pas prier. Sans même attendre sa mère, elle traverse l'accueil et descend les marches du bureau de police. Mais quand elle bifurque vers sa voiture, elle se rend compte qu'un homme habillé en costard et avec des lunettes de soleil se trouve juste devant. « Vous êtes au courant que les lunettes de soleil, c'est inutile à vingt-deux heures? » demande-t-elle à l'homme, qui esquisse un sourire. Il retire ses lunettes et reste droit. « Miss Blackstone ? » Dylan fronce les sourcils. « Euh... Ouais ? » Il avance d'un pas, tandis que la mère de la jeune femme arrive derrière elle. « Qu'est-ce que tout ceci ? » fait-elle, inquiète et tendue. « Mrs. Blackstone, Agent Thompson. Du SHIELD. Je suis venu parler à votre fille. C'est grâce à nous que la plainte contre elle a été retirée. » Dylan ouvre de grands yeux surpris, mais recommence à froncer les sourcils. Un mec en costume et lunettes de soleil qu'elle n'a jamais vu auparavant vient de lui sauver la mise. Elle ne sait pas vraiment si c'est une bonne ou mauvaise chose. « Nous savons tout de toi, Dylan. » Et voilà que maintenant, il l'appelle par son prénom. Ben voyons. « Comment tu as modifié les notes de tes amis au lycée. Comment tu as hacké le téléphone de ton ancien petit ami Shawn Whiteman et partagé son contenu à l'ensemble des élèves. Comment tu t'es infiltrée dans le service de sécurité du magasin multimédia pour y voler des composants informatiques sous le nez de toute le monde. » Dylan baisse les yeux. Sa mère ne sait pas tout ça. Elle va se faire tuer à la maison. « Comment tu as réussi à t'infiltrer dans un grand nombre de fichiers top secrets, dont certains qui nous touchent particulièrement. » Il croise les bras devant sa poitrine. « Je vous jure que j'ai jamais lu un seul de ces trucs. Je voulais juste... » « T'amuser. Oui, je sais. Tu n'es pas la première que je rencontre. Nous t'avons sauvé la mise pour cette fois, mais nous ne pourrons pas toujours le faire. » Il commence à fouiller dans la poche intérieure de sa veste. « Ce que nous pouvons faire, en revanche, c'est t'offrir un nouveau terrain de jeu. Bien plus grand que ce que tu peux imaginer. Nous recrutons des petits génies comme toi pour les former, et les engager. » Flattée, Dylan lance un sourire reconnaissant. Il l'a qualifiée de petit génie. Enfin quelqu'un qui reconnaît ses talents ! « Si tu décides de nous rejoindre, tu n'auras plus jamais à hacker quoi que ce soit de manière illégale. » Le visage de Dylan s'assombrit légèrement. C'est justement ce qui est fun, de faire ce qui est interdit ! L'agent regarde sa montre et semble soudain pressé. « Je dois y aller. Je te laisse ma carte. N'hésite pas à nous appeler quand tu auras ton diplôme. Bonne chance, d'ici là. Et pas trop de bêtises. » Il part sans un mot, monte dans une voiture noire, et disparaît, laissant les deux femmes incrédules. « C'était quoi, ça ? » demande alors Mrs. Blackstone. « Une illusion ? Ou alors un mec qui voulait se payer ma tête. »