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 Please, don't call May! | Staticquake

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Un entraînement ? Là, maintenant, tout de suite ?” Un regard désespéré en direction de Daisy. Voix plaintive. Une tentative d’attendrissement. Tentative échouée. Elle lui adresse ce regard qu’elle a volé à May. Le genre de regards qui vous fait changer d’avis en moins de cinq secondes. Le genre de regards qui vous fait flipper. Il pousse un soupir. Bon okay, va pour la séance de sport. Il s’arrache de la chaise dans un grognement. Adieu petite chaise adorée. Adieu petit bureau tranquille. Bonjour courbatures douloureuses. Bonjour les hématomes violacés. Les entraînements, ce n’est pas qu’il n’aime pas. C’est plutôt qu’il n’a pas eu beaucoup de temps libre depuis plusieurs jours. Il n’a pas eu de journée aussi chargée depuis une éternité, même à l’hôpital. Et pourtant, il semblerait que ce soit possible de faire pire que vingt-quatre heures de garde. Il aurait apprécié de se replonger dans ce livre mis de côté depuis plusieurs jours. Il aurait aimé se promener dans les rues de New-York. Il aurait voulu s’accorder quelques minutes de répit. Ce n’est pas vraiment au programme. D’un autre côté, il a conscience que l’entraînement est nécessaire. Il n’est pas comme tous ces agents passés par l’Académie. Eux sont redoutables au combat. Ils sont capables de déceler la moindre faiblesse au premier coup d’oeil. Ils sont capables de savoir où l’adversaire va frapper en moins d’une seconde. Pas Lincoln. Lui, il a eu l’habitude de faire travailler son cerveau en suivant des études de médecine. Si connaître le corps humain est utile pour savoir où frapper et où la douleur est la plus intense, ce n’est pas pratique lorsqu’une personne tente de s’en prendre à vous. Depuis son arrivée, il a quand même fait des progrès. Dès qu’il entre dans la salle, il est sur ses gardes. Avant, il se faisait avoir par Daisy qui profitait de son comportement détendu pour le frapper. En parlant de Daisy… une vraie tortionnaire. Elle ne retient pas ses coups. Elle ne le ménage pas. Elle ne le prévient même pas quand les hostilités commencent. Au début, il s’est souvent demandé si elle lui faisait payer quelque chose qu’il aurait fait. Manger son yaourt. Court-circuiter son ordinateur. Éteindre les lumières. Un truc dans le genre. Il a fini par comprendre que ce n’était pas du tout une vengeance ou un geste mal digéré. Seulement de l’entraînement pur et dur. Ainsi, il a compris que sortir de la séance avec des bleus et courbé comme un grand-père est normal. Et encore, il sait qu’il a de la chance avec elle. Sa formation au combat aurait pu être confiée à May et ça, il n’y tient pas vraiment.

Au moins, il a compris que compter uniquement sur son pouvoir est impensable. Comme le S.H.I.E.L.D., d’autres organisations travaillent sur des objets permettant d’annihiler les capacités des mutants, mutés, aliens et autres. Alors, ce serait une erreur de croire que seuls les pouvoirs suffisent. Il n’est jamais à l’abri d’une mauvaise surprise. Et même au cours d’une intervention, savoir frapper avec la bonne force et au bon endroit peut être un avantage. Il y va en ronchonnant, tout en sachant que ce lui sera utile plus tard. La mauvaise volonté n’est plus qu’une comédie. Daisy a déjà quitté la pièce. Elle ne lui laisse même pas la possibilité de protester. Elle ne lui donne pas l’opportunité de trouver une excuse. Tyrannique, en plus de ça. Il attrape rapidement ses affaires de sport et lui emboîte le pas. Il la connaît assez pour savoir qu’elle profiterait du moindre retard pour le lui faire payer. Elle serait capable de l’attendre derrière la porte et de lui sauter dessus dès son entrée. Il presse le pas afin de se porter à sa hauteur. Il s’enferme dans les vestiaires pour se changer. Lorsque c’est fait, il attrape ses gants et se glisse dans la salle. Vide de toute présence. A croire que les agents ont senti qu’ils ne devraient pas être dans le coin. Daisy est déjà là. Prête à en découdre. “En fait, je sais c’est quoi ton problème : tu ne sais pas t’amuser.” Puisqu’il est son principal souffre-douleur, il prend très à coeur le fait qu’elle s’occupe en dehors des missions. Des moyens de décompresser et d’évacuer toute la pression qu’elle pourrait accumuler. Ce sont toujours des motifs en moins de le frapper fort ou de le traîner pour des séances de torture sur tapis. Il y voit aussi une excuse pour la taquiner. Sûrement une mauvaise idée à avoir juste avant un entraînement. Mais il assume. Il prendra quelques coups supplémentaires. Quelques hématomes en plus. Il n’est plus à ça près, non ? “Tu devrais faire le genre de trucs que font toutes les femmes de ton âge : sortir avec des amis, aller au cinéma, rencontrer des gens... Tu sais, tout ce qui n’implique pas de frapper quelqu’un.” Des amis, les agents en ont quelques uns. Des gens qui ne connaissent pas la moitié de leur quotidien. Des gens qui croient parler à des employés de bureau, à des cadres, à des ouvriers, mais sûrement pas à des personnes habilitées à tirer. Ce n’est jamais simple de lier des amitiés quand la sincérité et l’honnêteté ne sont pas possibles. Il y a bien les collègues qui, eux, connaissent les risques du métier et partagent le même quotidien. Lincoln n’oublie pas qu’à une époque, Daisy était entourée par une équipe qui s’apparentait à une vraie famille pour elle. Équipe qui a été disséminée dans d’autres groupes ou qui sont partis de l’organisation. Elle a passé des années à chercher ses parents. Elle les a trouvés et elle s’est trouvée des frères, des soeurs, des parents de substitution. Au final, elle a pratiquement tout perdu.

Il glisse ses mains dans les gants de combat et les serre aux poignets. La partie va pouvoir commencer. Les poings sont montés au niveau du visage pour ne pas risquer une attaque de ce côté là. Il lève les yeux vers Daisy. “Au fait, ça a donné quoi tes retrouvailles avec Jemma ?” Elle l’a retrouvée récemment. Elles se sont revues pour la première fois depuis, quoi ? Des semaines ? Il n’était pas là quand tout la séparation s'est passée. Il était à l’autre bout du pays, à essayer de se créer une vie normale, alors que l’équipe de Coulson partait en lambeaux. Quand il est revenu, tout avait changé. A part Daisy, Mack, Hunter. Quant à Fitz… le changement le plus remarquable vient de lui. Lincoln ne l'a pas côtoyé assez longtemps pour le connaître, mais suffisamment pour se rendre compte que l’ingénieur s’est renfermée sur lui et se coupe du monde extérieur. Tout ce qui ne touche pas à ses objets n’a pas de vrais intérêts. Sûrement une manière de se protéger et de ne plus être trahi. Tous les membres de l’équipe initiale se sont séparés, se sont éloignés, se sont quittés de vue. Incroyable. Eux qui étaient pourtant si soudés et qui fonctionnaient bien les uns avec les autres. Recoller les morceaux semble difficile, pas impossible. A son échelle, Lincoln ne peut qu’inciter Skye a les revoir. Parce qu’il voit que cette distance la fait souffrir. Il voit qu’elle n’est plus aussi épanouie et heureuse qu’avant. Elle a toujours cette joie de vivre et cette folie qui la caractérisent, mais il lui manque quelque chose. Une famille.

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« Un entraînement ? Là, maintenant, tout de suite ? » Regard en coin, bras croisés. Comme s'il avait le choix, de toute façon. Il n'avait pas l'air emballé à l'idée de se faire traîner jusqu'à la salle d'entraînement du shield. Daisy pouvait le comprendre sans trop de difficultés : quand elle s'était retrouvée à sa place, avec May comme os, qui plus est, nombreuses étaient les fois où elle avait tenté d'éviter les séances de tortures où cette dernière ne la ménageait pas. Jamais. Sans doute aurait-elle préféré mourir que de la ménager, de lui rendre les choses trop faciles. Bref, ses efforts avaient été vains, pour tout dire. May n'était pas dupe. Alors Daisy ne l'était pas non plus. Elle avait été forgée à son image, peut-être sans réellement s'en rendre compte, même si elle avait accueilli avec une joie certaine ce modèle de femme forte et indépendante, qu'elle avait aussitôt cherché à devenir, elle aussi. Pour une fois qu'elle pouvait prendre exemple sur quelqu'un. C'est donc avec difficulté que le jeune homme s'arracha finalement de sa chaise, comme s'il s'agissait d'un effort surhumain. Elle aimait beaucoup Lincoln, sincèrement. Peut-être un peu trop, à bien y réfléchir. Mais ça c'était une autre histoire à laquelle elle ne préférait pas trop penser. Quoiqu'il en soit, elle avait beau l'apprécier, ce qu'elle aimait d'autant plus, c'était de se retrouver à la place de May. La position de l'entraîneur. Celui qui frappe sans retenue, peut-être. (bon, okay, ça ne la dérangeait pas du tout d'attribuer un coup de poing au pauvre Lincoln, pas encore préparé à encaisser un choc aussitôt un pied posé sur le tapis). Mais celui qui enseigne, surtout. Qui rend plus fort. Lincoln était intelligent. Et elle voulait vraiment qu'il combine cet avantage à celui de pouvoir se défendre contre n'importe qui sans avoir à utiliser son pouvoir. Après tout, rien ne garantissait qu'il pourrait toujours compter sur ce dernier, qu'on ne chercherait pas à l'en priver pour le rendre plus vulnérable. Elle préféra disparaître avant qu'il ne parvienne à trouver une potentielle excuse pour se défiler.

« Avec Mack on avait prévu de commander des pizzas, ça te tente ? » Lui demanda t-elle aussitôt sortie des vestiaires, tout en lançant un regard dans sa direction. « Tu vois, je suis pas si terrible que ça, je pense quand même à te nourrir après t'avoir torturé. » Elle s'approcha de lui et lui attribua une légère tape sur l'épaule, les yeux pétillants de malice. C'était vrai qu'une fois passée les portes de la salle d'entraînement, elle n'était pas l'os la plus cool que le shield ait connu. Quoiqu'au fond, un os cool, est-ce que ça existait au moins ? Ou bien étaient-ils tous des tyrans ? Elle se voyait déjà arrêter chaque agent faisant des allées et venues au sein du bâtiment : "hey, j'sais qu'on se connaît pas, mais je fais un petit sondage concernant les os. Alors, le tien il était comment ? Plutôt du genre May, qui n'hésite pas à te briser un doigt si l'occasion se présente ? Ou cool ? Tu connais des os qui ont été cool avec leurs élèves ?" Elle allait le faire. Oh oui, décidément. Et elle allait enrôler Hunter dans cette nouvelle quête. Fallait bien qu'il serve à quelque chose, elle l'avait vu s'enfiler des bières devant un jeu vidéo en salle de repos. « En fait, je sais c'est quoi ton problème : tu ne sais pas t'amuser. » Elle releva le regard dans sa direction, soudainement arrachée à ses pensées. Daisy plissa les yeux, l'observa durant quelques instants sans prononcer le moindre mot. Et puis, un sourire en coin se dessina sur ses lèvres. Un sourire qui n'annonçait rien de bon. Il allait le regretter. Elle enfila ses gants, tout en ne le lâchant pas du regard : cela sonnait aisément comme une potentielle mise en garde, lui signalant qu'il avait intérêt à peser ses mots. « Au contraire, je m'éclate là. » Elle recula d'un pas, puis l'observa attentivement. « Tu devrais faire le genre de trucs que font toutes les femmes de ton âge : sortir avec des amis, aller au cinéma, rencontrer des gens... Tu sais, tout ce qui n'implique pas de frapper quelqu'un. » Pour tout dire, il marquait un point. Cela faisait une éternité qu'elle n'avait plus été au cinéma et pourtant ce n'était pas l'envie de voir des films qui lui manquait. Fût une époque, elle adorait même ça et son entourage l'avait qualifiée de cinéphile. Titre qu'elle avait forcément perdu depuis qu'elle était entrée au shield. C'était le sacrifice de tous les agents, en somme. Faire une croix sur la vie privée. Et encore, elle s'estimait chanceuse de ne pas avoir une famille à l'extérieur. Une famille à qui elle serait obligée de cacher tout ça. Obligée de trouver des prétextes lorsqu'elle manquait un repas de famille. Lorsqu'elle manquait un anniversaire et ce genre de choses. Non, elle était réellement chanceuse, parce que le shield était sa famille. Une grande famille qu'elle n'échangerait pour rien au monde. « Faut croire qu'à force de fréquenter May, frapper quelqu'un est devenu comme une espèce de seconde nature », finit-elle par lui répondre, un sourire jusqu'aux oreilles. Elle profita d'un bref moment d'inattention, alors qu'il enfilait ses gants pour lui attribuer un léger coup dans le ventre. Le pauvre, tout de même. Parfois, elle se retrouvait à avoir pitié de lui. Surtout parce qu'elle savait ce que ça faisait de se trouver à sa place. Il la remercierait plus tard, pourtant. « Et puis, je m'occupe ici. L'autre jour on a fait un concours avec Hunter qui consistait à... » Elle se stoppa dans son élan, puis retroussa le nez avec d'abandonner l'idée de lui dire en quoi consistait ce fichu concours. Mieux valait ne pas savoir. « Laisse tomber. Hunter n'est pas une référence, en fait », avoua-t-elle en hochant légèrement la tête, comme pour lui donner raison, tout de même amusée. Avoir Lance Hunter dans les parages était toujours distrayant. Qui avait besoin d'un ciné, avec un tel phénomène à ses côtés ?

« Au fait, ça a donné quoi tes retrouvailles avec Jemma ? » Point sensible. Daisy en baissa presque sa garde, avant de se ressaisir. Les images se mirent à danser devant ses yeux. Jemma, livide. Jemma et le malaise ambiant qui résidait dans son appartement, témoignant de l'état émotionnel de sa propriétaire. Jemma et son retour de la planète. Jemma qui n'était plus pareille. Qui était persuadée de ne plus l'être. Peut-être en avait-elle eu besoin, de revoir son amie. Sans aucun doute, à dire vrai. Bon sang, ce que ça lui avait manqué. Et Fitz. Se retrouver loin l'un de l'autre n'était pas la chose qui leur réussissait le plus. Celui qui ne le voyait pas était le premier des idiots. Même un aveugle l'aurait ressenti. « On a peut-être bu un peu trop de vin », lui confia-t-elle finalement en faisant de grands yeux qui en disaient long. « Mais ça m'a fait du bien. De la retrouver. De voir que finalement, les choses sont les mêmes entre elle et moi. » Parce qu'elle avait passé un nombre considérable de temps sur la fameuse planète. Parce qu'elle avait tout lâché du jour au lendemain. Parce qu'elle avait abandonné Fitz. Parce qu'elle l'avait abandonnée, elle. Daisy n'était pourtant pas rancunière, bien au contraire, elle était du genre à pardonner facilement. « Tu vois, que je fais des trucs de fille. » Elle enchaîna plusieurs coups et constata, non sans fierté, que Lincoln avait drôlement progressé. Plus qu'elle ne le pensait. Elle baissa alors sa garde l'espace de quelques minutes pour s'approcher de lui et relever ses coudes pour lui donner une meilleure posture. « Tu ne protège pas assez ton visage », lui dit-elle en recouvrant son sérieux.


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Avec Mack on avait prévu de commander des pizzas, ça te tente ?” Il pose sur elle des yeux soupçonnés. Qu’est-ce qu’elle cache derrière sa proposition ? Lui faire baisser sa garde ou l’amadouer. Dans les deux cas, il ne compte pas se laisser faire. Même si il ne serait pas contre une pizza. “Okay, va pour la pizza.” Ce sera toujours un réconfort pour oublier qu’il devra se déplacer en fauteuil roulant les trois prochaines heures, à cause d’elle. Un baume pour oublier ses courbatures, ses hématomes. Une pizza. Il a le sentiment qu’il n’en a pas mangé depuis une éternité. Son estomac serait prêt à en avaler trois d'affiliée. Et les hamburgers. Les hamburgers ! Cette junk food lui manque atrocement. Sauf qu’il ne peut pas manger n’importe quoi si il veut surpasser Daisy. Il doit essayer de se maintenir en forme. Il doit s’assurer de ne pas prendre de la masse graisseuse qui l’encombrerait dans ses mouvements. Elle en profiterait pour le frapper deux fois. Il la soupçonne de prendre du plaisir à lui botter le derrière. Il la soupçonne d’avoir quelques ancêtres dictateurs et esclavagistes. Sinon, comment expliquer qu’elle a toujours ce fichu sourire quand ils entrent dans la salle de sport ? “Tu vois, je suis pas si terrible que ça, je pense quand même à te nourrir après t'avoir torturé.” Il ne retient pas son sourire. Oh que oui, elle est prévenante et adorable. Elle s’assure de le consoler avec une part de pizza. On ne peut pas rêver mieux comme fin d’entraînement. “Tu as raison, je suis totalement ingrat de me plaindre... mais tu sais qu’une pizza est encore meilleure quand tu as la force de la manger ?” Pendant qu’ils enfilent chacun leurs gants, il se lance un jeu dangereux. Il sait qu’en la provoquant, il risque d’essuyer les conséquences. Il risque de se faire laminer sur le tapis. Il joue un jeu dangereux en la provoquant. Il le sait. Il en a bien conscience. Et le regard que lui renvoie Daisy ne fait que le confirmer. Il va payer son effronterie dans les dix prochaines minutes. Il parie qu’elle va vouloir le mettre au tapis. Qu’elle va le retourner comme une crêpe.

