Vasiliy tournait comme un lion en cage dans la chambre qu’il occupait désormais au QG de la Confrérie. Les premiers jours avaient été agités. Il avait fallu calmer les élèves, notamment  les plus jeunes, traumatisés par l’attaque de l’Institut et ce soudain déménagement. Heureusement qu’ils avaient des gens capables comme le Prof, Storm ou encore Kitty pour gérer ce genre de problèmes, parce que lui et la psychologie des gosses… Ses capacités s’arrêtaient à l’enseignement de la mécanique – et avant, le combat et autres choses utiles à son ancien métier, comme l’avait prouvé Esfir – et puis il fallait avouer, même s’il tenait à ces gosses, que ça l’emmerdait profondément. Ensuite il avait aussi fallu régler tous les problèmes qu’avait pu causer le dit déménagement de tous les élèves et installer tout le monde.

Mais maintenant que toute l’agitation s’était calmée, il avait tout le temps du monde pour penser. Penser à ce dont il avait été témoin avant que la X-Mansion n’explose. Esfir… Il avait d’abord cru à un fantôme, à une hallucination de son esprit. Et puis finalement il s’était avéré qu’elle avait été là, en chair et en os. Il n’avait pas compris comment cela avait été possible sur le coup et il ne comprenait toujours pas. On lui avait assuré qu’elle était morte au cours d’une mission et pourtant elle s’était trouvée là. Il fallait qu’il sache. Qu’est-ce qui avait bien pu se passer à l’époque ? Est-ce qu’elle avait vraiment été morte ? Après tout, après des aliens attaquant New-York, des morts qui reviendraient à la vie ne le surprendraient pas plus que ça. Il avait trop de questions de ce genre en tête. Et il ne voyait qu’une façon d’obtenir les réponses qu’il désirait. Retrouver Esfir et lui poser ces questions directement.

Alors il avait commencé ses recherches depuis le QG. Et puis, quand il avait eu le début d’une piste, il avait empaqueté quelques affaires, avait prévenu le prof de son absence pour une durée encore indéterminée et était parti. Il avait suivi sa piste jusqu’au bout et avait finalement retrouvé la piste de la jeune femme. Il faut dire qu’elle lui avait simplifié les choses en ne changeant pas de nom. Il l’avait observé quelques jours pour connaitre ses habitudes et son emploi du temps afin de trouver un bon créneau pour la confronter.

Et puis il s’était finalement décidé. Il l’attendrait en fin d’après-midi quand elle rentrerait du travail, le mardi suivant, quand il était sûr que son mari – et dieu sait que de la savoir mariée l’avait surpris – finissait plus tard qu’elle.

Le jour J, il se rendit à son appartement. Il pénétra dans le bâtiment sans aucune difficulté et monta les escaliers jusqu’à son appartement. Il crocheta la serrure en faisant bien attention à ce que personne ne le remarque. Il rentra et referma silencieusement la porte derrière lui. Il fit le tour de l’appartement pendant quelques minutes avant de se diriger vers la cuisine. Il regarda sa montre et vit qu’il lui restait encore une petite dizaine de minutes avant qu’Esfir ne rentre chez elle. Alors il fit comme chez lui, fouilla un peu les placards à la recherche d’une tasse et d’une cuiller puis se fit un café. Il prit place à la table et sortit un cigare de sa poche de veste, l’alluma et attendit ?

Plusieurs minutes plus tard, il entendit le bruit de clé dans la serrure de la porte d’entrée et la porte qui s’ouvrait. Il y eut quelques secondes de silence et Vasiliy eut un petit sourire. Il savait qu’elle avait compris qu’il y avait quelqu’un dans l’appartement. Après tout il n’était pas des plus discret et puis l’odeur âcre de la fumée du cigare avait dû lui mettre la puce à l’oreille. Finalement elle débarqua dans la cuisine, arme au poing. Vasiliy haussa un sourcil et ses lèvres s’étirèrent en un sourire autour de son cigare. « Salut gamine ! Je crois qu’on a des choses à se dire, toi et moi, hm ? » Il se leva pour se resservir une tasse de café. « Désolé, j’ai fait comme chez moi. » dit-il en lui tournant le dos. Il se tourna légèrement vers elle en tendant sa tasse vers elle. « Café ? »

La cloche signalant la fin des cours retentit dans la salle de classe et Esfir s’’immobilisa en voyant ses élèves commencer à remballer leurs affaires.
Elle poussa un bref soupir, un peu dépitée par leur comportement et prit la parole d’une voix forte pour se faire entendre malgré le vacarme. « Et n’oubliez pas que je veux votre résumé sur Un long dimanche de fiançailles sur mon bureau demain matin au plus tard ! » Les élèves quittèrent rapidement la salle, certains déposant leurs résumés sur son bureau au passage et elle attendit qu’ils soient tous sortis pour enfin se décider à ranger ses affaires.

