Ça faisait maintenant une paire d'heures que Mona avait passé la porte de la maison de Primrosae. Implantée dans un bout de quartier plutôt résidentiel, la bâtisse se dressait fièrement loin des grands buildings et de la tour des avengers - heureusement d'ailleurs parce que la jeune femme ne pouvait pas la voir en vrai ni en peinture - mais à quelques rues seulement de l'Hudson. C'était un quartier calme, loin de l'effervescence qui définit pourtant si bien Manhattan. La rousse considérait qu'elle avait de la chance d'avoir hérité de cette maison de la part de ses parents. Tout le monde ne pouvait pas se permettre un tel investissement. Elle avait eu envie d'inviter Mona ce soir pour plusieurs raisons. La première était simple: elle appréciait la présence de la brune. Se retrouver entre elles sans avoir les watchers en principal sujet de conversation - bien qu'ils restaient toujours dans un coin de leurs têtes - cela lui faisait tout de même un bien fou. Elle avait trouvé en Mona une petite sœur qu'elle n'avait jamais eu et même si elle ne montrait pas son attachement à la jeune femme, sa seule présence ici était la principale témoin de l'intérêt qu'elle portait à la jeune femme. La deuxième raison était tout aussi évidente: Primrosae voulait éloigner son amie des Watchers, dans le sens physique du terme, pour ce soir. La PDG avait toujours connu Mona de cette façon, à fond dans les idéaux de leur groupe, à fond pour leur cause quitte à se frotter à des mutants sans pouvoir les éliminer dans son travail. Primrosae était admirative pour ça mais elle se souciait aussi de son mental et s'éloigner un peu de tout ça de temps en temps - comme elle avait pu le faire avec Jeremiah au Texas - ça faisait toujours du bien.
Elle l'avait donc invité chez elle pour la soirée, préparant un dîner plutôt simple avec une omelette de champignons donnés par son voisin, une salade et un dessert sorti de la boulangerie pas très loin d'ici, sans oublier que tout ceci était arrosé d'une ou deux bouteilles d'un bon vin. Primrosae avait beau avoir un compte en banque très bien alimenté, elle vivait simplement parce que c'est ainsi qu'on lui avait appris à vivre tout simplement et plus elle était discrète, mieux c'était, de son point de vue en tout cas. Au moins les médias ne s'intéressaient pas des masses à sa vie privée et encore moins à ses activités en dehors du temps qu'elle passait dans son industrie d'armement ou en voyage d'affaire. Quoi qu'il en soit c'est avec un verre de vin dans les mains qu'elle se retrouvait sur le canapé avec Mona, à digérer tranquillement leur repas. En revanche, ce que Primrosae ignorait - et qu'elle n'avait pas vérifié, faisant totalement confiance à son voisin pour ça - c'était que les champignons qu'elles avaient ingurgité n'étaient autres que des champignons hallucinogènes. Des effets qui commençaient à se faire ressentir, tandis qu'elle posait son verre sur la table basse face au canapé. « Je meurs de chaud. Pas toi? » Retirant le fin gilet qu'elle portait pour le poser près d'elle, elle se retrouvait en simple tunique courte noire et en jean. Remplissant de nouveau son ballon de vin ainsi que celui de Mona, elle ne pouvait s'empêcher de faire sa curieuse. « Alors, comment ça se passe avec Joseph? Raconte-moi tout. » Après tout, avant d'être des Watchers, elles sont des femmes et forcément, les femmes, ça papote et ça aime les potins, quoi qu'on en dise.