Au contraire, je m'éclate là.” Ah oui ? Alors, pourquoi il y a une alarme qui vient de se déclencher dans son cerveau ? Il sent qu’ils n’ont pas la même définition du mot “s’éclater”. Au secours. Où est l’issue de secours ? Il se concentre sur Daisy. Ou plutôt sur ces satanés gants. Aujourd’hui, ce ne sont pas les gants de boxe. Ceux-là sont encore pires à mettre puisque les doigts sont coincés dans des moufles géantes. Les gants de combat sont plus simples à mettre, plus aisés. “Faut croire qu'à force de fréquenter May, frapper quelqu'un est devenu comme une espèce de seconde nature” May. La mère de substitution. La mère-dragon. Elle fait peur avec son regard noir. Elle fait peur avec son visage impassible. Il croit avoir réussi à la percer à jour. Il n’est pas sûr. On ne peut pas l’être avec la Cavalerie. Mais ils ont trouvé un terrain d’entente. Elle l’aide avec son caractère et lui… il se tait, il fait des efforts, il se montre à la hauteur du S.H.I.E.L.D. En tout cas, il essaye. C’est tout ce qu’il… OUCH. Le rouge lui monte au visage. Le corps se plie en deux pour accueillir le coup. La douleur se répand dans l’estomac. Il se redresse. Elle est vile. Incroyablement vile. Mais il le savait. Il le savait qu’il devait rester sur ses gardes. Il savait qu’elle ne manquerait pas de lui asséner un coup. Il n’a même pas fini d’attacher ses gants, bordel ! Il n’y a pas un règlement qui dit que les hostilités ne commencent pas avant que tout le monde soit prêt ? “Et puis, je m'occupe ici. L'autre jour on a fait un concours avec Hunter qui consistait à…” Hunter. Concours. Les deux combinés dans une même phrase à de quoi faire sourire. Ce que ne peut pas s’empêcher de faire Lincoln. Ils ne peuvent pas dire que Hunter soit le plus sérieux. Il n’est pas le plus responsable, non plus. De toute l’équipe, il est sûrement le plus puéril, mais il se révèle être un élément redoutable. Il est aussi le plus expérimenté de tous.  

Oui… ?” Faire référence à Hunter est triché. Elle profite juste de l’humour d’un collègue. L’excuse ‘Hunter’ est inacceptable. Surtout, il est à côté d’elle toute la journée. On ne peut pas appeler ça sortir pour s’amuser. Mais lorsque l’on est agent, les amis sont rares, de même que les occasions d’aller dans les bars, d’aller au cinéma, de se promener. Toutes ces choses simples et courantes qu’ils ne font plus. Ils passeraient leur temps à regarder par-dessus leur épaule. Déformation professionnelle. Autant leur épargner toute sortie non nécessaire. “Laisse tomber. Hunter n'est pas une référence, en fait.” Comme c’est étonnant. Il a un air narquois. Il se moque. Il en rigole. Elle est quand même sortie il y a peu. Pour rejoindre Jemma. Lincoln n’a pas eu beaucoup de temps pour apprendre à la connaître. Il en a assez appris sur elle pour savoir qu’elle est généreuse et bienveillante. Il sait aussi qu’elle a fait beaucoup de mal autour d’elle en partant et en ne donnant aucune nouvelle. “On a peut-être bu un peu trop de vin.” L’alcool a l’avantage de transformer des retrouvailles étranges en retrouvailles conviviales. Le vin est aussi un moyen de se retrouver et de partager un moment autour d’un verre. Une bonne manière de faire un pas vers l’autre. “Mais ça m'a fait du bien. De la retrouver. De voir que finalement, les choses sont les mêmes entre elle et moi.” Un résumé plutôt positif et encourageant. Tout n’est pas perdu avec Jemma. Elle a seulement pris ses distances. Elle a seulement cherché à se construire ailleurs. Maintenant qu’elles se sont retrouvées, qu’elles sont rassurées, elles n’ont plus qu’à poursuivre sur cette voie. “Tu vois, que je fais des trucs de fille.” Il lève les mains en l’air. Elle a raison. Elle fait des trucs de n’importe quelle personne de son âge. Elle a même une vie sociale plus épanouie que la sienne. Il ne peut pas le nier. “Okay, okay, tu as raison. On peut même considérer que tu as eu une soirée de quarantenaire.” Après tout, à vingt-sept ans, Daisy ne pouvait pas traîner Jemma boire un verre dehors ? Faire le choix de s’enfermer et de consommer du vin dans un grand verre est un truc pour femmes matures. Mais il n’a pas le temps de s’amuser de sa taquinerie.

Il est obligé de ramener ses poings devant son visage pour intercepter les coups de Daisy. Il évite la première salve en se baissant. Genoux fléchis. Il tente d’attaquer, mais elle réagit avant. Il se redresse, il recule d’un pas. Il ne compte pas la laisser le frapper aussi facilement. Il bloque son coude, mais reçoit un coup dans la mâchoire en réponse. Il accuse le goût, non sans une grimace. Il a un mouvement de recul lorsqu’elle se rapproche. Homme maltraité et torturé. Il se détend en comprenant ses intentions. Nulle question de frapper ou de martyriser. Uniquement la volonté de l’aider. Ses coudes se redressent. Il a les joues mieux protégées. Le menton complètement couvert. “Tu ne protège pas assez ton visage.” La suite, il ne saurait dire comment ça se passe. Un enchaînement de coups. De contre-attaques. De tentatives. De gestes rapides. Une succession de mouvements qui le conduit à la chute. Il n’a pas le temps de se réceptionner dans une roulade que son dos percute déjà le sol. Aïe. Il s’accorde un instant pour laisser son dos se remettre de la douleur, avant de tendre la main en direction de Daisy. Elle va bien être respectueuse et l’aider à se relever, non ? Bingo. Il attrape la main, s’y cramponne et tire dessus. Tandis qu’elle bascule par terre, il en profite pour se relever. Il fait un pas de côté, histoire de s’éloigner de potentielles représailles, et replace ses poings devant son visage. Sourire triomphant sur le visage. “J’ai pas fait exprès, désolé.” Il se garde bien de lui tendre la main. Il ne va pas lui faire cet honneur. Il compte rester sur ses deux jambes pendant les dix prochaines secondes. “Et ton plan machiavélique pour May et Coulson ?” May et Coulson. L’histoire d’amour qui tient tout le S.H.I.E.L.D. en haleine. Depuis que l’agente est revenue de son voyage mystérieux, tout le monde attend. Tout le monde guette les retrouvailles et les effusions amoureuses. Sauf que rien ne vient. Tous les espoirs reposent sur le plan de Daisy. Ces deux-là sont comme des parents pour elle. La connaissant, il est logique qu’elle tente de les rapprocher, voire même de les mettre dans le même lit. Si pour cela, elle doit demander l’aide de tous les agents de l’organisation, elle le fera. C’est Daisy, quoi.

Il évite un crochet du droit et tente une percée au niveau de ses jambes. Échec. Même si il s’améliore, ce n’est jamais assez pour venir à bout de ses parades. “J’ai croisé May tout à l’heure. Je crois qu’elle a capté que tu mijotais un truc. C’est limite si elle n’a pas essayé de lire dans mes pensées avec son regard… tu sais ? Quand elle fait ses yeux de super agent secret ?” Des yeux effrayants. La première fois qu’il y a eu le droit, il a senti ses poils se hérisser sur sa nuque. Il en cauchemarde encore. Maintenant, il est moins impressionné lorsqu’elle pose ses billes noires sur lui. Mais quand même… elle dégage une froideur et un respect qui l’impressionnent.

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« Okay, va pour les pizzas », lui répondit-il, l'air aussi méfiant que si elle était l'ennemi public numéro un du gouvernement. Après tout, ça l'aurait étonnée qu'il lui réponde par la négative. Les pizzas, c'était quelque chose d'universel. Tout le monde aimait ça. Bon, pas tout le monde, d'accord. Mais du moment que Lincoln, Mack et Daisy aimaient ça, c'était le principal. Parce que ce soir, ils allaient se faire un festin qui mettait déjà l'eau à la bouche de la jeune femme. C'était vrai qu'en tant qu'agents de terrain, la première chose qu'ils devaient faire étaient garder la forme. Et les pizzas nuisaient à cette forme. D'après May. Daisy était d'un tout autre avis et rien que pour ça, Lincoln aurait dû lui être redevable à vie. Sauf s'il finissait par devenir obèse à cause d'elle. « Tu as raison, je suis totalement ingrat de me plaindre... mais tu sais qu’une pizza est encore meilleure quand tu as la force de la manger ? » Elle esquissa un sourire amusé. Oui, Lincoln était un ingrat. Un vrai gosse, aussi. Le pire était tout de même lorsqu'il se retrouvait dans la même pièce qu'Erin, tous les deux devenaient insupportables et ne cessaient de se châmailler pour un oui ou pour un non. Et elle était obligée de les rappeler à l'ordre, comme une mère le ferait avec ses enfants. Enfants qui avaient pourtant le même âge qu'elle, ah ! « Oh n'exagère pas », lui lança-t-elle en retenant un léger rire. « Nos entraînements ne sont pas si terribles que ça », poursuivit-elle en enfilant ses gants, ne lâchant pas Lincoln du regard une seule seconde. Il la charriait, la taquinait. Et finirait au tapis d'ici quelques instants. Elle ne le ménagerait pas. Bon, ce n'était déjà pas dans ses habitudes de leur rendre la vie facile, à lui et Erin, mais là... Là il la cherchait.

Moment d'inattention lorsqu'elle évoqua May. Elle en profita. Le coup partit presque tout seul, de façon automatique. Vengeance ? Certainement. Elle posa ses prunelles sur lui, observa le rouge lui monter jusqu'aux joues, puis se plier en deux avec un amusement qu'elle ne masqua pas. Elle inclina légèrement la tête de côté, lui lança un regard entendu, comme pour lui dire "bien fait". Il s'y attendait pourtant, n'est-ce pas ? C'était comme ça que fonctionnaient leurs entraînements : un coup pour une taquinerie. Ou approximativement, du moins. « Oui… ? » Il attendait des détails sur ses paris avec Hunter. Elle se contenta de lever les yeux au ciel, puis lui lancer un regard pétillant, empli de malice, presque mystérieux. Il ne saurait pas, oh ça non. Surtout si elle voulait conserver un minimum de dignité auprès de lui. « Et tu sais pourquoi je n'ai pas le temps de faire des trucs de femme de mon âge ? » Elle haussa un sourcil, un sourire narquois étirant ses lèvres. « Parce que je suis trop occupée à vous surveiller, toi et Erin. » Prétexte. Généralement, lorsqu'ils se chamaillaient, ce n'était pas devant elle. On venait lui rapporter diverses anecdotes qui bien souvent la faisait plus rire qu'autre chose. « D'ailleurs, à ce propos, il paraît que t'as grillé la cafetière ? » Elle baissa sa garde l'espace de quelques instants, lui lançant un regard réprobateur. Irrécupérable. Malgré tout ça, elle tenta de lui prouver noir sur blanc qu'elle faisait des trucs de fille de son âge. Même si elle-même n'y croyait pas forcément. L'esprit de contrariété, ni plus, ni moins. « Okay, okay, tu as raison. On peut même considérer que tu as eu une soirée de quarantenaire » Elle lui donna un coup dans l'épaule, plus fort qu'elle ne l'aurait voulu, mais elle ne se démonta pas. Au contraire, elle releva le menton, haussa un sourcil. « Parce que tu crois que passer tes soirées à bouquiner, c'est pas un truc de quarantenaire, peut-être ? »

Il a fait des progrès, Lincoln. Et elle était fière de lui. Genre aussi fière qu'une maman lorsque son enfant s'élançait seul à vélo. Pourtant, après avoir réussi à éviter plusieurs de ses coups, elle heurta sa mâchoire de plein fouet, lui arrachant une grimace. Elle fronça les sourcils, s'avança d'un pas tandis que lui reculait. Pour peu, elle en aurait presque rigolé, tant et si bien qu'elle ne parvint pas à masquer le sourire amusé qui s'étendait d'une oreille jusqu'à l'autre. Le pauvre. Là était la preuve qu'elle n'était vraiment pas tendre avec lui. Mais ça lui donnait de bons réflexes. Elle ne savait pas si elle était si douée que ça, comme professeur. Parce qu'entre effectuer soi-même et apprendre à autrui, il y avait toujours une marge de décalage. Ou un gouffre, plutôt. Oui, un gouffre, c'était totalement ça. Les coups s'enchaînèrent. Il réussit à bloquer plusieurs de ses coups, lui en porta même quelques-uns. Pourtant, elle parvint à le faire chuter. Un éclair de malice mêlé à la fierté traversa son regard lorsque son dos heurta violemment le tapis. Et quand il lui tendit la main, qu'elle l'accepta pour l'aider à se redresser, ce fût elle qui finit le dos contre sol. Sans qu'elle ne comprenne ce qui s'était passé. Elle cligna des yeux plusieurs fois, fronça les sourcils. Puis releva le regard en direction de Lincoln, pinçant les lèvres. « T'as pas osé... » Cela sonna comme une potentielle menace qu'il s'empressa de couper, prenant un air innocent. « J’ai pas fait exprès, désolé. » Un rire mauvais s'échappa d'entre ses lèvres. Il n'avait pas fait exprès, ouais, et elle allait le croire, peut-être. Cette fois-ci, sa petite tête blonde ne l'amadouerait pas, il allait le regretter. « Et ton plan machiavélique pour May et Coulson ? » Elle resta immobile durant quelques instants, ferma les yeux et inspira profondément. Coulson et May. May et Coulson. Le duo que tout le monde espérait voir finir leurs vieux jours ensemble. Et ceux qui ne l'espérait pas encore finirait pas être contaminés par Daisy qui poussait les agents à se joindre à la cause qu'elle défendait. Finalement, elle roula sur le tapis pour se retrouver sur le ventre, puis s'agenouilla, observant Lincoln. « J'ai essayé de faire parler May », lui confia-t-elle avant de lever les yeux au ciel, exaspérée. « Mais autant demander à une armoire à glace ce qu'elle ressent. Elle s'est contentée de m'envoyer au tapis. »

Elle n'avait pas spécialement envie de se relever. Elle était bien là, au tapis. A force d'y être envoyée lors de ses entraînements avec May, elle s'était rendue compte qu'il était relativement confortable. « J’ai croisé May tout à l’heure. Je crois qu’elle a capté que tu mijotais un truc. C’est limite si elle n’a pas essayé de lire dans mes pensées avec son regard… tu sais ? Quand elle fait ses yeux de super agent secret ? » Il évita son crochet du droit, ainsi que bon nombre d'autres coups. Elle ne perdait pourtant pas de vue qu'elle devait lui faire payer la feinte qui lui ayant valu de se retrouver au sol, alors que lui se remettait sur ses pieds. « Son regard me fait encore carrément flipper, des fois », lui fit-elle remarquer en faisant de gros yeux, compatissant grandement à sa douleur. Comme tout le monde, en fait. Qui n'avait pas peur de May et son regard qui, si il le pouvait, tuerait bon nombre de personne. « En même temps, ça doit pas être facile pour eux, de nous avoir sur le dos, Ava, l'agent Carter et moi », leur accorda-t-elle en retroussant le nez. « J'ai même entendu Coulson nous surnommer le trio insupportable. Alors que c'est loin d'être vrai. On est adorables et tout ce qu'on veut, nous, c'est leur bonheur. » Elle plaidait sa cause auprès de Lincoln, littéralement. Elle voulait juste qu'il la rassure, qu'il lui dise que non, elle n'était pas insupportable, alors qu'elle savait extrêmement bien qu'elle l'était. « Ils devraient être heureux de nous avoir, moi je te le dis. »