Sa faisait quelques semaines depuis la destruction de la X-Mansion mais elle avait toujours l’impression qu’elle avait eu lieu la veille. Elle avait reprit sa vie "normale" comme si de rien n’était, continuait à donner des cours, mais elle ne parvenait pas à oublier ce qu’elle avait vu et fait ce soir là. Elle ne parvenait pas à oublier qu’elle avait participé à cette horreur. Bien sûr, les rapports avaient indiqué qu’il y avait eu peu de victimes finalement et que la plupart des résidents avaient pu s’enfuir avec l’aide de la Confrérie mais elle ne pouvait pas s’empêcher de s’en vouloir.
Elle ne dormait presque plus et passait ses nuits dans son canapé sans pouvoir expliquer à Wyatt pourquoi elle était comme ça. Il était au courant de sa double vie mais elle refusait de le mêler à cette histoire là. D’une part parce qu’elle ne savait pas comment il réagirait en l’apprenant mais aussi parce qu’elle ne voulait pas qu’il la juge pour ce qu’elle avait fait.

Ses affaires remballées, elle quitta rapidement sa salle de classe et sortit du bâtiment, souhaitant les collègues qu’elle croisa sur son chemin et monta dans sa voiture pour rentrer chez elle. Elle allait encore devoir passer une partie de la soirée toute seule en attendant que Wyatt ne rentre lui aussi mais au moins elle avait des travaux à corriger cette fois. Peut être que ça lui permettrait de penser à autre chose.

Elle salua rapidement l’un de ses voisins qu’elle croisa dans l’ascenseur et arriva rapidement devant la porte de son appartement. Elle l’ouvrit et s’immobilisa subitement en sentant une odeur âcre, semblant être celle d’un cigare. Qu’est ce que c’était que ce délire ? Elle se déplaça silencieusement jusqu’au meuble dans l’entrée et glissa sa main derrière pour en sortir l’arme de poing qu’elle y cachait et l’arma le plus discrètement possible. Elle avança sans un bruit, l’arme levée, les sens aux aguets et s’immobilisa dans l’entrée de la cuisine quand son regard se posa sur l’intrus.
Elle lâcha un. « Vasiliy ? » Dans un souffle, restant immobile quand il lui afficha un sourire. Putain mais qu’est ce qu’il foutait là ?

« Salut gamine ! Je crois qu’on a des choses à se dire, toi et moi, hm ? » Elle resserra instinctivement sa prise sur son arme quand il se leva mais la baissa en soupirant quand elle le vit se servir un café. « Désolé, j’ai fait comme chez moi. » Oui, ça elle s’en était bien rendu compte. « Café ? » Elle hocha négativement la tête et elle réenclencha la sécurité de son arme avant de la jeter négligemment sur la table de la cuisine en poussant un nouveau soupir. « Tu pouvais pas faire comme tout le monde et m’attendre à mon lycée où devant la porte ? » Non, bien sûr que non. On parlait de Vasiliy là. « Pas de café non, merci. » Elle se dirigea vers l’un des placards pour en sortir un verre et prit ensuite une de ses bouteilles de vin pour s’en servir. Son verre servit, elle se retourna vers son ancien mentor avant de s’appuyer son bassin contre l’un des meubles, braquant un regard mauvais sur son vis à vis. C’était une blague.

Poussant un nouveau soupir dépité, elle sortit une cigarette de son paquet pour l’allumer et tira une longue latte dessus avant de reprendre. « Et le cigare c’était obligé ? » Un très léger sourire en coin étira ses lèvres. « Ça empeste Vasiliy. » Wyatt allait l’engueuler, c’était certain. Elle espérait que son mentor n’en aurait pas pour longtemps parce que si Wyatt débarquait et qu’il était encore là… Non, elle préférait ne pas y penser.

« Bon, comme tu l’as dit, on a des choses à se dire ouais. » Elle leva légèrement l’une de ses mains, l’invitant à commencer. « Vu que tu t’es… Invité, vas-y, à toi l’honneur. » Elle avait elle aussi des tas de questions à lui poser, à commencer par comment est ce qu’il s’était retrouvé aux Etats-Unis mais c’était lui qui avait fait le premier pas -si l’on pouvait dire- autant que ce soit lui qui démarre pas vrai ?

