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 Taxi driver's secrets | Alistair

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Dix-sept heures quinze. Une heure décente pour retourner chez soi. Je n’ai pas l’habitude de quitter le travail aussi tôt. Je n’ai pas l’habitude de voir Manhattan sous le soleil couchant. Une grande première. J’ai presque envie de m’asseoir sur un banc et de profiter du spectacle. Les rayons du soleil qui reflètent dans les fenêtres des buildings. Le soleil déclinant qui pare la rue d’une couleur orangée. Les voitures qui allument leurs phares. Les gens qui retournent à leur routine. La vie vaut la peine d’être savourée. Mais, ce soir, j’ai surtout envie de profiter de mon temps libre. J’ai surtout envie de poser mes pieds sur ma table basse. J’ai surtout envie de récupérer un pot de glace, une cuillère et de mettre un bon film. Les soirées à ne rien faire sont rares. Elles le sont tellement que chacune est un petit trésor que je couve. Ma petite soeur est encore en mission. Une de plus. Parfois, je la jalouse de pouvoir voyage autant. A une époque, il en était de même pour moi. Maintenant, j’ai l’impression de passer plus de temps à négocier, à bavarder, à réfléchir. Moins d’action, plus de réflexion. Qu’elle soit absente a au moins l’avantage de me laisser l’appartement à moi toute seule. Le silence me manque. La possibilité de lambiner. L’opportunité de ne pas faire à manger deux repas de suite. Avec Riley, je suis un peu plus attentionnée. Organisée. Soigneuse. Je me laisse moins aller. Je dois montrer l’exemple à ma cadette, après tout. Je quitte le building du S.H.I.E.L.D., avec l’idée que pour une fois, je ne ressentirai aucune culpabilité. Mais avant de me laisser choir sur le canapé. Avant de me déchausser. Avant d’entamer mon pot de glace. Je dois faire quelque chose. Je compose le numéro de téléphone d’une compagnie de taxis. En règle général, j’alterne. La prévenance et la méfiance apprises au travail rejaillissent. Il suffirait que quelqu’un m’espionne pour qu’il sache comment je rentre. Alors, je change régulièrement de compagnie. Ce soir, mon choix est motivé par mon intuition. Il y a ce chauffeur de taxi qui est déjà venu me chercher à plusieurs reprises. Il a l’air sympathique. Nous n’en sommes pas au point d’échanger nos vies. Cependant, je commence à bien l’apprécier. Même si il a des occupations bien étranges. Quel genre de type se promène en pleine nuit, à moitié chamboulé ? Et qui entre dans les égouts par choix ? Il m’intrigue. Il est un juste mélange entre l’homme sympathique et l’homme bizarre. Peut-être a-t-il une bonne raison pour s’y rendre. Mais franchement, un taxi driver dépressif et passionné par les égouts, c’est étonnant. Pour ne pas dire totalement hors du commun. En passant mon appel, je croise les doigts pour que ce soit Alistair qui débarque. Je pose mon sac par terre. Je remonte mes cheveux ondulés en un chignon lâche. Il a l’habitude de voir Sharon, l’employée du service juridique travailleuse et soignée. Pas l’agent 13 travaillant au S.H.I.E.L.D. La couverture doit tenir. Soigner les moindres détails est donc important. Je lisse ma chemise d’une main et récupère mon sac de l’autre. Mon arme est cachée à côté de mon porte-monnaie. Pour ce qui est de la fatigue après une journée de travail, aucunement besoin d’artifice. Elle est déjà là. Je croise mon regard dans le reflet d’une voiture. L’illusion est parfaite. L’infiltration et l’espionnage sont mes domaines de prédilection. L’image que je renvoie est satisfaisante. Qui se douterait que je côtoie des super-héros tous les jours ? Personne.

Au bout de quelques minutes, le taxi est en approche. Je l’observe se frayer un chemin entre les autres voitures. Il finit par s’arrêter le long du trottoir, à ma hauteur. Je cache ma satisfaction. Alistair est bien au volant. Je vais pouvoir le cuisiner avec ma théorie sortie de nulle part ! Je lui fais un signe de la main. On va finir par se connaître, tous les deux. Son métier doit l’amener à rencontrer des centaines de personnes différentes chaque jour. Un métier éprouvant et enrichissant. J’ouvre la portière arrière. Je me glisse sur la banquette. Un soupir lassé m’échappe. Une vaine comédie pour maintenir l’image de l’employée débordée. Je débarque souvent avec une pile de faux dossiers. Aujourd’hui, j’ai les mains vides. J’ai une bonne raison à cela : j’ai profité d’une baisse de travail pour quitter le travail et prendre un jour de congé. Voilà l’excuse que je lui servirais, si d’aventure, il s’y intéresse. Penser à tout. Anticiper toutes les éventualités. Rester cohérente. Faire semblant au quotidien est usant. Je le fais avec mes voisins. Je le fais avec tous les gens que je rencontre. Les seules personnes avec qui je suis totalement vraie sont ma famille et mes collègues. Ce qui restreint considérablement les possibilités de discuter librement. L’esprit tranquille. Je suis sur mes gardes, chaque heure du jour comme de la nuit. Mais j’aime mon travail. Je ne le quitterai pour rien au monde. Alors, modifier la vérité est un moindre mal. Je passe une main sur mon visage. Je repousse une mèche d’un doigt. Finalement, je capte le regard du chauffeur dans le rétroviseur. J’esquisse un sourire fatigué. “Salut !” Faire l’employée juridique d’une entreprise est plutôt gratifiant. J’ai déjà dû jouer les potiches pour des infiltrations. J’ai déjà dû jouer l’idiote de service. J’ai déjà dû me glisser dans la peau de la séductrice. Alors, être simplement une employée épuisée par son travail est presque facile. Agréable. Je me penche vers la vitre qui nous sépare. “Comme d’habitude : Woodhaven Boulevard, dans le Queens. Merci.” Sharon l’employée de bureau et Sharon l’agent sont toutes les deux casanières. Sur cela, il n’y aucune différence. Je me laisse aller contre le dossier de la banquette. Le pauvre Alistair doit connaître la rue par coeur, à force de venir me chercher et de m’y déposer. Il doit avoir une pâle opinion de moi. Cette femme de vingt-huit ans, presque aux portes de la trentaine. Cette femme qui se lève pour travailler. Cette femme qui rentre pour dormir. Métro, boulot, dodo. Une routine qui convient parfaitement à mon besoin de rester tranquille. Il m’arrive de sortir. D’être embarquée par quelques collègues qui ont pitié de moi. Ils me forcent à aller boire un ou deux verres. Histoire de sortir. En dehors de ces occasions, les opportunités sont rares. Et tant mieux. Quand je ne rentre pas à des heures indues à cause du travail, la chaleur de mon appartement est plus conviviale. Plus conviviale que les conversations bruyantes des bars. Cela dit, j’ai eu le temps de découvrir un Alistair différent pendant mes sorties nocturnes. Moins posé. Moins amical. Plus fragile, même. “Comment vous allez, aujourd’hui ?” Sous-entendu : pas de promenade nocturne, déprimé et émotif, à l’horizon ? Il doit cacher son jeu aussi bien que moi. Toutefois, je n’arrive pas à me méfier de lui. Ce n’est pas faute d’avoir essayé d’être objective. J’ai beau chercher, il ne me semble pas dangereux. Juste fragile. Peut-être que le soir où je l’ai croisé, il venait de se faire plaquer pour sa petite amie. Peut-être qu’il avait reçu une mauvaise nouvelle. Qui sait ? Il y a des explications à tout. Mais tout de même. Je laisse mon regard se perdre dans le paysage qui défile. Les piétons qui deviennent des traînées de couleurs. Les voitures qui klaxonnent. Les buildings qui disparaissent pour en laisser d’autres apparaître.

Cette ville est une vraie fourmilière. Du monde partout. Du monde tout le temps. Du mouvement perpétuellement. New-York ne semble jamais en pause. Sauf lors de grosses tempêtes de neige. Là, plus personne n’ose mettre le nez dehors. J’aime cette effervescence. J’aime ce dynamisme. J’aime l’idée que l’on puisse se laisser porter par l’ambiance ou au contraire, que l’on puisse se réfugier dans un logement pour y échapper. Beaucoup étouffe. Je respire. Je suis soulagée que la vie continue pour ces milliers de personnes, malgré les problèmes. Malgré les morts. Malgré tout. La vie continue. Cette force de se lever tous les jours est une inspiration. Je m’arrache à la contemplation de l’extérieur. De toute manière, nous sommes à l’arrêt. Je me penche de nouveau vers Alistair. “Au fait, j’ai réfléchi ces derniers jours. Je vous ai croisé à moitié dépressif en fin de journée. Je vous ai vu entrer dans les égouts. Vous m’assurez que vous allez bien. Okay, j’accepte. Mais du coup, je me suis demandée ce que vous pouviez faire dans ces égouts à une heure pareille...” Je laisse un silence de quelques secondes s’installer. Je contemple sa réaction dans le reflet du rétroviseur. Ces machins sont vraiment trop petits ! On n’a pas idée de créer de tout petit miroir. Impossible de voir entièrement son visage. Seulement ses yeux. A quoi bon faire durer le suspense, de toute manière. Je ne suis pas en plein interrogatoire. Je suis dans un taxi, avec une connaissance. Ceci n’est qu’un jeu. Ceci n’est qu’une plaisanterie. Le jeu d’une employée qui cherche à se divertir après une dure journée de travail. “J’en suis venue à la conclusion que vous êtes un trafiquant de drogue. Ca se tient : vous avez besoin d’un endroit tranquille pour faire vos affaires, pour stocker votre marchandise… Personne n’irait fouiller dans les égouts. C’est la drogue que vous consommez vous-même qui vous rend hypersensible.” J’ai l’air totalement sérieuse. Totalement certaine de ce que je raconte. Mes proches ont l’habitude. Ils y voient de l’humour pince-sans-rire. Ceux qui ne sont pas habitués ont parfois des sueurs froides. Parfois, certains ne savent pas comment réagir. Ils ne savent pas si je suis sérieuse ou si je rigole. Là, je ne suis absolument pas sérieuse. Bien sûr qu’il n'a rien à voir avec des trafics de drogue. Il a la carrure pour l’assumer, certes. Néanmoins, qu’est-ce qu’il foutrait dans un taxi toute la journée ? Il ne peut pas être trafiquant de drogues. Par contre, receleur ou transporteur de colis mystérieux...
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Taxi Driver's Secrets


Une journée de travail comme une autre. Une nuit mouvementée, comme j’avais pu en connaître aussi un tas par le passé. Il me semblait même avoir rêvé. C’était un songe que je n’avais ni apprécié, ni détesté. Le genre de chimères qui me revenaient assez souvent, lorsque je n’étais pas assommé par un vide mémoriel - dont je pensais connaître aujourd’hui la cause. À moins que ce soit des bribes issues de mes escapades nocturnes, chose que je ne pourrais jamais vérifier par moi-même…sauf peut-être dans les journaux rubrique faits divers, remarque. Ce n’était pas quelque chose qui m’enchantait, loin de là. J’avais, il y a une semaine, senti que j’allais perdre pied. Concrètement, j’ignore ce qui s’est produit. Sur les nerfs, affolé, je ne saurais pas décrire avec certitude ce que j’ai ressenti à ce moment-là. Toujours est-il que j’ai voulu m’isoler afin de ne pas exposer quelqu’un…dans les égouts. Je ne voyais pas quoi faire d’autre. Ça me paraissait la meilleure idée sur le moment. Qui viendrait passer la nuit ici, si ce n’est des êtres monstrueux à mon image ? Pendant un moment, j’ai redouté qu’on me voit effectivement m’introduire dans ces souterrains de la mégalopole. Ou pire, que quelqu’un qui me connaisse soit de ceux-là. Si ça avait été le cas ? Je ne saurais même pas m’en souvenir. Les odeurs se mélangeaient, et la panique m’a fait oublier un nombre incontestable de détails. À vrai dire, même un parfum familier ne m’aurait pas tiré de cet état.

Je m’étais déjà senti oppressé de la sorte, mais jamais autant que depuis ce moment, celui où j’ai appris la vérité. Enfin, la vérité…tout est relatif. Je ne savais pas comment j’en suis arrivé à être comme ça, ni qui m’a fait subir ces changements drastiques. Tout ce que je sais, c’est que je suis un danger pour les autres - et que je suis particulièrement effrayé par ce que je suis réellement. Moi qui ai toujours oeuvré pour que ce soit le contraire, je m’étais pris dans une spirale infernale. J’étais même rendu à songer à me livrer aux autorités…mais je craignais que cette autre entité ne le désire pas, et que les choses se compliquent davantage. C’était déjà assez difficile à avaler pour le moment, je ne préférais pas faire de vagues inutiles. Trop d’innocents avaient déjà disparus par ma faute.

Je m’étais octroyé une pause d’un quart d’heure sur le temps de midi, le temps de manger. J’avais l’appétit vorace depuis maintenant quelques années, et si je ne me nourrissais pas décemment, il y avait de fortes chances pour que je ne puisse pas tenir l’après-midi sans rien grignoter d’autre. Ça aurait pu être une technique pour oublier l’odeur de la ville et ceux qui la faisaient vivre. Ou alors, le meilleur moyen de le réveiller. Quitte à perdre quelques dollars sur mon salaire, j’avais moins de chances de détruire des vies, voire des familles toutes entières. Du moins c’était la façon dont je percevais les choses.

Et effectivement, je n’avais pas eu de réel souci durant l’après-midi. L’heure de pointe arriva avec son lot de courses et de stress. J’y étais d’autant plus réceptif que je devais gérer davantage de variables, contrairement à d’autres. Mais j’étais, au fond, persuadé que je n’étais pas le seul dans mon cas. Rien ne disait que je n’avais pas accueilli un muté (c’est un terme que j’apprécie peu, mais passons) sur la banquette arrière ou qu’un mutant n’ait pas perçu ma nature. D’ailleurs, était-ce simplement possible ? Je ne l’espérais pas. Une pointe dans le poumon. À chaque inspiration, je souffris alors. Anxiété. Encore le résidu de ces pénibles événements. Et d’autres choses certainement.
Je prends la course demandée à quelques pas de là. Je m’y prête car je connais la voix que j’ai entendu sur la fréquence de la centrale…et que, d’autre part, j’étais vacant et à deux avenues du lieu-dit.

