Gunner, ou plutôt devrions nous l'appeler Shell Shock en ce moment, se baladait en rue avec son attirail sur le dos. L'avantage d'une ville bondée, c'est qu'on pouvait facilement se mêler à la foule sans être remarquer plus que ça, même avec deux lance-grenades collés au bras. Il marchait à visage découvert, ne craignant même pas qu'un représentant de l'ordre le reconnaisse au détour d'une rue. Il tourna au détour d'une allée, quittant la masse humaine en se frayant un chemin vers ce coin désert entre deux buildings. On pouvait se demander ce qu'il faisait là, ainsi armé pour déclencher ce qui correspondrait à une annihilation de la moitié de la ville. C'était un nouveau contrat qui lui était tombé dessus, un petit boulot entre deux contrats pour son employeur actuel qu'était les fanatiques du poulpe, comme on lui en proposait souvent. Un riche homme d'affaire n'ayant pas trop de scrupule voulait se débarrasser d'un concurrent qui refusait de lâcher prise après quelques menaces bien placée. Il était donc temps de mettre les menaces à exécution et de créer une veuve et un orphelin de plus. Il n'y avait qu'une seule et unique condition pour que le contrat soit validé et que les billets soient remis en main propre – parce que l'informatique à cette fâcheuse tendance à laisser des traces gênantes – il fallait que le tout aie l'air d'un accident. Décidément, certaines personnes aimaient se compliquer la vie.
Allumant sa cigarette et tirant ce qu'on appelait communément une taffe, il observa sur l'un des murs qui délimitait l'allée et plus précisément l'échelle de secours qui y trouvait place. Expirant la fumée qui avait empli ses poumons, il approcha d'un container qui servait de poubelle pour l'immeuble et la poussa juste en dessous de l'échelle remontée. Rapidement, même pour un homme de son âge, il grimpa sur ce nouvel appui et monta à l'échelle pour enfin atteindre l'escalier à n'utiliser qu'en cas d'incendie. Il monta alors les étages de cette manière, sans réellement s'inquiéter d'un habitant qui verrait à sa fenêtre l'homme au cerveau plus tellement intact se promener. La fin de cet escalier le mena sur le toit de l'immeuble, d'une taille relativement moyenne pour le quartier et s'approcha du bord pour observer la rue. Il prit entre ses doigts le tube de tabac qui se consumait et fit tomber les cendres en contre-bas, sur la foule qui se promenait comme si de rien n'était. C'est à ce moment qu'il sortit de son blouson la cagoule qui complétait son costume de combat. Il recouvra son visage avec et plaça les lunettes de visées devant ses yeux. Rapidement, des indications diverses s'inscrivirent dessus, la vitesse du vent, les différentes distances qui se mettait à jour à chaque fois qu'il bougeait sa tête. En face se trouvait un petit bureau dont le patron prochainement décédé allait bientôt sortir, sans se douter que ça le conduirait à une mort certaine. A côté se trouvait alors un chantier où trônait une grue gigantesque supportant des blocs en bêton. La mort en ressemblant à une crêpe, ça restait un classique mais il était tout aussi indémodable. Il lui avait suffi d'un petit passage sur les lieux pour déplacer la grue afin qu'elle se trouve pile poil au-dessus du trottoir, là où la victime devait passer. Il regarda l'écran de son lance-grenades droit afin de regarder l'heure. S'il n'était pas en retard, l'homme d'affaire n'avait plus que 20 minutes à vivre avant de rencontrer son funeste destin. Il tapota alors sur l'écran en se servant des informations relatives qu'il avait enregistré pour préparer la grenade qui allait faire le boulot, programmant le temps qu'il lui faudrait pour traverser la rue et atteindre le câblage en face. La cigarette continuait à se consumer entre les lèvres du mercenaire, qui la récupérait entre ses doigts de temps à autres, regardant vers les bureaux, un pied posé sur le rebord du toit. Machinalement, la mélodie du Yankee Doodle commença à être fredonnée.
Il y a des jours comme ça où rien ne va. Où on se lève en se tordant la cheville sur une chaussette en boule. Où l’on se brûle avec son café. Où l’on réaliser qu’il vaut mieux poser la tasse et filer sous la douche si on ne veut pas être en retard. Où l’on court partout dans l’appartement à la recherche de son téléphone portable. Il y a des jours où rien ne va. Et même une fois quelques minutes passées, les choses ne s’arrangent pas. Comme quand on loupe une apparition de Spider-Woman. Comme quand on arrive avec trois quart d’heure de retard au travail. Comme quand le supérieur est en colère. Comme quand on manque de se faire renverser par une camionnette de livraison. Heureusement, Jared est encore en un seul morceau. Le coeur battant. Les yeux à moitié fermés par le manque de sommeil. La veste de l’uniforme froissée. Mais il est vivant. Il pédale mollement sur son vélo, à la recherche de son prochain client à livrer. Il connaît cette personne. A la clé, il sait qu’il aura le droit à une petite pause sur les toits, avec un croissant et peut-être même un verre de jus d’orange. Il le sait. Il a ses habitudes chez les clients. Certains sont froids et lui ouvrent à peine la porte. D’autres le laissent attendre dans l’entrée. Et puis, il y a ceux qui savent l’accueillir. Ces derniers, il devrait les fuir. Ils lui font perdre du temps sur sa journée. Sauf que Jared est tout sauf l’employé modèle. Il a un problème avec les heures, ce n’est plus à prouver. Et quand il est avec un client, il en oublie les minutes qui filent. Il voit cela comme une manière d’entretenir la proximité avec les clients, d’améliorer l’image de l’entreprise. Vagues excuses pour ne pas culpabiliser et se dire qu’il est vraiment dans la merde. Cette fois-ci, ça ne peut pas manquer. Il est à deux doigts de s’endormir. Il est à deux doigts de tomber sous une voiture. Il lui faut vraiment du repos. Une petite sieste, peut-être. Est-ce que ce serait mal vu qu’il dorme chez un client ? Sûrement. Bon, il pourra au moins s’accorder quelques minutes de répit, loin des pots d’échappement et des klaxons. Alors, il pédale. Encore et encore. Jusqu’à arriver au pied d’un immeuble. Là, il fixe son vélo à un lampadaire avec un anti-vol. Manquerait plus qu’il se le fasse voler. Ce serait le pompon, comme dirait son patron. Ce serait la raison d’un licenciement, probablement. Il tire sur l’anti-vol pour s’assurer qu’il tient. Il récupère le chargement et se dirige jusqu’à la porte. Il est lent. Atrocement lent. Ses pieds ont du mal à le porter. Ses pieds râpent le sol. Il n’aura bientôt plus de semelle si il continue. Un fait qui ne semble pas le déranger outre mesure. Il veut juste retourner dans son lit. Il veut juste quelques heures de sommeil. Juste ça. Ce n’est pas trop demander, quand même ! Sous la pression de son doigt et après quelques mots échangés, la porte se met à grésiller. Signal qu’il peut y aller. Signal qu’il a le droit d’entrer. Il ne se fait pas prier. Mais il sait qu’il a six étages à monter. SIX. On n’a pas idée de vivre si haut, sans ascenseur. Il prend une inspiration. Marche après marche. Étage après étage. Il y parvient. Le carton n’est même pas tombé. Son corps est toujours attaché à sa tête. Tout est bon. Il est à peine essoufflé. Ses cuisses le font à peine souffrir. Merci les heures à pédaler.
Il arrive au mauvais moment. C’est ce que lui répond le client. Mais il peut quand même monter sur le toit pour souffler, si il le souhaite. Jared s’en fiche. Il voulait sa dose de caféine et un canapé sur lequel roupiller quelques heures, non pardon, quelques minutes. Il fait signer le reçu avant de poursuivre la montée. Il gravit de nouvelles marches. De nouveaux étages. Le voilà fasse à une porte de secours. Maintenant qu’il est en haut, il est plus réveillé. Plus en forme. Il n’aurait presque pas besoin de prendre l’air. Il n’aurait presque pas besoin de se reposer. Par acquis de conscience, il préfère tout de même pousser la porte. Sait-on jamais. Imaginez qu’il soit de nouveau fatigué sur son vélo ! Il pourrait causer un accident. Il pourrait renverser une personne. Il pourrait… on ne sait pas ! Il bloque la porte avec une brique abandonnée là. Il fait quelques pas sur le toit, prenant le temps d’inspirer pleinement. Ici, les bruits de la rue sont étouffés. Il n’y a que le ciel bleu. Il n’y a que quelques pigeons. Il n’y a que la solitude. Être seul en plein New-York, impossible et pourtant… Ses réflexions s’arrêtent lorsqu’il voit un homme encagoulé, dos tourné. Il semble concentré sur un point, de l’autre côté de la rue. Mais ce n’est pas l’homme qui interpelle Jared. Plutôt l’équipement qui l’accompagne. Un équipement digne d’un film d’action ou de guerre. Le gars tient une arme entre les mains, une arme dont Jared ne connaît même pas le nom. Il devrait jouer davantage aux jeux vidéos. Ainsi, il saurait nommer toutes les armes qu’il croise. Celle-ci semble encombrante. Du genre qui ne déclenche pas un frisson ou un chatouillement chez la personne qui est visée. Plutôt du genre qui fait très très très mal. Le simple coursier qu’il est hésite. La logique voudrait qu’il sorte son téléphone et qu’il appelle la police pour signaler cet individu suspect. La logique voudrait qu’il prenne peur devant cette cagoule. Sauf qu’il ne pense pas logiquement. Il a un problème de connexion entre ses neurones. Plutôt que de reculer, il avance. De quelques pas. Il finit par s’arrêter à bonne distance. Il espère que ce sera suffisant pour esquiver si Cagoule le vise. Doux rêve. Douce espérance. “Hey Cagoule, qu’est-ce que tu fais avec ton truc, là ?” Il l’interpelle de loin. Il ne tient pas à se prendre un coup dans la tronche. Il n’est pas un professionnel des arts martiaux, ça aussi, c’est connu. Il a déjà pu s’en rendre compte par lui-même à plusieurs reprises. Mais Cagoule ne peut pas le savoir. Maintenant qu’il se retourne vers Jared, il semble énorme. Énorme et imposant. Un vrai ours. Toujours pas de peur chez le coursier. Peut-être de la surprise, peut-être de l’étonnement, mais pas de la peur. Les muscles et la carrure ne font pas tout. Par contre, son regard. Un regard mi-fou mi-flippant a de quoi arracher quelques frissons d’appréhension. Mais Jared ne part pas. Il reste là, à vouloir faire régner l’ordre. A donner des leçons. A se croire aussi fort que les super-héros. Il en oublie parfois la réalité. Si un Thor pouvait survivre à cet homme, ce ce ne serait sûrement pas le cas d’un coursier. Mais tant pis, Jared est prêt à prendre le risque. A mourir en héros. Oui, il a le sens du mélodrame.
Il reprend la parole, d’une voix plus sûre et autoritaire. “Je ne suis pas sûr que tu puisses rester, mon vieux.” Très clairement, Cagoule n’est pas là pour balayer le toit. Il n’est pas là pour bronzer. Il est là pour faire quelque chose de mal et Jared ne va pas se contenter de tourner les talons. Il n’est pas du genre à laisser faire les autres. C’est la sécurité des gens et la survie de la personne ciblée qui est en jeu. Il ne compte pas lâcher le morceau. Il ne compte pas prendre ses jambes à son cou. Il ne compte pas fuir au premier coup ou au premier regard noir. Lui aussi peut rivaliser dans un concours de regard effrayant. Lui aussi peut frapper. Alors, qui des deux va gagner : l’ours à la cagoule ou le coursier à l’uniforme froissé ?