Depuis que Mona était la nouvelle assistante du secrétaire des affaires mutantes, Hank McCoy lui-même, elle travaillait extrêmement fort et faisait beaucoup d’heures supplémentaires. Pas parce que le boulot lui plaisait, il était même plutôt redondant et statique pour le moment, mais parce qu’elle voulait montrer qu’elle était motivée et intéressée pour ainsi gagner la confiance du mutant. Son but était de devenir proche de lui et de faire en sorte qu’elle lui était indispensable. Elle devait tranquillement s’immiscer dans sa vie. Elle devait l’amener à se confier à elle sur sa vie personnelle, professionnelle et surtout tout ce qui concernait les personnes à pouvoirs. Cela ne se faisait pas à un petit claquement de doigt. Les bases devaient d’abord être posées. Ce qui était un processus long. Hank n’était pas facile d’approche. Il n’était pas complètement à l’aise avec les autres et il n’offrait pas sa confiance à n’importe qui. Mais, la jeune femme sentait qu’il l’appréciait de plus en plus et que ce n’était qu’une question de temps. Elle devait être patiente, mais elle avait peur de perdre le respect de Jeremiah si cela prenait trop de temps. Elle n’avait pas encore accès à tous les documents et si elle prenait trop de temps dans la salle des archives, cela devenait louche. Elle ne pouvait pas se montrer trop insistante auprès de son employeur afin qu’il ne se doute de rien. Pour le moment, Mona n’avait rien pu donner à son leader et cela la frustrait. Elle aurait tant voulu lui apporter des informations croustillantes pour qu’il puisse garder sa foi en elle, mais ça n’avait pas encore été le cas.
Pour se changer les idées, la brunette avait accepté avec plaisir l’invitation de celle qu’elle considérait comme son mentor au sein des Watchers. Primrosae était celle qui l’avait pris à son arrivée avec le groupe anti-mutant. Elle lui avait appris à se battre et à tirer du fusil. Mona n’avait jamais pris une arme entre ses mains en bonne bourgeoise qu’elle était, mais elle s’était montrée très douée. Et surtout, elle avait adoré. Elle se sentait puissante. C’est la rouquine qui l’avait accompagné pour sa première mission qui consistait tout simplement à tuer un mutant identifié pour démontrer sa fidélité à l’organisation. C’était une chose de tirer sur une cible en carton, s’en était une autre de viser un être vivant. Mona avait voulu reculer et tout lâcher. Elle avait remis en question son adhésion et sa participation aux Watchers. Ce n’était pas une tueuse. Les raisons qui l’avaient poussées à rejoindre Jeremiah étaient superficielles comparées aux autres membres qui avaient perdu des gens de leurs familles et de leurs entourages. Prim avait posé une main douce sur son épaule et lui avait simplement chuchoté : Tes raisons sont aussi valables que n’importe qui. Souviens-toi pourquoi tu es là. Et ça avait été le déclic dans la tête de la Blackfield. Les mutants risquaient de tout prendre ce pourquoi ses ancêtres avaient travaillé fort. Ils ne pouvaient pas tout gâcher. Elle avait repris sa position, relevé son arme et avait pointé le viseur directement dans le front de sa victime. Puis, le coup était parti. Mission accomplie. Mona n’aurait jamais pensé que cela pouvait faire aussi bien. Mais, si cela n’avait pas été de son amie, elle n’aurait pas réussi. Au fil du temps, les deux femmes s’étaient mises à passer du temps ensembles en dehors du groupe qui les avait unies. Elles n’avaient pas une amitié fusionnelle puisqu’elles étaient toutes les deux indépendantes et avaient beaucoup de caractère, mais Mona avait beaucoup de respect pour son mentor. Celle-ci lui remettait souvent les pieds sur terre lorsque l’assistante se montrait trop impulsive et à fond dans les idéaux de Jeremiah. D’ailleurs, Mona soupçonnait cette petite soirée de filles en être une des raisons.
Après un excellent repas composé d’une omelette aux champignons, d’une salade fraiche et d’un dessert que Mona avait à peine touché n’ayant pas la dent sucrée, les deux femmes s’étaient assises sur le canapé pour terminer leur vin. Elles en étaient à leur quatrième ou cinquième coupe lorsque Prim remarqua qu’il faisait chaud. Maintenant qu’elle en parlait, la jeune femme eut une poussée de chaleur. "Oui, c’est vrai qu’il fait chaud tout à coup." À son tour, elle enleva sa veste qu’elle posa sur l’accoudoir à côté d’elle. Un sourire malicieux se dessina sur ses lèvres lorsque son verre fût à nouveau rempli. Le vin était délicieux et probablement dispendieux. Il se buvait facilement, même si elle commençait à avoir un peu la tête qui tournait.