La tasse encore en l’air, il attend sa réponse. Il la voit soupirer et entend le clic de la sécurité de son arme qu’elle réenclenche. Elle la jette ensuite sur la table en poussant un nouveau soupir qui le fait sourire doucement. « Tu pouvais pas faire comme tout le monde et m’attendre à mon lycée ou devant la porte ? » Il retint un rire à sa question et se servit un nouveau café. « Pas de café, non merci. » Il rangea donc la deuxième tasse qu’il avait sorti pour elle puis retourna s’asseoir alors qu’elle se servait un verre de vin. Elle prit appui sur le meuble derrière elle puis un duel de regard commença entre eux deux alors que chacun prenait de petites gorgées de leurs boissons respectives. Le regard mauvais qu’elle lui lançait l’amusait au plus haut point et il cacha son sourire derrière sa tasse en prenant une nouvelle gorgée de café. Elle laissa ensuite tomber pus s’alluma une cigarette sur laquelle elle tira une latte. « Et le cigare c’était obligé ? » Elle l’amusait vraiment, avec ses airs de grande dame son verre de vin dans une main et sa cigarette dans l’autre, mais il voyait bien que ce n’était qu’un air qu’elle se donnait et qu’elle aussi était amusée. Preuve en était le petit sourire en coin qu’elle arborait. « Ça empeste Vasiliy. » Il explosa de rire. « Says the one smoking a fag ! » Il finit de rire en prenant lui-même son cigare dans le cendrier et en tirant dessus. « I would’ve loved to wait for you at your workplace, but given the national situation, I didn’t think it would be wise, don’t you think ? »  Elle haussa les épaules et tira une nouvelle latte sur sa cigarette. C’était vrai, il n’allait pas se pointer devant un lycée, au sein duquel il était certain que des détecteurs avaient été installés. Il ne s’était pas recensé et tenait à ce que ça reste ainsi.

Elle fut pensive quelques instants puis se reprit. « Bon, comme tu l’as dit, on a des choses à se dire ouais. Vu que tu t’es… invité, va-y, à toi l’honneur. » Il sentait bien que l’atmosphère s’était faite tendue et sérieuse, d’un coup. Mais il était venu ici pour avoir des réponses. Il n’avait pas quitté la sécurité du QG de la Confrérie pour repartir bredouille. Il reposa sa tasse et son cigare et se pencha en avant vers Esfir et ne tourna pas autour du pot. « La première chose que j’aimerais savoir, c’est comment tu peux être en vie ? Parce qu’on m’avait assuré que tu étais morte. Dans un vulgaire accident de voiture ! » Il s’était un peu emporté sur la fin, parce qu’il n’arrivait toujours pas à croire que ses supérieurs aient pu lui raconter de telles conneries. Le pire, qu’il n’arrivait toujours pas à croire non plus, c’est que lui-même ait pu gober cette histoire au bout d’un moment. « Qu’est-ce qui t’es arrivé ? Où est-ce que tu étais passée ? Et puis, pourquoi est-ce que tu ne m’as donné aucunes nouvelles ?! » Est-ce que ça avait été une mission confiée par le bureau ? Une mission de longue durée, d’infiltration ou quelque chose dans le genre ? Mais si c’était le cas, pourquoi la faire passer pour morte ? Surtout qu’elle avait gardé le même nom. Tout ça n’avait aucun sens. Il tenta d’apaiser son esprit et de conserver son calme. « Je t’ai pleurée, Esfir. L’annonce de ta mort m’a complètement bouleversé. Alors commence donc déjà par m’expliquer tout ça et on verra pour le reste plus tard. »

Elle attendait que Vasiliy se décide à répondre en buvant une nouvelle gorgée de vin et arqua légèrement un sourcil en le voyant reposer sa tasse et son cigare et se pencher en avant. « La première chose que j’aimerais savoir, c’est comment tu peux être en vie ? Parce qu’on m’avait assuré que tu étais morte. Dans un vulgaire accident de voiture ! » Elle se crispa légèrement face au ton qu’il employa sur la fin de sa question. Ils lui avaient dit qu’elle était morte ? Pourquoi est ce qu’ils avaient fait ça ? C’était HYDRA qui lui avait demandé de tuer son ancienne identité, pas le KGB. Le KGB n’avait absolument rien fait pour elle après son accident. Pourquoi est ce qu’ils n’avaient pas simplement dit qu’elle avait disparue ?