Je finis par la reconnaître, là-bas, à cheval entre le trottoir et la chaussée. Elle a l’air à la fois soulagée et agacée. De me voir arriver - et de sa labeur journalière ? Qu’en sais-je. Si je me posais la question à chaque fois que je récupérais quelqu’un, je n’étais pas sorti de l’auberge. Il n’était pas encore très tard, je terminais mon service à huit heures. J’arriverais à canaliser ma paranoïa croissante jusqu’à l’horaire donné. Une chose aidant, à savoir que mon corps n’était pas fatigué - mais mon esprit l’était. Terriblement, même. J’ignore si ça jouera sur le reste.
Je stoppai le véhicule au plus proche, mais aussi de telle façon que je puisse m’extirper le plus aisément possible et ne pas finir prit en sandwich. Le compteur tournait, je n’étais pas là pour lui faire perdre son temps. À peine entrée qu’elle me salua. Je lui répondis d’un « Bonjour. » tout à fait professionnel, peut-être un peu trop cordial. Mais j’étais sur mes heures de travail et je ne la connaissais pas, ou vaguement. Tout ce que je savais, c’était que son travail était épuisant et qu’elle avait la place de conseillère juridique dans une entreprise plus ou moins importante. En regardant l’heure à laquelle nous partions, je ne pus m’empêcher de penser qu’elle avait été libérée étrangement plus tôt que d’habitude. Simple détail dont je ne lui tiendrais pas rigueur, je n’allais même pas lui en faire la remarque. Pour la simple et bonne raison que, m’immiscer dans la vie des gens, ce n’était pas mon passe-temps favori. Les banalités, les échanges de politesse, je m’y efforçais sans grand soucis. J’avais toujours eu un bon contact avec les autres…enfin, ça, c’était avant. Même si je n’étais pas très bavard me concernant ou qu’il ne fallait pas trop me pousser à bout, ça m’arrivait d’être abordable. Lorsqu’il n’y avait pas de raison que je montre les crocs.

À sa demande, je me mets en route pour le Queens. Je ne connais que trop bien ce quartier car j’y habite moi-même. Fort heureusement, elle n’avait pas pour habitude de commérer sur les faits divers qui concernaient notre lieu de vie commune. Car il est clair qu’aborder la présence d’une bestiole farouche non identifiée dans les environs ne serait pas des plus agréable pour moi. J’imagine qu’elle a été confrontée à cette nouvelle mais qu’elle n’en fait pas une fixette, ce qui serait tout à fait normal je dirais. À côté, la menace d’une invasion extraterrestre ou d’autres vilains aux pouvoirs cosmiques était beaucoup plus inquiétant. Pourtant, moi-même je ne m’en inquiétais moins que ce que je pouvais provoquer une fois englouti par l’animal.

« Très bien. », lui fis-je simplement. Nos regards se croisèrent un instant dans mon rétroviseur. J’ai pourtant un soupçon de sourire sur les lèvres, mes yeux eux aussi montrent une convivialité certaine. Mais ils cachaient évidemment quelque chose de plus morne. Elle me demanda alors comment je me portais. Dans ces situations-là, je répondais du tac-o-tac. Et comme souvent, la réponse qui revenait le plus souvent c’était celle-ci. « Ça va. Et vous ? », mais aujourd’hui, j’avais décidé d’enrober. Impossible de savoir pourquoi. « Vous avez l’air moins fatiguée que d’habitude. C’est plutôt positif. » Car même si elle avait soupiré en rentrant, qu’elle donnait l’air d’être exténuée, j’avais l’impression qu’elle ne l’était pas autant que d’habitude. Pas que c’était surjoué, loin de là. J’étais loin de soupçonner cette femme de quoi que ce soit - pour l’instant du moins. Les double-jeu, ça me connaissait maintenant. J’en étais la preuve vivante. Bien que le contexte ait été différent…je le concevais parfaitement.

Il y a vraisemblablement beaucoup de monde. Les fin d’après-midi sont parfois difficiles…des accidents sont évités parfois de peu. Quelques agents tentaient de mettre un peu d’ordre mais la circulation restait toutefois ardue. J’avais dû m’y habituer. Elles étaient loin ces rues d’Edimbourg…mais au moins, j’avais emporté mon accent et ma Honda avec moi. Tout n’était pas perdu en fin de compte.
Je me concentrai donc tout en l’écoutant. Et ce qu’elle vint à me dire me laissa coi un instant. Nous nous stoppâmes à un feu pourpre, et je levai les yeux vers elle. J’attendais la suite, pour sûr. Mauvais point : elle m’avait vu dans un état second, l’autre soir. Et je ne l’avais même pas remarquée. Une anxiété tapissée décuple mes sens, et je crois sentir l’odeur du métal froid. Que portait-elle sur elle ? J’étais presque certain de sentir une de ces armes que je m’étais tant entraîné à maîtriser…

La jeune femme finit par me donner ce que j’attendais quelques secondes après, et je ne pus contenir un ricanement. Je souriais à pleines dents, comme amusé par sa théorie. Elle avait pourtant l’air sérieuse en disant ça, mais peu m’importait. « Vous m’avez démasqué. Je ne sais plus où me mettre… », glissai-je. Elle aura peut-être l’impression que je me fiche d’elle, mais j’étais comme ça. Sans-gêne. J’espérais simplement ne pas perdre une cliente à cause de ça. « En quoi ai-je l’air hypersensible ? », fis-je, curieux d’en savoir plus sur le fond de sa théorie. « Même si vous me bâillonniez devant Titanic ou La Ligne Verte, ça ne me ferait ni chaud ni froid. Vous êtes sûre de ce que vous dites, Miss Marple ? » Je l’avais volontairement assimilée à cette détective non pas pour son physique mais plutôt pour son tempérament. J’avais l’impression d’être la cible de ses curiosités profondes. Et ça, par contre, ça ne m’enchantait pas tellement dans l’idée. Pas qu’elle me déplaise…mais ce n’était pas ce dont j’avais besoin actuellement. J’avais plutôt besoin de me faire oublier.

Et c'était franchement mal parti.
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Dernière édition par Alistair Blackwood le Mer 23 Mar - 14:39, édité 1 fois
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Parfois, n’être que Sharon l’employée juridique a du bon. Elle me laisse plus de liberté. Elle me permet plus de familiarité. Elle m’aide à découvrir de nouvelles facettes de ma personnalité. Avec Sharon la conseillère, je ne suis pas aussi froide en apparence. Toujours aussi sérieuse, oui. Mais je me laisse un peu plus porter par les conversations. Je me fais plus spontanée. Ce n’est pas Sharon l’agent qui aurait lancé des théories infondées à un parfait inconnu. Il y a parfois de quoi devenir schizophrène. Depuis le temps, j’ai appris à gérer les différents personnages. Les différentes identités. Les différents caractères. Je me suis glissée dans la peau de la potiche de service. J’ai joué la millionnaire ennuyée. J’ai prétendu être une secrétaire. J’ai fait la nounou. Chaque alias a sa spécificité. Chaque alias a été créé pour les besoins d’une mission. Chaque alias est mort ou a disparu d’une manière différente. J’entre dans la vie des gens. Je les trompe. Je sors de leur quotidien du jour au lendemain. Aussi rapidement que je suis entrée. C’est probablement la raison pour laquelle les relations ne sont pas mon fort. Je n’ai pas pris l’habitude de me lier d’amitié. Je n’ai pas eu le réflexe de tomber amoureuse. De toute manière, je suis vouée à partir. Partir toujours. Soit cela, soit le manque de temps. Je n’ai pas le temps de me poser autour d’un verre. Je n’ai pas le temps de préparer un dîner. Je n’ai pas le temps de sortir entre amis. Les rares moments de détente sont égoïstes. Je les passe seule, à ne rien faire. Mes plus proches amis sont mes collègues. Les personnes que je croise au quotidien. Les gens avec qui je discute souvent. Avec eux, pas besoin de mentir. Pas de besoin de s’inventer une vie. Ils partagent le même quotidien que moi. Ils connaissent les emplois du temps surchargés. Ils ont l’habitude des missions. La situation me convient. J’ai des tendances solitaires. Alors, cette absence d’amis ne me fait pas souffrir. Ne m’empêche pas de vivre ma vie. La sociabilité de mes alias compensent ma solitude quotidienne.

De tous les personnages que j’ai joués, Sharon du service juridique est celle qui me ressemble le plus. Elle travaille dans le même quartier. Elle est forte. Elle a une vie à cent à l’heure. Elle est aussi plus sociale. Plus amicale que ma vraie version. Elle est du genre à avoir des dizaines d’amis sur qui compter. A passer des soirées à s’amuser comme une folle. Elle est plutôt ce genre là, même si le temps à consacrer à ses proches est plutôt restreint. La conseillère n’a pas de soeur qui est tombée dans le coma après avoir touché un objet alien. Elle n’a pas une arme cachée dans son sac à main. Elle n’est pas courbaturée par les séances d’entraînements. Elle est un peu la femme normale. La femme de base. Se glisser dans sa peau a quelque chose de reposant. De génial. L’espace de quelques minutes, je suis une personne qui profite simplement de la vie. Une personne qui a conscience que chaque moment est essentiel. Une personne qui vit sa vingt-huit année pleinement. “Ça va. Et vous ?” Il n’y a pas plus bateau comme conversation. Pas plus basique. Pourtant, elle me met en condition. Comme les sportifs, j’ai besoin d’un échauffement. “Vous avez l’air moins fatiguée que d’habitude. C’est plutôt positif.” Il est observateur. C’est toujours bon à savoir lorsque l’on veut tenir une fausse identité. J’esquisse un sourire. “La journée a été moins longue que d’habitude, donc ça va.

Le taxi prend la route. Direction le Queens. Mais avant, nous devons survivre à l’épreuve des embouteillages. Et je compte bien mettre en place mon remake du Cluedo. Ici, pas de meurtres. Pas d’armes. Seulement un suspect. je me doute que ce jeu ne mènera à rien. Il n’est qu’un chauffeur de taxi. Dont je ne connais même pas le prénom, d’ailleurs. Passer plusieurs minutes avec une même personne sans savoir comment elle s’appelle a un côté malpoli, non ? A l’occasion, il faudra que je lui demande. Même si une recherche me suffirait à trouver la réponse. Je préfère l’apprendre de sa bouche. Je ne risque pas de me griller, ainsi. Ce cher taxi driver a des occupations étranges, lorsqu’il ne conduit pas son taxi. Il pourrait regarder le football américain à la télévision. Il pourrait collectionner les timbres. Il pourrait repriser ses chaussettes. Non, rien de tout cela. Il préfère amplement errer dans les rues de New-York dans tous ses états. Il aime aussi se promener dans les égouts. Allez savoir pourquoi ! Peut-être que ce jour-là, il a simplement fait tomber ses clés dans une bouche d’égout. J’ai bien mes propres vices et mes propres étrangetés. Pourquoi pas lui ? Ce n’est pas parce que l’on est chauffeur de taxi que l’on a une vie morne et ennuyante. Néanmoins, j’aurais préféré qu’il ait des hobbies plus… normaux. Plus courants. Après tout, je ne suis qu’une cliente. Je n’ai pas mon mot à dire. Je lui présente ma théorie. Je lui explique. Et il rit. Il a compris que c’était une blague. C’est toujours le risque avec les inconnus. Ils ne savent pas toujours si je plaisante ou pas. Si je suis sérieuse ou non. Lui semble avoir perçu l’humour derrière mes explications. Cela dit, j’ai l’impression qu’il se moque un peu de moi. Le bougre ! Je le prends comme un juste retour des choses. Je l’accuse de dealer de la drogue. Il peut bien se moquer de moi. Sinon, ce ne serait pas drôle.

Vous m’avez démasqué. Je ne sais plus où me mettre…” Je lève les yeux au ciel. L’art d’en faire trop. Je ne vais pas lui en vouloir. Pour une fois que je trouve quelqu’un qui surenchère. “En quoi ai-je l’air hypersensible ?” La question est légitime. Au premier abord, il semble sain d’esprit. Plutôt stable, voire même sympathique. On n’imagine pas qu’il puisse être chamboulé. Avec son métier, l’hypersensibilité est mise à rude épreuve. Entre les coups de klaxons, les clients désagréables et les courses interminables, s’il était sensible, il finirait ses soirées en larmes. Il vient de détruire ma théorie. Toute de même, il avait l’air déboussolé l’autre fois. Presque paniqué et pressé. Je l’avais vu de loin. Je ne m’étais approchée que pour qu’il entende que je l’appelais. Ce qui n’a pas fonctionné puisqu’il est passé sans lever les yeux. “Même si vous me bâillonniez devant Titanic ou La Ligne Verte, ça ne me ferait ni chaud ni froid. Vous êtes sûre de ce que vous dites, Miss Marple ?” Je prends un air choqué. Autant pour le surnom que pour son manque de sensibilité. Ce n’est pas possible qu’il soit insensible à ce point. Qu’est-ce qu’il a à la place du coeur ? Un caillou ? Je me rapproche de lui. Je hausse les sourcils, perplexe. “Attendez, vous êtes en train de dire que la mort de Jack, dans Titanic, ne vous a pas arraché une seule larme ? Une toute petite minuscule larmichette ?” Impensable ! Complètement impensable ! Tout le monde a au moins pleuré à ce moment là. L’amour de ces deux êtres. Le sacrifice de Jack pour garder Rose hors de l’eau. Je secoue la tête.

Alors, si Monsieur Sans-Coeur est insensible, dans quel état pouvait-il bien être le jour où je l’ai croisé ? Perturbé, alors. Et puis, ça n’explique pas sa présence vers les égouts. L’hypothèse d’un trafic de drogue peut tenir. Il n’est pas hypersensible à cause de la drogue. Mais, il va quand même dans les sous-terrains de la ville. Je me laisse aller contre le dossier de la banquette. Je croise les bras. Je ne vais pas me laisser démonter. On ébranle pas mes idées aussi facilement. “Okay, Monsieur J’aipasdecoeur, vous n’êtes pas hypersensible. Avouez quand même que ma théorie sur le trafiquant de drogues peut tenir. Vous rencontrez des dizaines de personnes avec votre taxi. Il n’y a rien de plus discret pour faire affaire !” L’agent qui sommeille en moi ne croit pas une seconde que cela puisse être le cas. Il ne s’embêterait pas à prendre n’importe qui. Il serait à son propre compte. Et il m’aurait déjà menacée depuis longtemps. Non, ce n’est pas un baron de la drogue. Seulement un gars qui vaque à ses occupations. Jusqu’à preuve du contraire, il n’est pas méchant. Il n’est pas agressif. Il n’est pas violent. S’il doit y avoir quelque chose, je le verrais bien à un moment. Faire confiance en son instinct. Une habitude que j’ai prise. Même si l’instinct peut parfois se révéler trompeur.
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Trafiquant de drogue…on ne me l’avait jamais faite encore, celle-là. Il est vrai que les taxi-drivers étaient si nombreux en ville qu’il était peu probable que l’un d’entre eux ne soit pas véreux. Je ne me sentais pas particulièrement concerné par ce terme, ni par ces magouilles. Elle aurait même pu me prendre pour un mafieux que ça ne m’aurait pas étonné à ce rythme. Enfin, même la mafia irlandaise n’aurait pas voulu de moi avec mon accent écossais à couper au rasoir. Je pensais ne pas avoir à me faire beaucoup de soucis de ce point de vue là. Maintenant que j’y pense, il me semble déjà avoir eu des propositions douteuses de cet acabit…

Toujours est-il qu’avec le débit de clientèle, on n’avait pas réellement le temps pour les cachotteries. À chaque course, à chaque arrêt de compteur, tout était retranscrit à la seconde près auprès de l’entreprise mère. Tout était tracé, jusqu’à votre pause de deux minutes pour aller pisser dans une station-service. Et ouais…même ça. C’est bien une chose que je n’appréciais pas particulièrement dans ce pays. L’excès. La surveillance. Les règles strictes. Et la justice…pardon, on peut passer ce volet ?