Son sourire disparu lorsque son amie prononça le prénom de Joseph. "Jo? Il ne me parle plus depuis que j’ai obtenu ce poste. " Répondit-elle en haussant les épaules et en fixant le liquide rougeâtre de son verre. "Je ne sais pas pourquoi. Il est bête. Mais, je ne me fais pas de soucis. Il reviendra." Elle posa un regard attendu et confiant sur la rousse. Elle ne le montrait pas, mais ne plus avoir de contact avec lui l’affectait plus qu’elle ne l’aurait pensé. Ils avaient l’habitude de se disputer, mais ils se rabibochaient toujours quelques jours plus tard. Là, ça faisait plusieurs semaines. Elle ne l’avait pas vu aux réunions des Watchers, pourtant elle savait qu’il ne les avait pas quittés. Puis, ill ne répondait pas à ses textos. Mona avait tout de même espoir de le revoir. Il avait juste besoin de plus de temps cette fois. "Et toi? Tu ne parles jamais de tes prétendants! Alors que je suis certaine qu’ils sont tous à tes pieds." Après tout, la belle Dahl était PDG d’une grosse compagnie. Elle était belle, forte et classe. Elle devait bien avoir des histoires à raconter! Sa tête continuait de tournoyer et elle avait de plus en plus chaud. Ses vêtements étaient devenus inconfortables, trop lourds. Elle mit cela sur le dos du vin, même si elle avait déjà bu plus que cela sans en ressentir les effets.
La conditionner autant qu'elle l'était. C'était un désir utopique. Primrosae ne pouvait pas formater Mona à son image parce qu'elles n'avaient pas la même histoire, parce que Mona ne baignait pas dans la haine des mutants depuis sa naissance. Surtout, parce que Primrosae n'était pas aussi extrême que ses parents, elle était probablement pire et cela mènerait sûrement au décès de la Blackfield ce que la rousse ne voulait pas. Elle s'était faite à l'idée qu'elle ne pouvait pas pousser les gens à être comme elle, sans hésitation, sans scrupule et sans coeur. Elle devait faire avec les sentiments de chacun et avec l'absence des siens. Elle se contentait donc de pousser la brune au maximum de ses capacités, à repousser toujours ses limites plus loin dans leurs propres retranchements. La faire se surpasser. Tel était devenu le nouveau défi, le nouvel objectif et surtout la nouvelle fierté de Primrosae. Mona était avant tout son élève avant de devenir son amie. La fierté s'était lu dans le regard de la rouquine, sous ses traits durs et froids, quand Mona avait appuyé sur la détente pour la première fois, logeant une balle dans le crâne d'un mutant. Ce fut la première étape de son intégration aux Watchers, la première marche de son apprentissage, le premier cap de leur amitié. Bien entendu, elle avait constaté l'hésitation, la remise en question de Mona, mais elle n'avait pas douté d'elle, pas une seule seconde et aujourd'hui c'était probablement cette réussite qui les avait mené à être de proches amies, assez pour que la brune n'ait plus besoin du soutien de la rouquine pour ôter la vie d'un de ses monstres qui peuplent la ville, assez pour qu'elle l'invite chez elle sans aucune appréhension.
Elles n'avaient aucun mal à aborder des questions personnelles, bien loin des préoccupations des Watchers. Au contraire, c'était même plutôt simple. Si Primrosae était avant tout - et malheureusement pour certains - un soldat pour une cause, elle savait Mona femme avant d'être une partisane des Watchers et c'était tout naturellement que la PDG lui avait alors demandé comment ça se passait avec Jo, son compagnon plus ou moins officiel. Elle qui pensait qu'elle allait aborder un sujet léger, vu la tête que Mona faisait, c'était loupé. Son sourire avait disparu, son regard était fixe sur son ballon de vin. Haussant doucement les épaules, Primrosae lui offrait un sourire rassurant bien que ses pensées ne pouvaient s'empêcher de lui hurler qu'il valait mieux être seule que mal accompagnée. « C'est un idiot. Tu vaux mieux que ça. » Mieux qu'un type qui boude parce qu'elle a un job, mieux qu'un type pas foutu de comprendre qu'elle admirait une cause plus qu'elle admirait l'homme à son commencement. Jo faisait un bon Watcher, individuellement, mais visiblement pas un bon compagnon.