Tic-Tac, Tic-Tac. Toujours pencher vers la rue, Gunner comptait patiemment les secondes qui s'écoulaient, attendant l'instant fatidique durant lequel sa cible allait prendre le chemin favorable à son décès. Ses doigts serraient le manche de son lance-grenades et le pouce était prêt à appuyer sur le bouton à l'extrémité de celui-ci. La cigarette qui lui pendait au bec ressemblait de son côté de plus en plus à un mégot au bout rougeoyant. Dans quelques minutes le boulot serait terminé et il n'aurait plus qu'à rentrer toucher l'argent mais c'était sans compter sur les potentiels perturbateurs qui se mettraient en travers de son chemin. Ce qui était le cas quand une voix arriva à ses oreilles, une voix provenant de son dos. Gunner se retourna pointant le lance-grenades chargé dans la direction de la personne qui l'avait interpellé comme étant "Cagoule". Il observa rapidement le gamin devant lui, parce que c'était tout ce l'univers avait à lui offrir, un gamin. Dans une ville où les toits étaient occupés par des hommes en armure ou des lanceurs de toiles, il se retrouvait face à un simple garçon, un challenge indigne de sa personne. Il poussa un petit ricanement, dédaigneux autant qu'il se pouvait, à son attention, inspirant une ultime bouffée sur sa cigarette avant de la reprendre de sa main libre, l'autre pointant toujours le canon chargé dans la direction du jeune homme.
"Désolé gamin, tu ferais mieux de passer ta route si tu ne veux pas respirer avec tes poumons directement à l'air." Rapidement ses lunettes rajoutaient les informations relatives au gamin pour une éventuelle agression. Gunner, malgré toutes les apparences, ne tuait pas volontairement ceux pour qui il ne recevrait pas des pièces sonnantes et trébuchantes. Evidemment, les dommages collatéraux existent, la chute des parpaings suspendus au-dessus de la rue pourrait, dans leur chute, entraîner la mort de l'une ou l'autre personne innocente qui n'avait commis comme crime que de se trouver là au mauvais moment. D'un mouvement de doigts, il jeta son mégot derrière lui, par-dessus la rambarde afin d'entamer sa longue descende vers la rue inconsciente de ce qui se passait en amont. Il cracha sa fumée dans l'air en baissant son bras droit, ne mettant plus en joue le sauveur de l'humanité, ou son futur martyr, ça dépendait du point de vue. Il regarda l'écran ce coup-ci posé sur son bras gauche, celui qui était relié au lance-grenades accrochés à ce même bras pour tapoter dessus également. "Je te laisse 30 secondes pour repartir d'où tu es venu et oublier à tout jamais ce que tu as vu ici. Ainsi, tu pourras retourner à ta pathétique petite vie pour la regretter une journée de plus." Il pressa l'un des boutons sur l'écran et un bruit caractéristique de mécanisme se mit en place, provenant de l'énorme sac qu'il avait au dos. Puis le bruit se tourna vers le tube qui reliait ce dernier à son excroissance porteuse de mort, cette fois, le bruit caractéristique d'un objet qui tombait, une grenade de sa fabrication. Enfin, le dernier bruit, directement dans le lance-grenade, ressemblait à l'armement de cette dernière, prête à être tirée. Son bras gauche se tendit alors vers le jeune homme, imitant son petit frère quelques secondes au préalable. "L'aiguille tourne gamin. L'aiguille tourne." Et l'aiguille tournait malheureusement pour lui aussi. S'il ne se débarrassait pas assez vite de ce trouble-fête, il risquait de louper son rendez-vous avec la faucheuse, ce qui ferait tâche sur son CV. Son regard ne quittait plus le gamin, espérant le voir tourner les talons et partir en courant et en implorant sa mère. Si ce n'était pas le cas, il risquait de le faire dans les secondes à venir, vu le cadeau qu'il lui préparait.
Il pointe le canon de son arme dans sa direction. Ce n’est pas la panique qui envahit Jared. Ce n’est pas la peur de mourir. Ce n’est pas l’instinct de survie. Plutôt l’incompréhension. Plutôt le désir de chasser cet homme du toit de l’immeuble. Plutôt la volonté de le décourager de faire du mal à qui que ce soit. Peu importe qui est cette personne. Peu importe de quoi elle est capable. Jared ne voit que la nécessité de le faire fuir. La sécurité en dépend. Il n’est pas du genre à fermer les yeux. Il n’est pas du genre à laisser faire les autres. Il n’est pas du genre à accepter que l’on fasse du mal sous ses yeux. Si chacun arrêtait de détourner le regard, le monde serait moins moche. Moins incertain. Il serait plus sécuritaire. Plus paisible. Il ne compte pas faire justice lui-même. Il en est incapable. A part quelques muscles, il n’y a rien d’autres de très développer chez lui. Il n’a pas d’arme. Il n’a pas d’armure. Il n’a pas de super-pouvoir. Mais il reste tout de même déterminé à casser cet individu. Et la détermination n’est pas ce qui manque chez Jared. Certains disent qu’il en a trop. Qu’il est un peu trop borné. Qu’il est un peu trop tenace. D’autres disent que c’est ce qui fait son charme. Les avis divergent, tandis que la réalité reste la même. Il ne faiblit pas devant les menaces. Il ne fait pas dans son caleçon face à un regard noir. Il ne tremble pas devant une arme. Il reste stoïque, imperturbable. Il est moins impressionnant que Cagoule, moins baraqué. Pour autant, ils ont plus ou moins la même taille. Et là où Cagoule aura du mal à être rapide à cause de sa corpulence, Jared se révélera agile. Du moins, il l’espère. La tenue de l’homme ne lui rappelle aucun super-vilain. Il lui rappelle seulement un gars prêt à faire un braquage ou qui cherche à ne pas être reconnu. Dans les deux cas, ce n’est pas un bon présage. “Désolé gamin, tu ferais mieux de passer ta route si tu ne veux pas respirer avec tes poumons directement à l'air.” Il lève les yeux au ciel. C’est le genre de répliques que l’on peut entendre dans les mauvais films sur la mafia. Le genre de menaces qui ne fait peur qu’aux enfants. Sauf que Jared n’est pas un gamin de huit ans. Il a déjà vu des héros se battre. Il a déjà frôlé la mort. Il a passé la moitié de sa vie aux urgences des hôpitaux. Il n’a pas vraiment peur de mourir. Surtout pas quand la personne en face de lui n’est pas original. “Sérieux ? Ouhouh, au secours, j’ai peuuuuur.” Il se tortille et agite les mains dans tous les sens. Un vrai comédien qui mime la frayeur. Il revient vite à sa position d’origine. Mains le long du corps. Dos droit. Sourcils froncés. Si monsieur Cagoule décide de jouer les gros bras, Jared va jouer l’idiot de service. C’est décidé. Et si l’idiot doit mourir à la fin de cet échange, hé bien, il sera mort en héros, non ? Personne ne saura le pourquoi du comment. On découvrira peut-être son corps dévoré par les pigeons trois semaines plus tard. Mais au moins, Jared saura les raisons de son meurtre.
Il fixe l’homme masqué. Ce serait tellement mieux si Cagoule pouvait dévoiler son visage. Visiblement, il tient trop à son anonymat pour faire le moindre effort. Il le regarde jeter son mégot de cigarette par-dessus le toit. Sans aucun scrupule. Sans aucune inquiétude. Jared ouvre la bouche, choqué par le scène. Cet homme est totalement irrespectueux. Cet homme vit au-dessus des lois. Cet homme se prend pour plus important qu’il ne l’est vraiment. “HEY ! Mais vous êtes malade ! Ça peut brûler quelqu’un !” Cagoule a forcément eu des problèmes durant son enfance. Des parents qui le maltraitaient. Des professeurs qui le mettaient au coin. Des camarades qui n’appréciaient pas sa passion pour les cagoules. Il a forcément dû être mal-aimé pour être aussi prétentieux et irrespectueux. Ou alors, il a été mal élevé. Dans tous les cas, son comportement est répréhensible. Son comportement est inacceptable. Et si c’est un bébé dans une poussette qui reçoit la cigarette en plein front ? Et si la cigarette atterrit dans la nuque d’une personne ? La brûlure doit être douloureuse. Violente. Surprenante. Et puis, la rue n’est pas une poubelle. L’écologie et tout ça, il n’en a pas entendu parler ? Ce mec n’en a rien à faire. “Je te laisse 30 secondes pour repartir d'où tu es venu et oublier à tout jamais ce que tu as vu ici. Ainsi, tu pourras retourner à ta pathétique petite vie pour la regretter une journée de plus.” Sa pathétique petite vie ? Donc, c’est ainsi que Cagoule voit son quotidien. Alors qu’ils ne savent rien l’un de l’autre. On ne fait pas plus prétentieux. Jared croise les bras sur son torse. Malgré la menace de l’arme. Malgré le son caractéristique de son chargement. Il ne faiblit pas. Il compte bien attendre la fin des trente secondes. Il compte bien prendre le risque. De toute manière, qu’est-ce qu’il a à perdre ? Il n’a pas de fiancée, il n’a pas d’enfants, il a un travail ennuyant. Il n’y a que sa mère qui serait attristée. Elle s’en remettrait parce qu’elle sait comment est son fils. Elle sait qu’il ne fait pas attention. Elle sait qu’il a un talent pour s’attirer des ennuis. “L'aiguille tourne gamin. L'aiguille tourne.” Les secondes s’égrènent. L’arme est toujours visée sur lui. Ce machin chose doit être lourd. C’est un appareil encombrant, technique. Ce n’est pas un jouet que l’on trouve dans un magasin pour enfants. Jared doute même que l’on en trouve dans une armurerie. C’est plutôt un engin bricolé et fabriqué par des mains expertes. Une création sur demande. Une création unique. Une création qui doit faire beaucoup de dégâts. “Pas besoin de prendre ce ton avec moi. J’ai n’ai pas une arme ou une cagoule, mais j’ai un cerveau. Je vois bien que vous n’êtes pas là pour tricoter. Alors, je ne bouge pas. Hors de question.” Il paraît que ce n’est pas en portant un costume que l’on devient un héros, mais que c’est le comportement qui le détermine. Est-ce qu’il est en train d’en devenir un, en tenant tête à cet homme, ou est-ce qu’il est complètement désespéré et suicidaire ? La question se pose. La question va trouver sa réponse.
Jared hausse les épaules. Il est prêt à pousser l’affront jusqu’au bout. Jusqu’à le provoquer. Jusqu’à remettre son comportement en question. Jusqu’à remettre en cause sa logique. Il ne sait pas qui était dans le viseur de Cagoule avant qu’il n’intervienne. Il ne sait pas qui risquait de mourir, mais il compte bien gagner du temps pour que l’homme n’ait pas à mourir. Tué par un homme cagoulé, c’est vraiment nul, comme mort. Surtout que ce serait un meurtre à distance. Il ne saurait même pas pourquoi ou par qui il est mort. Il serait juste tué. Il n’aurait pas le droit à une seconde chance. Il n’aurait pas le droit au bénéfice du tête. “Tuez-moi, allez-y, vous serez tout de suite repéré et vous ne pourrez plus tuer personne aujourd’hui.” Jared fait un pari dangereux. Celui que son arme est assez puissante pour générer un bruit important. Un bruit qui serait entendu des habitants de l’immeuble et des passants dans la rue. Un bruit qui inquiéterait et qui provoquerait l’arrivée de la police. Cagoule aurait le temps de s’enfuir, sans conteste, mais sa mission resterait inachevée. Alors, il ne lui reste que deux solutions : assommer Jared ou le tuer. Finalement, peut-être que Jared est suicidaire. Provoquer un homme armé. L’inciter à tirer. L’inviter à le tuer. Il est forcément suicidaire. Forcément imprudent. Forcément inconscient.
