La voir lever les yeux au ciel était un bon signe pour lui. Ca voulait dire qu’elle écoutait et qu’elle était toujours là. Oui, elle l’était physiquement, mais elle pouvait très bien avoir l’esprit ailleurs. Cependant, elle semblait concentrée sur ce qui se passait. Un bon point donc et encore plus quand elle vint exprimer le fait qu’elle serait très énervée s’il venait à mourir. Ca lui fit penser à une expression des midgardiens et visiblement il avait tapé juste. Elle serait capable de le ramener à la vie et de le tuer de ses propres mains. Mais de la voir sourire ainsi l’amusa. Au moins, elle n’était pas complètement énervée contre lui. Il avait donc une chance de pouvoir continuer à lui parler. Malheureusement, il savait aussi que ce moment pourrait être le dernier qu’il passait avec l’agent. Ca pouvait être la dernière fois qu’il lui parlerait et il commença à faire ses adieux. Sharon semblait refuser d’entendre de telles paroles. Seulement, il ne voulait pas partir sans avoir pu le lui dire de vive voix. Il aurait très bien pu enregistrer un message ou écrire quelque chose, mais il se doutait qu’elle lui en voudrait vraiment de faire une chose pareille. Donc, il continua, jusqu’à arrêter de parler et de la voir fermer les yeux. Haussant les sourcils quand elle ouvrit à nouveau les yeux et qu’elle prit la parole, il ne s’était clairement pas attendu à ça. Un compliment ? Il avait l’impression que s’en était un, mais il ne voulait pas poser la question de peur qu’elle lui dise qu’il avait halluciné. Alors, il resta silencieux, l’écoutant reprendre la parole. Elle parla d’une façon plus générale avec la Terre et il hocha simplement la tête. Il avait tenté de faire de son mieux pour aider Midgard. Il était après tout le Prince d’Asgard, celui qui devrait garder les Royaumes en sécurités. Esquissant un sourire aux paroles suivantes, il resta la fixer. Ca faisait plaisir à entendre, c’était certain et il resta la fixer, ne lâchant pas son regard.
Je vois ça et vous n’êtes pas douée pour en faire visiblement.
Esquissant un sourire, il voulait juste mettre un peu d’humour dans tout ça. Sharon semblait particulièrement mal et il tentait juste de l’apaiser un peu. S’approchant, il laissa quelques centimètres entre eux, mais il continua de la fixer.
Je déteste également les adieux, mais c’est nécessaire. Je ne veux pas avoir de regrets et encore moins avec vous.
Il espérait qu’elle comprendrait ce qu’il voulait dire. Il voulait être certain que l’agent comprenne qu’il l’appréciait vraiment et qu’il y avait même plus que ça. Mais, Thor savait que c’était égoïste de lui faire comprendre une telle chose, car s’il venait à mourir elle serait mal. Alors, il fit la seule chose qu’il savait vraiment faire, peu importe les situations : agir. Comblant l’espace qui les séparait, le Dieu passa son bras autour des hanches de la jeune femme et posa sa main libre sur sa joue, pour venir l’embrasser. Un baiser léger, dans la même veine que précédemment. Il était plus doué pour agir et il croisait les doigts pour qu’elle comprenne qu’il ne jouait pas les profiteurs, mais qu’il était sincère dans ce baiser. Il tenait à elle et il espérait vraiment pouvoir la revoir un jour. Il voulait pouvoir gagner le combat à venir et avoir la possibilité de retrouver Sharon. Pouvoir la prendre dans ses bras à nouveau. Pouvoir l’embrasser à nouveau. Pouvoir l’entendre lui crier dessus à nouveau. Pouvoir suivre les coutumes de Midgard et l’inviter à dîner. Pouvoir simplement être avec elle. Ca faisait beaucoup d’informations à faire passer dans un baiser, mais, il fit en sorte de passer le message.