Et pourtant j’étais là. J’avais accepté de prendre ce billet que l’on m’avait payé pour venir ici. Tout frais payés. J’ignore toujours pourquoi j’ai accepté, et qui en a après mon cul. Dans tous les cas, je le saurais tôt ou tard. J’avoue que pour le moment, j’étais bousculé par d’autres révélations - j’espérais simplement que celle-ci n’allait pas se greffer au tas. Ce n’était pas le moment. Et ça ne le serait jamais, j’en étais presque convaincu.

Endormir ma vigilance ? Même si j’essayais de le faire, je n’y parviendrais pas. Pas totalement du moins. L’instinct était trop fort, c’était un appel que je pourrais aujourd’hui qualifier de naturel, mais ce naturel était parfois d’un handicapant monstrueux. J’avais même trouvé un substitut afin de brouiller mon odorat trop développé : la clope. Ce n’était pas mieux que de renifler ce parfum me direz-vous, cependant…je préférais ça qu’être happé par d’autres odeurs, si vous voyez ce que je veux dire. Bien que ce ne soit pas vraiment celles-là qui m’inquiétaient le plus…
Et effectivement, je me sentais particulièrement anxieux à l’idée d’avoir été surpris dans une de mes crises. En était-ce seulement une ? Si je ne l’avais pas détectée par l’odeur que je connaissais au préalable, et que je ne m’en souvenais pas…cela ne pouvait dire qu’une seule chose. Que j’avais été dans cette phase intermédiaire. J’espérais seulement qu’elle finirait par lâcher l’affaire, les soucis s’accumulant contre mon gré. Tout me semblait être un piège, à commencer par cette ville où je vivais désormais. Je glissai une de mes mains du volant à ma cuisse gauche, serrant momentanément mon poing. Le besoin d’extérioriser, même par bribes, s’était fait sentir. Le plus discrètement possible, mais malgré la récurrence des courses de la demoiselle, je n’étais sûr de rien. Pas même qu’elle pût être de ceux dont elle m’accusait.

Son ton s’envole lorsqu’elle rebondit sur ma remarque. J’avais beau avoir une parcelle de sensibilité en moi, je n’avais pas pleuré face à ces films. Je me disais simplement à l’instant que je pourrais très bien être à la place de John Coffey sur la chaise électrique. Sauf que moi, malgré l’injustice que je pourrais éventuellement ressentir (on sait jamais, d’ici que mon avis mute entre temps), je l’aurais mérité. Je n’ai même pas pleuré la mort de celle qui m’a élevé, me dis-je, argumentant dans mon esprit. Cette pensée resta coincée au bord de mes lèvres. Alors un personnage de fiction, ça paraît…

« Un peu démesuré, non ? », prononçai-je librement. C’était dit à mi-voix, pas par honte, mais par réserve naturelle vis à vis des pensées plus ou moins profondes qui m’habitaient.

Elle poursuit.
J’ai envie de sourire. Alors je lui en donne un peu, je crois que ça me détend par la même occasion.  À mon avis, elle pourrait le prendre mal, comme un affront - une moquerie. Je n’y crois pas vraiment moi-même. Le feu passe au vert, mais nous roulons à une allure qui ne nous hissera pas plus loin que dix mètres dès les premières secondes. Cela me laisse le temps de lui répondre en étant concentré, et non pas happé par l’environnement. « Je vous l’accorde. », avouais-je, certainement pour balayer un peu plus ce sujet de notre conversation. Nous reprenons la route, l’avenue s’est décoincée un peu et je peux bifurquer vers l’artère qui nous permettra d’atteindre le quartier-dit. « Donc vous avez vraiment pleuré devant Titanic… », marmonnai-je, remuant le couteau dans la plaie. Ce n’était pas méchant. Mais ça pouvait être interprété comme tel - je connaissais ça, les susceptibles anonymes.

Je poursuivis la route, sans abuser sur la vitesse. Je n’étais pas sur la Honda, ni dans une plaine reculée. J’avais tendance à l’oublier, moi qui appréciait tant l’adrénaline en terre consacrée. Je ne suis pas bavard, mais quelque chose me dit qu’il valait mieux que j’ouvre mon clapet. Mon silence était préjudiciable, je le savais.
Cependant quelque chose me retint. Au loin, je détecte des mouvements de foules. Pas d’impact de balles, de détonation, rien, mais quelque chose clochait. C’était une évidence que je ne pourrais combattre avec aucun argument. Je ne ferais pas le con aujourd’hui : je pris un autre chemin en bifurquant, ravalant ce que je voulais dire un peu plus tôt. Je ne préférais pas mettre de l’huile sur le feu - l’huile, c’est moi, que les choses soient claires. Et qui sait comment je réagirais ? J’inspire lentement et expire de la même façon, poursuivant mon chemin. D’ici dix minutes nous serions arrivés. Enfin, en théorie. Si le détour avait été remarqué malgré sa supposée fatigue, je penserais faire un geste commercial, prétextant l’erreur…c’était le moins que je puisse faire. Cette femme était en civil, et pour moi, de ce fait même, je la considérais comme telle. En soi je n’étais pas si différent, je ne portais aucun uniforme ni titre - si ce n’est celui du terrible monstre qui secouait aujourd’hui le Queens.

L’humain que j’étais voulais lui éviter des ennuis, comme à tous les autres ; même si la situation était potentiellement dommageable de base. Ça, au moins, j’étais certain de m’en souvenir.

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Certains films ont le pouvoir de faire remonter des émotions insoupçonnées. Certains films parviennent à faire peur, à émerveiller, à émouvoir. Certains films sont des bulles de bonheur et d’autres, sont des concentrés d’anxiété. Chacun vit ces films différemment, selon sa sensibilité et sa capacité à recevoir le message. L’ouverture y est pour quelque chose. La curiosité, aussi. Pleurer devant un film semble ridicule. Innocent. Presque immature. Et pourtant, même les plus insensibles sont parfois touchés par une histoire. Le cinéma a le don de générer des réactions incroyables. Avec le théâtre, c’est un monde où le talent parvient à émettre des ondes qui frappent les spectateurs. Je ne suis pas friande de cinéma et pourtant, je ne me lasse pas de voir certains films en boucle. Il y a seulement les films d’action qui ne trouvent pas de sens à mes yeux. Trop d’effets spéciaux. Pas assez réalistes. Trop surfaits. Pas cohérents. Les films d’action sont des concentrés de bêtises qui ont le mérite de m’agacer. Il n’y a qu’à voir la manière dont certains tiennent les armes. Dont certains se battent. Dont certains échappent à des blessures mortelles. La réalité n’est pas ce qui dérange le plus les scénaristes. Je laisse ce genre d'histoires à ceux qui ne s'y connaissent pas. Je me contente des autres genres. Les films historiques, les documentaires, les comédies, les films fantastiques ou de science-fiction… Je mange de tout. Si Alistair est curieux, il a bien dû tomber sur un film émouvant une fois dans sa vie. Il a bien dû lâcher une petite larme. Il a bien dû être ému par une histoire. S’il n’a pas pleuré devant Titanic, peut-être qu’il l’a fait devant un autre film. Qui sait ?

Un peu démesuré, non ?” Il est sceptique. Donc, il a un coeur de pierre. Je lève les yeux au ciel. Il rate quelque chose dans sa vie. Il rate des moments d’anthologie à cause de son absence de sensibilité. Être chauffeur de taxi a brisé son coeur, visiblement. Être chauffeur l’a rendu hermétique. Je ne me laisse pas démonter. Je continue. Je poursuis dans mes théories foireuses sur son comportement. Son sourire n’est qu’une incitation de plus pour continuer. Ce qu’il fait le soir, après le travail, ne m’inquiète pas. Il n’a pas l’air d’être méchant. A la limite, bourru, mais pas violent. Sinon, il m’aurait déjà virée de son taxi, vexé par mes hypothèses idiotes. Il ne ferait pas de mal, à moins d’en être contraint. “Je vous l’accorde.” Ah, enfin ! Il n’a rien à opposer à mes arguments. Aujourd’hui, je l’imagine trafiquant de drogue. Demain, je lui trouverais un air de mafieux russe. Tout ceci n’est qu’un jeu. Une manière de faire la conversation. Il n’empêche que j’ai un sourire victorieux sur le visage. J’ai gagné cette partie. Il y a évidemment ses comportements étranges le soir venu, mais tant que je n’entends pas parler d’un avis de recherche pour un homme d’une quarantaine d’années, je ne m’inquiète pas. Peut-être à tort.

Donc vous avez vraiment pleuré devant Titanic…” Et voilà, l’attaque déloyale. Je croise les bras et chasse l’air satisfait de tout à l’heure. Il n’a pas le droit d’utiliser un sujet pareil. Il se raccroche à des informations qui pourraient me faire honte. Qui pourraient m’embêter. C’est juste, après l’accusation que je viens de proférer. “Je n’ai pas dit ça, mais d’accord, j’avoue, j’ai pleuré. Juste un tout petit peu.” Minimiser est toujours plus facile que d’assumer, n’est-ce pas ? Mais après tout, ce n’est pas pour rien que Titanic a rencontré un si grand succès. A cause de l’émotion provoquée par le destin tragique de ce couple. A cause des espoirs d’évasion nourrie par toute une génération, au siècle dernier. Titanic est la preuve de la naïveté humaine. L’être humain se lance dans des projets extraordinaires qui le dépassent. Lorsqu’il n’est pas à la hauteur, cela se chiffre en pertes humaines.

Il y a de l'animation au bout de la rue. Je me penche en avant pour mieux voir. Des mouvements de foule. Des gens qui s’éparpillent. Il y en a quelques uns qui sont prêts à se jeter sous les roues des voitures. Des fuites. Je ne vois que des silhouettes qui se déplacent. Rien de plus. Je n’ai pas une assez bonne vue pour déceler des détails à plusieurs centaines de mètres. Il faudrait s’approcher. Il faudrait se rendre sur place. J’oublie que je ne suis pas dans un véhicule du S.H.I.E.L.D., mais dans un taxi. Qui tourne à une intersection. Merde. Mon regard ne parvient pas à décrocher de la scène qui se joue au loin. Je pourrais être d’une quelconque utilité, là-bas. Je pourrais m’assurer qu’il ne s’agit pas d’un accident ou d’une attaque. Si seulement le chauffeur voulait bien reprendre la route d’origine. Ce n’est que lorsqu’un immeuble se plante en plein milieu de mon champ de vision que je me secoue. Mon instinct d’agent est réveillé. Finalement, la journée n'est pas terminée. “Est-ce que vous pouvez retourner là-bas ? Il s’y passe quelque chose.” Je sais mon arme à quelques centimètres de ma main. Juste à côté de moi. Elle n’est pas loin. Si jamais j’en ai besoin là-bas, je l’aurais sur moi.

La vigilance voudrait que je me renseigne d’abord. Que je m’assure qu’il n’y ait pas de danger. Que j’appelle des renforts, si la situation l’exige. Que je laisse Alistair en dehors de cette histoire. Il peut juste s’arrêter. Il peut juste me déposer ici. Au moins, il ne prendra pas de risques. Il pourra rentrer chez lui, sain et sauf. “Si vous préférez, vous pouvez me laisser ici.” Mon ton n’a plus rien d’innocent. Mon ton ne laisse plus entrevoir une conseillère juridique excentrique et un peu trop familière. Il est plutôt sérieux, presque autoritaire. Une nouvelle facette de ma personnalité que ce cher chauffeur découvre. L’urgence ne me permet pas de conserver le masque de l’employée. Je ne peux pas perdre de temps en négociation. Finalement, de nous deux, je suis celle qui a le plus de secrets. Je suis celle qui a une double identité. Voire une triple ou une quadruple. Je ne suis pas celle que je prétends être. De nous deux, Alistair est le plus honnête et sincère. Ce serait à lui d’élaborer des théories tordues sur moi.

Je sors mon téléphone portable, à la recherche d’informations complémentaires. Si ce mouvement de foule est assez important, il aura peut-être fait le tour des chaînes d’informations et de la presse. Sinon, les réseaux sociaux sauront satisfaire ma curiosité. Je tapote frénétiquement sur l’écran tactile, avant de lever les yeux vers le chauffeur. Bon okay, il vaut mieux que je me la joue discrète plutôt qu’agent d'une organisation gouvernementale. J’esquisse un drôle de sourire de travers. “J’ai… je crois que mon petit-ami est là-bas.” Il n’a pas besoin de connaître les détails de ce petit-ami imaginaire. Il n’a pas besoin de savoir que je ne suis absolument pas inquiète pour lui. Alistair doit juste savoir pourquoi je dois aller là-bas. Pourquoi je dois aller à la rencontre des problèmes. Je baisse les yeux sur l’écran de mon smartphone. Les médias ne font pas état d’un problème quelconque. Soit l’événement vient tout juste d’avoir lieu, soit il n’y a absolument aucune inquiétude à avoir. Toutefois, je dois en être certaine. Je dois m’en assurer. Je dois le voir de mes propres yeux. Tourner le dos aux gens n’est pas dans mes habitudes. Je n’aime pas non plus attendre que les informations arrivent. Je me connais. Je ne parviendrais pas à dormir, en sachant que j’aurais pu agir. En sachant que je n’ai pas fait mon travail. En sachant que je n’ai pas été à la hauteur. “Je dois vraiment y aller.” Ma voix se fait suppliante. Je croise les doigts pour qu’Alistair stoppe sa voiture au bord du trottoir et me laisse partir. Sinon, je crois que je serais capable de sauter du véhicule en marche ou de sortir mon arme. S'il refuse de me laisser sortir, on peut l'assimiler à une prise d’otage, non ?
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Elle ne réagit pas verbalement à mes remarques, mais je vis, en regardant un instant dans le rétroviseur, qu’elle leva les yeux au ciel. Je devais être fiché à présent, c’était certain…un hypersensible au coeur de pierre, entre nous, c’était tout sauf commun. Au moins je me tenais ma réputation, s’il y en avait déjà eu une sur le sol américain. Il ne me semblait pas que ma prise d’otage ait été médiatisée jusqu’ici. Je ne l’espérai pas du moins. Je ne voulais plus penser à tout ça,  mais pourtant, en dépit d’une bonne volonté manifeste…ces blessures ne guérissaient pas et le passé me rattrapait. J’aurais peut-être dû ne jamais m’engager dans l’armée et rester enchaîné au cottage. Ça m’aurait évité bien des souffrances. J’en aurais certainement recueilli d’autres à la place cependant…
La jeune femme lâche une information qui me satisfait légèrement : elle a laissé quelques larmes face à Titanic. En soi, elle n’était ni la première ni la dernière. C’était plutôt moi qui devrait avoir ‘honte’, même si le fait de ne pas être réceptif à un film n’était pas une catastrophe. Je préférais ne pas m’étaler là-dessus et garder la tête froide autant que je le pouvais. Dans tous les cas, ma contrattaque subtile avait réussi à faire son oeuvre. Visiblement nous avions tout deux gagné une petite part du gâteau.