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Oh n'exagère pas. Nos entraînements ne sont pas si terribles que ça.” Moue dubitative. Pas si terrible que ça. Tout dépend de l’avis de chacun. Tout dépend si on est celui qui donne les coups ou celui qui les reçoit. Tout dépend qui souffre et qui éprouve du plaisir. Dans leur cas, on ne peut pas dire que Lincoln s’épanouisse dans le rôle du puching-ball. Par contre, Daisy y trouve un plaisir infaillible. Il n’y a qu’à voir ses sourires. Il n’y a qu’à voir ses expressions. Elle est heureuse de le maltraiter. Elle est heureuse de le frapper. Une vraie dictatrice. Un vrai tyran. Le pire, c'est qu'elle se trouve moins violente que d'autres. Comme May. Lincoln n’a pas besoin d’affronter la Cavalerie pour savoir qu’elle serait tenace. Encore pire que Daisy. Encore pire que toutes ces séances. Après un face à face avec elle, ce ne sont pas des hématomes qu’il récolterait. Ce ne sont pas des courbatures qu’il collectionnerait. Ce sont des fractures, des entorses, des traumatismes à vie. Alors, il s’estime heureux d’être tombé sur Skye. Il aurait pu avoir pire. Il aurait pu avoir plus sadique. Il aurait pu avoir plus monstrueux. Il s’en rend bien compte. Il remercie sa bonne étoile tous les soirs, lorsqu’il se traîne jusqu’à son lit. Le pire est sûrement de savoir qu’il va souffrir. Pour cela, il n’a qu’à croiser son regard. Il n’a qu’à repérer cette petite lueur dans ses prunelles. Cette lueur qu’elle a lorsqu’elle est décidée à lui donner une leçon. Cette lueur qu’elle a lorsqu’elle veut lui faire payer quelque chose. Quand il voit cette petite lueur, il sait d’avance qu’il va passer un mauvais quart d’heure. Autant dire qu’il a encore moins envie de se lancer dans un entraînement. Pourtant, il le cherche. Il provoque sa malchance. Il réclame presque d’être maltraité. A croire qu’il se prend au jeu. A croire qu’il devient masochiste. A croire qu’il apprécie lui aussi. “Et tu sais pourquoi je n'ai pas le temps de faire des trucs de femme de mon âge ?” Il lève un sourcil. Il est curieux de savoir quelle excuse elle va encore se trouver. Trop de missions. Trop de responsabilités. Trop d’entraînements. Trop de de bottages de fesses. Il est curieux. “Parce que je suis trop occupée à vous surveiller, toi et Erin.” La mauvaise foi totale. Elle n’est jamais là lorsqu’ils font des bêtises et quand elle est là, Lincoln essaye de se tenir à carreau. Il essaye d’être sage et sérieux. Il essaye d’être mature. Mais lorsqu’elle a le dos tourné, il est possible qu’Erin et lui se chamaillent. Possible. Il y a comme un doute. Il y a comme une supposition. La présomption d’innocence fonctionne aussi pour deux inhumains qui se disputent à longueur de journée.

Tu exagères, on essaye juste de passer le temps en ayant des conversations animées.” Daisy est douée pour la mauvaise foi. Pas autant que Lincoln. Il est le professionnel de la mauvaise foi. Il est le roi. Il recule la tête pour éviter un coup. Parfois, il se dit que les attaques de la jeune femme sont pour lui faire payer ses phrases. Parfois, il se perd dans quelques théories paranoïaques. Ce coup envoyé en direction de son visage à ce moment précis n’est pas calculé, évidemment. Il s’agit d’un pur hasard. Il s’agit d’une pure coïncidence. “D'ailleurs, à ce propos, il paraît que t'as grillé la cafetière ?” La cafetière. Il s’en rappelle encore. Il revoit la scène. Le mail dans sa boite de réception. Le lien de la vidéo YouTube. Le titre de la vidéo. Les images. Les Pikachus qui se dandinent. Il n’est pas parvenu à griller Erin. Il n’est pas parvenu à lui donner une leçon. Il tentera une prochaine fois. Car, il y aura une prochaine fois. Comme d’habitude. Erin est une vraie gamine. Elle doit toujours le provoquer. Elle doit toujours lui envoyer des piques. Et crétin comme il est, il se laisse faire. Il se laisse manipuler. Il fonce tout droit dans le piège. “C’est de la faute d’Erin, elle bouge trop vite. Et elle m’a envoyé une vidéo totalement choquante et déplacée.” Choquante et déplacée. Ce sont les mots. Des Pikachus qui dansent au son d’une musique atroce est complètement indécent. Déplacé. Il en a encore des frissons. Des frissons de choc. Des frissons de colère. Des frissons de peur. Il ne s’en remettra pas. Jamais. Lorsqu’il ferme les paupières la nuit, il a des flashes. Des personnages jaunes. Des cris asiatiques. De la musique horrible. Daisy ne peut pas laisser passer cela. Il s’agit d’intimidation. De manipulation. De torture. Elle devrait punir Erin, tiens. Elle devrait lui interdire d’approcher un ordinateur à plus de dix mètres. Elle devrait lui interdire d’envoyer des vidéos intimidantes. “Parce que tu crois que passer tes soirées à bouquiner, c'est pas un truc de quarantenaire, peut-être ?” Il hausse les épaules. Il ne trouve pas. Lire, c’est universel. Lire, c’est se cultiver. Lire, c’est apprendre. Et on ne peut pas dire qu’il ait autre chose à faire. A part passer ses soirées à jouer aux jeux vidéos ou à discuter avec Hunter. Il n’a pas grand-chose d’autres à faire. Les sorties dans les bars sont prohibées. Il pourrait replonger. Il ne compte pas non plus inviter Erin au cinéma. Elle serait intenable. Elle lui balancerait du pop-corn au visage. Elle parlerait pendant tout le film. Hors de question. Quant à inviter Daisy, il ne s’est pas encore penché sur la question. Il pourrait. Il devrait. “J’essaye de me cultiver pendant que d’autres boivent des litres de vin.” Il a un sourire en coin. Pendant que mesdames se sont enfilées une bouteille de vin, il a lu quelques pages. Chacun son truc.

Il commence à ressentir les premiers essoufflements. Les premières palpitations. Les premières fatigues. Il passe une main sur son front. En plus de travailler sa technique, il doit travailler son endurance. Au lieu de lire des livres, il devrait peut-être se mettre à courir. Courir à travers New-York. Courir dans ses rues inconnues. Courir dans son célèbre parc. Pourquoi pas. “J'ai essayé de faire parler May.” Daisy et sa franchise habituelle. Il imagine sans mal la scène. La jeune femme qui tombe sur Melinda, qui la bombarde de questions, d’affection, d’amour. Daisy qui tente de la faire parler à tout prix. Daisy qui veut savoir où elle est passée. Melinda n’a pas dû apprécier tant d’attention d’un seul coup. “Mais autant demander à une armoire à glace ce qu'elle ressent. Elle s'est contentée de m'envoyer au tapis.” Pas étonnant. Melinda May n’est pas réputée pour s’épancher sur ses sentiments. Surtout pas auprès de ses équipiers. Elle ne s’ouvre qu’à une seule personne : Coulson. Ils se connaissent depuis tellement longtemps qu’elle arrive à baisser sa garde devant lui. Mais les autres - même Daisy - ne trouvent pas grâce à ses yeux. Lincoln a parfois l’impression de voir une version plus personnelle de l’agente expérimentée. Quand ils discutent du sang-froid et du contrôle, elle semble se dévoiler un peu. Juste un peu. Jamais trop. Jamais beaucoup. Elle brise tout espoir d’un coup de regard, d’un mot ou d’une intonation. Elle a cette capacité de ne rien laisser paraître. Il est toujours surpris de voir que Daisy ne se décourage pas devant autant d’insensibilité et d’absence d’affection. “Ça explique certaines choses…” Pourquoi Daisy le met régulièrement au tapis. Pourquoi elle s’acharne sur lui. Pourquoi elle le bat souvent. Parce qu’elle le tient de May. Parce que May s’amuse à la jeter au sol dès qu’elle en a l’occasion. Il paye pour toutes les fois où la Cavalerie prend le desuss sur Skye. Si la jeune femme pouvait uniquement se défouler sur Erin, sur Mack ou sur Hunter, il en serait ravi. Il laisse volontiers sa place à quelqu’un d’autre. “Son regard me fait encore carrément flipper, des fois.” Un regard glacial. Un regard froid. Un regard assassin. Elle a le talent de décourager toute personne voulant lui parler. Elle est sûrement la personne la plus tranquille du S.H.I.E.L.D. Personne n’ose lui faire de reproches. Personne ne veut la déranger. Personne ne désire l’interrompre. Elle bénéficie d’une tolérance et d’un respect sans pareils. Si après plusieurs années, Daisy n’est toujours pas immunisée contre ce regard, il ne peut pas espérer y survivre après seulement quelques semaines.

En même temps, ça doit pas être facile pour eux, de nous avoir sur le dos, Ava, l'agent Carter et moi.” Il hausse les sourcils. A trois. Elles sont trois à tenter de les pousser dans les bras l’un de l’autre. Pas étonnant que May le fusille du regard. Elle doit se demander qui est de mèche. Elle doit lui trouver un air coupable à cause de sa relation avec Daisy. Il secoue la tête. Elles cherchent les ennuis. Elles vont se faire haïr. Elles vont se faire détester. Coulson risque de ne pas apprécier. Lincoln a eu le temps de voir que le co-directeur n’apprécie pas que l’on se mêle de ses affaires. Encore moins de ses histoires de coeur. Qui aimerait ça ? Même Erin qui met lui lance des piques sur Daisy l’agace - en même temps, tout ce que fait Erin l’agace - alors, il imagine quelle pression ce doit être d’avoir trois personnes sur le dos. “J'ai même entendu Coulson nous surnommer le trio insupportable. Alors que c'est loin d'être vrai. On est adorables et tout ce qu'on veut, nous, c'est leur bonheur.” Lincoln éclate de rire. Finalement, il n’est pas le roi de la mauvaise foi. Daisy vient de le surpasser. Elle vient de montrer qu’elle est pire que lui. “Ils devraient être heureux de nous avoir, moi je te le dis.” Elle repousse les limites du déni. L’amusement de Lincoln se solde par un faux mouvement qui lui arrache une grimace. Il perd sa concentration, avec ces histoires de couple. Avec ces plans foireux. Il est d’accord avec Daisy sur le fait que Coulson et May formeraient un beau couple. Depuis le temps qu’ils se tournent autour. Depuis le temps qu’ils se connaissent. Depuis le temps qu’ils sont complices. Par contre, il préssent des conséquences. Des disputes. Des remises en place. Des bouderies. De cette bonne action pourrait découler de mauvaises choses. Il n’est pas certain que Daisy, Sharon et Ava se rendent compte. Et si leur plan avait l’effet inverse ? Elles ne seraient pas dans la merde. “T’as conscience que ça risque de te retomber dessus ?” Il ne tient pas à la décourager. Il ne cherche pas à l’enfoncer. Il ne veut pas qu’elle baisse les bras. Ce qu’elle fait est plutôt bien, même si on peut s’interroger sur les vraies raisons. Si, inconsciemment, elle ne chercherait pas à recréer une famille parfaite. Avec des gens qui l’aiment. Avec des gens qu’elle aime. “Je sais que Coulson et May sont comme des parents pour toi, mais… franchement, ils sont assez grands. Si il avait dû se passer un truc entre eux, ça aurait déjà le cas, tu ne crois pas ?” Après tout, ils ont fait plusieurs missions ensemble. Ils ont eu l’occasion d’être dans des situations dangereux - tout le monde sait que les situations dangereuses rapprochent. Ils ont pu s’embrasser, coucher ensemble, essayer d’être en couple.

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« Tu exagères, on essaye juste de passer le temps en ayant des conversations animées. » Des conversations animées, c'est le mot. Daisy est incapable de retenir le sourire qui étire ses lèvres jusqu'aux oreilles. Chercher à se donner l'air sévère n'est pas une grande réussite et pour cause, elle est la dernière à pouvoir juger Lincoln et Erin. Elle n'est pas la personne la plus adéquate pour parler de maturité, pour reprocher aux agents de ne pas se tenir à carreaux. Alors qu'il évite un potentiel coup, elle lui fait part de l'histoire de la cafetière, celle que lui a rapporté un agent du Shield, légèrement mauvais. Exaspéré, loin d'être content. Elle l'entend encore la sermonner, comme si elle n'était qu'une petite fille de cinq ans venant de faire une bêtise, scander qu'en chef d'équipe, elle était supposée savoir gérer cette dite équipe. Et cet agent, tout rouge de colère était reparti tout aussi vite quand May s'était pointée, les sourcils haussés. Dans son regard, Daisy avait décelé une certaine forme de curiosité, même si elle s'était contentée de rester muette, de se servir un café et de repartir aussitôt. Peut-être l'avait-elle fait exprès, peut-être savait-elle l'effet qu'elle produisait sur presque tous les agents du Shield : certains l'évitaient, d'autres l'enviaient ou l’idolâtraient. Une chose était sûre, la jeune inhumaine avait été tranquille après cet épisode et il n'était plus jamais revenu. « C’est de la faute d’Erin, elle bouge trop vite. Et elle m’a envoyé une vidéo totalement choquante et déplacée. » C'est un rire franc qui s'échappe de sa gorge, cette fois-ci. Lincoln a des allures d'enfants. Un petit garçon qui viendrait se plaindre à sa mère des chamailleries entre sa soeur et lui. C'est l'effet que ça donne à Daisy, en tout cas. Choquante et déplacée. Elle s'éloigne quelque peu, repart dans un fou rire. Envolé le regard réprobateur qu'elle lui a lancé en lui annonçant qu'elle savait qu'il avait grillé la cafetière. « C'est vrai qu'une vidéo de pikachus dansants, c'est tellemeeeeeent choquant et déplacé », lui dit-elle en reprenant son sérieux, prenant un air faussement outré. Elle le sait, parce qu'Erin a pris un malin plaisir à lui envoyer le lien, à elle aussi. Et ce n'était pas la première fois qu'elle le faisait, soit dit en passant. C'était drôle, Daisy s'est imaginé des petits Lincoln dansants et lançant de l'électricité l'espace de quelques instants. Finalement, ils dérivent sur Jemma, sur la soirée qu'elles ont passée à deux, autour d'une bouteille de vin. L'inhumaine pince les lèvres l'espace de quelques secondes, elle hésite à lui confier ce qu'elle a vu. Ce qui a été dit. Est-ce que parler de tout ça à Lincoln s'apparentait à une potentielle trahison ? « J’essaye de me cultiver pendant que d’autres boivent des litres de vin. » Il coupe le file de ses pensées, elle lève les yeux au ciel et abandonne l'idée de lui raconter. De lui confier que la chambre de Jemma est couverte de photos et de notes jusqu'au plafond. Elle se retient fermement, c'est plutôt difficile, parce que Lincoln et elle sont proches. Elle pourrait lui en parler, ça la soulagerait peut-être un peu et à deux, ils pourrait chercher une solution pour aider la scientifique. Mais encore une fois, l'impression de trahir la confiance Jemma est plus forte. Alors elle se tait, elle passe à autre chose.

« Ça explique certaines choses… », qu'il lui glisse doucement, alors que le sujet de leur conversation dérive un peu plus. Non plus sur Jemma, mais sur May cette fois-ci. May qui a érigé autour d'elle des remparts afin de se protéger des émotions, aussi bien provenant de l'extérieur que d'elle-même. May, dont elle sent ces dits remparts s'ébranler un peu plus chaque jour. Oh, si Daisy sent qu'elle fait des progrès, elle sait pourtant qu'elle ne parviendra pourtant jamais à transformer la Cavalerie. Parfois, elle parvient tout de même à la rendre un peu plus humaine, elle aperçoit des brèches dans sa carapace. Depuis son arrivée au sein de l'équipe, sa relation avec May est sans aucun doute celle ayant le plus évolué : de parfaite inconnue aussi froide que le marbre et distante au possible, elle a été promue figure maternelle numéro une. C'est vrai que Daisy se calque sur elle comme une enfant prend exemple sur un parent. Parfois, elle se surprend à avoir ses mimiques ou à reproduire ses techniques de combat. Et surtout, à l'instar de sa relation avec Couslon : elle cherche à la rendre fière. C'est étrange, parce que lui et May ne seront jamais ses parents, elle le sait. Elle devrait être plus professionnelle, elle devrait se comporter d'autant plus comme un agent. Mais voilà, elle a trouvé en ces deux-là quelque chose qu'elle n'avait jamais possédé auparavant, un sentiment lui étant encore étranger avant sa rencontre avec l'équipe. Parce que si Coulson et May étaient les parents, Fitz et Simmons étaient indéniablement les frères et soeurs. La fratrie n'avait cessé de s'agrandir par la suite : Hunter, Mack, Bobbi, Erin, Ava, Lincoln. Là était la différence entre le Shield et Hydra : les sentiments. Considérés comme une faiblesse de la part de ces derniers, Daisy y puisait d'autant plus une potentielle force. Elle faisait des choses en compagnie de May qu'elle aurait été incapable de faire seule. Elle faisait des choses pour Fitzsimmons qu'elle aurait été incapable d'accomplir si ce n'était pas pour eux. Et Lincoln... Lincoln était à part. « Qu'est-ce que tu entends par là ? » Son intonation résonne presque comme un reproche, sagement masqué sous une question anodine. Ça explique certaines choses Lincoln sait qu'il doit se méfier, faire attention à ce qu'il dit, sans quoi il finira au tapis.