La journée aura été affreuse. La journée aura été fatigante. On lui avait promis un retour reposant, loin de tous les problèmes, loin de tous le stress. On lui avait assuré un retour ennuyant à mourir. Ce n’est pas tout à fait le cas. Elle se serait bien passée de la trahison d’Heather. Elle aurait bien échappé aux adieux de Thor. Elle ne rêve que d’une chose : rentrer chez elle et s’effondrer dans son lit. Elle n’en sortirait qu’une fois le monde entier en paix et tous les problèmes réglés. Attendre sous la couette que tout se tasse. Ce n’est pas elle. Elle s’en voudrait de ne pas avoir été là. Elle s’en voudrait de ne pas avoir pu aider. Elle sera de nouveau là, demain. Fidèle au poste. Elle l’a été pendant des années. Elle ne baissera pas les bras. Il lui en faut plus pour lui faire abandonner son job. Il lui en faut plus pour la décourager. Il lui en faut plus pour la mettre à terre. Et si parfois, elle peut ressentir de la lassitude, c’est pour mieux se relever et affronter la suite des événements. Une profonde lassitude. C’est ce qu’elle ressent quand elle pense à Heather. Impossible de détecter les espions. Impossible de les virer avant le drame. Impossible de se battre contre eux. Ils sont invisibles. Ils sont malins. Ils sont minutieux. Mais maintenant qu’elle sait la vérité, certaines choses lui apparaissent plus clairement. Les horaires. Les questions. Le manque de concentration. De petits détails qu’elle a longtemps mis sur le compte de la fatigue ou du manque de sérieux. De petits détails qui, séparés, ne l’ont pas fait tiquer. Elle aurait dû, pourtant. Elle aurait dû se méfier. Elle aurait dû s’inquiéter. Elle aurait dû se questionner. Et puis, il y a Thor. Le grand et merveilleux Thor. Idolâtré par des milliers de personnes. Détesté par autant. Ils se sentent obligés de faire leurs au revoirs. Ils se sentent obligés de se dire quelques mots. Des adieux dissimulés derrière un masque professionnel. Des adieux prononcés à demi-mots. Elle ignore ce qu’il va se passer ensuite. Si Thor va survivre. S’il y aura plus entre eux. S’il y aura moins. Elle ignore si elle ressent quelque chose pour lui. Plus que de l’attirance ou de l’amitié. Elle ignore tout. Elle verra par la suite. Se laisser le temps, ce n’est pas ce qu’avait dit Riley ? “Je vois ça et vous n’êtes pas douée pour en faire visiblement.” Un soupir lui échappe. Il faut toujours qu’il gâche tout avec son humour. Il faut toujours qu’il la taquine. Comme depuis le début. Et à chaque fois, elle est agacée de la même manière. A chaque fois, elle a envie l’envoyer balader. Cette fois, elle se contente du sourire. Tête inclinée sur le côté. Tête secouée en signe de désapprobation. Il n’est pas possible. Un vrai gamin dans un corps de guerrier.