Le canon toujours pointé sur le gamin, Gunner relevait le sourcil si fort qu'il était facile de le remarquer malgré la cagoule qui lui cachait le visage. Son pouce frôlait le bouton lui permettant de lancer la grenade qu'il avait préparé spécialement pour l'occasion alors qu'il écoutait ce qui risquait d'être les dernières paroles d'un fou. Il essayait à son tour de l'intimidé, lui faisant remarquer que sa mort consumerait toutes ses chances de succès. Le mercenaire pouffa légèrement une fois que le silence revint, suite au discours courageux qui aurait mérité une musique patriotique en fond. Doucement, il commença à rire autant que ses poumons pouvaient le lui permettre. "Dis-moi gamin, tu répètes ça tous les matins devant la glace ou bien ?" Il regarda alors l'écran libre afin d'avoir une nouvelle fois une connaissance du temps qui passait. "Je ne sais pas si tu es courageux ou si tu es juste inconscient." Lança-t-il en reprenant un semblant de sérieux. "Mais quoi qu'il en soit, les 30 secondes viennent de s'écouler." Avec un sourire narquois, il pressa le bouton et le mécanisme d'expulsion à air comprimé, ce qui ruinait complétement ses espoirs de bruit grâce au tir, fit son office, lançant la grenade sphérique en direction du perturbateur qui devait en ce moment voir sa courte vie défiler devant lui. La sphère ainsi lancée tourna, pivota dans l'air avant de s'ouvrir sans même le moindre bruit afin de libérer un filet pour piéger le gamin cherchant à sauver le monde à son échelle.
Gunner n'était pas fou, il savait qu'une explosion sur un toit allait compromettre sa mission, mais il avait bien plus qu'un tour dans son sac pour se débarrasser d'un gêneur sans alerter la populace alentour. Il ne fallait pas oublier qu'il était avant tout un militaire et qu'il avait participé à de nombreuses opérations qui avaient justement demandé de la discrétion avant tout. De plus, même si les dommages collatéraux étaient nécessaires parfois, ce n'était pas pour autant qu'il voulait mettre un terme à la vie du premier venu qui lui cherchait des crosses. Après tout, si personne ne restait vivant, qui pourrait raconter sa vengeance et dire que le malade à la grenade avait été responsable de la mort de tel ou tel personne. Le bouche à oreille, c'était sa façon de trouver de nouveau employeur pour faire le sale boulot. Il se retourna, ne prêtant plus attention à son prisonnier, en espérant qu'il se soit assez fait dessus que pour comprendre qu'il devait prendre la poudre d'escampette et partir là d'où il venait. Il retourna pour se pencher sur le bord du toit, là où se trouvait son terrain de chasse. "Au moins, tu auras eu l'opportunité de me distraire, maintenant, laisse les grands bosser." Les lunettes de visée de Gunner lui indiquaient les nouvelles données relative au vent, ce qui lui permettrait de compenser au moment du tir dans les airs. De l'autre côté, il gardait son regard en direction de la porte pour voir la tête de sa victime sortir du bâtiment et se rendre à sa voiture, destination qu'il n'atteindrait jamais.
Sans même tourner la tête en direction du gamin qui s'était peut-être déjà libéré, voir qui était déjà parti sans demander son reste, il reprit la parole. Au pire, il parlerait tout seul pour passer le temps et il serait tranquille par la suite pour commettre son méfait. "Sérieusement, qu'est-ce que tu sais de la personne que tu veux sauver à tout prix ? Si ça se trouve, c'est un tueur d'enfant et un violeur de femme et je rends un service à la société." Et en disant sa phrase, l'ancien militaire ignorait lui-même si ses accusations étaient vraies ou pas mais si ça se trouve, en dehors de ses activités professionnelle, il avait peut-être d'autres passe-temps beaucoup moins avouables. Sadique comme il était, et stratège par la même occasion, il aimait mettre le doute dans l'esprit des gens présents. De son côté, il s'en foutait, il était payé pour faire un boulot, pas pour avoir une morale à deux balles sur les questions existentielle du bien et du mal.
Son rire. Il déteste son rire. Est-ce que l’on peut détester un rire ? C’est pourtant le signe d’un amusement profond. D’un moment amusant. Le rire est le symbole de la liberté et de l’expression. Le rire est beau et émouvant. Mais celui de ce gars est froid, moqueur, sarcastique. Il n’y a pas à dire. Il n’y a pas à hésiter. Jared ne l’aime pas. Il a le sentiment que l’homme se fiche de lui. En fait, ce n’est même pas une certitude. C’est la vérité pure et simple. Le sourcil arqué qui se dessine sous le tissu de la cagoule en est la preuve. Pourtant, il ne se vexe pas. Il a déjà compris que l’homme le prend pour un idiot. Un fou. Cagoule n’a clairement pas l’habitude d’avoir des obstacles sur sa route. Encore moins d’entretenir des relations amicales avec les gens. Il vient probablement de sortir de sa grotte, perdue dans une forêt amazonienne. Il ne sait probablement pas comment on se comporte dans un monde civilisé. Sinon, comment expliquer qu’il balance sa cigarette par-dessus bord et qu’il espère tuer une personne, sans être pris sur le fait, en plein New-York, hein ? Heureusement, Jared est intervenu. A temps. Juste avant qu’il n’appuie sur la gâchette. Juste avant qu’il ne délivre un message mortel. Juste avant qu’il ne sème la mort sur son passage. Mais maintenant, le coursier se retrouve démuni face à l’homme armé. Il n’a que les mots pour le dissuader. Il n’a que son imprudence pour l’inciter à agir. Autrement dit, de faibles armes à côté du machin-truc que porte Cagoule. Il préfère ne pas s’inquiéter de ce dont est capable l’arme. Il préfère l’ignorer. Sinon, il risque de prendre peur ou de partir dans des hypothèses à en perdre la raison. Il préfère se concentrer sur le tueur. “Dis-moi gamin, tu répètes ça tous les matins devant la glace ou bien ?” Son ton suffisant fait lever les yeux de Jared. Des yeux au ciel pour ne pas se laisser atteindre par la connerie de cet homme. Il mettrait sa main à couper que Cagoule se sent puissant, invincible, immortel. Il est prêt à parier que Cagoule a l’habitude de tuer les gens, au point de menacer n’importe qui sur le toit d’un immeuble lambda. Il est certain que Cagoule n’est plus à un mort près. Au contraire. La mort de Jared pourrait lui apporter un avantage dans son travail. Si on peut appeler cela un travail. Franchement, se poster devant la lunette d’une arme et attendre pendant des heures n’est pas crevant. Pas physique. Pas intellectuel. Rien de tout cela. Ce sont plutôt des vacances. Des moments de détente. Des moments de repos. Cagoule se tourne les pouces, alors qu’il y en a qui trime (comme Jared). Qui se donne à fond pour gagner leur vie. Qui accumule les heures de travail pour finir le mois sans découvert. Et des gens comme Cagoule se pointent, prennent cinq secondes pour viser et tirer, et ils repartent tranquillement. Un métier, ça ? Que nenni !
“Je ne sais pas si tu es courageux ou si tu es juste inconscient. Mais quoi qu'il en soit, les 30 secondes viennent de s'écouler.” Déjà ? Trente secondes passent à une rapidité incroyable. Trente secondes sont plus courtes qu’il ne le pensait. Bien. Il est prêt à découvrir sa sentence. Il est prêt à mourir, explosé en mille morceaux, ou à vivre. Au moins, il aura retardé l’homme. Au moins, il aura peut-être sauvé une personne. Il aura fait son devoir de citoyen. La police n’a jamais voulu de lui. Trop maladroit pour intégrer les rangs. Pour autant, Jared peut faire régner l’ordre à sa manière. Il peut assurer la sécurité de ses concitoyens, en se sacrifiant. Acte héroïque, non ? Si ça se trouve, le Président des Etats-Unis d’Amérique lui décernera une récompense. Ou alors, il finira en une matière décomposée sur un toit désert. Alors, il hausse les épaules. “Même pas peur !” Il est détaché. Il n’est pas inquiet. Il veut seulement voir la suite. Il fait confiance en son instinct. Il fait confiance en sa bonne étoile. Mais au fond de lui, il entend la voix de sa mère lui hurler qu’il est con et qu’il devrait courir pendant qu’il est temps. Il entend la voix de Skylar lui intimer l’ordre de fuir. Elle n’est pas dans le coin, trop occupée avec ses livres, pour savoir qu’il se met en danger. Sinon, elle aurait probablement enfilé sa tenue d’héroïne pour le secourir. Ses réflexions s’arrêtent là. Ses pensées disparaissent. C’est le vide dans son cerveau. Il ne s’attend pas à cette sphère qui se dirige sur lui. Il ne s’attend pas à mourir, au final. Il est surpris plutôt qu’effrayé. Il est étonné plutôt que soucieux. Il n’a pas le temps de sauter sur le côté. De toute manière, il est figé sur place. Ébahi par la beauté d’une grenade qui se dirige vers lui. Ébahi par l’élégance de son tracé et de ses courbes. Et plop ! Elle explose en silence. Elle dévoile son cauchemar. Elle laisse échapper sa sentence. Un filet. Un filet qui lui tombe dessus et l’oblige à s’accroupir par réflexe. Bordel de merde. Jared est vivant. Complètement vivant. Ce qui est un exploit incroyable qui doit être souligné. Déjà, il cherche à se défaire du filet, mais il a l’impression que plus il tire dessus, plus le filet s’agrandit et se déploie autour de lui. Il est pris d’un élan de panique. D’une crise de claustrophobie. Le filet laisse pourtant voir le jour. “Au moins, tu auras eu l'opportunité de me distraire, maintenant, laisse les grands bosser.” Jared se concentre. Il pose son regard sur le dos tourné de Cagoule. Il a repris sa “traque”. Il a repris sa mission. Ce n’est pas bon du tout. La panique disparaît. La claustrophobie s’efface. Il n’a qu’une seule chose en tête : se défaire du filet et assommer Cagoule.
Il tente de procéder avec minutie. Il attrape une maille et suit ses fils jusqu’en bas. Il trouve bientôt la fin du filet. Il le soulève, en tentant de ne pas s'empêtrer dedans. Le connaissant, ce ne serait pas étonnant. Des fois, sa maladresse le fatigue vraiment. L’agace, même. Il se libère enfin de son piège. Il peut se tenir droit. Il peut respirer. Il peut… arrêter Cagoule-man. Mais comment ? Le moyen reste encore à déterminer. Face à ce colosse, il ne peut pas sérieusement prétendre à le mettre K.O. dans un combat au corps-à-corps. Son regard traîne ici ou là. A la recherche d’une solution. A la recherche d’une arme improvisée. “Sérieusement, qu'est-ce que tu sais de la personne que tu veux sauver à tout prix ? Si ça se trouve, c'est un tueur d'enfant et un violeur de femme et je rends un service à la société.” Au final, Cagoule est peut-être plus censé qu’il n’y paraît. Pourtant, Jared ne partage pas son avis. Il a une façon de penser inspirée du bouddhisme. Chaque être vivant mérite de vivre. Il ne doit pas être tué arbitrairement ou volontairement. Ils ne sont personnes pour décider que quelqu’un doit mourir ou vivre. Et encore plus lorsque cela concerne des criminels. Ils doivent être amenés devant la justice. Ils doivent être jugés pour leurs actes. Ils doivent être punis pour apporter du réconfort aux familles des victimes. Si ils doivent mourir, ils ne doivent mourir que de vieillesse ou de maladie. Sûrement pas d’une balle en plein coeur. Sûrement pas d’une grenade explosive. “Tueur ou violeur, ça ne change rien. Personne ne mérite de crever, même pas vous.” L’explication est simple et pourtant, elle est réelle. Il ne comprend pas qu’aujourd’hui, la peine de mort soit encore instaurée dans certains états. Il ne comprend toujours pas qu’on puisse retirer la vie à une personne. Que cela soit par un serial killer ou par un jugement. Le monde est déjà assez cruel pour ne pas en rajouter. A son échelle, il ne peut rien. Petit insecte face à des requins. Cagoule lui tourne toujours le dos. Il ne se méfie même pas. A croire qu’il a une grande confiance en ses talents. A croire que Jared est une distraction. “Et si on suit votre logique, faudrait que je vous tue. Ce serait dommage, non ?” Il se rappelle de l’existence de la brique. Celle posée contre la porte pour l’empêcher de se fermer. Si il la retire, il sera incapable de rentrer dans l’immeuble. Mais si il ne la prend pas, une personne risque de mourir de l’autre côté de la rue. Entre se laisser mourir de faim et de soif sur un toit et sauver une personne, le choix est compliqué. Mais l’individualisme n’étant pas dans les gènes de Jared, le dilemme est rapidement terminé. Il se déplace doucement. Chaque pas est léger pour ne pas être trahi par leurs bruits. Chaque pas est calculé pour le rapprocher de la brique.