Alors, elle lui confie qu'elles sont trois sur le coup. Que Sharon, que Daisy vénère presque littéralement, est de son côté, tout comme Ava. « T’as conscience que ça risque de te retomber dessus ? » La silence s'installe et les paroles de Lincoln la font réfléchir l'espace de quelques instants. Il la pousse à se remettre en question, mais cela ne dure que quelques secondes. Une minute, tout au plus. Daisy est convaincue que ce qu'elle fait est juste et peut-être que cela relève de l'entêtement, mais elle ne lâchera pas prise aussi facilement. May aura beau l'envoyer au tapis aussitôt qu'elle lui posera une question personnelle, Coulson aura beau la réprimander, lui taper sur les doigts, cela ne changera rien. Elle a un but, la gamine. Elle veut les voir heureux et c'est sincère. Tout comme elle souhaiterait voir Fitz et Simmons réuni. « Je sais que Coulson et May sont comme des parents pour toi, mais… franchement, ils sont assez grands. Si il avait dû se passer un truc entre eux, ça aurait déjà le cas, tu ne crois pas ? » Elle lui attrape fermement le bras, place son pied derrière le sien et le pousse légèrement de sorte à ce qu'il tombe sur le dos. Elle ne sait plus trop si c'est une prise de judo ou d'autre chose, mais elle s'en moque, il chute et c'est tout ce qui compte. L'espace de quelques instants, elle est fière, jusqu'à ce qu'il l'entraîne au sol. Elle se retrouve à quelques centimètres de lui, plonge ses yeux foncés dans ceux de Lincoln. Elle repense à la question de Fitz. "Il se passe quoi entre Campbell et toi ?" Elle repense à la question de Jemma. "Il se passe quoi entre Lincoln et toi ?" Ils essayent de lui faire passer un message, elle n'est pas stupide. Elle l'a pas lâché du regard, n'a pas bougé d'un seul millimètre. « Tu sais ce qu'on dit, pas vrai ? Y'a des regards qui ne trompent pas », qu'elle se contente de lui répondre, faisant allusion à May et Coulson. A May et Coulson et à eux seulement.


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C'est vrai qu'une vidéo de pikachus dansants, c'est tellemeeeeeent choquant et déplacé.” Comment elle sait ça, elle ? Lincoln fronce les sourcils. Erin n’oserait quand même pas transmettre sa vidéo à Daisy. Elle ne ferait pas ce genre de choses. Quoique... Il va lui faire griller le cerveau. Il va en faire une brochette électrocutée. La prochaine fois, impossible qu’il la loupe. Il ne fera pas semblant. Il ne jouera pas les incompétents. Il ne la ratera pas. Elle peut en être certaine. Quelle idée d’envoyer la vidéo à Daisy ! Ils la connaissent par coeur. Elle serait capable de transférer le mail à tout le S.H.I.E.L.D. Et alors, là… Lincoln n’aurait plus aucune réputation. Il n’aurait plus aucune chance d’être bien par ses collègues. Adieu la crédibilité. Adieu le sérieux. Adieu le respect. Erin ruine sa carrière en envoyant des vidéos pareilles à Daisy. Il secoue la tête. Il va l’étrangler. Il va l’étriper. Il est déjà en train de réfléchir à la pire manière de la punir. Il réfléchit à tous les stratagèmes de gamin pour le lui faire payer. La mousse à raser à la place du dentifrice. Les moustaches dessinées au stylo indélébile pendant son sommeil. La coupure d’électricité intempestive quand elle est sous la douche. Elle va avoir son compte. Il s’en fait la promesse. “Je n’y crois pas… Qui d’autre les a reçues ?” Il a peut-être encore une chance de sauver sa peau. Peut-être que si la directrice ne les voit pas, ni Coulson… Peut-être que si les autres équipes ne sont pas au courant… Peut-être. Il croise les doigts. Sinon, c’est sûr, il déclare la guerre. Erin n’aura plus un seul instant de répit. Elle ne pourra plus boire son café sans qu’il ne surgisse derrière elle. Elle ne pourra plus se coiffer sans qu’il n’apparaisse dans le reflet. Elle ne pourra plus manger sans qu’il fasse exploser un truc dans son assiette. La guerre. Heureusement, la conversation dévie sur May. May et son regard flippant. May et son rôle de matrone. L’entraînement prend des allures de discussion. Ils ne sont pas assis. Ils ne sont pas autour d’un verre. Ils se tournent autour, cela dit. Ils restent en mouvement. Sans tenter quoi que ce soit pour attaquer l’autre. Sans essayer de mettre l’autre au tapis. Ils ont oublié pourquoi ils étaient là, des gants aux mains et en tenue de sport. “Qu'est-ce que tu entends par là ?” Il a un sourire amusé. Elle le prendrait mal ? Vraiment ? Il n’y croit pas. May est ce qui se rapproche le plus d’une mère pour Daisy. La figure maternelle qui lui a appris beaucoup de choses. La figure maternelle vers laquelle elle se tourne dès qu’elle est préoccupée. La figure maternelle qui lui manque quand elle disparaît de la surface de la Terre. Mais une figure maternelle qui lui fracasse la tête contre le sol. Ca fait des dégâts. Il fait ostensiblement un pas en arrière. Histoire d’anticiper la réaction qui pourrait venir. “J’entends que tu es complètement dérangée du cerveau et que tu as besoin de te défouler sur nous quand May te maltraite.” Il n’a peur de rien. Même pas de se prendre un coup de poing. Même pas de se prendre une claque. Il a du courage. Et il en faut pour affronter son regard assassin. Il en faut pour être dans son équipe. Il en faut pour côtoyer deux folles furieuses. Il devrait avoir une médaille du mérite pour réussir à supporter ces deux agentes. Elles sont survoltées. Quand elles se liguent contre lui, elles le rendent fou. Complètement fou.

Il enchaîne sur le couple May/Coulson. Un couple promit à un bel avenir, si seulement on les laissait faire. Mais Daisy n’est pas de ceux qui attendent de voir que ça se passe. Elle doit agir. Lincoln la met en garde. Il voit que son avertissement sème le trouble en elle. Le temps de quelques secondes. Juste quelques secondes. Il voit le déclic dans son regard. Ce moment où elle repousse les doutes. Ce moment où elle décide d’ignorer les mises en garde. Ce moment où elle décide qu’elle n’en a rien à faire des conséquences. Il lève les yeux au ciel. Au moins, il l’aura prévenue. Maintenant, il ne peut que la surveiller et s’assurer qu’elle ne va pas trop loin. Comme organiser un dîner aux chandelles et les enfermer dans une chambre d’hôtel. Comme les obliger à exprimer leurs sentiments. Comme les forcer à s’embrasser. Elle pourrait précipiter les choses et tout détruire. Il compte surveiller ses plans. Même si elle tentera sûrement de lui mentir et de minimiser les choses. Il insiste tout de même. Pour essayer de la faire chanceler. Pour essayer de la convaincre d’arrêter. Sauf qu’elle ne répond pas. Au lieu de cela, elle s’en prend à lui physiquement. Il sent son corps partir en arrière. Il tombe, non sans s’agripper à Daisy. Il tombe, mais elle avec lui. Son dos frappe le sol. Une grimace se dessine sur son visage, jusqu’à ce qu’il croise le regard de la jeune femme. Ils ne sont qu’à quelques centimètres l’un de l’autre. Une proximité dont ils ont l’habitude en temps normal, lors des entraînements ou des missions. Mais cette fois, il y a un flottement. Un moment de réflexion. Un moment de doute. Un moment d’hésitation. Il sonde ses prunelles. A la recherche d’un indice. A la recherche d’une indication sur ce qu’elle pense. “Tu sais ce qu'on dit, pas vrai ? Y'a des regards qui ne trompent pas.” Comme ceux entre Fitz et Simmons. Comme ceux entre Coulson et May. Des regards dans lesquels l’affection se ressent. Des regards dans lesquels des sentiments cachés sont exprimés. Des regards dans lesquels on lit l’attachement. Ils ont ce regard eux aussi, n’est-ce pas ? C’est ce que semble penser Erin. C’est ce qu’elle insinue quand elle se moque de lui. C’est ce qu’elle sous-entend dans ses remarques. Et si elle ne se trompait pas ? Quand quelque chose se passe, Daisy est la première personne qui lui vient à l’esprit. Quand il s’inquiète des dangers, il pense immédiatement à elle. Quand il veut partager une nouvelle, c’est à elle qu’il s’adresse. Peut-être à cause de leur amitié. Peut-être à cause d’autre chose. “Peut-être que ça les rassure d'être dans une relation qui n'engage à rien." Melinda et Philip sont amis depuis des années. Il est possible de rester ainsi, plutôt de se lancer dans une nouvelle aventure. Plutôt que de tout mettre en danger pour une histoire d'amour qui ne finira peut-être pas bien. Peut-être qu'ils préfèrent rester bons amis.

Il y a des regards qui ne trompent pas. Qu’est-ce qu’il voit dans celui de Daisy ? Des doutes. De la peur. Et autre chose qu’il ne parvient pas à qualifier. Autre chose qu’il ne parvient pas à définir. Autre chose qui trouve écho en lui. Il met fin au moment de flottement. Il l’achève. Il le brise. En se rapprochant. En capturant ses lèvres. Ce moment de flottement, ils l’ont vécu plusieurs fois. Sans jamais sauter le pas. Sans jamais savoir quoi faire. Sans jamais réussir à aller au bout. Sans jamais avoir le courage. Il se détache. Il laisse sa tête retomber sur le sol. Un sourire en coin. “J’en avais envie depuis longtemps.” Il le croit, en tout cas. Il en est même persuadé. Depuis l'Afterlife. Elle ne ressent peut-être pas la même chose. Elle n’a peut-être pas envie de se lancer dans une relation, encore marquée par Ward. Elle ne s’attendait peut-être pas à un baiser. Alors, il est prêt à essuyer tous les coups qu’elle veut. Il est prêt à lui servir de puching-ball. Il est prêt à être envoyé balader. Il est prêt à tout accepter. Au moins, il l’a embrassée. Il l’a fait et il ne pourra pas avoir de regrets. Il retire les mains qu’il a instinctivement placé sur ses hanches. Il ne faudrait pas tenter le diable. Il ne faudrait pas lui donner une raison de plus pour le maltraiter sur le tapis, si cela devait arriver. “Certains ont simplement besoin d’avancer à leur rythme.” May et Coulson. Simmons et Fitz. Daisy et lui. Ils ne sont pas des rapides. Ils ont besoin de comprendre leurs sentiments. Ils ont besoin de mettre des mots dessus. Ils ont besoin de rassembler le courage de risquer une amitié pour révéler leur amour. Ils ont besoin d’évoluer doucement. Un peu comme eux deux.

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« Je n'y crois pas... Qui d'autre les a reçues ? » Lincoln a les sourcils froncés, il semble réfléchir à mille façons de torturer Erin. Parce qu'au fond, il se doute bien que si Daisy sait pour la vidéo des pikachus, c'est parce qu'Erin s'est empressée de la lui envoyer avec un malin plaisir. La jeune inhumaine esquisse un sourire narquois, elle baisse sa garde l'espace de quelques instants, juste le temps de pouvoir hausser les épaules, de lever les yeux vers le plafond, donnant l'impression de réfléchir. De compter, plus précisément. « Alors... » Elle lui jette un bref coup d'œil pour voir son état. Elle, ça l'amuse ce genre de choses, cette guerre qu'il mène contre sa coéquipière, alors qu'elle ne sait que trop bien que sous cette dernière se cache une couche d'affection. « Hunter et Mack l'ont reçue », lui dit-elle, se gardant bien de lui annoncer que c'est elle qui leur a montré la vidéo après l'avoir reçue. Elle se revoit faire passer son portable entre les mains de ses deux collègues, alors qu'ils éclataient de rire à l'unisson. « Après, je ne peux pas te garantir à qui Hunter l'a envoyée, mais il avait l'air particulièrement amusé. » L'histoire de Lincoln, ou celle de l'agent tombé en disgrâce. Lincoln, ou comment un agent a perdu toute crédibilité en trois click. Au Shield, il est définitivement fini et tout ça à cause d'Erin. Et de Daisy. Et de Hunter qui, elle le sait, s'est empressé de partager cette vidéo avec le reste de leurs collègues. « Oh, Fitz l'a reçue aussi. Certainement Hunter, comme je te le disais », s'exclame-t-elle en se souvenant de sa discussion avec le jeune scientifique. Elle laisse le temps à son partenaire de combat d'encaisser la nouvelle, même si elle sait qu'il devait s'en douter. « Estime-toi heureux, ça pourrait être pire. La vidéo aurait pu atterrir dans la boîte mail de Coulson. Ou pire. » Daisy marque une pause et fait de gros yeux, comme pour appuyer ses dires. « Dans celle de May. » Nouveau regard en coin. Elle prend son air le plus innocent et lui propose, l'air anodin : « Si tu as besoin d'aide pour te venger, je me rangerais de ton côté. » Cette fois. Une nouvelle fois, elle se garde bien de lui préciser cette pensée. Elle n'est pas suicidaire, Daisy, elle n'a pas envie de finir électrocutée ou que Lincoln prépare une suite de plans machiavéliques à exercer contre elle. De toute façon, il n'oserait pas. Si ? « J'entends que tu es complètement dérangée du cerveau et que tu as besoin de te défouler sur nous quand May te maltraite. » Ses yeux s'agrandissent comme des soucoupes et une petite moue se dessine sur son visage. Dérangée, elle ? Sans attendre plus longtemps, son poing s'écrase contre le nez de Lincoln et elle le repousse en lui donnant un autre coup dans le ventre. D'accord, ça, c'est exactement le genre de choses que ferait une personne dérangée. D'un geste du regard, elle défie l'inhumain de prononcer le moindre mot, d'émettre une nouvelle fois l'hypothèse qu'elle n'est pas normale. Les sourcils haussé, le regard vrillé dans le sien, elle a ce petit air arrogant qui la qualifie si bien. « Quelque chose à ajouter ? » Non ? C'est bien ce qui lui semblait.