Elle hocha faiblement la tête en réponse et attendit qu’il continue, parce qu’elle était sûr qu’il avait d’autres questions. « Qu’est-ce qui t’es arrivé ? Où est-ce que tu étais passée ? Et puis, pourquoi est-ce que tu ne m’as donné aucunes nouvelles ?! » Ah ça… Elle avait voulu lui donner des nouvelles, lui expliquer ce qu’il se passait mais ses supérieurs avaient été très clairs. Elle avait du couper les ponts avec tout ce qui la liait à son ancienne vie. « Je t’ai pleurée, Esfir. L’annonce de ta mort m’a complètement bouleversé. Alors commence donc déjà par m’expliquer tout ça et on verra pour le reste plus tard. » Elle tira une dernière latte sur sa cigarette, à peine entamée, et l’écrasa dans la foulée dans le cendrier avant de boire une nouvelle gorgée de vin. Bien.
C’était le moment de vérité hein ?

Elle reposa son verre sur le meuble de cuisine contre lequel elle était toujours appuyée et croisa lentement les bras. Il voulait des explications et elle allait lui en donner. Elle lui devait bien ça.
La question, c’était de savoir ce qu’elle pouvait lui dire. Elle n’était pas censée dévoiler la moindre information sur son travail à HYDRA et devait abattre quiconque pouvait en obtenir. Mais est ce qu'elle pourrait tuer son ancien mentor ? Elle n'en savait rien.

Elle souffla un petit. « Ok. » Tout en hochant faiblement la tête. « Ce que je vais te dire est censé être classifié. Si jamais ils apprennent que j’ai dévoilé ces informations, ils me tueront, ainsi que mon mari. » Son regard se fit plus sérieux, déterminé alors qu’elle reprenait. « Alors je compte sur toi Vasiliy. Si j’apprends que tu as balancé ces infos, je n’hésiterait pas à te tuer. » Son ancien mentor hocha la tête, montrant bien qu’il comprenait. Ça ne la dérangeait pas de se mettre en danger, mais elle refusait que Wyatt ne soit mis en danger par sa faute ou celle de Vasiliy.  

« C’était pendant ma dernière mission. Ils m’avaient encore fait bosser pour HYDRA. Je devais récupérer un colis dans une base tenue par des rebelles tchétchènes. » Ça lui semblait tellement lointain. Comme si ces souvenirs lui venaient d’une autre vie. « J’ai réussi mais… J’ai eu un accident de voiture à quelques kilomètres de mon point de rendez-vous. Ils ne t’ont pas menti là dessus. » Elle soupira et releva légèrement son haut pour lui montrer les cicatrices qui lui striaient le bas ventre. « Le colis a été détruit dans le même temps et m’a laissé quelques traces. » Elle rabaissa son haut et activa sa capacité au moment d’attraper son verre, la faisant passer à travers pour lui montrer son pouvoir. « HYDRA a préféré me récupérer… A temps plein disons. Ils m’ont soignée, m’ont entraînée et aidée à comprendre mon nouveau don. »  Elle désactiva son pouvoir pour attraper son verre et en boire une gorgée.

« J’ai voulu te prévenir Vasiliy. Vraiment. » Son regard se fit plus triste. « Mais comme tu l’as vu, j’étais censée être morte. J’ai été volontaire pour ça. Ils m’ont proposé d’effacer mon ancienne identité et de reprendre une nouvelle vie ici. En tant qu’agent dormant. » Elle releva les yeux vers Vasiliy, le regard toujours aussi triste. « Il faut que tu me comprennes. Le KGB n’a rien fait pour moi après cet accident. Pour eux, je n’étais qu’un autre agent mort sur le terrain. Alors qu’HYDRA a voulu me donner une nouvelle chance. » Elle déglutit avec difficulté et rebaissa les yeux, fixant un point invisible au sol. « Du coup je suis venue vivre aux Etats-Unis, sous une nouvelle identité. Comme prof de français. » Elle leva légèrement sa main gauche, pour lui montrer son alliance avec un mince sourire. « Et je me suis mariée. » Elle ne put réprimer un petit rire. Elle se demandait si ce ne serait pas ça qui choquerait le plus son ancien mentor.  

« Enfin voilà. » Elle reprit son verre en main pour en boire une dernière gorgée et se resservit dans la foulée, reposant un regard intrigué sur son vis à vis. « Je suppose que c’est à ton tour maintenant ? » Parce qu’elle aussi avait pas mal de questions à lui poser. « Tu étais à l’institut Xavier. Donc j’imagine que ça veut dire que tu es un mutant pas vrai ? » Elle connaissait déjà la réponse à sa question. Il ne fallait pas être particulièrement intelligent pour comprendre qu’il en était un puisqu’il se trouvait là bas. « Tu ne bosses plus pour le KGB ? » Ça par contre, elle se le demandait vraiment. Il pouvait très bien être en mission pour eux et surveiller les mutants ici.
Elle avait hâte d’en savoir plus.