Alors que j’avais choisi de bifurquer pour m’éloigner du remue-ménage au carrefour suivant, j’eu l’impression d’entendre des battements de coeur plus rapides et cadencés. Ce n’était pas les miens, bien que je fusse plus tendu que d’habitude. Malgré la distance, ça n’avait pas échappé aux yeux de la blondinette et elle semblait être particulièrement touchée par l’événement. Chose que je ne comprenais pas vraiment. Inquiète ? Curieuse ? Peut-être un peu des deux, et même plus encore. Je continuai de rouler mais elle semblait préoccupée, remuante. Lorsque la scène n’était plus dans notre champ de vision, elle se mit à parler.

« Est-ce que vous pouvez retourner là-bas ? Il s’y passe quelque chose. »

Et ça c’était peu de le dire. Devais-je l’écouter ? Pour moi, ça semblait complètement fou, à côté de ce qu’une personne « normale » voudrait faire dans une situation pareille. Je n’irais pas dire que j’avais des consignes, surtout en ces temps difficiles - marqués par la peur et la révolte - mais ça aurait très bien pu être le cas. Je n’aimai pas mentir, mais si ça me permettait de la préserver, je le ferai sans hésiter.

« Je sais. », commençai-je, annonçant par la même occasion mon subterfuge, ma ‘fuite’ calculée. Même si j’essayai de lui expliquer correctement, elle ne comprendrait pas. Je n’aimais pas les mots…surtout ceux qui s’alignaient à profusion et qui ne voulaient plus rien dire. Agir, c’était le bon deal. Le ton de la jeune femme change lorsqu’elle me demande - d’une façon plus posée, dissimulant à peine sa volonté profonde - d’y aller. « Je ne peux pas faire ça… », lui dis-je, croisant son regard assuré dans le rétro. Elle voulait m’éloigner d’ici et y rester. Nous étions tout deux des civils. L’odeur de métal froid que j’avais senti sur elle à son arrivée n’était pas anodine, mais je me refusai de croire qu’elle n’était pas potentiellement en danger si je la laissais descendre ici.  Vint ensuite un autre argument que je crus à peine, je ne savais trop pourquoi… « Essayez de l’appeler ? Ne prenez pas des risques inutiles… » Je voulu terminer ma phrase par son prénom, mais je me rendis compte que je ne le connaissais même pas. Ce léger détail technique m’embêtai un instant, tout comme cette transformation à laquelle j’assistai.

Elle insiste, je continue toujours de rouler, même si ma vitesse est moindre. Dans sa voix, quelque chose d’étrangement sincère. Quelque chose que je n’avais alors jamais entendu jusqu’ici venant d’elle. Le sans-coeur que je pouvais être à ses yeux allait réagir comme l’hypersensible qu’elle aurait voulu que je sois. Ou que j’étais malgré moi du fait de ma condition…

Un juron en gaélique m'échappe.
Je pile et fait demi-tour. Pas question de la laisser descendre ici pour qu’elle s’y rende seule. Je ne veux plus d’autres morts sur la conscience, et encore moins quand je suis moi. J’arrête le compteur tout en retournant dans la direction opposée, puis tourne là où nous aurions dû nous retrouver. Je ne la regardai plus, et accélérai sur cette voie qui avait été étonnamment désertée. Je laissai mon taxi sur un trottoir, à l’arrache, et restai un instant au volant. Je reste coi. Des gens couraient dans notre direction, mais pas que. Un groupe de cinq personnes les talonnait, et j’étais presque sûr qu’ils étaient plus que ça quand j’en avais aperçu au loin quelques minutes plus tôt. Des personnes mal intentionnées s’étaient visiblement immiscées et avaient transformé le tout en émeute. Je vis deux blessés dans le lot de civils. Je ne réfléchis pas davantage et sorti du véhicule. Qu’ils soient mutants ou pas, ils n’allaient pas aller plus loin. Et je n’étais pas le seul à entretenir cette ambition visiblement...

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Sauter du taxi m’effleure l’esprit, même si ce n’est pas le genre de comportements que l’on attend d’une employée de bureau. Elle est l’une de seules possibilités qu’il me reste, si je souhaite sortir de cette voiture et voir ce qu’il se passe dans cette rue. Mais avant de jouer la suicidaire de service, je préfère tenter le tout pour le tout. Je croise les doigts pour que mon interlocuteur ne soit pas un homme bien. Pour qu’il me laisse au bord de la route, sans se préoccuper de ma sécurité. Pour qu’il ne se pose pas de question. Raté. Il n’arrête pas son taxi. Il poursuit sa route. A une faible vitesse. Une vitesse qui me semble pourtant trop élevée. Les immeubles défilent trop vite. Les passants disparaissent trop rapidement. Ce sont des précieuses minutes que je perds. Des minutes que j’aurais pu mettre à profit pour aider ces personnes. Les doigts me démangent. L’envie de sortir et d’agir me titille. “Je ne peux pas faire ça…” Bien sûr que si, tu peux le faire, bon sang. Je le supplie mentalement pour qu’il fasse demi-tour. Je le supplie mentalement pour qu’il abandonne ses scrupules. Je le supplie mentalement pour qu’il me laisse partir. Il peut le faire. Ce n’est pas si compliqué. Il ralentit, il s’arrête et je descends. Rien d'insurmontable. Rien d’impossible. Il a fallu que je tombe sur un gars bien qui ne souhaite pas que je me mette en danger. La société se porte mieux avec des gens comme lui. Sauf à ce moment précis. Sauf quand il empêche des personnes de secourir.

Essayez de l’appeler ? Ne prenez pas des risques inutiles…” Des risques inutiles… Je suis montée dans le taxi d’un trafiquant de drogue, j’ai pris un risque inutile. Je me déplace en voiture, c’est un risque inutile. Il y a des risques inutiles partout. Même le simple fait de griller son pain au petit-déjeuner peut être risqué ! Alors, qu’il ne m’embête pas avec ses remords. J’insiste. Je mets toute ma volonté dans une dernière tentative. La dernière avant que je braque mon arme sur sa tête et que je lui intime l’ordre de stopper son véhicule. La dernière avant que je fasse usage de force. Il ne mérite pas un traitement pareil. Il ne mérite pas de ternir sa journée avec une menace de ce genre. Des secondes passent. Je le fixe, les yeux fixés sur le rétroviseur. Finalement, son regard change. Il lâche un juron dont je ne saisis pas le sens. Je sens le taxi freiner. Il fait demi-tour. Les règles du code de la route n’ont plus d’importance. Elles sont inutiles. Elles sont contraignantes quand la survie de la population est en jeu. Le soulagement m’envahit. “Merci. Merci beaucoup !” L’usage de mon arme ne sera pas nécessaire. Parfois, les mots suffisent. Je range mon téléphone dans une poche. Je me rapproche de la fenêtre du côté passager, afin de mieux voir. La rue se dresse bientôt devant nous. C’est la chaos total. Des gens courent partout, dans tous les sens. Il devient impossible de progresser. Trop dangereux. Le chauffeur arrête son taxi sur un trottoir. Le silence dans l’habitacle est soudain lourd. Nous avons conscience qu’une scène surréaliste se déroule sous nos yeux.

Je prends une inspiration. J’analyse la situation. Deux groupes. Une fuite. Une chasse. Ils se dirigent vers nous. Qui que soit ces personnes, certains fuient pour leur survie. D’autres courent pour tuer et blesser. Par terre, des pancartes. Sûrement une manifestation qui a mal tourné. Sûrement une opinion qui dérange. J’attrape mon sac à main et j’y cherche mon arme. La voilà. Ma paume enveloppe la forme familière de la crosse. Je vérifie les munitions. Je m’assure que le cran de sûreté est mis. L’objectif est de maîtriser la situation, sans dommage collatéral. L’objectif est de ne pas tuer de civils innocents. Je glisse l’arme à ma ceinture. Je m'assure qu'elle est bien cachée par mes vêtements. Avant de sortir, j’attrape mon téléphone. Qu’il s’agisse d’inhumains, de mutants ou d’humains, le S.H.I.E.L.D. doit être prévenu. “Et merde !” Il y a des blessés. Il y a des regards affolés. Il y a des bousculades. La situation est pire dehors qu'à l'abri dans la voiture. Je jette un oeil en direction d’Alistair. Il est hors de question qu’il vienne. Il est hors de question qu’il se mette en danger. Il est hors de question que je m’inquiète pour lui. Il va retourner dans son taxi immédiatement. “Vous ne devez pas rester là. C’est dangereux.” Ma voix porte par-dessus les cris et les appels à l’aide. Je ne peux me lancer dans ce foutoir, sans m’assurer qu’il soit sain et sauf. C’est important. Les victimes seront assez nombreuses pour le rajouter à la liste. Mais je ne suis que l’employée de bureau à ses yeux, à la recherche de son petit-ami. Je n’ai aucune autorité, aucune crédibilité. Surtout, je suis mal placée pour lui demander de s’en aller. Visiblement, j’ai vu juste. Il ne fait pas mine de partir.

Alors, je m’élance. Protéger les civils. Sécuriser les lieux. Je compose le numéro d’urgence qui nous permet de joindre le S.H.I.E.L.D. à tout moment. Téléphone à l’oreille, je vais en direction des problèmes. Je sens le canon froid contre ma peau. Un contact rassurant. Au cas où. Je préfère régler les problèmes autrement. Je préfère favoriser les combats à mains nues, plutôt qu'armée. Je n’entends pas ce qu’il se passe au téléphone. Les bruits aux alentours m’assourdissent. Il faudrait que je m’arrête. Il faudrait que je me cache dans un coin calme. Impossible. Impensable. Je fais signe au groupe de fuyards de se dépêcher. De partir. De courir. Ils n’ont pas besoin de moi pour le faire. La panique dans leurs yeux fait froid dans le dos. Ils sont plongés dans un cauchemar dont ils ne trouvent pas l’issue. Je sais que j’ai bien fait d’insister. Que j’ai bien fait de revenir sur les lieux. Le chauffeur de taxi a pris la bonne décision. D'ailleurs, je ne le vois plus. Je l'ai perdu de vue. “Att…” Je n’ai pas le temps de finir. Je n’ai pas le temps d’arriver. Je n’ai pas le temps de la retenir. Une femme a été attrapée. Tirée en arrière avec brusquerie. Je range le téléphone. Je me rapproche calmement. Ma main se faufile dans mon dos, à la recherche de mon semi-automatique. Du bout des doigts, je devine sa présence. Je ne le sors pas encore. Je garde secret cet atout. Je m’arrête à bonne distance d’eux.

Je ne sais pas de quoi ils sont capables. Je ne sais pas jusqu’où ils veulent aller. S'ils montrent clairement leurs armes, d'autres pourraient se cacher. Des armes blanches et à feu pourraient être dissimulées sur eux. Avant d’agir, je préfère être certaine que la jeune femme n’est pas en danger. “Laissez-la s’en aller.” Mon intonation n’est plus celle empruntée durant le trajet. Autoritaire. Inflexible. Il ne permet pas la négociation et les protestations. Le groupe a arrêté de martyriser leur victime. Ils la poussent de côté, l’abandonnent par terre. Ils échangent un regard et s’avancent dans ma direction. J’ai peut-être sous-estimé leurs réactions. Peut-être légèrement. Seule contre cinq personnes. Une matraque. Un canif. Une batte. Un pistolet. Et… une chaîne. Vraiment ? Le gars s’est cru dans un mauvais film ? Je ramène mon bras le long du corps. Je recule. Des pas lents qui me ramènent plus près de la voiture de taxi. Des pas lents qui les forcent à se rapprocher. Je peux gérer les armes blanches. Pour ce qui est de l’arme à feu, je ne peux pas prédire quand l’homme aura décidé d’en faire usage. Je le garde à l’oeil. Je ne le quitte pas du regard. Je dois juste être assez proche d'une voiture pour me planquer derrière, en cas de coup de feu. Une nouvelle silhouette entre dans mon champ de vision. Je mets quelques secondes à le reconnaître. Le chauffeur de taxi. Je le vois plus souvent de dos ou à travers le reflet du rétroviseur. Le voir debout, en pleine possession de ses moyens, le rend presque méconnaissable. “Je vous ai dit de vous en aller.” Il va se faire tabasser, s’il reste. Et je n’y tiens pas. Je ne pense pas non plus qu’il porte un gilet pare-balles. En temps normal, je le décrirais comme un hypersensible, doté un coeur de pierre. Finalement, son problème est peut-être ailleurs. Son problème se situe peut-être dans le fait qu’il n’ait pas peur des dangers. Il devrait fuir, comme la plupart des gens. Pas rester là, pour une cliente qui lui ment. Cet homme est suicidaire.