Et comme si ça coulait de source, ils finissent par engager le sujet de conversation concernant May et Coulson. Parce que faut dire, c'est l'une des préoccupations centrales de la vie de Daisy, ces derniers temps. C'est vrai qu'elle a une certaine tendance à fourrer son nez dans les affaires d'autrui (et de ses deux supérieurs, surtout. Elle y prend d'ailleurs un malin plaisir), mais elle est bien incapable de s'en empêcher. Pourtant avant de mettre tout plan au point, elle veut savoir. Parce qu'elle sent bien que quelque chose se trame, entre ces deux-là et elle sait que si elle ne ressentait pas cette petite étincelle, elle ne tenterait rien. Soit dit en passant, cette dite étincelle, elle n'est pas la seule à l'avoir ressentie, à l'avoir remarquée. C'est pour ça qu'elle s'est liguée avec Ava, dans un premier temps, puis avec Sharon. Et quand elle en a parlé avec Jemma, cette dernière s'est aussi montrée relativement réceptive, preuve qu'elle n'hallucine pas. Quoiqu'il en soit, actuellement, elle n'en est encore qu'au stade du questionnement. Ou de l'harcèlement, tout dépend du point de vue. Et comme pour lui donner raison, aucun des deux ne l'ont détrompée. Ils se sont contenté de laisser flotter l'incertitude, qu'elle s'est empressée d’interpréter à sa façon. (Qui est la bonne, elle est certaine à deux-cent pourcent). Quand il réussit à la faire douter, elle décide de le mettre au tapis, parce qu'elle déteste ça : qu'il joue la voix de la sagesse et qu'il cherche à lui faire entendre raison. Pourtant, elle sait qu'elle en a besoin. Lincoln lui est plus que nécessaire, elle l'a compris il y a quelque temps, déjà. « Peut-être que ça les rassure d'être dans une relation qui n'engage à rien. » Peut-être. Elle voit où il veut en venir et elle ne lui donne pas tort, bien au contraire. Elle observe le jeune homme, détaille les traits bien dessinés de son visage qu'elle a presque envie de caresser. Étrangement, cette proximité avec lui ne la dérange pas, au fond de son ventre, elle sent qu'elle en a besoin. Qu'elle en a envie. Ses pensées ne sont plus très claires. « Raison de plus pour les secouer un peu », se contente-t-elle de lui répondre d'une petite voix, presque innocente. « Tu ne crois pas ? »

Elle se sent faible. C'est pas pour rien qu'avec Lincoln, les choses tardent. Si elle éprouve une confiance envers lui qui grandit un peu plus chaque jour qu'elle passe à ses côtés, il y a un doute qui subsiste. La trahison de Ward l'a marquée au fer rouge et chaque fois qu'elle a l'impression de réussir à passer au-dessus, ce dernier revient la hanter. Des rencontres inopinées, des discussions houleuses, un rien la fait chanceler. Pourtant à cet instant précis, alors que ses pupilles sont vrillées dans celles de Lincoln, elle est prête à s'abandonner. Elle est prête à laisser tomber tous les remparts qu'elle a érigés autour d'elle depuis la trahison de Grant. Le sentiment qu'elle éprouve est loin d'être nouveau. Ce qui l'est, c'est cette sensation d'être prête à le laisser entrer dans sa vie pour de bon. Et d'un simple geste, il lui fait comprendre que lui aussi. Quand ses lèvres caressent les siennes, le monde s'arrête de tourner autour d'elle. Rien n'a plus d'importance. Elle se sent stupide d'avoir fait traîner les choses en longueur, parce qu'elle se rend compte que la sensation qu'elle éprouve est plus qu'appréciable. « J’en avais envie depuis longtemps. » Doucement, elle relève le regard vers lui, alors qu'il laisse sa tête s'écraser contre le tapis. Elle se redresse légèrement, mais ne bouge pas, confortablement installée sur Lincoln. Un sourire farouche se dessine sur ses lèves et elle arque un sourcil. « Ah oui ? » Elle aussi. Elle en mourrait d'envie depuis un certain moment, déjà. Depuis quand exactement, elle serait pourtant incapable de le dire. Elle hésite un peu, puis finit par pencher légèrement la tête de côté. « J'ai l'impression que moi aussi. » Elle espère que le rouge qui lui monte aux joues n'est pas visible. Ça lui donne l'impression d'être une godiche. Quand elle sent les mains de Lincoln glisser de ses hanches, elle se penche dangereusement vers lui. Difficile d'arrêter, lorsqu'on a goûté une première fois aux lèvres de Lincoln Campbell. « Certains ont simplement besoin d’avancer à leur rythme. » Elle se redresse une nouvelle fois avant d'avoir eu le temps de se laisser aller à son envie de l'embrasser à nouveau. Elle pense d'abord à eux. Puis automatiquement à Fitz et Simmons, à May et Coulson. Il a entièrement raison. Daisy se rend compte que, si jusqu'à présent, rien n'était encore arrivé entre eux deux, c'était parce qu'ils avaient besoin d'être certains. Certains de ne pas passer à côté de quelque chose d'autre, d'une amitié qui aurait été gâchée et surtout de ne pas se brusquer. « Pour ma part, je pense avoir assez attendu. » Elle est sûre d'elle, cette fois-ci.


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Erin a vraiment le don de lui pourrir la vie. Quand à l’école, les enseignants lui demandaient ce qu’elle ferait plus tard, elle répondait ‘chieuse professionnelle’. Elle a réussi. Elle a atteint son objectif. Super. Génial. Est-ce qu’elle pourrait embêter quelqu’un d’autre ? Ce serait vraiment appréciable. Bon, de toute manière, il ne compte pas faire sa carrière au S.H.I.E.L.D. Il n’est ici que pour faire plaisir à Daisy. Que pour lui rendre service. Que pour lui permettre d’aider d’autres inhumains. Il pourra bientôt repartir vivre sa vie de médecin. Ou bien, il sera forcé. Vu comme c’est parti, il sera bientôt la risée de toute l’organisation. Il comprend mieux certains regards. Il comprend mieux certains chuchotements. Il est temps qu’il passe à l’offensive. Il a assez regardé. Il a assez pris de coups. Il est temps qu’il élabore un plan machiavélique pour l’achever. Il ne peut pas éternellement être le mec maltraité. Il faut inverser les rôles. “Alors...” Alors quoi ? Il y en a tant que ça ? Il est découragé d’avance. Il sent que la liste va être longue. Il sent déjà l’envie de meurtre monter en lui. La cafetière qui grille, ce n’est rien comparé à ce qu’il compte faire à Erin. Attention à ses petites fesses. Il va arrêter de la protéger. Il va arrêter d’attaquer pendant qu’elle s’occupe de leur protection. Elle se débrouillera toute seule pendant les missions. C’est décidé. “Hunter et Mack l'ont reçue.” Nooon, pas Hunter ! Il est encore pire qu’Erin. Il est encore que Daisy. Quant à Mack, il a confiance en l’agent. Jamais il ne l’aurait transférée à quelqu’un. Jamais. Il ne peut pas en dire autant de Daisy et Hunter. Les deux pires agents du S.H.I.E.L.D. pour faire des conneries et attirer les ennuis. C’est bon. Sa carrière est officiellement foutue. Il va songer à faire sa valise dès la fin de cet entraînement. Histoire de se sauver avant d’être moqué de tous les côtés. Il faudra aussi qu’il coupe la connexion Internet, tiens. Erin ne pourra plus faire de recherches, comme ça. Il lui supprimera aussi son téléphone. En fait, plus simplement : il va l’enfermer dans une des cellules. Au moins, il sera débarrassé d’elle. “Après, je ne peux pas te garantir à qui Hunter l'a envoyée, mais il avait l'air particulièrement amusé.” Il esquisse une grimace. Il a compris. Hunter l’a diffusée ‘sans faire exprès’ à tout le monde. Au monde entier, même. Il en serait capable. Lincoln est entouré de gens qui lui veulent du mal. La preuve ! Ils le persécutent, ils le harcèlent, ils l’embêtent. C’est injuste ! “Oh, Fitz l'a reçue aussi. Certainement Hunter, comme je te le disais.” Fitz aussi ? Bordel. La liste s’arrête quand ? Est-ce qu’il y a encore beaucoup de monde au courant de cette vidéo ? Pas Hill. Pas Coulson. S’il vous plaît. S’il vous plaît. Le pire dans tout ça est probablement le fait que Daisy ait aidé à propager la vidéo. Elle s’est sûrement assurée que les gens la voient. La trahison n’en est que plus douloureuse.

Estime-toi heureux, ça pourrait être pire. La vidéo aurait pu atterrir dans la boîte mail de Coulson. Ou pire.” Ou pire. Ou pire quoi ? Qu’est-ce qui peut être pire que tout le S.H.I.E.L.D. ? Finalement, il a peut-être une idée… Non, ce n’est pas possible. Elle ne peut pas avoir vu la vidéo. Elle ne peut pas l’avoir reçue. Elle ne peut pas s’être amusée devant. Il en a des frissons rien que dit penser. “Dans celle de May.” Il avale difficilement sa salive. Cette histoire ressemble à un mauvais film d’horreur. Que Hill ou Coulson la reçoive, il peut l’accepter. Il peut faire sa vie avec cette idée. Mais que May le sache… Elle va se moquer de lui. Elle va en jouer pendant les séances d’entraînement. Elle va le lui ressortir. Elle va avoir son petit sourire amusé et psychopathe. Non, pas May ! Pitié ! “Si tu as besoin d'aide pour te venger, je me rangerais de ton côté.” Lincoln efface l’image de May de ses pensées. Vraiment ? Daisy voudrait l’aider. Il sait pourquoi. Il a une petite idée de la raison. Elle se sent responsable. Évidemment qu’elle se sent responsable. Pour lui, il est clair qu’elle a joué un rôle dans la diffusion de la vidéo. Elle a été une des conspirateurs. Son visage le crie haut et fort. “Ce ne serait pas, par hasard, parce que tu te sens coupable ? Et ne le nie pas ! Je sais que tu as transmis la vidéo, ça se voit sur ton visage.” Elle ne peut pas mentir là-dessus. Elle ne peut pas lui cacher la vérité. Ses traits la trahissent déjà. Elle est amusée, ça se voit. Il ne peut même pas compter sur le soutien de la jeune femme. Il ne peut même pas espérer qu’elle empêche Erin de faire ses conneries. Au contraire, elle l’encourage. Il est donc seul contre le reste de l’organisation. Seul contre tous. Il se venge en exprimant ce qu’il pense sur sa santé mentale. Elle est dérangée. Complètement dérangée. Il n’y a qu’à voir les trucs fous qu’elle fait. Il n’y a qu’à voir son humour complètement décalé. Elle est folle. Tout le monde le sait, mais personne n’ose le lui dire. Il ne faut jamais vexer un fou, sinon il peut péter un câble. Ou vous frapper au visage. La douleur explose dans son nez. Pas le temps de s’en remettre. Elle lui assène un nouveau coup dans le ventre. Il lâche un “ouch”. Le souffle coupé. Le nez explosé. Elle va l’achever sur le tapis. Au moins, il n’aura plus à subir les vidéos d’Erin. Ce serait un vague réconfort. Il se redresse, non sans une grimace. Il cherche sa respiration. Il cherche à reprendre ses esprits. Il a le nez en feu. L’estomac défoncé. Quand il dit qu’elle est comme May, il le pense. Aussi cruelle et agressive. Aussi intraitable et insensible. Avec l’humour en plus. “Quelque chose à ajouter ?” Il en aurait des choses à rajouter. Sauf qu’il préfère s’abstenir. Il préfère garder le silence. Il préfère ne pas tenter le diable. Pour autant, il reprend la parole. “Tu es la meilleure cheffe de la Terre entière et j’ai de la chance de t’avoir comme supérieure.” Il esquisse un sourire ouvertement ironique. Il faut bien qu’il joue les lèches-culs après ce qu’il vient de lui dire. Si avec cela, il peut échapper à une nouvelle attaque surprise, il est gagnant. Ses compliments ne suffisent pas à lui épargner la chute. Ça aurait été trop beau.

Sous couvert de parler de May et Coulson, autre chose se passe. Une discussion à demi-mots. Une discussion pleine de sous-entendus. Une discussion dont les personnages principaux ne sont finalement pas les deux parents de substitution. Il ne la quitte pas des yeux. Parce qu’ils sont là, l’un contre l’autre. Cette espèce d’attirance qu’il repousse à chaque fois est de retour. Cette attirance qui l’incite à rester sagement en place. Cette attirance qui prend naissance dans son estomac encore retourné par son coup. “Raison de plus pour les secouer un peu. Tu ne crois pas ?” Dans le fond, elle a peut-être raison. Ils ont peut-être besoin d’un coup de main. Ils ont peut-être besoin qu’on leur ouvre les yeux. Peut-être. Mais tous n’ont pas besoin d’aide. Certains ne veulent pas être forcés. Certains veulent être libres d’agir quand et où bon leur semble. Comme eux. Ils sont là, allongés sur le tapis. Ils auraient pu s’embrasser n’importe quand, n’importe où. Ils auraient pu faire le premier pas à n’importe quel moment. Ils auraient pu se sauter dessus hier, il y a deux semaines, il y a un mois, il y a un an. Mais ils ont choisi ce jour-là. Jusqu’au moment où l’attente est devenue trop longue. Jusqu’au moment où la période s’y prête. Jusqu’au moment où ils se sentent prêts. Lèvres contre lèvres. Comme une évidence. Comme un besoin naturel. La tension disparaît. Il n’a pas peur de la blesser. Il n’a pas peur de perdre le contrôle de son pouvoir. Il n’a pas peur de devenir un monstre. Pas quand elle est là, à ses côtés. Pas quand elle est là, pour veiller sur lui. Il n’y a plus rien qui compte. Sauf le baiser. Sauf elle. Pas de moqueries. Pas de coups. Pas de gêne. Seulement des regards remplis d’affection. Seulement le sourire malicieux de Daisy. Il ne peut retenir le sourire amusé qui se profile sur ses propres lèvres. Elle ne peut jamais être sérieuse. C’est ce qu’il apprécie chez elle. C’est ce qu’il chérit en elle. “Ah oui ?” Oui. Il en avait envie depuis longtemps. Comme un besoin qu’il devait satisfaire. Comme une nécessite à laquelle il devait répondre. Comme une envie qu’il repoussait, qu’il écartait, qu’il refusait. La peur de l’inconnu. La peur du rejet. La peur de tout. “Oui…” Elle se moque. La lueur dans son regard le dit. Elle peut bien se moquer autant qu’elle le veut. Il s’en fiche. Il est bien, là. Finalement, il a attendu ce moment depuis trop longtemps pour ne pas le savourer. Pour se laisser atteindre par la taquinerie de Daisy. Pour se vexer de son sourire. “J'ai l'impression que moi aussi.” Elle se penche au-dessus de lui. D’un coup. Sans prévenir. Il a presque l’impression que l’expérience va être tentée une seconde fois. Il a presque l’impression qu’elle veut se servir une nouvelle dose d’embrassade. Mais il la coupe dans son élan. Pour lui rappeler qu’ils sont tous différents. Pour lui rappeler que les autres futurs couples ont besoin d’espace, de temps. Pour lui rappeler qu’ils ont attendu, eux aussi. Tout ne s’est pas passé du jour au lendemain. Tout ne s’est pas fait rapidement. Elle a le fantôme de Ward. Il a le fantôme de sa dernière petite-amie. Qu’il a failli tuer dans un accident de la route. Ce n’est pas le genre de chose que l’on oublie facilement. Ce n’est pas le genre de chose qui donne envie de retenter l’expérience. “Pour ma part, je pense avoir assez attendu.” Ils sont d’accord. Ils ont repoussé assez longtemps l’échéance. Ils ont repoussé trop longtemps le moment d’avancer l’un vers l’autre. Ils y sont. Ils ont sauté à pieds joints. Ensemble.

L’attente valait la peine. L’attente était nécessaire pour chacun fasse le deuil de leurs démons. Pour que chacun abandonne les erreurs du passé. Pour que chacun tourne la page. C’était nécessaire. C’était vital. Ils sont prêts maintenant. Il replace ses mains sur la jeune femme. Sur un corps qu’il va devoir apprendre à connaître. Sur un corps où il ne cherchera plus les faiblesses physiques. Sur un corps qu’il ne devra plus seulement mettre au tapis. Même si jusqu’à aujourd’hui, c’est plutôt l’inverse qui a lieu. L’envie de reconquérir ses lèvres est forte. L’envie de laisser parler les sentiments l’est tout autant. Mais il se contente de sourire. Il se contente de ne pas lâcher ses prunelles foncées une seconde. Il se contente de profiter de cette communion. De ce lien qui prend naissance. De cette attirance qui prend enfin forme. “Est-ce que… ce baiser me dispense d’entraînements ?” Parce qu’il faut parler d’un sujet sérieux. Parce qu’il faut bien trouver un avantage à embrasser la cheffe. Parce qu’il faut bien qu’il trouve une contrepartie, dans cette histoire.

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Quand Daisy lui expose les faits, lui fait part de ce qu'elle sait au sujet de cette maudite (tout dépend du point de vue, selon Daisy) vidéo qu'Erin lui a très sagement envoyée et qu'elle, en tant que chef extrêmement mature, s'est sans grande surprise empressée de faire tourner au sein du Shield, elle a l'impression que Lincoln est sur le point de défaillir. Défaillir ou prêt à étrangler le fin cou d'Erin si jamais elle vient pointer le bout de son nez dans la pièce. Pendant qu'elle énumère les noms des personnes ayant eu la chance de voir cette magnifique vidéo de pikachus se dandinant, elle se remémore la mine malicieuse arborée par Hunter même si elle n'en dit rien à Lincoln, elle sait qu'il se doute de l'aide non négligeable apportée dans le transfert de cette vidéo. C'est vrai qu'avec Hunter, elle fait la paire et niveau maturité, ils semblent battre des records. Elle comprend un peu mieux pourquoi Mack refuse de les laisser seuls : à deux, ils seraient capables de mettre le Shield sans dessus-dessous. Un peu comme Lincoln et Erin, en somme, ce qui prouve que dans le fond, elle a beau être montée en grade et avoir écopé du rôle de chef d'équipe, elle n'en a pas moins changé. Le meilleur moment dans cette conversation, c'est celui où elle le pousse à se rendre compte que la situation aurait carrément pu être tragique, genre vraiment, si May avait reçue cette fameuse vidéo. Elle voit la tête de Lincoln qui se décompose un peu plus (même si elle ne pensait pas que c'était possible) et elle esquisse un sourire en coin, lui proposant son aide de façon la plus anodine qui soit pour le venger auprès d'Erin. Après tout, c'est pas ça être chef d'équipe ? Tirer bénéfice de chaque situation pour se fendre la poire sur le dos de ses apprentis ? Non ? Tant pis, elle le fait quand même. De toute façon, elle s'en fiche, tant qu'Hunter et elle peuvent se bidonner comme des baleines devant une bière en se racontant les dernières anecdotes de cette querelle. « Ce ne serait pas, par hasard, parce que tu te sens coupable ? Et ne le nie pas ! Je sais que tu as transmis la vidéo, ça se voit sur ton visage. » Daisy hausse doucement les sourcils et prend l'air le plus surpris qu'elle possède en magasin. Elle, faire une telle chose ? C'est une accusation scandaleuse. « Quoi ? N'importe quoi. » Elle laisse un court silence s'installer avant de rajouter, regardant Lincoln du coin de l'œil : « T'as aucune preuve de ce que t'avance. » Ou comment s'incriminer un peu plus. Bon, dans le fond elle s'en fiche un peu que Lincoln sache ou pas qu'elle a participé à la propagation de cette vidéo, elle trouve ça drôle et elle est persuadée qu'avec un peu de recul (d'ici quelques années), Lincoln rigolera aussi quand on évoquera cette bonne période de leur vie. Presque innocente. « Tu es la meilleure cheffe de la Terre entière et j’ai de la chance de t’avoir comme supérieure », lui glisse-t-il ironiquement après avoir chuté au sol. Il aurait pu faire plus convainquant, surtout après lui avoir fait remarquer que sa santé mentale était légèrement défaillante. Après tout, même s'il a raison sur ce qu'il avance, même si elle est bien consciente que frapper sur autrui (et donc par extension sur Lincoln) la défoule et lui permet de canaliser ses émotions, elle ne l'avouera pas. Plutôt mourir que de lui donner raison. Si elle le faisait, il en profiterait et arborerait ce petit sourire entendu dont il a le secret.