Il y est. Il est juste à côté de la brique. Il l’attrape. Il accompagne la porte jusqu’à ce qu’elle se ferme, l’empêchant de claquer. Il a la brique dans la main. Maintenant, il lui reste à trouver la suite du plan. Il ne peut pas la jeter sur cagoule-man. Elle est trop lourde et n’atteindrait jamais sa cible. Il doit être au plus près. Il doit être à quelques centimètres. Sauf que Cagoule va s’en apercevoir. Merde de merde. Que ferait Thor dans cette situation ? Il le foudroierait sûrement. Mauvais exemple. Captain, alors ? Un coup de bouclier dans la gueule et le problème serait réglé. Daredevil ? Quelques coups et le tour serait joué. Il n’y a donc aucun héros qui puisse l’aider ? “Pourquoi vous tuez, hein ? Vous avez été traumatisé par un petit Brandon pendant votre enfance ? Il vous volait vos jouets ?” Une diversion pour se rapprocher. Une diversion pour couvrir le bruit de ses pas. Une diversion pour lui occuper les pensées. Jared tient fermement sa brique entre les mains. Il s’apprête à frapper une personne avec. Pour la première fois de sa vie. Il redoute les conséquences. Il redoute de tuer l’homme. Il redoute de lui causer un traumatisme. Il n’a pas le choix. Il faut parfois prendre des décisions. Il faut parfois se forcer. Alors, il continue sa progression. A pas lents. A pas silencieux. Il sera bientôt assez prêt pour asséner des coups sur le sommet de la cagoule. Bientôt.
Le mercenaire baissa la tête après les réflexions du gamin importunant. Il se croyait donneur de leçon, moralisateur, sachant tout de la vie d'autrui. Il marqua un léger silence avant de prendre la parole à son tour. "Ne t'en fait pas gamin, je sais exactement ce que le destin à prévu pour moi dans cette histoire, et je serais prêt à l'accepter une fois que j'aurais accompli mon dernier objectif." Il n'y avait plus rien qui retenait Gunner sur cette terre, si ce n'est la vengeance qui lui dévorait les tripes. Une fois que sa femme serait vengée, plus rien ne le retiendra sur cette terre et il acceptera la mort les bras ouverts. Mais pour le moment, il poursuivait cette ombre que son cerveau déréglé n'arrivait pas à se rappeler. Il trouvait petit à petit des pistes, beaucoup de fausses d'ailleurs, des impasses et en attendant, il se contentait de faire des petits boulots comme celui-ci pour vivre. L'ancien militaire n'avait pas peur de mourir, pour lui, il était déjà mort. Mais comment aurait-il pu le comprendre, lui le gamin sans expérience. A en juger même pas sa carrure, il n'avait même pas fait l'armée bien qu'il faisait preuve d'un courage exemplaire. Gunner reprit ses esprits pour se concentrer de nouveau sur le colis qu'il devait livrer pile à l'heure. Il était à présent fatigué de parler avec ce gamin qui commençait légèrement à courir sur le haricot.
Puis, il y eu de nouvelles paroles, de nouvelles morales brassées par une personne qui ne sait même pas de quoi il parle. C'en était trop pour ce qu'il pouvait le supporter, il avait été trop gentil pour le moment, peut-être aurait-il dû le tuer lorsqu'il le demandait au lieu de l'enfermer dans un filet pour juste le retarder. Gunner se retourna d'un coup pour saisir la gorge du gamin, n'hésitant pas à serrer pour le lever du sol de quelques centimètres. Son sourire narquois avait disparu, montrant plus de colère qu'auparavant. Il avança, sa proie toujours dans sa prise pour le coller contre le mur qui permettait de quitter ce toit par l'intérieur du bâtiment. "Ne parle pas de ce que tu ne connais pas gamin, ça pourrait t'apporter de nombreux problèmes auprès de certaines personnes mal intentionnées." Gunner n'avait pas eu une enfance malheureuse, mais il avait enterré deux femmes et un fils et – si son cerveau lui permettait de s'en rappeler – il avait également une fille portée disparue. Oui, il tuait, c'était son boulot, comme les militaires sur un champ de bataille, comme certains super-héros l'avaient eux-mêmes fait au cours des dernières années. Est-ce que la mort d'Obadhia Stane avait été reprochée au grand Tony Stark ? Non, parce que c'était lui le gentil. Il est plus facile de priver la vie d'autrui quand on le fait au profit d'une pseudo-justice, mais la vérité, c'est qu'il n'y a aucune différence une fois qu'on a un flingue entre les mains. Relevant un peu plus le gamin, frottant son costume de coursier contre le mur, il reprit la parole sans se soucier de la pression qu'il portait contre sa glotte. "J'ai mes raisons, et je n'espère même pas que tu puisses les comprendre, alors ne cherche pas à me juger… gamin."
Il relâcha finalement son emprise, laissant le jeune homme chuter sur le sol. Il récupéra la salive qui se tenait dans la bouche et cracha sur le côté, son expression faciale, du moins ce que la cagoule permettait de voir, montrant toujours cette expression de colère. Il espérait avoir été, cette, fois, assez clair pour qu'il la ferme une bonne fois pour toute, ou alors la grenade armée dans son canon allait trouver une nouvelle cible. Il se remit en position et observa de nouveau la porte en question. Malheureusement, le gamin semblait avoir réussi sa mission, cette dernière se refermait et, tournant son regard le long de la rue, il fit sa cible se diriger vers sa voiture et ayant déjà dépassé le point de non-retour. Gunner expira son mécontentement face à la situation. Il tapota sur son ordi pour ranger la grenade, ce ne sera pas pour aujourd'hui qu'elle allait être utilisée. "Il semblerait que tu aies gagné cette fois-ci gamin, il pourra vivre un jour de plus, à moins que tu ne reviennes ici demain." Il se retourna alors vers le sauveur du jour tout en continuant à jouer sur son écran, armant une seconde grenade. Puisqu'il pensait avoir affaire à un tueur sanguinaire, autant qu'il s'amuse un peu avec lui. La nouvelle grenade s'arma dans le canon. "Malheureusement, il faut bien que je tue quelqu'un aujourd'hui alors, je te laisse une dernière volonté avant que tu me serves de cible d'entraînement." Son expression changea de nouveau pour une retrouver son sourire narquois. Plaisantait-il seulement ? Car à présent, il n'avait plus besoin de se faire discret avec des grenades non-létales.
Chaque pas le rapproche de Cagoule. A chaque pas, son coeur s’emballe un peu plus. Il a le sentiment que Cagoule va bientôt se retourner, son instinct éveillé par les battements de coeur perceptible à trois kilomètres à la ronde. Mais non. Rien de rien. L’homme persiste à garder l’oeil rivé dans la lunette de son arme. Alors, Jared persiste à avancer. Il a la brique entre les mains. Mais ses paumes sont humides. Frapper un homme - même un assassin - semble relever de l’effort physique et psychologique. Il est stressé. Anxieux. Oubliés l’impulsivité et les airs de héros. Oubliés les discours chevaleresque et le courage. Il n’y a plus que l’angoisse de tuer cet homme. Alors que Cagoule est tout de même sur le point d’assassiner une autre personne. Alors que Cagoule ne fait preuve d’aucune pitié. Il ne mérite que d’être assommé. Jared a du mal. Il n’a jamais été violent, sauf pendant sa période où il était convaincu de pouvoir devenir un héros. Sauf quand il a enfilé un pseudo costume pour se frotter à quelques criminels de bas étages. Il en est ressorti avec quelques côtes cassés ou fêlées et des hématomes partout. Il a bien cru qu’il allait mourir, ce jour-là. Depuis, il évite de frapper des gens. Depuis, il évite de se trouver dans ce genre de situations. Sauf que le destin aidant, le voilà dans le dos de Cagoule, à brandir une brique, dans l’espoir de l’assommer et non pas, de le tuer. Il pourrait presque croire que quelqu’un quelque part lui fait une farce. Presque. Il le croirait si il ne se savait pas capable de se mettre dans le pétrin, tout seul, comme un grand. Depuis son plus jeune âge, il l’a prouvé. Au point de donner des cheveux blancs à ses enseignants et à sa famille. Au point de provoquer plusieurs crises cardiaques dans son entourage. Il a un talent, pas le bon, visiblement. Il aurait pu être talentueux en dessin, en écriture, en mathématiques. Rien de tout cela. Il est talentueux en problèmes. “Ne t'en fait pas gamin, je sais exactement ce que le destin à prévu pour moi dans cette histoire, et je serais prêt à l'accepter une fois que j'aurais accompli mon dernier objectif.” Cagoule parle comme si il avait un objectif ultime. Comme si il avait une mission à accomplir. Comme si rien d’autre ne comptait. Jared est trop occupé à avancer pour s’en soucier. Il est plutôt satisfait que son plan fonctionne. Il arrive à le faire parler. Il arrive à faire diversion pendant qu’il avance. Il sera bientôt assez prêt pour le frapper. Il sera bientôt assez proche pour lui asséner un coup… ou pour être saisi à la gorge comme c’est en train de se passer.
La brique lui échappe des mains. Elle tombe lourdement au sol. Jared sent les doigts s’enfoncer dans sa peau. L’air lui manque. Ses yeux s’ouvrent en deux gros globes. Il attrape les poignets de Cagoule, une vaine tentative pour échapper à son emprise. Ses orteils ne touchent bientôt plus le sol. Il va mourir. Ca y est. Il va crever, en manquant d’air. Il va crever, en ne pouvant plus respirer. Déjà, des râles rauques s’échappent de sa gorge. Il tente d’articuler des mots. Il faudrait peut-être qu’il apprenne à se taire, au final. Peut-être. Mais ce sera dans une autre vie. Dans une vie où il sera vivant. Il ne s’aperçoit pas tout de suite qu’ils se déplacent. Le regard trop fixé sur les prunelles haineuses de l’homme. Ce n’est que lorsque son dos percute un mur qu’il réalise qu’ils ne sont plus au bord du toit. “Ne parle pas de ce que tu ne connais pas gamin, ça pourrait t'apporter de nombreux problèmes auprès de certaines personnes mal intentionnées.” Si seulement Cagoule savait ! Les paroles ne sont pas nécessaires avec Jared. Parfois, un simple regard, une simple maladresse et les ennuis accourent. Mais il est vrai qu’en plus d’avoir un don pour s’attirer les problèmes, il en a un pour dire tout et n’importe quoi. Ce qui n’était qu’une blague se transforme en une mise à mort. Il ouvre la bouche. Il tente d’articuler quelques syllabes, dont la seule qui se formule clairement est : “... Mal…” Ce serait sympa de la part de Cagoule de lâcher sa prise sur sa gorge. Vraiment très sympathique. Jared ne peut inspirer qu’un mince filet d’air. Une mince bouée d’oxygène pour lui donner encore un peu d’espoir dans sa survie. Il a l’impression que son visage est en feu. Il a l’impression que son visage rougit. Il aimerait survivre à cette ‘rencontre’. Il aimerait repartir sur ses deux jambes. Il aimerait reprendre son quotidien. D’ailleurs, son patron va encore râlé qu’il est en retard dans les livraisons. Jared doute qu’il puisse obtenir un mot d’excuses de la part de Cagoule pour justifier son retard. Il n’avait qu’à être plus sage. Il n’avait qu’à réfléchir avant de parler. “J'ai mes raisons, et je n'espère même pas que tu puisses les comprendre, alors ne cherche pas à me juger… gamin.” Il ignore si c’est le manque d’oxygène ou la clairvoyance qui lui fait penser que Cagoule a finalement de vraies raisons d’agir ainsi. Qu’il a des motivations plus pures qu’elles n’y paraissent. Peut-être est-ce un mélange des deux. Rien ne justifiera jamais les nombreux morts que Cagoule a pu tuer dans sa vie. Mais il y est sûrement poussé pour une raison ou pour une autre. Jared a beau être en train de crever, il le voit.