“Je déteste également les adieux, mais c’est nécessaire. Je ne veux pas avoir de regrets et encore moins avec vous.” Ah oui ? Sourcil arqué. Elle n’est pas si importante que cela dans sa vie. Ils ne se connaissent que depuis quelques mois. Ils ont entretenu un rapport professionnel. Mais tout semble changer. Tout semble évoluer. Elle n’est pas prête à accepter ce que cela signifie. Elle n’est pas sûre de savoir ce que cela implique. Se prendre la tête est inutile. Se poser des questions n’est pas nécessaire. Il pourrait mourir dans les prochains jours. Il pourrait perdre son combat. Elle essaye de s’en convaincre. Sans grande conviction. Sans grande réussite. Elle est trop habituée à contrôler, à maîtriser toutes les données et toutes les variables. Face à l’inconnu, elle est souvent démunie. Elle a appris depuis longtemps qu’improviser lors des missions est dangereux. Si elle applique cette logique à Thor et elle, elle a de quoi s’inquiéter. Ce qui n’est pas le cas du dieu, visiblement. Lorsqu’il se rapproche, elle sent ses doutes s’évanouir. Il les balaie d’un bras dans son dos. Il les éloigne d’une main sur sa joue. Elle baisse les armes lorsqu’il l’embrasse. La crispation disparaît. Rien ne sert de lutter. Rien ne sert de nier. Il y a quelque chose. Il y a un truc qui les relie. Au-delà des gamineries. Au-delà des chamailleries. Et ce baiser. Il a le goût des adieux. Il a le goût de l’espoir. Il promet une suite. Il assure un avenir après cet échange. Si seulement Thor survit. Si seulement le dieu ne meurt pas dans un coin de New-York. Si seulement. Là contre lui, elle se sent faible. Elle a oublié ce que cela fait. D’être embrassée. D’être appréciée. Elle a oublié quelles émotions cela réveille. Elle a oublié la faiblesse que cela engendre. Elle ne peut que fondre sous le tendresse de cette étreinte. Elle ne peut que profiter de ce baiser. Peut-être le dernier. Tout contre ses lèvres, elle esquisse un sourire. Un sourire qu’il ne voit probablement pas. Mais un sourire heureux. Ils finissent par se séparer. Par prendre leur distance. Jamais trop loin, cependant. Pour profiter ces derniers instants. Pour savourer ces derniers moments. “Si vous embrassez votre adversaire, peut-être qu’il vous laisserait gagner.” Peut-être que son ennemi serait sensible à un de ses baisers. Il arrive bien à la faire fondre sous ses attentions. Il arrive bien à montrer une facette plus tendre et affectueuse du guerrier. Il n’est pas à l’abri d’avoir un adversaire avec le même caractère. Ce serait agréable de rester ici pendant des heures. A se chamailler avec Thor. A essayer de le convaincre de ne pas partir. A réfléchir à ce qu’ils pourraient être l’un pour l’autre. Ils ne sont pas au bon endroit, au bon moment. Ils ne sont pas dans un cadre propice à de pareils échanges. Alors, elle s’écarte. Elle s’éloigne. Elle quitte ses bras. Elle retrouve la solitude du célibat. Se mettre en couple suppose de laisser tomber les libertés si appréciées. D’abandonner les réflexes de célibataire. De consentir à des changements. Elle ignore si elle est prête. Elle ignore si elle en est capable. Et de toute manière, que signifient ces baisers ? Rien, si ce n’est la peur de perdre l’autre, une opportunité fortuite, un hasard des événements. Il aurait pu embrasser n’importe qui. Il aurait pu trouver n’importe quelle femme. C’est simplement tombé sur elle. Il a simplement sauté sur l’occasion.
Elle prend quelques secondes. Juste pour mémoriser les traits de son visage. Juste pour se rappeler de ce moment. Juste pour garder un souvenir de la dernière fois qu’ils se sont vus. La peut-être dernière fois. Elle n’aurait jamais pensé embrasser un super-héros de sa vie. Elle travaille à leurs côtés. Elle les côtoie tous les jours. Jamais elle n’a songé dépasser la relation professionnelle. Jamais elle n’a pensé sortir avec l’un d’entre eux. Ne jamais dire jamais, selon certains. Et même si ça n’a été que l’histoire d’un baiser, elle pourra au moins le raconter à ses enfants. A ses neveux. A toute la famille. Quand elle ne sera qu’une vieille femme croulante, elle pourra conter cette anecdote aux prochaines générations. Ils hésiteront entre délire ou mensonge. Ils auront bien tort de ne pas la croire. Lorsque Sharon est certaine d’être prête, elle retourne vers le banc. Prête à le laisser partir. Prête à accepter qu’il risque de mourir. Prête à le voir accomplir sa mission. Elle attrape les gants de boxe. “Vous devriez partir avant que je ne décide de vous faire suivre par des agents.” Elle se détourne de Thor après un dernier regard. Un dernier sourire. Elle se concentre sur le sac de frappe. Elle se focalise sur son entraînement. Elle ne restera sûrement pas longtemps ici. Elle ne s’acharnera sûrement pas beaucoup sur le punching-ball. Elle retournera rapidement chez elle afin de se reposer. Mais elle tient à le faire. Pour laisser à Thor une dernière image positive d’elle. Pour lui montrer qu’elle est déjà passée à autre chose. Pour qu’il puisse partir, l’esprit libre.