Finalement, un joli imprévu vient se dessiner au tableau : les coups ont laissé place à quelque chose de bien plus plaisant. Ils s'abandonnent à ce qu'ils n'ont cessé de repousser ces derniers temps, une attirance qui, elle le savait, finirait par prendre le dessus à un moment ou un autre. Et si elle avait pensé que c'était passager, que ça s'estomperait, elle se rend à présent compte combien elle a été stupide. Ou naïve. Ou un petit peu des deux, en fait. Sous ces airs de discussion anodine au sujet d'une May et d'un Coulson qu'elle ne souhaite que voir heureux, il y a quelque chose d'autre. « Oui... » Elle l'observe attentivement, ses yeux parcourent chaque centimètre de son visage. Si Lincoln n'avait pas craqué, elle ignore combien de temps elle aurait encore tenu à jouer ce petit jeu. Une indifférence difficilement feinte, avec un regard parlant bien souvent à sa place. Pour peu, elle retenterait bien l'aventure une seconde fois, parce que maintenant qu'elle a goûté une première fois aux lèvres du jeune homme, elle ne garantit pas pouvoir s'en passer à nouveau. Mais il l'interrompt en évoquant les différentes paires de leur équipe. Si un jour on lui avait dit qu'elle sauterait le pas avec Fitz et Simmons, elle n'y aurait pas cru une seule seconde. Ces deux-là sont destinés à finir ensemble et même si leur chemin se croise et se décroise, ça n'a aucune importance. Elle se dit que si deux personnes sont faites pour être ensemble, elles finissent un jour ou l'autre par se retrouver. Peu importe que ça prenne deux semaines, six mois, un an, trois ans. Il suffit de regarder May et Coulson. Ils se connaissent depuis des années et pourtant, elle a l'impression qu'ils ne se sont jamais sentis aussi proches l'un de l'autre. Il leur aura presque fallu toute une vie pour qu'ils se trouvent réellement. A côté, les dix années durant lesquelles Fitz et Simmons se sont tournés autour lui paraissent superflues.

Alors, c'est certain, ils auront pris leur temps, mais en comparaison d'autres, elle se dit qu'elle est chanceuse. Chanceuse que Lincoln se soit bougé les fesses. Chanceuse de ne pas avoir attendu dix ans, vingt ans, trente ans. Chanceuse d'être passée à côté de Ward pour trouver Lincoln, comme une sorte d'enchaînement de choses plus inattendues les unes que les autres. Ses mains, son regard plongé dans le sien et finalement le son de sa voix sont un rappel à la raison. « Est-ce que… ce baiser me dispense d’entraînements ? » Daisy laisse échapper un léger rire qui vient perturber la quiétude dans laquelle est plongée la salle d'entraînement. Doucement, ses mains viennent se poser sur ses bras, glissent leur long pour venir s'arrêter sur ses épaules. Machinalement, ses doigts dessinent des petits cercles sur ces dernières. L'espace de quelques secondes, Daisy lève les yeux au ciel, donnant l'air de réfléchir à la question. Comme si c'était une chose qu'elle envisageait : comme aller voir un film plutôt que de se retrouver ici à administrer un coup de poing sur le nez du jeune homme, par exemple. L'idée était tentante, certes et ça faisait longtemps qu'elle n'était plus sortie pour faire quelque chose d'aussi ordinaire. Finalement, elle vrille à nouveau ses pupilles dans celles de Lincoln, hausse doucement les épaules : « Non. » Elle souligne sa réponse d'un joli sourire, presque enjôleur, puis lève les yeux au ciel, non sans se détacher de son sourire qui étire ses lèvres jusqu'aux oreilles. « Mais j'applaudis l'essai. Après tout, qui ne tente rien n'a rien, il paraît. » Nouveau haussement d'épaules. Elle se surprend à l'observer à nouveau, alors que ses mains se posent sur ses deux joues. Elle a certainement l'air encore un peu béat, mais elle s'en fiche pas mal. Il lui faut un certain temps avant de se ressaisir pour de bon, mais quand elle le fait, elle parvient à se redresser sur ses pieds et tend la main à Lincoln pour l'aider à son tour. « Si toutes nos séances se terminent comme ça, je propose qu'on s'entraîne même encore plus souvent », glisse-t-elle, l'air de rien. Elle le regarde du coin de l’œil et a ce petit sourire taquin qu'elle adore arborer. Oh, pour sûr, elle rigole, même elle ne supporterait pas plus d'entraînements qu'ils n'en ont déjà, mais elle ne peut s'empêcher de lui faire croire le contraire et prend un malin plaisir à observer son visage, tout en se donnant un air sérieux.


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Depuis le temps qu’ils se connaissent, il sait de quoi Daisy est capable. Du pire comme du meilleur. La transmission de la vidéo de Pikachu fait partie des pires choses. La traîtresse a eu l’audace de la partager et de la montrer à Hunter. Elle aurait pu choisir n’importe qui. Il a fallu qu’elle choisisse Hunter. Le seul qui serait capable de tout pour que la vidéo devienne virale dans tout le S.H.I.E.L.D. On peut sans aucun doute parler de sabotage de sa carrière. Il va falloir que Lincoln ait une conversation avec lui. Quoique, ce serait vain. Lance est pire que Daisy quand il s’agit de rire des autres. Il prendrait un malin plaisir de faire encore plus atroce la prochaine fois. Quitte à pirater tous les ordinateurs de l’organisation pour diffuser les images. Le mieux est encore de rester silencieux et de seulement s’en prendre à Erin. Après tout, elle est la source de tous ses problèmes. Avec ses techniques de gamine. Avec sa volonté de lui pourrir la vie. Qu’est-ce qu’il lui a fait, bon sang ? Il a toujours été sympa avec elle. Il a toujours été chaleureux et amical. Mais quand une personne ne vous aime pas, il est impossible de forcer les choses, n’est-ce pas ? Daisy s’en fiche. Elle s’en amuse, même. Alors qu’elle lui propose son aide pour se venger est assez drôle. Ou déplacé. A voir. Dans tous les cas, Lincoln ne compte pas lui demander son aide. Il va se débrouiller tout seul. Il a déjà quelques idées machiavéliques pour répondre à cette attaque personnelle. L’avantage d’avoir une coéquipière aussi immature qu’Erin, c’est qu’il améliore sa créativité et son ingéniosité tout le temps. Elle le pousse à avoir de l’imagination et à toujours se renouveler. Dommage pour Erin. Elle ne peut même plus prévoir quand la vengeance tombera et sous quelle forme elle arrivera. “Quoi ? N'importe quoi.” Non mais regardez-la ! L’innocence incarnée. Elle pourrait endormir n’importe qui avec son expression. N’importe qui, sauf Lincoln. Il croise les bras et pose un regard sévère sur elle. Elle se fiche de lui ! Il sait très bien quel rôle elle a joué dans cette histoire. Il lui suffira de cuisiner un agent choisi au hasard pour le découvrir. Pas besoin de nier ! “T'as aucune preuve de ce que t'avance.” Il lève les yeux au ciel. En fait, Erin et lui sont peut-être immatures, mais Daisy est pire. Bien pire ! Et dire qu’elle est leur supérieure. Ils devraient plutôt veiller sur ses petites fesses, plutôt que le contraire. Correction : Lincoln devrait, tout seul, surveiller les fesses d’Erin et de Daisy. Il semble le seul à être assez responsable dans cette équipe. Il ira en parler à Coulson et à Hill. Ils comprendront et ils verront. Enfin, peut-être pas Coulson qui serait du genre à voir sa petite Daisy comme une enfant parfaite. La directrice serait plus facile à convaincre. Lincoln lui balance un coup de poing dans l’épaule. “Tu pourrais au moins être plus crédible quand tu mens ! Surtout que je te connais…” Elle est censée être une agente surentraînée, même lui ment mieux qu’elle ! Faut croire qu’elle est incapable de garder son sérieux quand il s’agit de plaisanteries. Cette femme est intenable avec son comportement de gamine. Mais après tout, est-ce que ce n’est pas ce qui fait son charme ?

Sans aucun doute. C’est ce qui fait son charme et c’est même une raison qui le pousse à accrocher ses lèvres. A arborer ce sourire idiot. Ils ont eu cette proximité des centaines de fois pendant des missions ou des entraînements. Pourtant, c’est seulement aujourd’hui qu’ils sautent le pas. Seulement aujourd’hui qu’ils se rapprochent un peu plus. Ils ont attendu. Moins longtemps que May et Coulson, que Simmons et Fitz. Mais ils ont attendu. Ce baiser sonne la fin de cette attente. Le début de quelque chose d’autre. Quoi exactement ? Cela reste à découvrir. Même le rire de Daisy sonne autrement, maintenant. Son rire, la lueur dans son regard, son expression. Elle n’est qu’à quelques millimètres de lui. Ses lèvres, sa peau, sont atteignables. Il n’osait pas les toucher avant, trop soucieux de leur laisser du temps. Le temps est passé. Le temps est terminé. Il peut se permettre ces contacts. Il peut s’autoriser à l’embrasser. Il peut laisser ses mains traîner trop longtemps sur ses hanches. Il peut apprécier son corps sur le sien. Une proximité à laquelle ils ont le droit. Il a le coeur qui bat la chamade. Sûrement grisé par le rapprochement. Sûrement heureux du changement. Il ne la lâche pas des yeux, comme si elle pouvait disparaître, comme si Daisy n’était qu’une illusion. Peut-être qu’elle pourrait disparaître d’une seconde à l’autre. Peut-être qu’il est en train de rêver. Peut-être. Pourtant, sous ses doigts, il sent bien la peau de Daisy. Pourtant, sur ses lèvres, il sent bien leur baiser. Si c’est une hallucination, elle est particulièrement réaliste. “Non.” Allez, Daisy ! Pour une fois que Lincoln aurait pu apprécier qu’elle soit immature, il faut qu’elle joue la cheffe sérieuse. Il pousse un soupir d’agacement, même si son sourire exprime le contraire. Chaque moment avec elle va devenir important. Chaque moment en privé va être précieux. Tant pis si ce sont des entraînements sur fond de torture. “Mais j'applaudis l'essai. Après tout, qui ne tente rien n'a rien, il paraît.” Des félicitations, ben voyons ! Il aurait préféré une réponse positive plutôt que des applaudissements. Tant pis. Il essayera la prochaine fois. Peut-être que si il l’embrasse une nouvelle fois, elle changera d’avis ? Ils se perdent dans la contemplation de l’autre, perdus dans un bonheur que seuls les couples connaissent. Un bonheur où chacun essaye de mémoriser les détails de la scène. Un bonheur qui trouve échos dans le regard de l’autre. Un bonheur qui vous protège de tout. Un bonheur que seules ces deux personnes connaissent. Un bonheur qui fait naître une certaine complicité, un lien unique. “Je reviens sur ce que j’ai dit tout à l’heure : t’es la pire cheffe de la Terre entière.” Elle est intraitable et tyrannique. Son premier avis était donc le bon. Il peut même ajouter irresponsable à la description. Peut-être même puérile, violente, agressive. Tentatrice, aussi. Finalement, Daisy le libère et ils se relèvent. Pour autant, Lincoln ne reprend pas sa position initiale de combat. Il reste à proximité de la jeune femme. Impossible de se séparer. Impossible de reprendre le cours de leur entraînement. Impossible de faire comme si de rien n’était. “Si toutes nos séances se terminent comme ça, je propose qu'on s'entraîne même encore plus souvent.” Il a un sourire en coin. L’idée lui plaît. Qu’est-ce que quelques coups quand, au final, si il peut obtenir quelques étreintes ? Il est prêt à finir au tapis autant de fois que nécessaire, si cela lui permet de passer un peu de temps avec elle. Il fait mine de réfléchir à sa proposition. Finalement, il ne passera jamais entre les de mains de May. Il sera définitivement pris en charge par Daisy et sa méthode particulière pour le faire évoluer.

Il fait un pas en avant. Réduisant à néant les quelques centimètres qui les séparent. Rapprochant encore leur corps. Il retire l’un de ses gants pour laisser les doigts s’aventurer dans la nuque de Daisy. Sans préoccupation pour les personnes qui pourraient arriver. Sans inquiétude pour les caméras qui pourraient tourner. Il ignore si les relations entre agents sont bien vues ou pas. Il ignore si il risque des sanctions. Il est loin de ses préoccupations. Tout aussi irresponsable et insouciant que Daisy. Il n’y en a pas un pour rattraper l’autre, dans cette équipe. “Si nos séances se terminent toutes comme ça, je pourrais commencer à les apprécier. Même si je préférerais que l’on passe directement à la fin...” La partie la plus plaisante. La partie la plus agréable. Pas besoin de se frapper et d’ajouter quelques hématomes à leur collection. Ils peuvent juste se trouver un coin tranquille. Il appuie son front contre le sien. Le baiser ne doit pas tout changer. Pas ce qu’ils ont déjà construit ensemble. Pas leur amitié. Pas leur relation professionnelle. Ils doivent continuer comme avant. Seulement avec un plus. Seulement avec un supplément. Trouver le juste équilibre entre le professionnel et le privé. Ce sera le plus dur. Enfin, à supposer qu’il y ait une histoire qui les attende derrière. “T’es prête pour ça ?Ça. Un couple. Une histoire d’amour. Une relation sentimentale. La question est adressée à Daisy, mais si il se la pose aussi. Ils ont tous les deux un passif difficile pour des raisons différentes. Ils ont tous les deux des raisons d’avoir peur, d’hésiter, de reculer. Il croit être prêt. Il croit pouvoir tout lui donner. Bien plus qu’il ne l’a jamais fait avec une autre femme. Elle est la bonne personne. Il le croit.

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« Tu pourrais au moins être plus crédible quand tu mens ! Surtout que je te connais... » Les lèvres de Daisy se tordent en une grimace qui ne prouve que d'autant plus sa culpabilité et elle hausse doucement les épaules. Elle solde le tout par un regard pétillant de malice qu'elle vrille en direction de Lincoln qu'elle doit certainement exaspérer. C'est qu'elle se surprend à le plaindre sincèrement, le pauvre : entre assumer au quotidien les frasques de sa coéquipière et le fait que Daisy ne trouve rien à y redire, malgré son statut de supérieure, cela ne doit pas être de tout repos. Le pire est sans aucun doute le fait qu'elle sache le sort qu'il subit et qu'elle se plaise à y prendre part, elle aussi. Lui mener la vie dure ne le tuera pas, après tout. C'est ce qu'elle se dit chaque fois qu'elle croise le regard mesquin d'Erin, que dans ses yeux brille la nouvelle blague qu'elle s'apprête à faire à Lincoln. Quoiqu'il puisse en dire, Daisy n'est pas l'initiatrice de tous ces plans établis pour le faire sortir de ses gonds et en soi, c'est déjà pas mal. Regarder de loin l'amuse déjà assez, y participer de temps à autre aussi. « C'est tellement facile de te faire sortir de tes gonds », finit-elle par se justifier en faisant la moue pour essayer de l'amadouer. « Ce serait un crime de ne pas le faire. » Et pour ponctuer sa phrase, elle hoche positivement la tête, comme pour se donner du crédit. La preuve que tout ce qu'elle dit est purement véridique, même Hunter participe à toute cette histoire et avec un plaisir non dissimulé !