Finalement, l’air afflue dans ses poumons en même temps qu’il s’effondre par terre. Une poupée de chiffon jetée par terre. Il n’a pas le réflexe de se réceptionner. Il n’a pas le réflexe de se rattraper. De toute manière, ses muscles ne répondraient pas à ses sollicitations. Il porte sa main à sa gorge. Les poumons brûlent en se remplissant de nouveau. Mais il respire. Bon sang, il respire. Il fait moins le fier. Il fait moins le courageux. Il a appris la leçon. Pour les cinq secondes qui suivent. Il ne promet pas de ne pas recommencer dans les prochaines minutes. “Il semblerait que tu aies gagné cette fois-ci gamin, il pourra vivre un jour de plus, à moins que tu ne reviennes ici demain.” Finalement, son plan a fonctionné. Il est parvenu à occuper assez longtemps Cagoule pour le dévier de sa cible. La satisfaction s’empare de lui. La satisfaction l’aide à se remettre sur pieds. Il a la trachée en feu. Il a la nuque marquée. Peu importe. Le plus important est qu’une vie a été sauvée. Le plus important est qu’il est parvenu à sauver quelqu’un sans user de violence. La preuve que tout est possible. Le sourire qu’il arbore s’efface rapidement en voyant l’arme se tourner dans sa direction. Quoi ? Ce n’est pas fini ? Cagoule ne peut pas simplement s’en aller en sautant de toit en toit ? Cagoule ne peut pas laisser tomber pour aujourd’hui ? Jared vient tout juste de frôler la mort. Il n’a pas envie de recommencer dans un si court intervalle. Il grimace. Il aimerait bien être immortel, un peu comme Deadpool. Un peu comme les super-héros. “Malheureusement, il faut bien que je tue quelqu'un aujourd'hui alors, je te laisse une dernière volonté avant que tu me serves de cible d'entraînement.” Ce gars est fou. Ce gars est un serial killer. Ce gars a besoin de sa dose de sang. Il devrait être interné. Il devrait être emprisonné. Il devrait être surveillé par les forces de l’ordre. Jared n’a plus rien d’enthousiaste, de courageux ou de satisfait. Il n’a plus rien du coursier intrépide et insouciant. Il est plutôt un homme déboussolé, surpris. Il est plutôt décidé à se battre, à protester, à faire entendre sa voix. “QUOI ? Mais ça va pas dans votre tête ! Vous pouvez pas tuer des gens gratuitement, j’ai rien fait !” Certes, il était à deux doigts de le frapper avec une brique. Certes, il a sous-entendu qu’il avait eu des problèmes à l’école. Certes, il l’a plus ou moins provoqué. Mais toutes ces choses ne méritent pas de mourir. Toutes ces choses ne sont pas assez importantes et graves pour mériter de mourir. “Vous savez quoi ? C’est vous qui devriez crever ! Vous m’avez étranglé, j’vous rappelle !” Il a pointé son doigt sur Cagoule. Un doigt accusateur. Après tout, c’est la vérité. Entre les deux, Cagoule a été le plus violent depuis le début. Il est hors de question que Jared crève sans donner son opinion. Cependant, ses éclats de voix ne semblent pas émouvoir l’homme. Alors, il se fait à l’idée qu’il va bel et bien mourir sur ce toit. Il se fait à l’idée qu’il va devoir accepter la sentence. Il prend une inspiration. Il se redresse. Il lève la tête. Il va mourir sans pleurer, sans avoir peur. Il va mourir avec courage. “Bon, okay okay, dites à ma mère que je l’aime et que promis, c’était pas de ma faute, cette fois, mais celle d’un fou tueur de gens.” Sa mère aura au moins ce réconfort pour faire son deuil. Elle saura que son fils n’est pas mort en trébuchant bêtement dans un escalier. Elle saura que son fils a tenu tête à un tueur en série. Elle saura.
La cible était toujours en joue, du moins la nouvelle cible. Il était responsable de l'échec de la mission et donc, il devait en payer le prix, que ça lui plaise ou non. Mais Gunner laissait le temps de savourer l'instant présent, de voir ce gamin qui ne pouvait se résigner qu'à son funeste destin. C'en était presque touchant de le voir ainsi, supplier qu'on dise à sa mère que son fils était un héros s'opposant au tueur à la grenade, celui connu des services de police sous le nom de Shell Shock. Peut-être devrait-il lui laisser le temps d'écrire une note à ce sujet, peut-être lui demander l'adresse de la dite mère pour lui apporter des fleurs en lui annonçant la terrible nouvelle. Le pouce semblait lui démanger mais sa concentration était ailleurs, centrée sur un détail dans le brouhaha de la ville et ce n'était pas le jeune homme en train de geindre. Quand soudain, au moment propice, il déplaça le bras qui jusqu'à présent visait la seule autre personne sur le toit. Sans détourner le regard, il pointa à présent son arme vers le ciel, comme s'il voulait le percer. Et il tira, le bruit caractéristique d'un arme à air comprimé envoya dans le ciel une nouvelle sphère, noire cette fois-ci, avec une bande faisant le diamètre et clignotant en rouge à intervalle régulier. L'objet s'envola, dans une courbe naturelle mais, au moment de sa chute, sa course changea de direction, partit vers la rue, au loin, comme si elle était guidée par quelques choses. Gunner rebaissa son bras pour aller chercher dans sa poche une feuille ainsi que du tabac et il commença à rouler une nouvelle cigarette. "Ne t'en fait pas gamin, tu crois réellement que ta mort m'apporterait une quelconque satisfaction."
Un plan de secours, voilà la plus grande leçon que ses années à l'armée lui avaient appris. Quand on se retrouvait dans une opération secrète, avec un plan d'évacuation qui risquait d'être compromis très rapidement, il fallait toujours connaître toutes les sorties possibles. C'était également ce qu'il avait concocté ici grâce à ses grenades, une méthode qu'il n'appréciait pas forcément, ça enlevait tout le fun mais au moins, c'était efficace. Au loin la sphère passait par-dessus les immeubles, changeant de direction par moment alors que le lanceur posait la cigarette terminée entre ses lèvres avant de sortir une allumette qu'il gratte contre l'un de ses lanceurs pour l'allumer. Il tira un coup sur la cigarette et expulsa la fumée de ses poumons. Juste à ce moment-là, une explosion eu lieu quelques rues plus loin. Sur la voiture de la cible avait été posé un émetteur et la grenade précédemment envoyée allait, une fois activée, être attirée par l'émetteur en question, explosant à son contact. Dommage pour le côté accident de la chose, ainsi que la belle mise en scène qu'il avait pensée, mais le contrat était rempli et ses poches allaient bientôt être remplies de billets. "Désolé gamin, des fois on gagne, des fois on perd, tu ferras sans doute mieux la prochaine fois." Il ne voulait pas démoraliser le jeune homme de son courage à cause d'une simple défaite. Les héros étaient certes une épine dans le pied, mais ils étaient réellement responsables de la part la plus amusante pour un super-vilain comme Shell Shock. Sans eux, pas de défi, pas de péril. Quelques part, il avait été heureux de se retrouver face à ce gamin pour mettre un peu de piment dans sa journée. Et si, sur ce toit, un nouveau justicier devait voir le jour, il serait content d'y avoir contribué. Il se dirigea vers le bord du toit, au loin une épaisse fumée noire commençait à s'élever dans le ciel et les sirènes ne tardèrent pas à retentir dans les rues de la grande pomme. Ils seront bientôt sur place à essayer de comprendre ce qui s'était passé. Il va sans dire que, prévoyant comme il était, Gunner avait créé des grenades qui ne laissaient aucune trace. "Au cas où tu voudrais aller voir les flics pour leur dire ce qui s'est passé aujourd'hui, tu peux dire que c'était Shell Shock qui a fait le coup." La réputation était toujours importante, le coup reviendrait forcément aux oreilles des gens intéressés et pour ce qui est de la presse, ce genre d'incident arrivait bien souvent dans la case fait divers et le nom de code de Gunner ne serait sans doute même pas mentionné. Il tira un nouveau coup sur sa cigarette en regardant le tableau devant lui. "Tu ferais mieux de courir maintenant, gamin."
Il est sûr qu’il va mourir. Il est sûr qu’une grenade va sortir du canon. Il est sûr qu’il va exploser. Il imagine déjà la déflagration, la brûlure et la désintégration. Il ne restera qu’un tas de chair et de cendre à sa place. Il ne sera plus qu’une odeur désagréable et un tas de poussière. Il le pense. Il a déjà échappé à la mort une première fois, Cagoule ne l’épargnera pas une seconde fois. Il en est certain. Il aurait aimé mourir de vieillesse. Il aurait aimé avoir le temps de vivre avant. Il aurait aimé trouver l’amour, fonder sa famille, voyager à travers le monde. Mais on ne fait pas toujours ce que l’on souhaite. L’avenir est parfois plus cruel. Au moins, il sera mort pour avoir voulu épargner la vie d’une personne. Son seul réconfort dans la mort. Non pas qu’il s’en préoccupera lorsqu’il ne sera plus. Les avis divergent sur ce qu’il se passe après la vie. Il saura au moins de quoi il en retourne. Et si il doit se réincarner en animal, il sera un pigeon qui viendra embêter Cagoule dès qu’il en aura l’occasion. Le genre de pigeons qui le collent et qui ne lui laissent pas une seconde de répit. C’est décidé. Mais l’homme tarde à appuyer sur le bouton. Il tarde à libérer la mort de son arme. Il tarde à prendre sa décision. D’un coup, l’arme change de direction. Elle part dans le vide. Elle se dirige vers une cible invisible. Jared ne comprend pas ce qu’il se passe. Il hésite encore entre “je vais crever” et “finalement, je vais peut-être vivre”. Il hésite. Il ne sait pas quoi penser. Il ne quitte pas le canon des yeux. En une seconde, une énième grenade en sort. Le canon délivre son message mortel. Ses paupières papillonnent. Il sursaute en voyant la munition. Elle ne prend pas sa direction. Elle disparaît au milieu des immeubles pour une destination inconnue. Jared se détend. Il ne sait toujours pas, mais il a le sentiment qu’il ne va pas mourir. Qu’il ne va pas finir cramé dans un coin. “Ne t'en fait pas gamin, tu crois réellement que ta mort m'apporterait une quelconque satisfaction.” Il se retient de courir pour voir où est partie la grenade. Pour savoir ce qu’elle a fait. Pour connaître les dégâts provoqués. Maintenant que le canon n’est plus fixé sur lui, il ose le quitter du regard. Cagoule lui assure de vivre encore quelques jours. Encore quelques heures, avant qu’il ne chute par maladresse dans les escaliers ou qu’il ne se fasse écraser par une voiture. Il a un sursis. Il a une chance de vivre encore. Il ne faut pas attendre longtemps avant qu’une explosion se fasse entendre. Le toit tremble sous ses pieds. La déflagration s’entend et se ressent depuis ici. Bientôt, un nuage s’élève d’une rue.