Et puis, je réalise que je n’ai pas le comportement d’une personne censée, non plus. Je n’ai plus l’air de l’employée de bureau. Plutôt d’une femme aussi suicidaire que lui. Mais il doit absolument partir. “Je saurais me débrouiller toute seule. Je suis certaine que ces… charmants jeunes hommes m’indiqueront où trouver mon copain.” Je désigne le groupe. Je dis la vérité. Je suis capable de m’en défaire, seule. A moins qu’ils se révèlent être des surhommes. Dans ce cas, ni le chauffeur de taxi ni moi ne pourront agir. Le risque est trop élevé pour que je n’essaye pas de le dissuader de rester. Tout à l’heure, j’ai bien réussi à le faire flancher. Pourquoi pas une deuxième fois ?
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Je n’ai rien à perdre. Eux, si. Et j’étais certain qu’elle était aussi dans ce cas.
Alors qu’elle était déjà dehors, j’avais appelé les urgences au plus vite en situant précisément les lieux, notamment en vue de la direction que prenait le groupe d’innocents. Je n’avais absolument pas en tête qu’elle puisse être autre chose, et je ne l’avais pas vue coller son téléphone à l’oreille, mon regard s’étant perdu ailleurs. Certains étaient blessés, et même si j’aurais été en mesure de les aider, je n’étais pas aussi bien équipé que je l’aurais voulu. Laisser cette femme foncer dans le tas n’était pas non plus dans mes projets, la seule chose que j’étais en mesure de faire, c’était de l’aider à retrouver son petit-ami (chose à laquelle je croyais à peine au vu de sa façon d’agir). Mais ses remerciements sincères auraient pu jouer en sa faveur. Or j’avais cette fâcheuse manie d’écouter mon instinct - s’il s’agissait vraiment du mien. Le ton qu’elle avait employé plus tôt à l’arrière du taxi n’avait rien à voir avec sa façon de se comporter habituellement. Cela faisait comme une tache au milieu d’une toile, on ne comprenait pas ce qu’elle faisait là…jusqu’à ce qu’on se rende compte qu’elle était la signification du tout.
Elle était un paradoxe à elle-même, et j’étais encore loin du compte. Tout est automatique, s’en est troublant. Le mensonge me paraît de plus en plus évident et à bien des niveaux. J’avais de quoi imaginer mille et une possibilités. Sauf que l’heure n’était pas à cette activité. Sa voix me démontra par quatre qu’elle n’était pas d’accord pour que je reste. Son avis m’importait peu. Nous étions tous les deux dans le même idéal, celui de protéger au maximum les civils. Sauf que nous étions sensés l’être nous aussi, l’un comme l’autre. Sensés. Au delà de tout ça, nous étions surtout des menteurs.

« Navré. », lui dis-je simplement. C’était ma façon disciplinée de lui dire que je n’avais pas besoin qu’on me le rappelle, ou du moins, que ça ne me dissuaderai pas. Je brassai du regard un instant le groupe, qui semblait perdre patience. Je suivi des yeux la victime qui s’était empressée de s’enfuir après avoir eu du mal à se relever, même dans l’urgence. Au même moment, la légère brise m’amena une odeur de métal froid, et les sons quant à eux, en dehors des chaînes, m’indiquèrent qu’une autre arme chargée était sur l’un d’eux. Il fallait que je la prévienne, mais elle se douterait alors de quelque chose.

« Vous n’y croyez même pas vous-même… », lui glissai-je alors qu’elle tentait de me convaincre qu’elle allait jouer de diplomatie avec ces singes. J’aurais pu être vexé, cette fois-ci.

Me faire partir sous l’insistance ne marchera pas une seconde fois. Une employée de bureau et un chauffeur de taxi face à des voyous, ça commençait comme un film de série B. « Au moins, vous êtes armée. », marmonnai-je à son égard, me confrontant à cette pseudo-incrédulité dont j’aurais pu être empreint. Mon visage s’incline un peu plus vers elle, feintant un revirement d’attention. Je lui soufflai alors un détail qui pourrait lui sauver la vie, au détriment de bien des malheurs qui pourraient me concerner par la suite. « Le glandu au canif a une arme à feu coincé à sa ceinture. » Mes yeux se réorientent vers eux, concentré. Je sais dire, avec plus de précision, où il se trouve. « …flanc droit, vers l’arrière. »

« Vous êtes de ces mutants, c’est ça ? », brailla l’un d’eux. « Ou alors vous êtes juste trop cons pour soutenir ces erreurs de la nature ! » Ils n’étaient pas évolués ou mutants, ça, c’était déjà quelque chose de bon pour nous. Sauf qu’ils étaient plus que ça…eux qui avaient joué les trouble faits dans une manifestation pacifiste pro-mutante. J’entendis d’autres bruits, puis une odeur de sang. Ça se mélange, je ne comprends plus rien, car en plus de ça, ce sont des pleurs d’enfant qui m’intriguent et m’interpellent.

« On s’en fout, balança celui à l’arme au poing, on les défonce ! »

À ses mots, ils se ruèrent sur nous. Celui qui tenait l'arme me visait délibérément l'épaule.
Mais les pleurs ne cessaient pas, et l’odeur de sang se faisait toujours plus forte, m'enivrant maladivement. La femme ou l’enfant ? Le temps d'essayer d'y réfléchir et le coup était parti.

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Il n’y a plus de gentille employée de bureau. Il n’y a plus de jeune femme inoffensive. Il n’y a plus que l’agent sur-entraînée. Il n’y a plus que la femme armée et habituée aux situations complexes. De même qu’il n’y a plus de chauffeur de taxi discret et fuyard. Maintenant, c’est un homme prêt à se mettre en danger pour aider des inconnus. A croire que Sharon n’est pas la seule à cacher des secrets. Pourtant, elle n’en démord pas : il doit partir. Il doit la laisser gérer la situation toute seule. Il peut rejoindre son taxi. Il peut repartir chez lui. Non, il ne peut pas. Il doit. Admettons qu’il ne soit pas qu’un conducteur, il n’a rien à faire ici. Civil, militaire, policier sous couverture. Peu importe. Sa place n’est pas là. Elle ne peut pas prendre ce risque. Mais il ne semble pas vouloir être coopératif. Sinon, ça n’aurait pas été drôle. “Navré.” Elle serre les dents, en réponse. Il peut l’être. Il peut être désolé. Il peut être navré autant de fois qu’il le souhaite. Elle aurait préféré qu’il s’éloigne. Elle aurait préféré qu’il prenne ses jambes à son cou. Elle aurait pu sauver sa couverture, au moins. Elle aurait pu agir sans craindre qu’il soit blessé ou qu’il découvre qu’elle est légèrement moins innocente qu’une employée du service juridique.

Elle insiste. Juste une dernière tentative. Juste un dernier espoir. Juste une dernière chance. “Vous n’y croyez même pas vous-même…” Évidemment qu’elle n’y croit pas elle-même. Évidemment qu’elle ne compte pas discuter sagement avec ces messieurs. Elle serait suicidaire si elle pensait pouvoir les raisonner. Tant pis pour lui. Il assumera. Il supportera la douleur en silence. Il acceptera de repartir avec un peu de sang sur sa veste. Parce qu’elle va devoir compter sur lui. S’il se passe quelque chose, il sera sa seule aide. Il n’a pas intérêt à fuir dès la première frayeur. “Pas vraiment.” Elle hausse les épaules. La discussion peut parfois servir. Dans des situations où la personne à raisonner n’est pas armée. Dans les situations où des civils ont été épargnées. Dans le cas présent, peut-être est-il plus intelligent de négocier, plutôt que de foncer dans le tas. Mais ils n’ont pas tout à fait le choix. Deux contre cinq. Peut-être même plus. Le combat semble déloyal. L’affrontement va être rude. Ils vont devoir faire face à des gens qui ne se se battent pas tous les jours. Qui ne s’entraînent pas. En leur retirant leurs armes, le chauffeur de taxi et l’employée de bureau pourront prendre le dessus. C’est le plan qui se dessine dans le cerveau de Sharon. S’approcher. Les désarmer. Les assommer. Un plan en trois temps. Un plan en trois axes. Un plan réalisable.

Au moins, vous êtes armée.” Elle jette un coup d’oeil à l’homme. Elle est certaine d’avoir sorti l’arme une fois qu’il était dehors. Elle est certaine qu’il ne l’a pas vue. Elle fronce les sourcils. “Comment… ?” Elle ne termine pas sa question. Peu importe. Elle lui arrachera quelques réponses plus tard. L’instant n’est pas aux détails. Mais elle réalise de plus en plus qu’il n’est pas ce simple conducteur de voiture. Qu’il n’est pas que l’homme qui se promène tous les jours dans un véhicule. Il se pourrait que ses balades dans les égouts soient plus que des balades. Dès ce soir, elle fera quelques recherches sur lui. Des recherches approfondies. Des recherches complémentaires. “Le glandu au canif a une arme à feu coincé à sa ceinture… flanc droit, vers l’arrière.” Cette fois, l’incrédulité se lit sur son visage. Comment est-ce qu’il fait ? Un sixième sens ? Une vision infrarouge ? Un pouvoir ? Mais elle note l’information. Pouvoir anticiper la réaction du gars est un avantage. Connaître son armement est un point positif. L’homme est possiblement dangereux. “Vous êtes de ces mutants, c’est ça ? Ou alors vous êtes juste trop cons pour soutenir ces erreurs de la nature !” Typique.

Au S.H.I.E.L.D., ils ont constaté une recrudescence des actes discriminatoires contre les mutants. Une volonté de leur nuire. Un besoin de les éradiquer de la surface de la planète. L’évolution fait peur. L’évolution est incontrôlable. Ce qui explique pourquoi certains réagissent si mal. L’être humain a besoin de se sentir supérieur. Mais là, en venir à faire du mal envers des semblables est ridicule. Pas loin d’eux, un enfant est également en train de pleurer. Un enfant qui est probablement séparé de ses parents. Un enfant qui doit être apeuré. Sharon croise les doigts pour qu’il n’ait rien. Pour que ces abrutis ne lui aient pas fait de mal. “On s’en fout, on les défonce !” Ils ont envie de se battre. Ils en deviennent encore plus dangereux. Ils ne lâcheront pas l’affaire. On dirait un troupeau. Un troupeau qui se met à courir vers eux. Un troupeau qui se précipite sans aucune cohésion. Il y a des signes qui annoncent qu’une personne va tirer. La manière de lever l’arme. La façon dont les doigts se contractent. Et le regard. La lueur meurtrière qui passe dans les yeux. Elle a réagi au moment où le coup est tiré. Elle s’est jetée sur le chauffeur de taxi. Elle ne peut pas le projeter par terre, mais elle est parvenue à le décaler de la trajectoire. La balle se fiche dans un lampadaire, à deux mètres derrière eux. “Ça va ?

La situation n’est pas propice pour ce genre de conversations. Mais elle doit s’assurer qu’il n’est pas blessé. Elle doit s’assurer qu’il est encore en état. Son petit doigt lui dit qu’elle aura besoin de lui. Pas plus tard que dans dix secondes, quand le groupe d’idiots les aura rejoints. Sharon pense un instant à sortir son arme et à les braquer. Ce ne serait pas judicieux. Il s’agit d’un atout qu’il vaut mieux sortir au dernier moment. Il y a encore une possibilité de les désarmer et de leur apprendre les bonnes manières. “Je suppose que vous n’êtes pas seulement un chauffeur de taxi, alors j’espère que vous savez vous battre.” Il pourrait s’agir de n’importe qui. Et même d’un agent du S.H.I.E.L.D. Il est impossible de connaître toutes les personnes qui y travaillent. Encore moins quand elles sont en couverture. Elle en sait quelque chose. Ce chauffeur pourrait passer ses week-ends au stand de tir. Il pourrait débriefer toutes les semaines avec un agent de liaison. Il pourrait être n’importe qui. Il pourrait avoir n’importe quel pouvoir. Pour le moment, elle le considère comme un allié. Mais pour combien de temps ? Elle lui tourne le dos, prête à frapper le premier qui s’approchera. “Et si votre instinct ou peu importe ce que c’est peut aider, ça serait bien de vous en servir.” Elle a l’expérience de son côté. Elle a les entraînements quotidien. Elle a les réflexes. Elle a les automatisme. Elle n’a pas l’anticipation. Elle n’a pas la possibilité de lire dans l’esprit des adversaires.

Ils sont là. A un mètre d’eux. Le regard méchant. Les armes prêtes à frapper. Le plus près est celui avec la matraque. Elle esquive un coup balancé dans ma direction. Elle en profite pour attraper son bras et y asséner un coup de genou dans le coude. La matraque tombe par terre. Le gars pousse un beuglement. Il se rabat sur ses poings, en essayant de la frapper au visage. Elle fait simplement un pas de côté. Elle laissa sa jambe traîner sur son passage pour lui faire un croche-pied. Il trébuche et s’écrase dans la rue, dans une position ridicule. Et de un. Elle jette un coup d’oeil en direction du chauffeur de taxi. Il semble se débrouiller, lui aussi. Elle ramasse la batte. Pour ne pas qu’elle tombe entre les mains de ces crétins. Pour la donner à son équipier du jour. Autant qu’il ait sa propre arme, lui aussi. Elle lui envoie l’objet. Dans la continuité de son geste, sa main vient récupérer le semi-automatique coincé dans son dos. Elle le pointe en direction de celui qui en tient un dans la main. Du coin de l’oeil, elle l’a vu s’approcher dangereusement. “Ça suffit. Tu vas donner ton arme au monsieur. Et sans gestes brusques.” Elle y croit peu. Voire pas du tout. L’homme ne s’embêtera pas à être intelligent. Il ne s’encombrera pas de pensées lucides. Il va foncer tête baissée. Elle s’en doute. Mais elle est prête à appuyer. Elle est prête à tirer. Elle est prête à libérer une balle. Elle rate rarement sa cible, malheureusement pour lui.
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Une couverture de pseudo-surhomme était en train de tomber. Le voile que je n’avais même pas essayé de dissimuler par le passé. Il y a quelques semaines, j’aurais encore été à déceler des choses que personne n’entendait, voyait, ressentait. Aujourd’hui j’en étais conscient et je commençais à comprendre davantage ce dont j’étais capable. Il y avait des choses, comme les sens, que je pouvais mesurer plus ou moins discrètement - sauf dans le cas présent, où une « civile » jouait sa vie. Mais le reste…même dans les égouts, je ne préférais pas essayer. Dans le pire des cas elle me dira mutant intégriste, dans le meilleur des cas je ne serais qu’un évolué comme les autres, sans prétention ni ambition malsaine. J’aurais aimé plaidoyer dans ce sens, mais l’Autre n’était visiblement pas le meilleur sujet à aborder…ni l’argument le plus viable.

Une enfant. Blessée. L’odeur du sang, elle me vient brutalement, elle s’intensifie au fil des secondes qui filent. Je crois que je me rappelle d’une gamine qui pleurait, une gamine blessée qui se déshumanisait. Je me souviens de sa voix mais pas de ses traits. Je ne pouvais pas la laisser. Je…
La réalité me frappe de nouveau, tout comme la détonation qui vint irriter mon audition sensible. J’ai cru sentir quelqu’un me décaler dans l’urgence, il s’agissait de l’inconnue armée. Ce n’était pas la peine de bégayer une réponse, mon cerveau était déjà en pilote automatique. Mes gestes suivirent. Je n’étais pas blessé, j’avais évité de peu, grâce à elle, la balle qui m’était destinée à l’épaule (à croire qu’il n’avait pas voulu me tuer, mais m’esquinter ni plus ni moins). Était-ce des tueurs ? Non. Dans leurs yeux, ce n’était pas ça que je lisais. Des tueurs, j’en avais vu. J’en avais côtoyé. Des tueurs qui aiment tuer, des destructeurs nés ou modelés pour l’être. Chaque fois que je croisais mon reflet, cette terrible question se soulevait.