D'une situation parfaitement anodine, de plaisanteries et d'entraînements, ils passent à quelque chose de bien plus personnel. Quelque chose que tous les deux attendent depuis pas mal de temps, déjà. Peut-être sans réellement en avoir pris conscience jusqu'à aujourd'hui. Daisy se dit qu'elle a été trop focalisée sur sa vendetta envers Ward, trop préoccupée par Fitz et Simmons et son envie de les réunir une bonne fois pour toute, par Coulson et May. Elle a été si occupée par les autres qu'elle a fini par s'oublier elle-même, par se cacher derrière des arguments bidons pour justifier cette attirance éprouvée envers Lincoln. Pas le temps, pas prête, pas autorisé, pas réciproque. Elle ne s'était jamais réellement remise en question à ce sujet avant aujourd'hui, avant ce baiser échangé, bien trop plaisir pour être relégué au simple rang d'accident ou de dérapage. « Je reviens sur ce que j'ai dit tout à l'heure : t'es la pire cheffe de la Terre entière. » Elle ouvre la bouche, prend un air faussement outré. Elle pourrait le torturer jusqu'à-ce qu'il lui dise que c'est faux, qu'elle est la meilleure dans son domaine et que les entraînements en sa compagnie sont de véritables parties de plaisir. « Et toi tu es l'un des pires élèves de la Terre entière. Tu te sers de... » Elle marque une pause, fait un vaste geste de la main pour les désigner, pour désigner ce qu'il s'est passé entre eux deux. « Tout ça pour essayer de m'amadouer. » Et il faut dire que ça lui plaît pas mal, que c'est une chose à laquelle elle pourrait s'habituer et prendre plaisir. Être soudoyée de baisers et autres gestes tendres pour éviter d'avoir à se battre. Elle ne fait pourtant pas partie de ces filles, ces romantiques inconditionnelles. Elle ne se l'est jamais réellement autorisé et ses plans d'avenir étaient autres jusqu'à il y a peu. C'était avant Lincoln.

Daisy suit chacun de ses gestes du regard, frissonne lorsque ses doigts viennent caresser sa nuque et elle se surprend à fermer les yeux quelques secondes pour se laisser bercer par cet instant privilégié. « Si nos séances se terminent toutes comme ça, je pourrais commencer à les apprécier. Même si je préférerais que l'on passe directement à la fin... » La fin... La partie qui finira par l'obnubiler, s'il continue à la regarder avec ces yeux-là... Elle rouvre les yeux, pose ces derniers sur le jeune blond. Dans sa cage thoracique son cœur bat la chamade malgré elle, malgré toutes les tentatives de se ressaisir. Elle peut faire face à toutes sortes de situation dangereuses, mais se retrouver à une telle proximité de Lincoln semble relever de l'impossible. Doucement, son front vient à la rencontre du sien, elle ferme à nouveau les yeux à ce contact qui empli son corps d'une chaleur rassurante. Autour d'elle, le monde s'arrête de tourner, il n'y a plus que Lincoln et elle. « T'es prête pour ça ? » Ça. Ça, c'est une version bien vague de la chose. Ça, ça veut tout et rien dire en même temps. Daisy rouvre les yeux et les plante dans ceux du jeune inhumain.Quelque chose se déclenche au fond d'elle-même, une alarme, un réveil, elle ne sait trop quoi. Elle connaît déjà la réponses à sa question, mais ses lèvres restent scellées. Ses pensées se tournent vers Coulson, vers May et par extension vers le règlement. C'est interdit. Les relations entre collègues sont prohibées. Elle s'en fiche comme du siècle dernier, ça n'a aucune importance à ses yeux. Une chose dont elle doute, cependant, c'est la réaction du directeur adjoint du Shield ou de May. Transgresser les règles, c'est pas trop leur truc à eux et si Daisy peut encaisser la moindre réflexion de leur part, peut-être même les faire plier, est-ce le cas de Lincoln ? « La question, c'est plutôt : est-ce que tu es prêt à me supporter pour de bon ? » On lui a souvent dit qu'elle pouvait être insupportable, c'est vrai. Pourtant, ce n'est pas réellement ça le problème. « Toi, est-ce que t'es prêt ? » Elle observe chaque mimique qu'il pourrait adopter et l'aiguiller sur le fond de ses pensées. Elle est prête, elle n'a pas peur. Elle peut lire d'avance la réponse dans le regard qu'il lui offre, mais préfère l'entendre de vive voix.


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Cette femme est insupportable. Une gamine dans le corps d’une femme. Comment est-ce qu’il a pu tomber sous son charme ? Comment il a pu succomber à ses yeux foncés ? Elle est un être machiavélique qui est venu à bout de ses réticences, à coup de gamineries, de sourires et de rires. Complètement machiavélique, je vous dis ! Et lui, en homme faible et dépendant de l’amour d’une femme, il ne peut résister. Il ne peut pas fermer les yeux. Il ne peut pas faire semblant qu’elle n’existe pas. Que voulez-vous ! Mais maintenant, il regrette. Il regrette de nourrir des sentiments pour elle. Il regrette de lui avoir fait confiance. Il regrette de l’avoir suivie. Et personne ne pourrait l’en blâmer ! Vous avez vu ce qu’il doit supporter ? Une pression monumentale chaque jour. Un regard critique au quotidien. Une comparaison perpétuelle avec Pikachu. Un être jaune mi-souris mi-chat. Et il est censé s’épanouir avec cette comparaison ? “C'est tellement facile de te faire sortir de tes gonds. Ce serait un crime de ne pas le faire.” Ben voyons ! Ce serait juste faire preuve de maturité. Ce serait juste exercer son rôle de supérieure. Elle devrait interdire à Erin l’accès à Internet. Et même à tous les ordinateurs. En l’enfermant dans sa chambre. En lui interdisant le dessert. Erin doit apprendre à respecter ses collègues. Lincoln en premier. Le pauvre souffre d’un harcèlement constant. Tous les jours, il s’inquiète de savoir ce qu’il va trouver dans sa boîte mail. Une nouvelle vidéo ? Un nouveau message ? Une nouvelle blague ? Le stress monte dès qu’il s’approche d’un ordinateur. Le stress monte dès qu’il ouvre sa messagerie. Le stress monte dès qu’il croise le regard vicieux d’Erin. On ne dirait pas comme ça, mais elle a un regard de psychopathe. Parfois, il sent ses yeux dans son dos quand il s’éloigne. Parfois, il jure qu’elle lui fait des clins d’oeil quand ils se croisent. Elle est flippante ! Il dresse un doigt entre eux. “Je te rappelle qu’elle m’envoie des vidéos de Pikachu. C’est… dégradant et elle manque de professionnalisme !” Daisy a besoin de cours de management, c’est ça le truc. Elle a besoin d’être formée. Elle a été propulsée à la tête d’une équipe sans savoir comment gérer les caractères de chacun. C’est tout. Il n’y a pas de mal à cela. Il faut juste… qu’elle suive l’exemple de Coulson, tiens. Lui ne prendrait pas part aux plaisanteries de ses agents. Enfin, il faut l’espérer. Il est vrai que le co-directeur a souvent le talent pour adopter un comportement détendu, voire enfantin, quand on ne l’attend pas. Dans tous les cas, Daisy doit apprendre à faire la part des choses. On peut embêter Erin, mais pas Lincoln. Point.

Il parvient à oublier toute sa rancoeur et tout son mécontentement en s’accrochant aux lèvres de la jeune femme. Des baisers dont il a rêvés. Des baisers dont ils rêvaient tous les deux. Des baisers qui ne suffisent pas à acheter Daisy. Toujours aussi intraitable. Toujours aussi dure. Alors, elle accepte de participer à des plaisanteries puériles, mais dès qu’il s’agit de favoriser Lincoln, il n’y a plus personne ! Il y a du favoritisme dans l’air. Il croise les bras sur son torse. Pour bien marquer son mécontentement. Pour bien jouer la comédie. “Et toi tu es l'un des pires élèves de la Terre entière. Tu te sers de… Tout ça pour essayer de m'amadouer.” Il éclate de rire. Ben voyons ! Elle ose sous-entendre qu’il la manipule, qu’il utilise leur rapprochement. Si vraiment il l’utilisait, il lui demanderait d’arrêter de jouer le jeu d’Erin. Il en profiterait aussi pour qu’elle le nomme meilleur recrue de tout le S.H.I.E.L.D. Mais il ne le fait pas. Alors, on peut décemment dire qu’il ne profite pas de la situation. “J’hallucine ! C’est toi qui en profites pour me tripoter !” Il ne se souvenait pas qu’elle était d’une si mauvaise foi, quand ils étaient à l’Afterlife. Elle était quelqu’un de tout à fait normal et d’équilibré. Enfin, aussi équilibrée que peut être cette femme. Vivre aux côtés de Hunter a eu raison de sa santé mentale. Il a une terrible influence sur elle. Il faudrait les séparer, ces deux-là. Non, en fait, il faudrait séparer Erin, Daisy et Lance. Les envoyer tous les trois à un bout du monde, avec l’interdiction de se contacter. Et alors, seulement, Lincoln pourra être tranquille. Bon, on le fait quand ? La conversation bascule vers un sujet plus sérieux. Vers des préoccupations plus légitimes. Ce couple. Ils l’ont désiré depuis des mois. Ils l’ont voulu depuis longtemps. Mais est-ce qu’ils sont prêts ? Daisy a le plus lourd bagage, avec Grant. Faire confiance à quelqu’un d’autre est difficile. En particulier lorsque son ancien crush s’est révélé être un traitre pas très sympathique. Lincoln, lui, doit faire face à des démons dont il s’est presque débarrassé. Avec le temps, la cicatrice s’est refermée. Elle est encore vive, à certains moments. Majoritairement, elle reste un mauvais souvenir. “La question, c'est plutôt : est-ce que tu es prêt à me supporter pour de bon ?” Il fait une moue. Très bonne question. Elle a tendance à être insupportable. Elle a tendance à faire des blagues. Elle a tendance à manquer de maturité. Elle a tendance à être fofolle. Et c’est ça qu’il apprécie chez elle. Cette femme battante qui cohabite avec une gamine. Elle sait profiter de la vie comme il ne l’a jamais fait. A l’Afterlife, il lui avait montré une facette de la vie. Une vie isolée de tous. Une vie protégée des menaces. Ici, elle lui dévoile les contours d’un autre genre de vie. Une vie dangereuse. Une vie dévouée à la cause des inhumains et au service d’une organisation censée être démantelée.

Toi, est-ce que t'es prêt ?” Il s’écarte pour faire quelques pas. Pour s’écarter de l’emprise qu’elle a sur lui. Pour réfléchir à ce que tout cela implique. Sentimentalement, il est libre, il est prêt. Psychologiquement, il l’est moins. Il va devoir affronter la pire belle-famille qui soit : le couple Coulson/May. Autant vous dire que ce ne sera pas de tout repos. Autant vous dire qu’il ne va pas s’ennuyer. Il va devoir faire ses preuves. À chaque instant. À chaque seconde. Sous leur regard protecteur. Le moindre geste sera épié, décortiqué, jugé. Le moindre mot sera écouté, analysé, enregistré. Il y a aussi le règlement. Sortir avec Daisy équivaut à envoyer balader les règles. Depuis qu’il a mis les pieds au S.H.I.E.L.D., il a démontré une vraie passion pour la rébellion et la transgression des consignes. Ce n’est pas maintenant qu’il va se ranger du côté de la direction. Il est venu ici pour suivre Daisy. Pour être près d’elle. Pour veiller sur elle. Il ne va pas s’effrayer. Il ne va pas fuir. Il ne pas lui tourner le dos à cause des conséquences. Il finit par revenir près d’elle. Un sourire aux lèvres. Il est en paix avec la décision qu’il prend. Il est en paix avec lui-même. Quoiqu’il arrive, il assumera. “Je suis prêt.” Prêt à la suivre n’importe où. Prêt à la supporter. Prêt à accepter les regards possessifs de ses parents de coeur. Prêt à se lancer dans cette relation. Peut-être qu’elle ne mènera à rien. Peut-être qu’elle ne ressemblera pas à ce qu’ils imaginaient. Dans tous les cas, ils auront essayé. Ils se seront donnés les moyens. “On devra être discrets pour ne pas avoir d’ennuis.” Il pourrait être viré, il s’en ficherait. Être agent au S.H.I.E.L.D. n’a jamais fait partie de son plan de carrière. Il comptait rester à l’hôpital pendant des années. Jusqu’à la retraite, même. Il avait même pensé à faire quelques missions humanitaires à l’étranger. Alors, s’ils ne peuvent plus travailler au même endroit, il n’hésitera pas à partir. Le S.H.I.E.L.D. est devenu une vraie maison pour Daisy. Elle ne voudra jamais partir. Elle ne voudra jamais laisser son ancienne et sa nouvelle équipes. Il ne pourra pas le lui demander. Néanmoins, il sait d’avance que la discrétion ne sera pas facile. Ils sont entourés d’agents surentraînés. Ils sont tous capables de déceler des comportements étranges ou des mensonges. Sans compter les nombreuses caméras. Sans compte que Daisy et Lincoln vivent au S.H.I.E.L.D.. La discrétion est impossible. Quand bien même ils y arriveraient, ils se trahiraient en mission. Quand l’un sera en danger, l’autre voudra le sauver. Au péril de sa vie. Remarque, ça ne changera pas d’avant. Et avec un peu de chance, elle aura pitié de lui et essayera de temporiser les excès de gaminerie de l’équipe. Avec un peu de chance. “Mais ça ne veut pas dire qu’on ne pourra pas faire tous ces trucs de couple…” Les dîners romantiques. Les sorties en tête-à-tête. Les projets. Les discussions sans fin. Des trucs normaux. Des trucs qu’ils ont presque oublié en travaillant sans relâche au S.H.I.E.L.D. Comment être un couple normal quand on passe son temps à risquer sa vie ? Très bonne question.

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Lincoln est un enfant. Erin est un enfant. Hunter est un enfant. Définitivement, elle est la seule mature du lot, le seul agent digne de ce nom au sein de cette fichue équipe. Entre Erin qui ne peut s'empêcher de provoquer son coéquipier, Lincoln qui démarre au quart de tour et Lance qui s'empresse toujours d'attiser cette guerre, de jeter de l'huile sur le feu dès qu'il en a l'occasion, elle ne sait plus trop où donner de la tête. Bon, peut-être qu'elle participe à toute cette agitation, elle aussi. De temps en temps, quand l'occasion se présente et qu'elle se retrouve dépassée par la paperasse, qu'elle s'ennuie un petit peu. Dès que Coulson et May ont le dos tourné, en fait. C'est arrivé quoi ? Une ou deux fois ? Peut-être bien trois, en fait. Bon, c'est vrai qu'elle n'est pas la plus mature du lot, à bien y réfléchir. Mais elle au moins, elle n'a pas foutu en l'air un grille pain en essayant de faire cramer une de ses coéquipières. Quoique puisse penser Lincoln à son sujet, lui l'a fait. Et à qui est-ce qu'on a passé un sacré savon ? Daisy Johnson, mesdames et messieurs. Quand elle ennuie Lincoln, elle fait ça de sorte à ne pas s'attirer d'ennuis et avec discrétion (une notion qu'il ne semble pas connaître, visiblement.) « Je te rappelle qu'elle m'envoie des vidéos de Pikachu. C'est... dégradant et elle manque de professionnalisme ! » Daisy plisse légèrement les yeux, prend un petit air suspicieux, l'air de lui dire "quoi, vraiment Lincoln ?" avant de secouer la tête de droite à gauche. « Tu sais ce qui est dingue dans toute cette histoire ? » Elle marque une pause, laisse sa phrase flotter dans l'air l'espace de quelques secondes avant de lever les yeux au ciel, prenant un air faussement exaspéré. « Ce qui est dingue, c'est qu'elle tient exactement le même discours que toi. Dégradant, manque de professionnalisme, enfantin, mauvaise foi... Et j'en passe. Vous êtes insupportables et je ne sais plus quoi faire de vous deux, voilà tout. » Cette fois-ci, un rictus amusé étire ses lèvres. « Et tu imagines bien qu'avec cette nouvelle application, pokemon go, ton calvaire est loin d'être terminé, pas vrai ? » C'est quelque chose qu'elle se gardera bien de lui dire, mais c'est elle qui a craqué les codes de l'application des semaines avant qu'elle ne sorte légalement en Amérique pour qu'Erin et Hunter puissent l'installer. Si elle se doutait qu'ils se mettraient à s'échanger des photos de Lincoln en clamant qu'ils avaient réussi à attraper un Pikachu ? Pas du touuuuut.