“Désolé gamin, des fois on gagne, des fois on perd, tu ferras sans doute mieux la prochaine fois.” Son regard passe du nuage à Cagoule. De cagoule au nuage. Il n’est pas sûr de comprendre. Il n’est pas sûr de vouloir comprendre. Parce que dans le fond, il sait de quoi il est question. Il sait que Cagoule vient d’abattre une personne juste sous ses yeux et que Jared n’a pas pu l’arrêter. Cagoule vient de tuer quelqu’un sans ciller, sans hésiter, sans regretter. Avec un tel sang-froid. Avec une telle détermination. “NOOOOOOON ! Mais vous êtes malade ?!” Il s’est élancé vers le bord du toit. Il essaye de mieux voir. Il essaye de se rapprocher de l’explosion. Déjà, il s’en veut. Il a des remords. Il n’a pas été à la hauteur. Il n’est pas parvenu à sauver cette personne. Il lui a simplement laissé quelques secondes de vie en plus. Il a seulement permis à Cagoule de faire davantage de dégâts. Au milieu d’une rue, combien de personnes étaient autour ? Combien ont été blessées ? Combien ont eu un accident ? Il a vraiment tout fait de travers. Même sauver une personne. Plutôt que d’en tuer une, Cagoule en a peut-être tué plusieurs. Il est nul. Tellement nul. Jared se retourne vers l’assassin. Il aimerait lui sauter à la gorge. Il aimerait lui arracher son arme. Mais il sait qu’il en serait incapable et que ça ne changerait rien. Le mal est fait. Une personne est morte, peut-être même plusieurs. Il a les mains qui tremblent. De colère. De frustration. D’incompréhension. Il ne saisit pas comment une personne peut en tuer d’autres avec autant de froideur et de détachement. Il ne comprend. C’est trop dur de se mettre à sa place. C’est trop dur de deviner ses motivations, ses raisons. “Au cas où tu voudrais aller voir les flics pour leur dire ce qui s'est passé aujourd'hui, tu peux dire que c'était Shell Shock qui a fait le coup.” Bien sûr qu’il va aller voir la police. Bien sûr qu’il va leur décrire cet homme sorti de nulle part. Bien sûr qu’il va leur dire qu’un homme s’amuse à tuer des innocents dans la rue. Il ne va pas s’en priver. Peu importe le nom que Cagoule se donne. Peu importe qu’il soit fier de ses méfaits. Jared va immédiatement courir dans un commissariat et lui donner sa position. Il va tout leur raconter. Peut-être qu’on le pensera fou. Peut-être qu’on l’imaginera drogué. Tant pis. Il doit prendre le risque. Il doit se faire entendre. La famille de l’homme mort doit le savoir. Elle doit comprendre. Elle doit connaître la vérité. Elle le doit. Il n’a jamais été aussi en colère. Contre lui. Contre Cagoule. Il est énervé de ne pas avoir pu faire quelque chose. Il est énervé que des hommes se promènent avec des armes destructrices et mortelles. Il est énervé.
“Tu ferais mieux de courir maintenant, gamin.” Il détache lentement son regard de la fumée. Il arrête d’écouter les bruits de circulation. Il se tourne vers Cagoule. Encore une menace. Une énième menace. A croire que cet homme ne fait que ça. Menacer, menacer et encore menacer. Ses poings se ferment. Ses poings se lient. Il ne va aller nulle part. Du moins, pas pour l’instant. Il s’avance vers Cagoule. Comportement probablement suicidaire. Comportement sûrement déconseillé. Il s’en fiche. Il a déjà cru mourir deux fois. Jamais deux sans trois, n’est-ce pas ? Il n’est plus à ça près. Il pointe un doigt accusateur vers Cagoule. Il n’est plus l’adolescent dans un corps d’adulte, je-m’en-foutiste et maladroit. Il est le citoyen concerné et l’humain. “Vous êtes complètement fou ! Vous feriez mieux d’être interné plutôt que d’être libre de vous déplacer avec une arme ! La vie n’est pas une fête foraine où on tire sur des cibles pour gagner une peluche, mais ça, vous ne l’avez pas compris.” La méchanceté humaine a le don de l’énerver. De le mettre en colère. Il veut bien être compréhensif. Il veut bien être inconscient. Il veut bien jouer les idiots. Mais il y a un moment où ça en est trop. Même lui est assez intelligent et mature pour savoir que la vie n’est pas un jeu vidéo. Que personne n’a le droit de se promener impunément après avoir tué une personne, peut-être même plusieurs. Si ça se trouve, l’homme explosé était accompagné. Si ça se trouve, il était avec ses collègues, ses amis, sa famille. Et ça, Cagoule ne pouvait pas l’anticiper en tirant sa grenade. Peut-être que la cible a commis des crimes impardonnables. Peut-être. Mais pas ses proches. “Vous ne pouvez pas simplement vous promener avec votre arme. Il y a des lois dans cette ville. Des lois que vous devez respecter ! Vous avez pensé cinq secondes aux conséquences de votre explosion ? S’il y avait des enfants, des familles ?” Et tuer pour quoi ? Pour avoir de l’argent ? Pour être satisfait ? Par bonté d’âme ? Quelle que soit les raisons, Jared n’y croit pas. Rien ne justifie de gagner sa vie en tuant des gens. Des métiers sont bien plus gratifiants et nécessaires. Pompier, policier, infirmier… Cagoule pourrait être tout et n’importe quoi. Pourquoi assassin ? “Vous savez seulement pourquoi vous avez tué quelqu’un en pleine rue ? Je suis sûr que non.” Shell Shock, ou peu importe sa vraie identité, est du genre à faire des leçons, mais sûrement pas à se renseigner sur ses cibles. Lui qui prétendait que la personne visée pouvait être un violeur ou un tueur d’enfants. Mais Cagoule n’est pas mieux. Cagoule est un tueur de personnes, un briseur de familles, un semeur de malheurs. Il ne vaut pas mieux.
Gunner laissait le gamin déblatérer sur le pourquoi du comment. Sur le bien et le mal et sur les motivations de Shell Shock. Il restait même totalement passif contre les accusations qu'on faisait sur lui, les présomptions qui pleuvaient à ses oreilles. Le jeune homme avait un peu de matière grise mais visiblement pas assez d'expérience pour aller avec. S'il y avait bien une chose que le monde lui avait appris, c'était que personne sur cette planète bleue n'était innocent, si on gratte assez, on finit toujours par trouver quelque chose d'inavouable. Pour Gunner en revanche, il fallait gratter pour découvrir un peu de bonté, dans un passé à présent révolu, oublié, enfoui, enterrer dans une tombe sur laquelle il ne pouvait se repentir. Gunner avait au final sauvé autant de vie qu'en avait tué Shell Shock, il aurait même pu avoir une médaille si tout ça avait été public. "77" Voilà la seule réponse qu'il donnait au gamin face à toutes ces accusations, un chiffre sans aucune autre explication. Puis, en prenant sa cigarette entre ses doigts, il pointa le tout vers la tour Stark, là où la bataille de New York avait pris place quelques années plus tôt. "Le nombre de victimes lors du combat des Avengers." Puis, la cigarette continua son trajet pour pointer vers Harlem. "14, lors du Duel de Harlem" Il faisait cette fois référence à l'altercation entre Hulk et Abomination. Puis, il pointa en direction du pays de l'oncle Sam. "Washington, 43 morts" Cette fois-ci, c'était l'évènement qui avait fait sombre le S.H.I.E.L.D. qu'il pointait du doigt. "Et je suis navré de te le dire mais tous n'ont pas été tué par les méchants…."
Il se retourna pour parcourir le toit dans l'autre sens. "Tu en veux d'autre ? Séoul, 56 morts, Johannesburg, 47 morts, la majorité par le monstre vert et enfin, Novi Grad, 177 morts, le tout grâce au génie de Tony Stark qui a créer l'une des plus grande menace de la terre…" Il se retourna pour faire face au gamin. "…Alors maintenant, dit moi, est-ce que tu as été aussi sifflé dans les oreilles de ce soi-disant héros en lui mettant toutes ces morts sur le dos, en lui parlant des familles détruites, des veuves, des orphelins. Non, car les héros sont pardonner de tous leurs crimes. On leur offre même les clés de la ville lorsqu'ils empêchent des évènements qu'ils ont eux-mêmes engendrés." Il allait sans dire que l'ancien président de Stark Industries n'avait même jamais été condamné pour le meurtre de son ancien collègue Obadiah Stane. Au contraire, on lui avait donné son joli sobriquet et faire une belle exposition, durant laquelle il avait encore tué une personne. Il se rapprocha du gamin, l'air pas plus menaçant qu'à l'accoutumée. "Alors ne te vante pas de faire la morale, ne te vante pas de me juger car tu ne me connais pas." Il pointa de son canon la fumée qui s'élevait toujours alors que les sirènes s'étaient tues, prouvant que les forces de l'ordre et les pompiers étaient arrivé sur les lieux. "J'ai tué cet homme parce que qu'on m'a payé pour le faire, j'ai tué cet homme parce qu'on me la demandé. J'ai tué cet homme parce qu'il avait fait de mauvaises fréquentations qui l'ont mené jusque-là. Des fréquentations qu'une personne gentille et innocente dans ton monde de bisounours ne fréquente pas" Gunner se calma un peu, espérant avoir permis au gamin de réfléchir sur ses paroles et ses accusations. Il se retourna pour reprendre une respiration un peu plus normale. "Pour ce qui est des dommages collatéraux, tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même, c'est toi qui a empêché une mort rapide et sans aucune autre victime." Oui, il lui rejetait la faute mais il n'était pas tellement dans le faux. Pour lui, un mort de plus ou de moins, c'était pas de chance mais c'était la vie, bien que ça ne l'amusait pas de massacrer les gens gratuitement, au sens propre du terme. Il tira une nouvelle bouffée sur sa cigarette.
C’est la deuxième fois qu’il se sent aussi démuni. La première était il n’y a pas si longtemps, avec l’évasion des mauvais mutants. Il était là. Seulement à quelques mètres. Dans un café, à fêter son anniversaire. Avec ses amis. Des espoirs pour le restant de sa vie. Des rêves à accomplir. Et tout a déraillé. Il a vu des super-héros se battre contre des mutants aux pouvoirs impressionnants. Il a vu des personnes s’enfuir en courant. Il a entendu des cris de peur, de douleurs, d’inquiétude. Il a perçu des appels de proches soucieux. Il aurait aimé avoir des pouvoirs, lui aussi. Il aurait aimé être capable de sauver des gens. Il aurait aimé être utile. Voilà que ça recommence. Que des innocents se font tuer. Juste sous ses yeux. Sans qu’il n’ait pu faire quelque chose. Ça doit changer. Il doit faire quelque chose pour être assez fort. Pour être utile. Pour empêcher ce genre d’événements. Il doit faire quelque chose. Il doit devenir un obstacle plus imposant. Pour l’heure, il n’a que sa colère et ses mots pour défendre ses valeurs. Il n’a que sa bouche pour lui offrir des super-pouvoirs. Il est en colère. Oui, comme jamais il ne l’a été. Parce que des gens sont morts par sa faute. Parce qu’il n’a pas été capable de stopper Cagoule. parce qu’il n’a pas su le neutraliser. Il est en colère autant après Cagoule qu’après lui. Il y a un moment où la connerie ne suffit plus pour ignorer la méchanceté humaine. Il y a un moment où le plus con des êtres humains comprend que ce n’est pas bien. Aujourd’hui, Jared en a marre de jouer les innocents et naïfs. “77. Le nombre de victimes lors du combat des Avengers. 14, lors du Duel de Harlem. Washington, 43 morts. Et je suis navré de te le dire mais tous n'ont pas été tué par les méchants…” Tandis que l’homme énumère les morts en pointant des lieux à travers New-York, Jared s’impatiente. Il le sait. Tout ça, il le sait. Il est au courant. Il sait que les super-héros ne sont pas des saints qui arrêtent les gens en un claquement de doigts. Il sait qu’ils font des dégâts humains et matériels sur leur passage. Mais si c’était si facile d’arrêter des criminels dangereux, la police n’aurait pas besoin d’eux. En parlant de la police, même les forces de l’ordre font des victimes lors des courses-poursuites, des arrestations, des fusillades. Il n’est pas étonnant qu’à une échelle plus grande, des super-héros fassent des super-dégâts. C’est un mal pour un bien, comme dirait sa grand-mère. Un mal nécessaire pour obtenir la sécurité et la tranquillité dans les rues. On leur pardonne parce qu’ils aident le monde et que sans eux, la Terre serait déjà un terrain de jeux pour les super-vilains. Tout simplement. Les Avengers, les Quatre Fantastiques et tous les autres sont la seule solution.