La question retour de Mona la faisait sourire. Et elle... C'était aussi simple que compliqué, aussi fluide que tourmenté. « C'est justement parce qu'ils sont trop nombreux que je vois pas l'intérêt d'en parler. » Un rire suivait ses paroles. C'était plus ou moins vrai. Bien entendu, ils n'étaient pas aussi nombreux qu'elle le prétendait - bien qu'elle n'avait pas à se plaindre - et l'un d'entre eux ressortait naturellement du lot, était plus régulier que les autres mais elle n'en faisait pas sa priorité pour autant. Elle se refusait de le faire. « Autant être claire. Je suis partisane du plaisir à deux mais pas des emmerdes qu'on peut avoir en étant en couple. C'est pas trop pour moi ce genre de délire. » Et même si elle connaissait l'attachement de Jeremiah pour elle, elle ne pouvait répondre à ses attentes d'exclusivité. Il n'avait pas besoin d'en parler pour qu'elle le sache, c'était évident. Pour elle, l'évidence restait qu'un attachement trop intense était une faiblesse, un frein de plus à leur mission. « Je préfère être officiellement seule et libre que d'être coincée dans un couple qui me posera forcément problème un jour. S'attacher à quelqu'un, c'est avoir des doutes qui embrument les idées, c'est avoir envie de donner sa vie pour celle de l'autre, c'est abandonner des idéaux pour faire des compromis. » Haussant les épaules, elle posait l'implacable par quelques mots. « Je veux garder l'esprit clair, n'avoir aucun doute et ne faire aucun compromis. » Quitte à finir seule contre le reste du monde, elle s'en foutait et n'avait pas peur d'un tel destin.
Finissant son verre qu'elle avait largement entamé pendant cette courte discussion, elle ne pouvait que constater que la chaleur se faisait d'autant plus présente. Certes, c'était l'été et tout le monde sait que les été New Yorkais sont particulièrement chauds mais pour parer à cela, les maisons, dont celles de Primrosae, étaient équipées de clim. Elle était pourtant en marche et ce n'était pas le peu de vin qu'elle avait bu qui lui donnait autant de chaleur. Regardant l'heure que l'horloge affichait sur le mur juste derrière Mona, elle reposait son regard sur elle. « Ça te dirait d'aller faire un tour? Pour se dégourdir les gens et prendre un peu l'air. » L'Hudson n'était pas loin, elle se disait que se balader un peu au bord de l'eau ne pourrait pas leur faire de mal, d'autant plus quand on savait que c'était probablement le meilleur des endroits pour avoir des courants d'air frais. A vrai dire, sans même attendre sa réponse, elle levait ses fesses du canapé, se rendant dans la cuisine ouverte sur le salon pour déposer son verre à pied dans le lave-vaisselle. Que son amie accepte ou non d'aller faire un tour, pour Primrosae, le vin ce soir, c'était terminé.
Avec ses années au sein des Watchers et avec l’aide de Primrosae, Mona était devenue une excellente combattante et son coup de fusil était parfait. Elle savait qu’elle n’égalerait jamais la rousse qui avait une rage animée et qui restait de marbre peu importe la situation. Mona ne l’avait jamais vu fléchir. Quand elle avait un but, elle l’atteignait coûte que coûte. Mais au moins, la brunette n’avait plus peur du monde qui se dessinait. Si on lui avait dit lorsqu’elle était adolescente qu’elle serait excellente au combat à mains nues et que tuer de sang-froid allait devenir son quotidien, elle ne l’aurait pas cru. Elle, Mona Blackfield la fille hautaine, froide et qui détestait se salir les mains était capable de se battre? C’était assez incroyable. Mais, elle en était très fière. Elle se sentait forte et puissante depuis qu’elle avait eu ses enseignements. Elle avait dû redoubler d’efforts pour prouver qu’elle avait sa place. Lorsqu’elle était entrée dans la salle de réunion la première fois, on l’avait regardé bizarrement. Très peu de gens croyaient en ses intentions. Plusieurs ne donnaient pas cher de sa peau et croyaient qu’elle allait craquer dès la première semaine. Elle avait dû leur montrer qu’ils se trompaient et que vouloir se débarrasser des mutants n’étaient pas qu’une simple passade. Certes, aucun de ses proches n’étaient morts entre leurs mains, mais cela ne voulait pas dire qu’elle ne pouvait pas les détester. Elle les détestait autant qu’eux. Les mutants étaient une erreur de l’espèce humaine. Ils s’agissaient de profiteurs et de menteurs. Ils étaient tous violents et méchants. Ils voulaient prendre le pouvoir et dieu sait ce qu’il adviendrait des pauvres humains normaux s’ils y arrivaient. Mona ne voulait même pas l’imaginer et c’est pour cela qu’elle était à fond avec les idéaux de Jeremiah. Mais au fil du temps, éliminer des mutants était devenu routinier. Si au départ, elle avait eu quelques interrogations et hésitations avant d’appuyer sur la gâchette, ce n’était désormais plus le cas. Elle avait eu envie d’un rôle plus important au sein de l’organisation anti-mutante. En tant qu’assistante au gouvernement, elle se sentait importante et plus utile, même si elle ne disait jamais non pour mettre à terre un mutant.