« J'hallucine ! C'est toi qui en profites pour me tripoter ! » Daisy ouvre légèrement la bouche pour répliquer quelque chose, mais la referme tout aussi vite. Alors ça, c'est la meilleure. Lincoln est décidément un enfant et il est irrécupérable. Un cas désespéré qui lui plaît énormément, cependant, alors qu'elle s'était jurée de se livrer corps et âme à son job et non plus à ces sottises sentimentales. Pourtant, quand il pose sur elle ce regard dont il est le seul à avoir le secret, son cœur se soulève un petit peu et une douce euphorie la gagne. « Peut-être... Mais c'est moi la boss et je fais ce que je veux », lance-t-elle d'une voix fluette où on perçoit nettement l'amusement, tandis que dans son regard se lit une certaine détermination. Elle est un peu sérieuse, dans le fond, parce qu'elle est comme ça Daisy : toujours de façon anodine, elle aime mener son petit monde à la baguette. Jamais rien de bien méchant, mais elle sait comment obtenir gain de cause et diriger autrui. « D'ailleurs, c'est toi qui a commencé, pas besoin de te défiler. » Elle hausse les sourcils, légèrement mesquine. Elle aime bien l'air qu'il prend, la façon dont les traits de son visage s'étirent. Elle commence à se familiariser avec ses mimiques, ses réactions et attitudes. Sans doute parce qu'elle aime bien l'examiner quand il est occupé à autre chose, qu'il ne peut pas surprendre son regard. C'est sûrement avec ce genre de choses qu'elle s'est faite griller par Fitz, qu'il a compris ce qui se tramait entre eux. Peut-être que ces instants volés où elle se surprenait à l'observer et même leurs regards complices échangés ont été surpris par le jeune scientifique qui, loin d'être stupide, en a fait des déductions. Déductions et conclusions qui s'avèrent être véridiques, en fin de compte. Elle le connaît assez bien pour savoir qu'il sera ravi d'avoir vu juste et n'hésitera pas à le lui faire remarquer.

Alors il lui pause la question fatidique, celle qu'elle lui aurait posée s'il ne l'avait pas devancée. Est-elle prête, est-il prêt ? Elle n'est pas sans ignorer qu'il avait décidé de faire une croix sur sa vie sentimentale, jusqu'à peu et qu'en un sens, elle vient tout bouleverser. Lui aussi, il vient tout chambouler et au final, elle ne sait pas lequel d'entre eux est le plus prêt. Ward et le souvenir douloureux de sa trahison est encore marqué au fer rouge dans son esprit et si elle sait qu'il est sérieusement temps qu'elle tourne la page, qu'elle termine ce fichu chapitre, elle se demande aussi comment elle pourrait y arriver, alors qu'il ne cesse de revenir vers elle inlassablement. Les sentiments qu'elle éprouvait à son égard n'étaient encore que sous forme d'embryon et ce qu'elle commence à ressentir envers Lincoln pourrait aisément effacer tout cela d'un simple revers de manche. Elle ne sait pas trop comment elle le sait et à dire vrai, il s'agit plus d'un pressentiment que d'une réelle affirmation. Elle est prête à s'ouvrir à lui et à l'aimer. Elle n'a pas peur et lui voue une confiance aveugle depuis un bout de temps déjà. Elle se souvient sans le moindre mal de l'Afterlife et de ce sentiment éprouvé à son égard. Cette assurance et le courant immédiatement passé entre eux. Tout cela n'a fait que s'améliorer avec le temps et les sentiments sont devenu plus forts. Daisy sait très bien qu'ici, c'est différent. C'est un monde opposé à celui qu'il a connu, bien loin de ce calme auquel il était habitué. Au Shield, on risque sa vie chaque jour, il y a un danger constant qui plane au-dessus de chaque agent. Mais le jeu en vaut la chandelle : on est aimé et protégé. Chaque membre est un maillon nécessaire à cette grande fratrie et si s'y intégrer n'est pas la chose la plus aisée qui soit, une fois qu'on y est, impossible d'en sortir. Qui voudrait en ressortir, de toute façon ? Daisy sait très bien que si elle quittait le Shield, Coulson garderait toujours un œil attentif sur elle et pas uniquement parce qu'ils partagent une relation de père-fille. Elle sait par exemple, qu'il a surveillé Jemma de loin, malgré son refus catégorique d'établir le contact avec ses anciens collègues. Coulson est comme ça. Ils sont tous comme ça. Hunter se prendrait une balle pour n'importe lequel d'entre eux, Fitz et Simmons se couperaient en quatre pour rendre service à un membre de l'équipe. De leur côté, May et Bobbi sous leurs airs de reines de glaces seraient prêtes à tuer le premier individu qui s'en prendrait à l'un d'entre eux. Et Lincoln, quoiqu'il en dise, fait un peu plus partie de cette famille chaque jour.

Sans broncher, mais à contrecœur, Daisy observe Lincoln s'éloigner d'elle. Elle ne sait pas trop ce qui lui fait le plus peur. Se lancer dans quelque chose qui pourrait ruiner leur complicité, si ça tourne mal ou se retrouver avec Coulson et May à dos. Elle sait qu'il n'aura pas facile et que plus que quiconque, ses gestes et paroles seront observés minutieusement. Ils peuvent s'épargner ce genre de choses durant un petit temps, mais elle ne sait que trop bien qu'ils ne pourront pas duper les autres éternellement. Entre Fitz qui a déjà des soupçons, Jemma qui lit en elle comme dans un livre ouvert et tous les autres qui sont des agents entraînés à détecter le moindre mensonge, le moindre geste qui pourrait les trahir, il y aura bien un jour où ils devront faire face à cette histoire. Alors que Daisy est perdue dans ses pensées, Lincoln revient vers elle, un sourire aux lèvres, le visage presque rayonnant. « Je suis prêt », déclare-t-il finalement sous son regard attendri. Elle s'approche un peu plus de lui avec une petite grimace derrière laquelle elle tente de masquer son sourire ravi. Question de dignité. « On devra être discrets pour ne pas avoir d'ennuis. » Ses mains glissent machinalement sur les mains de Lincoln, remontent le long de ses bras tandis qu'elle relève doucement le regard pour venir planter ses yeux noisettes dans ceux clairs du jeune homme. Elle a envie de l'embrasser à nouveau, de retenter l'expérience qui lui semble trop lointaine. Cette fois-ci cependant, elle prête l'oreille au moindre bruit extérieur, par précaution. « Tu crois qu'on pourra tenir combien de temps ? Parce qu'entre Fitz qui a des soupçons, May qui donne l'impression de sonder notre esprit et Hunter qui a tendance à fourrer son nez là où il ne faut pas... » Quand bien même ils seraient découverts, elle s'en fiche pas mal. Peut-être que ça frôle l'arrogance, mais elle sait que Coulson ne le virerait pas. Elle possède une immunité que Lincoln n'a pas. « Mais ça ne veut pas dire qu'on ne pourra pas faire des trucs de couple », fait remarquer le jeune blond, attirant aussitôt son attention. Daisy penche légèrement la tête, se retrouve incapable de se séparer du sourire qui étire ses lèvres depuis que Lincoln l'a embrassée. « Des trucs de couples-qui-ne-sont-pas-des-agents-secrets, tu veux dire ? » Elle fait mine de réfléchir en levant les yeux au ciel avant d'hausser doucement les épaules. « J'crois que ça peut se faire... Y'a un film qui est sorti au cinéma y'a quelques jours. J'comptais y aller avec Erin, mais la perspective de m'y rendre avec toi est bien plus tentante. »


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La conversation est totalement surréaliste. Ils en sont à se chamailler. A débattre pour savoir qui est responsable. A rejeter la faute sur l’autre. Tout cela avec bonne humeur. Bien entendu. Dans le fond, Lincoln se fiche complètement d’être comparé à Pikachu. A une époque, le machin jaune a même été son pokémon préféré. Ça a changé quand il a découvert son pouvoir. Quand il a débarqué au S.H.I.E.L.D. Quand on a commencé à le comparer à cette créature. Au début, c’était drôle. Amusant. Il souriait, même. Et puis, c’est devenu lassant. Agaçant. Chiant. Comme la blague de tonton Gilbert qu’il ressort à toutes les occasions et que l’on peut anticiper. Et puis, probablement est-il blessé que Daisy ne prenne pas sa défense. Après tout, en tant que cheffe d’équipe, elle est censée s’assurer que la bonne humeur et l’entente soient de mise. Ce n’est pas le cas quand les trois quart de l’équipe s’amuse à embêter le quart restant. Le quart étant Lincoln, si vous avez bien suivi. Au lieu de prendre son parti, Daisy continue à aider Erin. Vous y croyez, franchement ? L’impartialité là-dedans n’existe pas. Le pauvre pikachu souffre des moqueries des autres et il n’y a personne pour le voir. Ce monde est trop horrible pour lui ! Il ferait mieux de rejoindre sa ville natale, de reprendre son ancien poste et d’arrêter d’utiliser ses pouvoirs. Là au moins, il ne serait pas surnommé à la gloire d’un pokémon. “Tu sais ce qui est dingue dans toute cette histoire ?” Quoi ? Elle était sur le point de plaider sa cause ? Elle allait disputer Erin ? Rien de tout ça. C’est certain. Elle ne peut pas attendre de lui qu’il accepte ces plaisanteries, sans réagir. Elle ne peut pas lui demander d’épargner toutes les cafetières du S.H.I.E.L.D. C’est le seul moyen qu’il a trouvé pour se défouler. C’est le seul moyen pour ne pas s’en prendre directement à Erin. Parce que, dans le fond, il n’a pas envie de lui faire du mal. Même si ça lui coûte de l’avouer, il l’aime bien. Elle n’est pas trop casse-pieds comme collègue. Sauf quand elle se met à l’embêter avec Pikachu, évidemment. “Ce qui est dingue, c'est qu'elle tient exactement le même discours que toi. Dégradant, manque de professionnalisme, enfantin, mauvaise foi... Et j'en passe. Vous êtes insupportables et je ne sais plus quoi faire de vous deux, voilà tout.” Han ! Erin s’est rabaissée à le critiquer. La garce ! Il va lui frire le cerveau, Il va faire disjoncter sa chambre. Elle l’aura bien mérité ! Il ne peut pas compter sur elle. Jamais. Alors qu’ils souffrent tous les deux des mauvais traitements de Daisy. Alors qu’ils se consolent mutuellement quand ils subissent trop de violence. Elle vient de lui planter un couteau dans le dos. Elle vient de le trahir de la pire des manières. Ça y est, il a le coeur en miettes. Détruit avec cruauté par Erin. Plus jamais il ne lui fait pas confiance !

Et tu imagines bien qu'avec cette nouvelle application, pokemon go, ton calvaire est loin d'être terminé, pas vrai ?” … qu-quoi ? Qu’est-ce qu’elle raconte ? Il ouvre la bouche. Il ignore ce qu’il doit dire. Ou plutôt devrait-il pleurer ? Oui, pleurer toutes les larmes de son corps. Son calvaire n’est pas terminé. Son calvaire vient seulement de commencer. Il passe une main sur son visage. Il est hors de question qu’il supporte davantage de pression. Il va finir par craquer ! Ils s’en rendent compte, au moins ? Un jour, il va vraiment jouer les pikachus et tout électrocuter à plusieurs kilomètres à la ronde. Une nouvelle coupe gratuite les attend. Il plisse les yeux. Si Daisy lui parle de Pokémon Go, c’est qu’il y a une raison. C’est qu’elle a assisté à quelque chose. Il prend son regard le plus effrayant. “Qu’est-ce que tu sais à ce propos ? Qu’est-ce qu’ils font ?” Il a besoin de savoir. Il a besoin de s’armer contre de nouvelles attaques verbales. Il a besoin de se préparer. Parce que ceci est une guerre, messieurs dames. Ceci est une bataille lancée contre lui. Alors qu’il n’a rien fait. Il a pourtant été poli dès son arrivée. Sympa, attentif, sociable. Il n’a pas cherché à se mettre au-dessus des autres. Il n’a pas cherché à nuire aux autres. Ils ont commencé les premiers. Et ils continuent, les salauds. Face à tout cela, Daisy ne trouve rien à redire. Evidemment. “Peut-être... Mais c'est moi la boss et je fais ce que je veux.” Il lève les yeux au ciel. Ben voyons ! Elle est la cheffe, donc elle a toujours raison et elle a le dernier mot. Quelle injustice. Il pousse un soupir. Il ne pourra pas échapper aux entraînements, donc. Même en lui faisant les yeux doux. Même en la noyant sous les baisers. Il espérait, pourtant. Il y a trouvé une raison supplémentaire de l’embrasser. Mais ça ne semble pas entrer dans l’équation pour Daisy. Leur relation ne pèsera pas dans la balance. Il est prêt à s’y faire. Il n’a pas le choix, surtout. Déjà, la proximité se rétablit. Le sérieux reprend le dessus. Parce qu’ils s’apprêtent à faire n’a rien d’anodin quand on a leur passif et leur vie. Ils peuvent passer d’un registre à un autre en quelques secondes. Ils peuvent devenir sérieux en un claquement de doigts. Il suffit d’aborder un sujet sérieux et les visages se ferment. Sauf là. Les visages sont souriants, heureux. Les visages de deux jeunes gens qui se lancent dans une belle aventure. Ils sont assurés. Ils sont confiants. Ils sont sûrs. Il y a quelque chose entre eux. Ils en ont conscience. Depuis le début. Ils n’ont pas sauté le pas avant parce qu’ils n’étaient pas prêts. Ce n’était pas le bon moment. Ça ne le sera jamais vraiment. Ils devront improviser et composer avec leur vie complètement folle. Ils l’ont compris.

Les mains de Daisy sur sa peau provoquent des frissons. Contraste saisissant avec la vague de chaleur qui emplit son coeur. Il aime voir son regard. Il aime y lire toute l’affection qu’elle éprouve, tout l’envie qu’elle réprime. Il aime savoir que ses propres sentiments sont réciproques. Après tous ces mois d’errance, ils ont fini par se trouver. “Tu crois qu'on pourra tenir combien de temps ? Parce qu'entre Fitz qui a des soupçons, May qui donne l'impression de sonder notre esprit et Hunter qui a tendance à fourrer son nez là où il ne faut pas…” La tête dodeline d’un côté et de l’autre. En pleine réflexion. Voyons voir, ils sont entourés d’agents entraînés. Ceux qui les connaissent ont tous déjà deviné leur attirance. Il ne leur faudrait pas deux heures pour voir le changement entre les deux amoureux. “Laisse-moi réfléchir… on va tenir… trois secondes. On est foutus. On devrait prendre un quinjet et nous envoler sur une île déserte.” Il ponctue sa phrase d’un sourire. Partir, c’est la meilleure solution s’ils ne veulent pas d’ennuis. Mais ça ne ressemble pas à Daisy. Qu’est-ce qu’ils feraient sur une île déserte, de toute manière ? La jeune femme ne supporterait pas d’être privée de connexion internet et de tout appareil informatique. Et lui ne supporterait pas de voir Daisy tourner en rond et râler à longueur de journée. En fuyant sur une île déserte, ils ruineraient leur couple. Autant qu’ils restent ici. Même s’il n’est pas sûr qu’ils résistent à Hunter et à Erin. Mais ça, c’est encore autre chose. “Des trucs de couples-qui-ne-sont-pas-des-agents-secrets, tu veux dire ?” Elle se moque, non ? Bien sûr qu’elle se moque ! Cela fait des années qu’elle est au S.H.I.E.L.D. Elle a dû oublier que les couples normaux sortent et ont une vie en dehors du travail. Elle a dû oublier ce que tous les couples font. Ils ne partagent pas des moments sur le tatamis. Ils font d’autres choses. Des trucs normaux. Des trucs qui rapprochent.  “C’est l’idée, oui. Des trucs qui ne sont pas à base d’hématomes et de douleurs, si possible.” La connaissant, elle serait du genre à le traîner à une partie de paintball pour améliorer ses capacités à viser, sous prétexte qu’elle souhaite avoir un moment d’intimité avec lui. Daisy est intelligente. Très intelligente. Et elle saurait comment l’avoir. Il s’en doute. “J'crois que ça peut se faire... Y'a un film qui est sorti au cinéma y'a quelques jours. J'comptais y aller avec Erin, mais la perspective de m'y rendre avec toi est bien plus tentante.” Haussement de sourcils. Est-ce que ce serait un compliment ? Ou alors, est-ce qu’elle le choisirait par dépit parce qu’Erin n’a pas envie de voir ce film ? Les deux cas marchent. Mais il ne le lui demandera pas. Elle nierait totalement. “Noooon ? Ça y est, j’ai détrôné Erin, je suis ton préféré ?” Il joue l’étonné. Bon, il l’est complètement. Il croyait qu’il n’avait pas assez de poitrine pour attirer son attention. Apparemment, un baiser et tout est réglé ! La prochaine fois, il saura comment s’attirer les faveurs de Daisy. Lui aussi peut la manipuler. Enfin, essayer de la manipuler. Ce n’est pas gagné, cela dit. Il ne peut pas battre la reine de la manipulation à son propre jeu. “Et qu’est-ce que tu avais prévu, ensuite ?” Il passe une main dans le creux de ses reins. Il prend possession de ce corps. Un corps qu’il va pouvoir découvrir. Mais ils ne devraient pas être aussi proches. Pas ici. N’importe qui pourrait entrer à tout moment. Raison pour laquelle ils sont tous les deux aux aguets. Prêts à s’écarter au moindre bruit. Prêts à rétablir une distance réglementaire.

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