“Tu en veux d'autre ? Séoul, 56 morts, Johannesburg, 47 morts, la majorité par le monstre vert et enfin, Novi Grad, 177 morts, le tout grâce au génie de Tony Stark qui a créer l'une des plus grande menace de la terre…” Il lève les yeux au ciel. Il est face à un vieux qui n’aime pas l’évolution, qui ronchonne contre ces jeunes qui font n’importe quoi parce qu’il ne comprend rien. Cagoule n’a pas compris qu’ils sont entrés dans une ère nouvelle. Une ère où les criminels ne sont plus des petits malfrats qui sont tombés dans la drogue ou dans le vol par hasard. Aujourd’hui, le monde est bien plus complexe avec des laboratoires qui créent des pouvoirs, avec des dieux qui viennent d’ailleurs, avec des sur-hommes. Il faut évoluer. Il faut s’adapter. La société s’adaptent grâce à ces super-héros qui fleurissent ici ou là pour sauver des vies. Ils insufflent l’espoir et le réconfort. Sans eux, les populations n’oseraient plus sortir et seraient paniquées. Sans eux, les super-vilains auraient déjà renversé des gouvernements. Alors, oui, il y a des centaines de morts dans chaque ville où ces héros passent. Oui, il y a des familles déchirées, attristées, démolies. Oui, il y a des dommages collatéraux. Mais qu’est-ce que ce serait sans eux ? Les victimes seraient le double, le triple, le centuple. Qui sait ? “…Alors maintenant, dit moi, est-ce que tu as été aussi sifflé dans les oreilles de ce soi-disant héros en lui mettant toutes ces morts sur le dos, en lui parlant des familles détruites, des veuves, des orphelins. Non, car les héros sont pardonner de tous leurs crimes. On leur offre même les clés de la ville lorsqu'ils empêchent des évènements qu'ils ont eux-mêmes engendrés.” Jared n’a pas besoin d’en entendre davantage pour comprendre toute la haine et la rancoeur de Cagoule pour ces héros. Ils ont dû lui faire quelque chose, lui retirer un membre de sa famille, le dédaigner, pour qu’il soit aussi vindicatif. Il doit y avoir une raison. Son jugement n’a rien d’objectif. Son regard n’est pas neutre. Au contraire. Mais Jared ne sait pas ce qui motive un tel avis. Cependant, il sait qu’ils pourraient débattre pendant des heures. Qu’ils pourraient se disputer, se sauter à la gorge, se tirer les cheveux. Ils pourraient ne pas s’entendre et se battre pour savoir qui a raison. “Alors ne te vante pas de faire la morale, ne te vante pas de me juger car tu ne me connais pas.” Qui a envie de connaître un homme qui porte des cagoules, qui se moque, qui vous menace avec ses grenades et qui tue des gens dans la rue ? Personne. Même pas Jared qui n’est pas le plus sauvage de New-York. Ce n’est pas étonnant qu’il ne sache rien sur Cagoule. Ce n’est pas surprenant qu’il ne veuille rien savoir.
“J'ai tué cet homme parce que qu'on m'a payé pour le faire, j'ai tué cet homme parce qu'on me la demandé. J'ai tué cet homme parce qu'il avait fait de mauvaises fréquentations qui l'ont mené jusque-là. Des fréquentations qu'une personne gentille et innocente dans ton monde de bisounours ne fréquente pas.” En l’écoutant, on aurait presque l’impression que le monde est ainsi fait. Que tout est simple. On te paye, tu fais ton travail, tu te la fermes et tu obéis. Non. Le monde ne fonctionne pas ainsi. Tous les employés ont un minimum d’intelligence et l’utilisent pour déterminer si oui ou non, ce qu’on leur demande correspond à leurs valeurs, à leur éthique. Si tel n’est pas le cas, un ‘non’ suffit. A un moment, Cagoule a eu le choix de dire non. Il a eu le choix de refuser l’argent. Il a eu le choix de trouver un autre travail. On a toujours le droit de refus. Jared croise les bras. Il ne vit pas dans un monde de bisounours, même si il peut en avoir l’air. Il a simplement une vision de la vie qui implique qu’elle soit positive. Ruminer est inutile. Se plaindre est futile. Il faut apprendre de ses erreurs, avancer et voir ce que l’avenir réserve. “Pour ce qui est des dommages collatéraux, tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même, c'est toi qui a empêché une mort rapide et sans aucune autre victime.” Le coup est bas. Jared l’encaisse difficilement. Il n’a pas besoin qu’un inconnu le lui dise. Il n’a pas besoin qu’on lui rappelle sa culpabilité. Il la porte déjà suffisamment. Tuer des gens, même indirectement, n’est pas dans sa nature. Surtout quand il a voulu aider. Surtout quand il a voulu sauver. Son comportement partait simple d’une bonne attention. Une bonne attention qui a tué une personne, peut-être d’autres. “Vous croyez que je ne le sais pas ? Et moi, contrairement à vous, je m’en veux. Comment vous pouvez être si insensible, même si vous êtes payé ? Vous auriez pu faire n’importe quel métier, mais il a fallu que vous choisissiez tueur !” Comme tous les enfants, le petit Cagoule a eu le droit de choisir son orientation. Il aurait pu être un sportif populaire, même si Jared imagine qu’il doit avoir des furoncles sur le nez et des dents de lapin pour vouloir cacher son visage sous une cagoule. Il aurait pu être militaire, ses connaissances en combats et en armes auraient faire de lui la meilleure recrue de l’armée. Les métiers ne manquent pas ! Alors pourquoi choisir tueur à gages, assassin ou mercenaire, peu importe comment il appelle ça ?
“On est dans une société menacée par des personnes qui nous dépassent. On ne peut pas les affronter avec des armées ou des armes normales. Il nous faut des super-héros. Alors, avant de me dire que je vis dans un monde de bisounours, regardez vous dans la glace et voyez que c’est vous qui vivez dedans. Bien sûr qu’on voit toutes ces conséquences, on n’est pas cons ! Mais on est assez lucides pour savoir que sans les super-héros, les dégâts seraient plus grands. Eux, ils agissent gratuitement, seulement pour protéger une planète entière. Ils sont prêts à tout pour nous sauver. Ils ne sont pas payés pour abattre des gens et quand ils tuent, ils ne le font pas par plaisir. Voilà ce qui les différencie de vous.” Il reprend sa respiration. Si Cagoule a cru que son discours larmoyant sur les héros qui tuent des innocents suffirait à changer son avis, il s’est trompé. Jared a grandi avec les histoires de ces êtres extraordinaires. Il a eu le temps de se faire une idée précise sur la question et d’étayer ses convictions. Il a eu le temps de se confronter à d’autres avis et de justifier son opinion. Ce n’est pas un mec qui cache sa tête de Voldemort sous une cagoule qui va lui apprendre la vie. “Vous savez quoi ? j’vous emmerde ! Parce que je ne sais pas ce que vous avez vécu dans votre enfance, mais ça ne vous donne pas le droit de tuer des gens, sous prétexte que les super-héros font de même. C’est de la pure mauvaise foi !” Cette conversation est surréaliste. Sur un toit, ils se disputent alors que des gens souffrent au coin de la rue et que d’autres sont en train de mourir. L’un a une arme, l’autre n’a rien. Le combat semble inéquitable. Le combat est ridicule. Ils se battent contre des convictions contraires. Contre des avis opposés. Ils se battent pour rien, car aucun a tort, aucun a raison.
Au début, c'était amusant, une simple distraction pour passer le temps, mais plus la conversation avançait et plus ce gamin commençait à doucement lui courir sur le haricot. Il prenait tous les coups verbaux qui lui étaient adressés sans même sourciller. Il n'avait pas à se sentir coupable pour ce qu'il avait fait, il ne voyait juste pas en quoi il l'était. Quelqu'un devait mourir et il était juste là pour appuyer sur la gâchette au bon moment. Flic ou voyou, la personne qui se faisait explosé par ses soins, il s'en foutait, ça ne faisait aucune différence. Il n'était qu'une arme de destruction, est-ce qu'on condamnerait un flingue pour avoir servi à un meurtre ? Il s'avança encore un peu vers le gamin, avec un nouvel air menaçant. Qu'est-ce qu'il savait du monde réel après tout, qu'est-ce qu'il avait vécu. Il avait dans la vingtaine et n'avait sans doute rien accompli d'important encore, il ne s'était même sans doute jamais battu pour son pays. "Dit moi gamin, dans ton monde, où places-tu les militaires ? Est-ce que ce ne sont pas des gens payer pour transformer en sauce bolognaise le type en face, sans poser de question. Donc pour toi, tous ces héros de guerre, toutes ses décorations, ils devraient tous être enfermés. Et ceux tombés au combat ne devraient même pas avoir une cérémonie pour leurs funérailles. Sais-tu seulement combien de personne sont là, dehors, sans un costume, à se casser le cul pour que tu puisses vivre ta vie pépère. Et je te vois déjà venir, si nos hommes vont se battre, c'est parce que ce sont des héros et qu'ils vont taper sur les vilains en face. Malheureusement, en face, il y a aussi des militaires, qui essayent aussi de sauver la vie de leur proche et qui sont juste là parce qu'ils sont payé pour la même raison que nous. Qu'est-ce qui fais de nous des meilleurs hommes qu'eux ? En quoi nos actes sont-ils plus honorables que les leurs ? Tu ne pourras réellement le comprendre que le jour où, toi-même, tu auras côtoyé la mort d'assez près." Et Gunner l'avait côtoyé plus souvent qu'à son tour. Il avait tué des gens dans le camp adverse et parfois, c'était bien pire que de voir son camarade de combat tomber à ses côtés, Ce n'était en face que des hommes dont la seule différence était un drapeau d'une couleur différente. Mais il avait également perdu des proches, des civils, des gens que rien ne destinait à mourir avant leur heure. Quelle justice avait-il eu pour la mort de son épouse ? Quel super-héros, quel héros, quel flic, quel militaire était venu pour la défendre, pour retrouver son assassin ? Personne, Gunner était le seule à vouloir faire sa vendetta contre ce visage flou de sa mémoire. Non, son monde n'était pas celui des bisounours mais bien celui de happy tree friends.
Après avoir fini son discours, avec un timbre de plus en plus énervé, le mercenaire se retourna pour remettre de l'espace entre eux deux. Il tira l'ultime coup sur sa cigarette avant de la laisser mourir sur le toit cette fois-ci. Peu importe ce qu'il pouvait lui dire, ça ne ferrait jamais changer d'avis le militaire, les arguments du gamins ne rentraient pas en compte, il n'avait pas assez de vécu pour en parler, quand bien même toute sa famille avait été décimée. "Ne crois pas trop que le monde aurait été une horreur sans eux." Il avait repris un ton plus calme maintenant qu'il parlait des héros que le jeune homme semblait idolâtrer. "Observe de plus près chacun de leurs actes et tu comprendras que l'on crée nous-même nos propres démons." Il espérait que le gamin avait assez de matière grise pour comprendre que c'était grâce à la technologie de Stark qu'Iron Monger ou Justin Hammer avait réussi à créer leur machine, que l'Abomination existait uniquement grâce au sang de Hulk, que l'Hydra n'aurait pas pu survivre sans le S.H.I.E.L.D., que l'arrivée de Thor avait apporter avec lui des menaces venues d'ailleurs, que c'était bien Stark qui avait créer Ultron de ses propres mains et même ici dernièrement, c'était par les actes de bravoure du diable de Hell's Kitchen que d'autres cherchaient à faire de même de manière moins orthodoxe comme le fameux Punisher. Au final, sans les super-héros, les super-vilains n'auraient pas non plus leur place dans ce monde. N'était-il pas lui-même le résultat des actes d'une autre personne ?