Même si Mona passait beaucoup de temps avec Prim, que ce soit pour des missions, des rassemblements ou pour des soirées de filles, elle ne l’a connaissait pas énormément. La rouquine ne parlait jamais ou très peu de son passé, mais il était évident qu’il était dur et triste. Elle semblait avoir traversé une multitude d’épreuves, au contraire de l’anglaise qui avait toujours tout eu facilement. Primrosae avait une haine incommensurable envers les mutants, ce qui en faisait une tueuse redoutable. Elle était parmi les membres les plus respectés au sein de l’organisation après la famille Reagan. Elle possédait une détermination et une concentration de fer et c’était tout un spectacle de l’observer à l’œuvre. Elle avait tout le respect de Mona, qui même après avoir obtenue sa place permanente au sein des Watchers, continuait de demander conseil à son mentor concernant leur groupe ou sa vie personnelle. D’ailleurs, la brune aux yeux perçants avait été heureuse d’avoir le soutien de la tueuse pour ce poste aux côtés du secrétaire des affaires mutantes. Son avis avait été aussi important que celui de Jeremiah ou de Joseph. D’ailleurs, le sujet de la relation de Mona avec Jo arriva dans la conversation. Elle tiqua légèrement lorsque Prim lui dit qu’elle méritait mieux que lui. C’était vrai qu’ils se détruisaient mutuellement plus qu’autre chose, mais avec Joseph à ses côtés, Mona se sentait en confiance. Il était toujours de son côté et il était prêt à tout faire pour elle. La jeune femme savait qu’elle a avait gaffé et peut-être qu’il ne lui reviendrait plus jamais. Cela la rendait triste, mais elle ne le montra pas. Elle ne voulait pas passer pour une faible accroché à un homme aux yeux d’une femme qu’elle admirait. D’ailleurs, le discours de cette dernière sur le fait qu’elle ne voulait pas s’attacher et qu’avoir des relations stables étaient une faiblesse, ne passa pas dans l’oreille d’une sourde. Elle avait écouté attentivement et s’était demandé si elle ne devrait pas prendre exemple sur son amie. La distance de Jo l’a démoralisait et il prenait beaucoup de place dans ses pensées et cela avait une influence sur son travail. Sans attachement, elle serait beaucoup plus efficace. Elle regarda Prim. Cette dernière ne semblait pas malheureuse. Elle avait le contrôle et pouvait décider lorsqu’elle avait des envies. Ça pouvait être bien de vivre ainsi. Ne devoir aucun compte à personne et choisir du prétendant qu’on a envie cette journée-là. Être libre et ne faire aucun compromis. C’était à réfléchir, même si Mona n’était pas prête à faire une croix définitive sur Joseph pour le moment.
Ayant elle aussi terminé son verre, elle le posa sur la table basse. Se sentant inconfortable, elle commençait à gesticuler sur le canapé. Il faisait très chaud, mais pourtant lorsqu’elle était entrée dans l’appartement, il faisait très frais et la température était très confortable. La rouquine semblait énervée et pas très à l’aise. Il y avait réellement un truc qui rendait l’atmosphère de la pièce désagréable et c’est avec joie qu’elle accepta l’invitation de la jeune Dahl d’aller se promener à l’extérieur. "Bonne idée! Ta clim fait des siennes, je pense. Tu devrais la faire réparer. " Elle se leva d’un bond et posa un regard sur la veste qu’elle avait enlevé quelques instants auparavant. Elle haussa les épaules, non pas besoin de sa veste. Sa camisole blanche la démangeait déjà. "On devrait aller au bord de l’Hudson! Le coucher de soleil y est magnifique. Mais, tu dois être au courant." La belle rousse avait en effet une belle vu sur l’eau de son appartement.