Dédramatiser, parfois c’est important. En tout cas ça l’était pour Thor. Il ne voulait pas être trop sérieux après ce qu’il venait de dire à la jeune femme. C’était déjà assez difficile ainsi. Donc, une petite touche d’humour et en réponse un soupir. Il sait qu’elle aurait préféré qu’il ne dise pas une telle chose, mais ça avait été plus fort que lui. C’était sa façon de procéder. Cependant, il reprit un peu son sérieux, expliquant à son tour qu’il n’aimait pas les adieux, mais cette fois-ci, il ne voulait surtout pas avoir de regrets. Oui, il la connaissait depuis peu. Le plus qu’il connaissait d’elle était ce que Steve lui avait dit et le peu d’informations qu’il avait pu rassembler depuis qu’il avait fait équipe avec elle. Seulement tout ça amenait un ensemble qui lui plaisait. Il ne savait pas vraiment pourquoi, mais il avait fini par s’attacher à elle. Une connaissance qui prenait de l’ampleur et qui depuis quelques minutes s’était transformé en quelque chose de plus complexe, plus intime. Le blond n’avait pas l’habitude de ce genre de choses et il ne savait pas quoi dire. Alors, comme souvent, il décida d’agir. Pour cela, il avança vers l’agent et passa un bras autour d’elle, avant de poser sa main sur sa joue et de l’embrasser à nouveau. C’était dangereux, car elle aurait pu le repousser et il aurait compris pourquoi. Mais, elle ne semblait pas contre l’idée et il pu apprécier ce nouveau moment en sa compagnie. En plus de cela, il tenta de passer un message, de lui faire comprendre qu’il voulait la revoir, que ça n’était pas juste un geste anodin. Le dieu espérait que le message passerait, avant de devoir reculer doucement. Elle ne semblait pas offusquée et à ses paroles, il esquissa un sourire.
Si c’est un homme, ça risque d’être compliqué, mais je garde la proposition en tête.
Ca pouvait être une bonne stratégie, mais s’il se retrouvait face à un homme, ça ne servirait sans doute pas. Quoi que la situation pourrait être amusante. Mais, il reprit ses esprits quand Sharon s’éloigna. Il s’attendait alors au pire. Le blond ne savait pas pourquoi, mais il sentait que quelque chose de désagréable allait se passer. Il resta la voir le regarder, mais sans rien dire. Il ne préférait pas être celui qui briserait le silence. Il sentait qu’il risquait de dire une énormité, il valait donc mieux qu’il se taise. Malheureusement, elle ne dit rien et fait demi-tour pour s’éloigner encore plus. Il ouvrait la bouche, mais rien ne vint. Que pouvait-il dire après tout ? Alors, il resta là, bêtement, sans savoir quoi faire. Avait-il état trop loin ? Il espérait que non et il fixa la jeune femme quand elle prit la parole. Il avait bien vu son sourire, mais il ne pouvait pas en faire autant. Pas cette fois. Même si la voir se battre et être la femme forte qu’il avait déjà pu voir par le passé, quelque chose avait changé. Quelque chose qu’il ne saurait qualifier. Il resta la regarder quelques secondes de plus, avant de partir sans rien dire. Les mains dans les poches, il sortit de la base avant de rentrer à la Tour Stark. Il était temps de mettre ses affaires en ordre avant son combat désormais et de ne plus penser à autre chose … ou quelqu’un d’autre …
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Lun 23 Mai - 23:43