Jared a grandi dans un monde à part. Protégé par sa mère et ses grands-parents. Alimenté aux bandes dessinées et aux comics. Il a longtemps cru qu’il pourrait avoir des pouvoirs. Il a longtemps espéré qu’il deviendrait un super-héros. En grandissant, il s’est aperçu que c’était rare. Il n’en a pas perdu sa foi en l’humanité. Au contraire. Il reste persuadé qu’en agissant positivement et en soutenant ceux qui veulent faire le bien, le monde sera meilleur. Il est persuadé que le bonheur entraîne le bonheur, que le bien entraîne le bien. Tout est une succession d’événements qui conduit à de meilleures choses. Il faut juste y croire. Il faut juste se donner les moyens. Sauf que ses convictions sont mises à mal face à Cagoule. Des convictions qu’il nourrit et qu’il conserve depuis des années. Il s’est souvent heurté au défaitisme des autres. Il s’est souvent agacé du négativisme. Sauf que face à Cagoule, la conversation prend une autre tournure. Le contexte est différent. Les paroles sont différentes. Le comportement est différent. Tout est différent et prendre des propensions différentes. L’inconnu a, lui aussi, ses propres idées, ses propres croyances, sa propre expérience. Sûrement a-t-il vécu des situations traumatisantes. Sûrement a-t-il été militaire. Sûrement a-t-il une vision plus éclairée et juste que Jared. Sûrement. Mais pour autant, le coursier est certain que tuer des gens dans la rue n’est pas juste. Que les tuer parce qu’ils ont peut-être fait quelque chose de mal n’est pas justifiable. Les criminels devraient plutôt avoir un procès, une peine. Pas mourir dans une explosion, en manquant de tuer toutes les personnes à proximité. Des personnes qui ne l’ont pas mérité. Des personnes qui n’ont rien demandé. Des personnes qui n’ont rien fait. “Dit moi gamin, dans ton monde, où places-tu les militaires ? Est-ce que ce ne sont pas des gens payer pour transformer en sauce bolognaise le type en face, sans poser de question. Donc pour toi, tous ces héros de guerre, toutes ses décorations, ils devraient tous être enfermés. Et ceux tombés au combat ne devraient même pas avoir une cérémonie pour leurs funérailles. Sais-tu seulement combien de personne sont là, dehors, sans un costume, à se casser le cul pour que tu puisses vivre ta vie pépère. Et je te vois déjà venir, si nos hommes vont se battre, c'est parce que ce sont des héros et qu'ils vont taper sur les vilains en face. Malheureusement, en face, il y a aussi des militaires, qui essayent aussi de sauver la vie de leur proche et qui sont juste là parce qu'ils sont payé pour la même raison que nous. Qu'est-ce qui fais de nous des meilleurs hommes qu'eux ? En quoi nos actes sont-ils plus honorables que les leurs ? Tu ne pourras réellement le comprendre que le jour où, toi-même, tu auras côtoyé la mort d'assez près.”
Jared secoue la tête. Ce qu'il entend est une aberration. Cagoule se compare aux militaires. Il se met à leur niveau. Alors que les militaires se sont engagés pour protéger la nation, pour perpétuer des valeurs qui leur sont chères. Ils ne s’engagent pas en pensant au salaire ou aux personnes qu’ils vont tuer. Ils n’ont pas une cible précise à abattre. Tandis que Cagoule, si. Lui, il a un visage précis dans son cerveau et il sait combien cette mort va lui rapporter. Les militaires tuent, mais pas par plaisir. Certains reviennent des pays en guerre en étant traumatisés et marqués à vie. Jared ne croit pas un instant que Cagoule ressente des remords ou soit touché par les cadavres qu’il sème sur son passage. Il ne manquerait plus que ça. “Ne crois pas trop que le monde aurait été une horreur sans eux.” Le soupir lui échappe. Les discours sont toujours les mêmes. Ils pourraient se renouveler. Ils pourraient penser que les ennemis étaient déjà là, sans que personne ne le sache. La présence de super-héros les a seulement révélés au grand public. Jared lève les bras, dans un geste de désespoir. Que l’on puisse haïr à ce point des personnes qui sauvent les autres lui échappe. Il ne comprend pas. Il ne saisit pas. Il a beau essayer de se mettre à la place de Cagoule ou de tous les autres, il ne voit pas le mal là-dedans. Ce serait comme accuser les policiers de créer des criminels. Ce serait comme dire que les militaires créent des guerres. Non. “Observe de plus près chacun de leurs actes et tu comprendras que l'on crée nous-même nos propres démons.” Observer leurs actes, c’est ce que Jared fait de mieux. C’est ce qu’il écrit, c’est ce qu’il prend en photo. Au quotidien. Bien sûr qu’il y a des dommages collatéraux. Bien sûr qu’il y a des menaces insoupçonnées. Mais les super-héros sont là pour les contenir. Ils sont là pour protéger la société des démons qu’ils ont pu engendrer. Ils sont toujours là. Le jour où les gens arrêteront de croire en ces hommes en slip, les super-menaces seront toujours présentes, elles. Et alors, les simples humains ne pourront plus rien faire contre eux. “Okay, vous avez raison, je ne sais rien, je ne connais rien. Je suis trop naïf et innocent pour comprendre la réalité du monde. Mais je crois que tout n’est pas perdu. Il y a encore des gens pour lesquels il faut se battre et essayer de rendre le monde meilleur qu’il ne l’est.” Il a un ton plus posé, plus calme. La colère a disparu. Parce que rien ne sert de s’énerver. Surtout avec des personnes comme Cagoule qui pensent tout savoir. Faire entendre son opinion à une personne comme celle-ci est compliqué. Jared ne désespère pas. Et même si Cagoule continue de le prendre pour un fou naïf, il s’en fiche. Il continuera à mener sa vie tel qu’il l’entend, avec ses espoirs et ses convictions.
Il n’oublie pas la raison de cette discussion. Il n’oublie pas la personne qui vient de mourir sous les yeux des passants. Il n’oublie pas les potentiels blessés et morts. Tout cela parce que Cagoule n’assume pas son geste. Tout cela parce qu’il préfère dénoncer les autres plutôt que de s’expliquer. “Et ça n’excuse pas le meurtre que vous venez de commettre. C’est bien beau de balancer sur les super-héros, mais vous n’êtes pas un exemple en matière de sainteté.” La parole n’est plus à la provocation ou au jugement. Elle est à la réalité. Il ne fait qu’énoncer des faits. Parce que telle est la vérité. Cagoule a tué des personnes qui étaient mauvaises, peut-être. Mais alors, il n’est pas mieux que tous ces super-héros. Il n’est pas mieux que les autres, qu’ils soient gentils ou méchants. “Pourquoi vous faites ça ? Vous ne pourriez pas avoir un métier moins mortel ?” D’après ce que Jared a pu entendre, son nouvel ami Cagoule a un amour incroyable pour les militaires et il a des compétences incroyables pour entrer dans l’armée. Pourquoi ne pas en faire partie ? Ou alors, être policier, garde-du-corps, vendeur de cagoules… n’importe quoi d’autre que tueur à gages pour les beaux yeux de quelques individus peu fréquentables. Ce sont des métiers tellement plus valorisants et utiles.
Le petit jeu aurait pu agacer Shell Shock mais à présent, il avait totalement dépassé ce stade. Aussi bizarre que ça puisse paraître pour un homme comme lui, il commençait à se lasser du débat. Plus encore qu'un dialogue de sourd, le gamin semblait passer à côté de ce qui était important dans les paroles du mercenaire. Certains militaire avait la mission précise de tuer quelqu'un en particulier, c'était surtout ce genre d'opération qu'il avait vécu durant ses années de service. Et les militaires protégeaient leur peuple contre d'autres militaires, il était assez naïf de penser qu'ils étaient tous gentils et voulant défendre la veuve et l'orphelin. "Tu radotes gamin." En effet, c'était déjà la seconde fois qu'il lui faisait remarquer que dans sa vision des choses, il ne valait pas mieux que ceux dont il dénonçait les actions. "Mais, vu que je suis quand même un mec sympa, je vais te le redire une nouvelle fois. Moi, contrairement aux clowns en collant, je sais exactement où mes actions vont me mener, et le jour où je me trouverais sur une chaise électrique, je serais sans doute le premier à l'accepter." Gunner était beaucoup de chose et certaines personnes qui l'employaient le prenaient pour un fou, ce qui n'était pas tout à fait faux. Mais il était également quelqu'un de très lucide qui connaissait la portée de ses actes et il était prêt à en payer les conséquences dès qu'il aurait vengé sa femme. Une fois son dernier acte accompli, il n'aurait plus d'autre volonté que de la rejoindre afin de pouvoir la serrer dans ses bras une dernière fois. Si on lui demandait aujourd'hui de se défendre pour tout ce qu'il a fait, il ne plaiderait sans doute pas coupable, mais il accepterait la peine qu'on lui imposera sans broncher. Pouvait-il seulement espérer qu'un gamin puisse comprendre le besoin de mourir de la sorte ? Et surtout, combien de héros acceptait de reconnaître qu'ils avaient fait des erreurs comme le sienne.
Puis, vint la question lui demandant pourquoi il avait choisi une telle voie. Comme dit plus haut, comment pourrait-il le comprendre. Il pouvait se vanter de vivre dans la réalité, il n'en restait pas moins hors de sa portée, il n'en restait pas moins dans un monde caché par les médias et les super-héros. Quelque part, Gunner ne lui en voulait pas, il enviât presque sa candeur. Il ne connaissait du monde que ce que le monde voulait bien lui montrer. Le mercenaire aurait alors pu lui parler des missions secrètes, de ce que l'on cache aux simples citoyens et qui entacherait définitivement son idée du bon. Bien entendu, l'entièreté de l'humanité n'était pas à jeter, mais nul n'était innocent dans ce monde, même ce gamin sur le toit qui empêchait, selon lui, un monstre de commettre le mal. Et s'il était trop jeune pour avoir déjà commis un acte répréhensible, alors ce n'était qu'une question de temps. "Parce que je n'en ai pas le choix. Crois-le ou non mais c'est la seule chose que certaines personnes ont appris à faire. Malgré tout ce que tu pourras imaginer, on a pas toujours le choix de ses actions, parfois, le monde t'impose ses choix." Et c'était exactement ça pour lui, en lui enlevant sa femme, on lui avait également enlevé sa raison de vivre et on avait fait de lui un tueur – enfin, l'armée s'en était déjà chargé de ce dernier point. Il aurait pu répliquer, encore une fois, que Frank Castle, qui avait fait la une des journaux il y a peu avec son procès, était dans le même cas de figure, ancien militaire ayant perdu sa famille et se vengeant l'arme au poing. Gunner regardait l'horizon, la fumée qui commençait à s'estomper peu à peu quelques rues plus loin. "Il n'y avait pas d'autre choix, parce qu'aucun autre choix n'avait réellement d'importance." Il n'avait plus réellement fois au système qu'il avait défendu, plus aucun espoir en la bannière étoilée. A quoi bon les super-héros, à quoi bon la justice, à quoi bon les guerres si, dans son propre foyer, il était impossible de protéger les gens que l'on aimait ?