« Je ne l’ai pas toujours été… », me défendis-je alors que je m’apprêtai à virer de bord. Je ne répondis pas aux mots qui suivirent. Je m’étais déjà servi de cet ‘instinct’ et elle était la première à le savoir. Cette exposition ne me plaisait pas. Mais je m’étais résolu à ne pas la laisser ici, quant bien même elle semblait savoir se défendre. Je ne sais pas quoi faire, mais je dois agir d’abord sur place avant de rejoindre l’enfant. Elle s’est cachée derrière des bennes à poubelle, elle peut attendre. Mais elle a peur, son coeur bat vite…trop vite.
Je suis ancré dans la réalité, prêt à faire front. Je me souviens comment faire, car je l’ai appris. Ils ne sont pas entrainés, ou alors très peu. Ils n’ont aucune chance. Deux d’entre eux étaient presque synchronisés et s’étaient décidés à m’attaquer. Chaînes et matraque. J’aurais dû m’en douter, au vu de mon gabarit, ce n’était pas la peine d’essayer de foncer en solo. J’ai décidé d’intercepter la chaîne dans son mouvement pour l’enrouler autour de mon poignet. Malheureusement, le garçon avait eu la même idée afin d’avoir une meilleure mobilité, mais il s’était prit au piège de sa propre arme. D’un coup sec je le tirai vers moi, et la matraque de son comparse s’échoua dans le creux de son coude au lieu du mien. Le bras tendu dans cet élan que j’avais engendré, le craquement se coupla d’un semi-cri de douleur. Étant parallèle à lui et derrière qui plus est, je lui donnai un coup dans l’un de ses genoux afin de le faire tomber. Je ne jaugeais certainement pas ma force, car de toute évidence, je n’avais même pas conscience de son étendue. Je déroulai la chaîne autour de ma main et me prit un coup de matraque dans l’avant-bras que j’avais posé en défense. Ce qui me permit d’attraper le sien et de le tirer lui aussi vers moi, lui offrant un de mes genoux dans les côtes. Encore un craquement désagréable à mes oreilles, sur lequel je ne préférais pas me concentrer trop longtemps. J’avais cette foutue impression que les dégâts n’étaient pas normaux, ou du moins n’étaient pas comparables à mon gabarit, quant bien même étais-je grand et potentiellement costaud.

Je n’étais pas uniquement ‘là’, j’avais l’impression d’être partout à la fois. Mes sens ne me laissaient pas de répit et une bonne partie de mon instinct me guidait actuellement. J’avais encore l’homme courbé contre moi alors que l’odeur du sang me revenait comme l’ultime évidence. Moins de deux secondes plus tard, j’entendis la jeune femme m’interpeller très brièvement. Aussi tirai-je mon bras blessé afin d’attraper la batte qu’elle venait de me lancer, que j’utilisai aussitôt pour l’écraser contre le dos que j’avais sous les bras et le menton, et ce malgré la douleur que cela m’engendra au passage. Il tomba net à mes pieds. Sans plus attendre et sans lâcher mon arme, j’étais allé voir en vitesse la gamine qui était cachée derrière la benne, enivré par ce parfum métallique qui avait ce don de me mettre dans tous mes états. Elle avait tout le bras éraflé, ce n’était rien de grave mais son âge - que j’estimais à 6 ans, sans être pour autant sûr de ce que j’avançais - ne me permettait pas de la laisser seule. Elle était perdue et effrayée par ce qui était en train de se passer. Ma main tremblait nerveusement, et mon avant-bras était, sous mon manteau, certainement couvert d’un hématome frais et épars. Ce n’était pas ça qui me donnait ces spasmes aux mains, mais autre chose. « C’est ma voiture, tu seras en sécurité dedans. Viens. », lui dis-je dans l’urgence, sans peser la possibilité qu’elle refuse par peur. Chose qui ne fut pas le cas, aussi étrange que cela puisse paraître. Finalement, si j’avais l’air d’un psychopathe pour un certain nombre de gens, il me restait encore un peu de cette essence que je croyais disparue depuis longtemps. Je la prends dans mes bras et la soulève, puis la dépose dans la voiture. Je repartais après lui avoir offert un sourire sincère quoique bref, ma main glissant sur la petite tête brune. J’avais à peine refermé la portière que je vis la conseillère dégainer son arme, et à juste titre, puisqu’elle-même était menacée.

Contrairement à moi, ils étaient certainement pris dans le vif de l’action. Pas la peine d’y aller avec des pincettes, ça se jouait désormais à la seconde, et j’étais déjà parti dans leur direction, sprintant dans le dos de celui qui la menaçait. À ce moment-là, il était justement en train de profiter de sa pseudo-supériorité, qui n’allait pas durer aussi longtemps que prévu. « Tu mérites ce que tu vas prendre, grogn… » fit-il presque essoufflé, mais je le coupai dans son discours. Le second n’avait pas l’arme au poing mais avait le canif dégainé, et prêt à en faire autant avec l’arme à feu qu’il cachait si la situation partait à leur désavantage. Ce qui était désormais le cas, et pour de bon. Je l’avais déséquilibré presque totalement en arrivant sur lui, donnant la priorité à ce bras tendu au bout duquel se trouvait son arme. Je l’avais agrippé à ce niveau-là de ma main valide, tandis que l’angle de mon autre bras pressait sur son cou afin de le faire faiblir.

Il ne parvenait même pas à me tenir tête au vu de la force déployée pour ramener son bras vers le ciel. Ce qui ne l’empêcha pas, pourtant, de tirer un coup dans le vide, à la verticale. Et d’essayer de me donner vainement des coups de tête. L’homme au canif jugea bon de s’attaquer à moi par le flanc droit plutôt qu’à une femme armée…car j'allais, comme son compagnon, être le meilleur bouclier humain qu'il puisse trouver.

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Ce qu’il y a de remarquable dans les combats, c’est la rapidité d’enchaînements. La rapidité des gestes. La rapidité d’exécution. Chaque mouvement est effectué par réflexe. Chaque mouvement est une réponse à une attaque ou à une défense. Le temps de la réflexion n’existe pas. Il est impossible de mettre la scène sur pause pour réfléchir à la prochaine gestuelle. Il est impossible de demander des temps morts. Il est impossible de revenir sur un coup qui n’a pas fonctionné. Un combat est comme une danse improvisée. Tout le corps est sollicité. Les bras, les jambes, le dos, les hanches, la tête. Tout doit être mobile. Tout doit se mouvoir. Tout doit répondre. Il faut faire fi des douleurs et des dangers. Il faut simplement se concentrer sur la neutralisation de l’ennemi. Les entraînements sont de bons moyens d’y arriver. Mais quand la réalité dépasse les entraînements, il est important de ne pas perdre l’idée que la mort peut survenir. Que les risques sont réels. Dans le cas présent, Sharon en a conscience. Elle a également conscience que ses adversaires du jour ne sont pas entraînés. Elle sait aussi qu’ils sont assez idiots pour la sous-estimer. Et c’est ce qu’il se passe. Ils se mettent à plusieurs pour affronter le chauffeur de taxi. Assis derrière son volant, il semble moins baraqué et imposant. Une fois debout, elle réalise qu’il est plus grand et costaud. Il est une cible de choix. Un ennemi à abattre en premier. Pour autant, il se débrouille à merveille. Il se débrouille avec aisance. Son comportement est celui d’une personne ayant été formée au combat. Il n’y a aucun doute. Ses aptitudes sont d’un grand secours. Et un poids en moins sur la conscience de Sharon. Après tout, il sait se défendre, elle n’a pas besoin de courir pour l’aider. Au contraire, les rôles sont inversés. L’arme pointée sur Sharon semble dangereuse. Prête à lâcher une balle qui la perforera. Elle tient elle aussi son arme. En direction du gars. Elle ne vise pas sa tête. Elle ne vise pas son coeur. Elle cible plutôt son épaule. Loin de tout organe vital. Elle n’a pas pour habitude d’abattre froidement des crétins, en pleine rue. Tant qu’elle le peut, elle préfère éviter. Aussi idiot qu’il puisse être, il n’a pas vraiment l’intention de la tuer. En tout cas, Sharon l’espère. Elle lui ordonne de rendre son arme. Elle lui ordonne de capituler. Mais c’est sans compter la détermination de l’homme. “Tu mérites ce que tu vas prendre, grogn…” Dans d’autres circonstances, elle aurait levé les yeux au ciel. Sauf qu’une arme la menace. Elle n’a pas le temps pour s’exaspérer. Elle n’a pas le temps pour s’énerver.

Par contre, elle a le temps de voir le chauffeur de taxi débouler derrière. C’est l’affaire de quelques secondes. De quelques coups douloureux. La situation tourne vite à son désavantage. Sharon prend quelques secondes pour réfléchir. Impossible de tirer. Ils bougent trop. Elle ne peut pas prendre le risque de tirer sur son acolyte. Alors, elle range de nouveau son arme pour partir en direction des assaillants. Elle attrape fermement l’homme au canif par les épaules et le tire en arrière. Elle profite de sa confusion pour le désarmer et lui asséner un coup de coude dans l’abdomen. Dans un ‘ouch’ de douleur, il se plie en deux. Sans attendre qu’il se relève, elle enfonce son genou dans son visage. L’arcade sourcilière craque. Il lâche un beuglement, avant de reculer. Elle récupère le canif pour ne pas lui donner l’opportunité de le leur planter dans le dos. Elle a seulement quelques secondes pour trouver une ouverture dans le combat entre l’homme armé et le chauffeur de taxi. Pour analyser le duel. Pour déceler une possibilité d’intervention. La situation est compliquée. L’arme à feu peut être mortelle et au vu de ce qu’il se passe, elle pourrait décharger une nouvelle balle pour un rien. Sharon fonce sur le bras encore libre de l’homme. Elle le tord dans le dos et approche le canif de sa gorge. Pas trop près pour ne risquer de lui inciser la peau. Pas trop loin pour que la menace soit réelle. Elle resserre sa prise sur son bras. “Tu as décidé d’être un peu plus coopératif ou pas ?” Ses lèvres sont proches de son oreille. Du bluff. Du pur bluff. Mais ça, l’homme n’est pas obligé de le savoir. Il n’est pas forcé de penser qu’elle n’ira pas au bout de son geste. Elle sent déjà qu’il s’est tendu. Il hésite. Coincé entre un chauffeur de taxi colossal et une femme armée. Il a peu de chances de s’en sortir en un seul morceau. Il lâche un grognement. Sharon l’imagine en train de calculer les différentes issues. Il ne peut plus attendre l’aide de ses compagnons. Ils sont tous au sol, à gémir de douleurs et à implorer l’aide de leur mère. Il n’y a plus que lui. Un contre deux. “Okay, okay ! Lâchez-moi.” Elle jette un regard à son comparse. Elle retire le canif de sous sa mâchoire. Elle ne lâche pas pour autant le bonhomme. Pas tant qu’il n’est pas désarmé. Pas tant que le chauffeur n’est pas à l’abri d’un nouveau coup. Seulement après, elle lâche son bras. Elle recule d’un pas. “Je préfère ça.” Dans sa bêtise, il est parvenu à être lucide. L’espace de trois secondes. L’espace d’une prise de décision. Maintenant, que faire de lui ? Les autres sont trop assommés pour faire preuve de résistance ou pour bouger. Mais lui est encore debout. Sharon ne se promène pas avec des menottes. Ni avec une corde, d’ailleurs. L’assommer serait plus commode, mais elle ne s’y résout pas. Elle va seulement le surveiller jusqu’à ce que les secours débarquent. D’ailleurs où sont-ils, ceux là ?

Elle attrape donc leur dernier adversaire par le bras et le force à s'asseoir au bord du trottoir. Là où elle peut le voir sans problèmes. Là où il ne pourra blesser personne. Là où il ne pourra pas fuir facilement. Elle pivote ensuite vers le chauffeur de taxi. “La gamine va bien ?” Elle n’a pas eu le temps de vérifier. Elle n’a pas eu le temps de lui porter secours. Elle a simplement vu qu’il s’en était occupé. Comment il a su où la trouver reste un mystère. Tout comme sa manière de localiser les armes. Tout comme sa capacité à se battre. Ce chauffeur de taxi n’est pas que ça et comme il l’a si justement soulevé, il ne l’a pas toujours été. Cependant, le mystère reste grand autour de lui. Finalement, l’hypothèse de la mafia ou du trafiquant de drogues n’est pas si farfelue. Finalement, dans ses plaisanteries, elle n’était peut-être pas si éloignée de la vérité. Peu importe ses activités. Peu importe ses passe-temps. Peu importe ses explications. Elle est contente d’avoir pu compter sur lui. Elle est heureuse d’avoir pu mettre fin à ces combats à ses côtés. “Je suppose que l’on va devoir s’expliquer.” S’expliquer. Comprendre. Justifier. Sa couverture d’employée de bureau a sauté. Elle doit trouver autre chose. Elle doit trouver un autre mensonge à lui servir. Elle doit déformer la réalité pour obtenir une fausse vérité plausible. Cacher leur vraie existence, c’est ce qu’ils font de mieux, au S.H.I.E.L.D. Dès l’Académie, ils apprennent à ne pas révéler de secrets. Ils apprennent à ne pas parler sous la contrainte. Ils apprennent à mentir. A leurs proches. A leurs amis. A des inconnus. Mentir sur leur travail est une habitude. Une obligation. Ils y sont obligés s’ils souhaitent garder leur famille en sécurité. Si ils veulent garder les actions de l’organisation confidentielles.

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L’homme au canif s’était fait laminer de son côté, puis la jeune femme était revenue vers nous afin de menacer une dernière fois le bonhomme. Je sentais son pouls qui s’affolait encore plus, et même cette sueur moite qui dévalait de son front jusqu’à sa mâchoire. Je maintenais mon emprise sans faire davantage. Parce que je savais que, si je ne me contrôlai pas, je pouvais tout simplement le tuer. Le serrer trop au niveau du cou et il aurait été étouffé, ou un faux mouvement qui aurait pu lui briser la nuque comme un morceau de pain rassis. Cette simple idée avait de quoi me faire froid dans le dos. C’est certainement pour ça que j’avais canalisé, inhibé les coups qu’il avait voulu me porter, sans chercher à être dans l’offensive pure et simple.

La situation retourna à notre avantage et ce plus rapidement que prévu. Il avait cédé. Ma main toujours compressée autour de son poignet armé, je lui fis lâcher le flingue que je récupérai habilement. J’avais pris soin de ne pas dévoiler l’étendue de mes capacités, dernier rempart que j’avais pu encore dresser. Les mutants, et la preuve étant, cela courait les rues malgré tout. Ce n’était pas parce que j’avais deviné certaines choses que j’étais à enfermer, ou à soupçonner immédiatement. N’est-ce pas ? J’aurais souhaité qu’il en soit ainsi, et que cette femme, qui avait défié toutes les hypothèses que je m’étais imaginé aux premiers abords sur elle, en fasse autant. Ce qui ne serait pas le cas, j’en étais bien conscient, quant bien même je lui avais prêté main forte.