S'il y avait une chose qu'elle pouvait accorder à Mona, c'était sa persévérance, sur bien des domaines. Sa persévérance pour avoir une relation plus ou moins stable avec son boy, une relation destructrice pour sûre mais qui durait dans le temps malgré tout. Surtout, elle notait sa persévérance à donner corps et âme dans les causes des Watchers. Primrosae avait beau être une chasseuse accomplie, une tireuse de renom au bout de son fusil de précision, elle ne restait qu'une gâchette pour mettre une balle dans la tête des mutants. Elle savait établir des plans et les exécuter mais ils étaient de courte durée. Mona, de son côté, était plus profonde que cela, bien plus ancrée et mouillée pour les Watchers. Elle mêlait sa vie publique et privée à sa vie de Watcheuse, là où Prim séparait les siennes pour conserver son entreprise - et sa cellule consacrée au développement d'armes antimutant mais ça, c'était une autre histoire. La brune, aux yeux de Dahl, était la personnification de l'investissement. Certes, Stone Cold jouait la comédie auprès de son patron, feintant le plaisir de travailler pour lui, ne laissant pas voir qu'elle était là pour bien d'autres raisons, mais cela n'empêchait pas sa sécurité d'être mise à rude épreuve. A tout moment, on pouvait faire le lien entre elle et les Watchers et ce, tous les jours. Elle prenait des risques pour accéder à des dossiers, elle était en mission tous les jours - et non quelques heuresu comme la plupart du temps pour Primrosae. En plus de cela, la jeune femme, bien que parfois trop fanatique des idées du Reagan en chef, était appréciée des Watchers à présent, là où la rousse était crainte. On faisait confiance à Mona, on se méfiait de Prim et de ses coups de sang. En plus d'être persévérante, elle avait la confiance des autres. Et pour tout ça, Mona avait tout le respect de son amie et bien plus encore. Une partie de son estime, très certainement.
Bientôt les conversations personnelles étaient abandonnées au profil du confort physique. Elles étaient deux à avoir chaud, deux à vouloir sortir de là pour aller prendre l'air. « La compagnie va entendre parler de moi, je te le garanti. » Oh que oui, elle allait gueuler. Tous les étés, elle faisait réviser sa clim pour être sûre que ce genre de connerie n'arrive jamais. Celui qui était venu allait en prendre pour son grade, pour sûr et autant dire qu'il avait intérêt à être humain quand elle allait se renseigner sur sa gueule sinon il allait finir entre quatre planches, comme tous les autres. Sans attendre une seconde de plus, elle ouvrait la porte à Mona et une fois cette dernière sortie, elle la suivait, fermant la porte à clé derrière elle. « Excellente idée. » Elle avait beau avoir l'habitude, en effet, ça restait quand même un moment agréable de voir le soleil se coucher. Elle n'avait rien pris avec elle, hormis ses clés qu'elle fourrait maladroitement dans la poche de son jean. Entament la marche, une petite brise de soirée venait chatouiller sa peau toujours blanche bien que l'été s'était installé depuis un moment. Ça faisait un bien fou. La chaleur semblait s'évacuer un peu de son corps bien que cela n'avait pas de quoi la faire soupirer de soulagement pour le moment. Les effets des champignons hallucinogènes commençaient sérieusement à monter, la rendant plus souriante qu'à son habitude alors que son regard restait fixé sur l'eau dès lors qu'elles longeaient enfin le fleuve. « J'ai envie de plonger dedans. » Disait-elle avec une certaine euphorie qui n'était clairement pas naturelle. « Tu sais quoi? Rien à foutre. » Ça, en revanche, c'était effectivement une habitude d'en avoir rien à foutre des avis et des possibles jugements. S'arrêtant, elle retirait ses chaussures, son jean et son haut, allant même jusqu'à se mettre totalement nue - c'est pas comme si elle connaissait le concept d'être pudique - avant de disparaître dans l'eau.
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