Le jeune homme est intercepté par sa comparse qui se chargea de le faire assoir, le surveillant de près. Je n’avais strictement rien dit pendant cet épisode, la laissant agir. J’avais bien entendu observé ses mouvements, sa façon d’opérer. Je n’étais pas un grand cru dans le domaine militaire ou de l’information, mais j’étais presque persuadé qu’elle possédait des compétences qui dépassaient nettement les miennes. Du moins, pas celles qui tenaient d’une quelconque mutation. Je me concentrai un instant, fermant les yeux pour simuler une prise de repos bref. J’essayai simplement de savoir ce qu’il en était pour l’enfant. Son coeur battait la chamade, elle avait peur. « La gamine va bien ? », demanda cette voix devenue familière. Je rouvris les yeux, décroisant les bras que j’avais liés contre moi un peu plus tôt. « Elle est terrorisée… », lui dis-je, le regard empreint d’une tristesse voilée. Je n’allais rien lui apprendre. Sauf que moi, je le sentais vibrer de tous ses pores, même à distance. « Elle est blessée mais c’est superficiel. » J’aurais aimé m’en occuper plus tôt, mais c’était ainsi. Le temps avait filé. J’avais une trousse de secours, mais les ambulances étaient en chemin, ce n’était pas la peine pour ce qu’il y avait à traiter. « Sa mère… », engageai-je alors que je m’avançai vers la jeune femme. « Cette femme qu’ils menaçaient tout à l’heure. C’est elle. », avais-je signalé un peu plus bas. Une odeur similaire. Leur sang partageant aussi beaucoup en commun. La gamine aurait très bien pu me le dire, ainsi avais-je su. Sauf que la mère s’était enfuie à toute jambes sans savoir où avait pu se cacher sa fille, le tout dans l’urgence. C’était compréhensible. J’entendis au loin des sirènes, les secours n’allaient pas tarder à arriver. Je jetai un coup d’oeil bref au malotru qui avait voulu du mal à ces personnes-là. J’avais brièvement ressenti de la colère à son égard, ravalant le tout pour me fixer sur l’idée de l’enfant dont on devait prendre soin. D’autres s’occuperont de son cas à lui, je n’étais pas là pour ça.

Alors que je m’étais rendu jusqu’à la voiture pour y retrouver l’enfant, de nouveaux propos me parvinrent. Plus graves je dirais, car cela engageait beaucoup - trop - de choses. Tenant la portière arrière, je m’étais adressé à elle, évitant soigneusement de croiser son regard pour autant. « J’en vois pas l’utilité…je vous ramènerai chez vous. », lui avais-je confié. Après avoir offert ces gusses-là en pâture aux flics, bien sûr. Peut-être refuserait-elle que je finisse sa course ? Ou alors était-ce un lieu d’habitation factice ? Je sentais qu’elle n’allait pas s’en arrêter là. Alors, pour éviter de tergiverser, je lui avais glissé. « On se contentera de remerciements. » Aller à l’essentiel. Car c’était ça qui comptait le plus au final : d’avoir évité le pire, ensemble.

J’avais reporté mon attention sur l’enfant, à qui j’avais murmuré quelques mots. J’avais cette envie irrépressible de la prendre dans mes bras, mais je n’osais guère franchir le pas pour l’instant. Je craignais de faux mouvements de ma part, d'autant que le corps d'un enfant était des plus fragile. L'évitement de contacts physique trouvait aussi son explication ici.

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Elle déteste ce genre de situations. Où les civils sont impliqués. Où les victimes sont sans défense. Où les agresseurs n’ont aucune pitié. Elle méprise ces gens qui osent s’en prendre aux plus faibles et ne leur laisser aucune chance. Pour quelle raison ? Un gène qui a muté. Depuis quand a-t-on une maîtrise sur sa propre génétique ? Depuis quand peut-on préméditer que l’on va devenir un mutant ? Ces personnes n’ont rien demandé. Encore moins la haine qui en découle. Ils ne devraient pas être des victimes, mais des êtres idolâtres. Après tout, ils représentent le futur. Ils représentent l’évolution. Ils représentent l’avenir. De la même manière que les enfants, ils sont la continuité de la société. Pourtant, certains persistent à les haïr et à les décrier. Heureusement, aucun mutant n’est présent ou n’a fait usage de ses pouvoirs. La situation aurait pu dégénérer. Elle aurait pu basculer. Elle aurait pu être mortelle. Mais Sharon n’est pas pour autant soulagée, ni apaisée. Ces crétins ne méritent pas la clémence. Ils méritent un traitement similaire à celui qu’ils font subir. Une haine aussi intense. Une violence aussi injustifiée. Ils comprendraient. Même si la violence ne résout rien, elle est parfois une bonne manière de faire comprendre. De placer l’agresseur à la place de la victime. Elle jette un coup d’oeil à l’individu interpellé. Quand il n’est pas armé, il a presque l’air inoffensif. Presque l’air sympathique. Il pourrait être le genre de gars qui boit quelques verres dans un bar et qui s’amuse avec ses amis. Il pourrait être le genre de personnes qui aide sa grand-mère à porter ses courses de sa voiture jusqu’à sa maison. Mais vous lui donnez une arme et il se transforme en monstre. La nature humaine est parfois fascinante. Fascinante et effrayante. Sharon reporte son attention sur le chauffeur de taxi. Le pire dans les mensonges est de révéler la vérité. Est de voir le changement dans le regard de l’autre. De sentir soit de la colère, soit de l’incompréhension. D’assumer les mensonges. Ils avaient pourtant une bonne relation chauffeur/client. Ils s’amusaient bien, à partir dans des théories bancales et à échanger sur le cinéma. Tout cela semble impossible. Elle va devoir s’éloigner, si elle ne souhaite pas mettre sa couverture en danger. Mais maintenant qu’elle ne ressemble plus à l’employée modèle, elle pourra poser les vraies questions. Les bonnes questions. Celles qui expliqueront pourquoi il disparaît dans les égouts la nuit. Celles qui expliqueront son comportement émotif le soir venu et ses capacités à déceler les armes. Elle ne croit pas en la chance, ni au hasard. Pas cette fois.

Elle est terrorisée…” Évidemment. Il fallait s’y attendre. Les enfants ne sont pas faits pour vivre ce genre d’événements. Ils devraient rester dans leur univers innocent et paisible autant de temps que nécessaire. Ils devraient être protégés de la haine et de la violence. Sharon regrette de ne pas être intervenue plus tôt. De s’être laissée aller aux banalités avec le chauffeur de taxi, alors que d’autres souffraient non loin. De ne pas être intervenue plus rapidement. Elle regrette. Se sentir inutile est atroce. “Elle est blessée mais c’est superficiel.” Une gamine blessée. Ces hommes n’ont donc rien dans le crâne. Ils n’ont donc aucune limite. Aucune pitié. Aucune once d’intelligence. Elle inspire, calmant ses envies de meurtre. Ce ne serait pas une bonne manière de réagir, ni digne de son entraînement. Mieux vaut le laisser entre les mains des forces de l’ordre. Mieux vaut le laisser être jugé pour ses actes. La fillette va bien. C’est le principal. Elle tente de se convaincre. A un âge où toutes les jeunes filles se rêvaient mères, elle s’imaginait agente d’une organisation gouvernementale. Avec les années, son rêve ne s’est pas essoufflé jusqu’à la mener ici. Elle n’est pas prête à laisser tomber son métier de rêve, quitte à essuyer des critiques de son entourage. Ils peuvent la penser carriériste, elle se voit chanceuse. Ils peuvent la juger égoïste, elle se voit profiteuse d’une opportunité en or. Mais de savoir que cette enfant a échappé au pire lui pince le coeur. Ils doivent retrouver ses parents, rapidement. Ils sauront trouver les mots pour la rassurer et la calmer. Ils sauront prendre soin d’elle. Son regard se pose instinctivement vers la voiture. La petite tête de la gamine est visible. Apeurée. Paniquée. Rien ne l’a préparée à vivre ces derniers événements. Rien. “Sa mère…” Sharon reporte son attention sur l’homme. Quoi, sa mère ? Elle retient son souffle, se demandant si son don divin ne va pas lui annoncer qu’elle est décédée. Elle croise les doigts intérieurement pour que ce ne soit pas le cas. Pour que cette fillette puisse retrouver son foyer dès ce soir. Pour que la gamine puisse récupérer des bras réconfortants. “Cette femme qu’ils menaçaient tout à l’heure. C’est elle.” Et elle est partie. Elle a fui pour sauver sa vie, sans un regard en arrière pour sa progéniture. Génial. Mais elle ne doit pas être loin. Elle doit être encore dans le coin. Elle a dû s’apercevoir que son enfant manquait à l’appel. Elle a dû réaliser qu’elle avait perdu sa fille dans la précipitation. Elle va revenir. Sharon l’espère. Elle ne se pense pas assez douée avec les enfants pour la prendre sous son aile. Par contre, ce cher chauffeur de taxi semble sensible au mal-être de la petite. Est-ce que Monsieur Je-ne-pleure-pas-devant-Titanic a, un jour, eu des enfants ?

J’en vois pas l’utilité…je vous ramènerai chez vous.” Il n’en voit pas l’utilité. Bien. Si lui ne voit pas l’intérêt de la questionner sur son comportement, l’inverse ne fonctionne pas. Elle compte bien décortiquer chacun de ses réflexes, chacun de ses pressentiments, chacune de ses paroles. Elle compte bien découvrir qui se cache derrière ce gros ours bourru au coeur d’or. “On se contentera de remerciements.” Malheureusement, elle va devoir le contredire. Elle va lui montrer une toute autre réalité. Les remerciements auront bien lieu. Ils se sont sauvés la vie mutuellement. Ils se sont entre-aidés. Mais il y aura aussi les questions, les doutes, les hypothèses. Si le chauffeur continue de la conduire, le jeu des devinettes ne sera plus aussi innocent qu’auparavant. Elle l’observe discuter avec la gamine. Elle se détourne de la scène pour s’occuper de l’agresseur. Il n’a pas encore tenté un geste pour s’enfuir. Ça ne saurait tarder. Il a été assez crétin pour braquer une arme sur un agent secret. Il le serait assez pour tenter de fuir. Elle élimine toutes envies de partir en courant d’un seul regard. Elle a encore son arme, elle. Elle pourrait lui tirer une balle dans la jambe. Elle pourrait être moins clémente et viser le dos. Elle rejoint le taxi. “Vous savez, elle ne va pas vous mordre. Vous devriez la prendre dans vos bras, elle serait rassurée.” Elle laisse volontiers le chauffeur de taxi s’occuper de la fillette. Elle ne veut pas lui imposer la brutalité d’un agent surentraîné. Elle ne veut pas forcer un contact avec une personne qui a déjà tiré, brutalisé et tué. Mieux vaut laisser faire les spécialistes. Quoique le chauffeur de taxi n’ait pas l’air plus à l’aise qu’elle. Deux empotés. Capables de se battre contre un groupe d’hommes, mais incapables d’être tendres avec une enfant. Mais c’est le problème. A force de frapper sur les autres, Sharon a presque oublié ce que cela fait d’être douce et attentionnée. Après avoir assommé une personne, il est rare qu’elle lui demande comment il va. Même si elle n’est pas totalement dépourvue d’empathie, elle ne se sent pas apte à prendre la gamine dans ses bras et à lui susurrer des mots rassurants. Elle préfère donner des conseils. Des directives.

Votre super-instinct ne saurait pas localiser sa mère, par hasard ? Il me semblait l’avoir vue partir dans cette direction.” Elle désigne une rue adjacente. Elle n’est pas sûre de ce qu’elle avance. Elle était prise par les événements. Mais elle est presque certaine. Presque. Et de toute manière, il est hors de question qu’elle quitte les lieux sans avoir retrouvé sa mère. Hors de question d’abandonner la jeune fille sur le bord du trottoir. Hors de question de ne pas savoir ce qu’elle devient. Il faut impérativement qu’ils retrouvent sa mère. Que la fillette se sente en sécurité. Que la fillette sache que tout va bien. Sharon ne parvient toujours pas à expliquer l’instinct, le flair, la chance, du chauffeur de taxi. Peu importe ce que c’est, ce sens pourrait les aider. “Elle n’a pas dû aller bien loin.” Elle est songeuse. Le regard perdu vers la rue où la mère a disparu. Elle ne conçoit pas que la femme soit partie sans sa fille. Elle n’imagine pas que la peur puisse dépasser l’instinct maternel. La mère est forcément dans le coin. Elle est forcément là, à attendre le bon moment pour récupérer son enfant. A attendre que la situation se calme pour revenir. “Vous avez vérifié si elle ne portait pas une étiquette sur ses vêtements avec ses coordonnées ?” Certains enfants ont ça sur leurs vêtements. Une étiquette collée à l’intérieur de l’habit. Une manière de récupérer leurs affaires si ils les perdent dans un bus ou à l’école. Avec un peu de chance, cette étiquette aura toutes les informations nécessaires pour identifier la petite.

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Le sens des priorités, ce n’était pas forcément commun à tout le monde. Comme les perceptions, les valeurs, ce genre de choses…qui variaient inévitablement d’un individu à l’autre. Je n’étais pas dupe, je savais que tout ceci allait me rattraper un jour. Car elle n’était pas cette femme que j’avais eu l’habitude de prendre dans mon taxi pour la ramener chez elle, dans le Queens. Elle était quelque chose d’autre, avec la même enveloppe. Quant bien même cette odeur de métal froid avait été présente sur elle de temps en temps - tout bon américain pouvait s’armer, alors peu m’importait à vrai dire - je n’étais pas allé pousser plus loin. Je n’allais tout de même pas le faire pour chaque personne qui passait sur la plage arrière, même si ça me prenait parfois. Parfaitement déplacé, j’en conviens. À la manière d’un de ces télépathes qui fouillerait dans votre tête à votre insu, et surtout, sans que vous ne vous en rendiez compte. Au final, j’étais un peu l’oppresseur dans l’histoire, car regorgeant d’informations que d’autres ne pouvaient saisir aussi aisément.

Comme cet élan de colère qui irradiait de la jeune femme alors que j’énonçai la pénible vérité, que la gamine était blessée. Et à en voir ladite blessure, elle n’avait pas été produite par ces gars-là, elle était tombée en voulant s’enfuir et s’était esquintée dans sa chute. Sa mère avait dû faire la même chose, à savoir fuir. Toujours est-il qu’il valait mieux désinfecter et prendre ça sérieusement, c’était l’organisme d’un gosse, pas d’un quarantenaire bon portant. Si une porte d’entrée aux micro-organismes s’était déclarée, il valait mieux la colmater au maximum. Allez savoir ce qui avait pu traîner sur ces morceaux de verre, ces poussières qui s’étaient accumulées par le mouvement de foule…et j’en passe.

Elle m’encourage assez franchement de prendre la gamine avec moi. Quoi, elle n’était pas bien sur le siège arrière, peut-être ? Au moins, celui-là ne le menacerait pas de lui briser les os par inadvertance. Cette brave femme était certainement la mieux placée pour aller apaiser les maux d’un enfant. Même si je préfèrerai qu’elle mette des gants avant d’utiliser sa poigne de fer sur eux. Je soupirai à ses dires, tentant de balayer mon ressentiment. Ouais, c’est plutôt moi qui risque de la mordre par mégarde avec toutes ces conneries, avais-je pensé férocement avant de m’accroupir face à l’enfant, naturellement surélevée par rapport à moi. Ses jambes s’étaient tournées vers moi alors qu’elle semblait vouloir bouger davantage. Les bras de l’enfant, eux, étaient encore contre elle, mouvement d’introversion que je ne pouvais pas ignorer. Et elle n’avait pas froid. Je rapprochai ma main en lui disant. « On va retrouver ta mère. » Oui, j’avais bien dit ‘on’. Je n’étais pas tout seul, quant bien même j’aidais à l’ouvrage. Et j’étais trop modeste dans ce genre de situation pour avoir à me vanter de quoi que ce soit. C’était aussi un moyen d’inclure la responsabilité de cette femme qui avait préféré partager les tâches comme elle le souhaitait. Peut-être était-ce cela qui lui manquait, ce quelque chose qui nous rendait plus humain… « Elle n’est pas loin. », avais-je signalé autant à sa fille qu’à la blonde, mais gardant un contact visuel avec l’enfant. La petite se mit à pleurer, et dans ses gestes, le besoin d’être rassurée, voire enlacée se faisait sentir. Je réceptionnai l’enfant dans mes bras, que je finis par soulever. « Ça va aller, », lui soufflai-je dans un murmure, pressant sur mes articulations pour me remettre debout. J’avais vérifié rapidement si elle n’avait pas d’étiquette ou quoi que ce soit d’autre : le tour était rapidement fait, n’étant vêtue que d’un tee-shirt et d’un pantacourt. « Non, rien de tout ça, », émis-je en jetant un coup d’oeil à la conseillère juridique aux allures d’agent secret. Mon intérêt vrilla de nouveau. Je pris soin de ne pas frôler sa blessure pendant l’opération, lui demandant, toujours à voix basse. « Comment tu t’appelles ? » Elle reprit son souffle et, entre deux hoquets, elle me répondit. « Mary. » C’était une plume. J’avais même l’impression de sentir mes mains trembler, je ne voulais pas trop l’enserrer; par crainte de la blesser…toujours. « Mary, ta maman va arriver bientôt, », lui promis-je, alors que je fermais les yeux pour me concentrer un peu plus. La femme - dont j’ignorais toujours le prénom soit dit en passant - avait raison, elle était partie dans cette rue-là, mais était, depuis, en train de contourner notre zone. À essayer de revenir sur ses pas, sans se confronter au déluge de violence qui se résumait à notre ‘petit’ périmètre. Au même moment, les sirènes se firent entendre de nous tous, me faisant légèrement grimacer. Je rouvris les yeux, les orientant au plus loin sur l’avenue, espérant y voir la silhouette tant recherchée. Son odeur était présente, elle était affolée, allant même jusqu'à entendre son coeur tant il battait vite. La respiration était saccadée par ses mouvements, et puis, finalement, elle suivit le son des sirènes, les premiers à arriver étant les forces de l’ordre. Je la vis alors, et la reconnu instantanément. « Là-bas, », déclarai-je d’une voix assurée en pointant du menton la direction dans laquelle elle se trouvait. Le son assourdissant de la première ambulance arriva moins d’une minute après, me faisant grimacer. Elles n’étaient pas les seules blessées, et c’était en portant un peu plus loin mon observation que je m’en étais rendu compte…la concentration faisait décidément beaucoup. Je commençai à comprendre. Ou le pourquoi il faudrait, à terme, arrêter de réprimer ce qui faisait partie intégrante de mon être…

Sauf que je ne pouvais pas accepter la présence de l’Autre. Il était un véritable poison. Je me braquai de nouveau à cette pensée douloureuse, alors que je serrai malencontreusement un peu trop fort la gamine. « Aie, » avait-elle émit faiblement, mais suffisamment promptement pour me faire réagir. « Pardon…ça va ? », balançai-je aussitôt, réapparaissant dans ce qu’on appelait la réalité, la vraie. Elle hocha la tête positivement, ça l’avait surprise plus qu’autre chose apparemment. La mère eut le temps de remonter jusqu’à nous, aidée par les signaux divers. Lorsqu’elle y vit sa fille, elle courut à toute jambe, manquant de trébucher. Les deux entités se reconnurent, s’appelèrent à leur manière, et je laissai l’enfant à la chaleur maternelle. « Faites attention à son bras et à sa jambe, elle s’est blessée. » Et non pas « a été blessée », le poids des mots ayant toute son importance. Et elle devait être soignée qui plus est. Elle demanda à son enfant où elle avait pu aller alors qu’elles s’enfuyaient toutes les deux. Les ambulanciers déboulèrent au même moment, envahissant mon espace vital. Je ne me sens pas très bien, comme vis à vis de ces remerciements compulsifs, ce flot d’émotion déversée à mon égard et à celui de ma cliente qui-était-plus-que-ça-encore. Les flics se parquent à l’arrache et commencent à prendre leurs marques, se dirigeant vers la blonde ainsi que les hommes à terre, éparpillés. Je refermai la porte arrière du taxi puis alla récupérer mon paquet de cigarettes dans la boîte à gants, le tout dans un silence olympien, me fixant sur l’objectif-dit. J’allumai l’une d’entre elles après en avoir coincée une entre mes lèvres, puis m’éloignai de la zone où s’attroupait désormais beaucoup trop de monde à mon goût. Je m’étais placé dans un coin, assit sur les marches d’un commerce, sur le même trottoir où j’avais garé la voiture. S’ils voulaient me poser des questions, ils savaient où me trouver, mais d’aucune manière  directe ou volontaire j’irai me foutre là-dedans. Cette foule m’irritait déjà trop, et cela se ressentait certainement de plus en plus. À fumer, le regard fuyant, la nervosité à peine dissimulée. Envie d’être ailleurs…assurément.

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Les pleurs de la fillette résonnent. Vibrent. Sharon ne la lâche pas du regard. Elle la comprend. Elle imagine très bien la peur qu’elle vient de subir. Elle devine l’état de panique et de choc dans lequel elle doit être. Cette gamine a besoin de ses parents au plus vite. Elle a besoin d’être cajolée, rassurée, protégée par ses paternels. Parents absents de leur champ de vision. Sharon est reconnaissante au chauffeur de taxi de prendre les choses en main. Elle était à deux doigts de se faire violence. Elle était à deux doigts d’oublier l’agresseur pour réconforter la petite. Elle était à deux doigts d’oublier son entraînement. Finalement, c’est l’homme qui prend l’enfant dans ses bras. Il s’en sort même plutôt pas mal, avec ses gestes calculés et maîtrisés. Avec ses paroles réconfortantes et posées. Elle en profite pour s’inquiéter de l’identité de leur protégée. Les enfants devraient tous porter une étiquette avec leur prénom dessus. Ils devraient tous avoir un bracelet à leur nom. Ils devraient tous être identifiables au premier coup d’oeil. Ils devraient. Mais ce n’est pas le cas. Dans ce genre de situations, cela pourrait s’avérer incroyablement utile et efficace. Sauf que ce serait traiter les enfants comme l’on traiterait des animaux de compagnie. Une puce dans le corps tel un chien ou un chat. Un tatouage à vie sur la peau. “Non, rien de tout ça,” Évidemment. Cela aurait été trop simple. Sharon pense une seconde à prendre une photo de la fillette pour l’envoyer au S.H.I.E.L.D. Ils ont la technologie nécessaire afin de réaliser des reconnaissances faciales. Ils pourraient trouver quelque chose. Interroger l’enfant n’est pas une option. Dans son état elle doit avoir les idées confuses et elle refusera sûrement de donner son adresse à des inconnus. Il ne leur reste plus qu’à espérer que ses parents débarquent dans les prochaines minutes. Ou alors, ils devront la confier aux mains des policiers. Ce que Sharon préférerait éviter. “Comment tu t’appelles ?” Il y a des chances pour que la gamine refuse de parler. Pour qu’elle refuse de s’adresser à des étrangers. Mais il y a aussi des chances pour que la peur la fasse parler. Pour que les bras du chauffeur de taxi la rassurent assez pour délier sa langue. “[color:c266=”plum”]Mary.” La voix fluette est emplie d’émotions et de sanglots. Elle va sûrement être traumatisée par les événements pendant longtemps. Peut-être même qu’elle aura du mal à trouver le sommeil les premières nuits. Malheureusement, elle n’a pas vu le jour dans une société où tout est beau, tout est rose. Au contraire. La société se transforme en une bombe à retardement où chacun se bat contre les valeurs de son voisin. Il se pourrait que cette manifestation ne soit pas la seule qu’elle subira au cours de sa vie.

Sharon se rapproche de ce couple étrange. Elle esquisse un sourire à l’enfant pour la mettre en confiance. Elle retient un geste protecteur dans sa direction. Une caresse sur sa joue inondée. Une marque d’affection dont elle ignore la provenance. Mais elle garde fermement la main contre son corps. Un sourire est suffisant pour consoler une âme en peine. Suffisant pour apporter la confiance à une fillette. “Mary, ta maman va arriver bientôt,” Elle aurait tendance à préférer qu’on ne fasse pas de promesse en l’air. Elle aurait tendance à ne pas faire croire à la gamine à des choses impossibles. Elle a laissé au chauffeur de taxi le soin de s’occuper de Mary, elle doit assumer et accepter ses tentatives de réconfort. Elle observe l’homme fermer les paupières, comme concentré. Encore un de ses talents ? Il est capable de géolocaliser n’importe qui ? Ce mec est à la fois impressionnant et effrayant. Sharon l’observe réaliser son tour de magie invisible. Elle s’attend à ce qui lui indique des données précises sur la localisation des parents de la gamine. Au loin, les premières sirènes retentissent. Les secours arrivent. Ils vont pouvoir s’assurer que Mary n’a rien. Ils vont pouvoir prendre en charge le crétin. Ils vont pouvoir maîtriser la situation. Et le chauffeur et la cliente vont pouvoir terminer leur course.  “Là-bas.” Elle lève des sourcils étonnés. Elle s’en doutait, pourtant elle reste étonnée par son talent. Il a un flair digne d’un chien de chasse. C’est ça, son secret. Il a l’odorat tellement fin et précis. Elle a confiance en ses dires. Il lui a déjà prouvé qu’il ne se trompait pas. Qu’il ne se trompait jamais. Alors, elle se tourne dans la direction qu’il indique. Elle part dans la rue, à la recherche d’un visage paniqué et inquiet pour sa progéniture. A la recherche d’une mère éplorée. Elle la trouve rapidement. Encore une fois, le chauffeur a vu juste. Senti juste, plutôt. En quelques mots, elle rassure la mère et l’accompagne vers Mary. Les retrouvailles sont dignes d’un film. Les larmes. Les appels. Les caresses. Les regards. Les remerciements. Voilà pourquoi Sharon apprécie son métier. Pour permettre à des gens comme cette mère et sa fille de se retrouver. Pour assurer la sécurité de tous ces civils. Un sourire attendri et satisfait vient même naître sur ses lèvres. Le sentiment du devoir accompli.

Les voitures de police finissent par arriver. Elle s’arrache du spectacle pour rejoindre les officiers. Elle n’oublie pas de récupérer l’agresseur au passage pour le leur livrer. Elle tient fermement son bras. Elle n’est pas censée révéler son identité. Pour la plupart, Sharon Carter est morte. Elle peut au moins se faire passer une citoyenne concernée par la sécurité de sa ville. Elle approche donc les policiers avec une attitude différente de l’agent expérimenté. Elle se fait plus amicale, plus chaleureuse. Elle tente même un énième sourire. Elle confie le criminel aux agents, avant de raconter ce qu’elle a vu et fait ces dernières minutes. Lorsqu’elle a fini de témoigner, elle se retourne, à la recherche du chauffeur de taxi. Elle avise Mary et sa mère entourées d’ambulanciers. La fillette est prise en charge. Mais c’est l’homme qui l’intéresse. Elle le trouve dans un coin reculé, assis sur des marches. Quelle attitude avoir, telle est la question. Elle compte bien retourner chez elle. Elle pourrait appeler un autre taxi. Elle pourrait aussi demander au chauffeur de terminer son trajet. C’est la solution qu’elle choisit. “On ne vous a jamais dit que fumer tue ?” Elle fait allusion à la cigarette prise entre ses doigts. Son ton est loin d’un discours moralisateur. Son ton est celui d’une tentative d’entrer en contact. Ils ne sont plus occupés à se battre contre des hommes armés. Ils ne sont plus préoccupés par l’état d’un enfant. Ils n’ont plus aucune raison de discuter. Sharon s’installe à côté de lui. La journée aura été longue. La journée aura été mouvementée. Qui aurait cru qu’ils finiraient dans les rues de New-York, à taper sur des personnes ? Elle devait simplement rentrer chez elle. Il devait simplement la conduire jusqu’à son appartement.

Au fait, moi, c’est Sharon.” Inutile de mentir. Il mérite la vérité, au moins pour certaines choses. Il mérite de connaître son vrai prénom. Elle lui doit bien ça. Ils se sont battus ensemble. Ils ont survécu ensemble. Ils se sont aidés. Ils ont tous les deux des secrets. Ils ont tous les deux une deuxième vie. Il est temps de mêler les deux pour révéler assez de vérité et cacher assez d’informations. Trouver le juste équilibre. “C’est impressionnant ce que vous faites avec votre odorat.” Mutant, muté, peu importe. Il y a du pouvoir là-dessous. Il y a un pouvoir caché derrière son incroyable odorat. Elle ne pense pas sérieusement qu’il ait juste un odorat surdéveloppé. Et elle ne parle même pas de sa manière de se battre. “Maintenant que je vous ai vu avec Mary, je doute vraiment que vous soyez resté insensible devant Titanic.” Quand on est si précautionneux avec un enfant, le drame de Titanic provoque au moins un pincement au coeur. Au moins des yeux brillants. Au moins un tremblement. Elle n’a plus besoin de jouer la comédie avec le chauffeur de taxi. Elle peut se contenter d’être l’agent, mais il l’intrigue. Il continue à être entouré d’un certain mystère. Un mystère qu’elle compte bien percer.

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