Tout s’était bien déroulé. Mieux que prévu, d’ailleurs, car face à des mutants on ne sait jamais à quoi s’attendre. Même avec ses capacités d’Adaptoid, la jeune femme préférait ne pas sous-estimer ses adversaires. Sans parler du fait qu’elle avait dû faire équipe avec un autre membre de l’organisation. L’habitude veut qu’elle travaille mieux seule, ou alors avec des sbires à ses ordres. Mais les temps changent et il faut bien qu’elle s’adapte petit à petit. Contre toute attente, elles formaient une bonne équipe. Les trois mutants visés étaient doués, certes, mais face à deux agents d’HYDRA ils n’ont pas su résister longtemps. L’Ukrainienne ne peut s’empêcher de les observer en attendant le bateau d’extraction. Leur avenir est incertain, l’ignorance la sied à cet instant. Seront-ils torturés jusqu’à en perdre la raison, dressé comme de bons chiens de gardes, une pensée directement liée au Soldat de L’hiver, ou bien serviront-ils de rats de laboratoires à un des nombreux scientifiques qui sert la cause ? Tant de questions, si peu de réponses. Qu’importe cette dernière, il ne lui viendrait pas à l’idée de les sauver, de les aider ou d’abréger leurs futures souffrances. Parfois, elle se rendait bien compte qu’un minimum d’empathie à l’égard de ceux qui viendraient à souffrir de telles conditions serait la bienvenue. Ensuite vient la simple réalisation qu’elle en est incapable. Personne n’est venu sauver les étudiantes de la Chambre Rouge et pourtant, beaucoup en connaissent l’existence. D’ailleurs, si certaines arrivent à survivre et d’autres non, c’est que la vie est ainsi faite. Une injustice en vaut une autre, peut-on d’ailleurs parler de justice dans ce cas-là ? Elle qui ne croit pas aux hasards et qui s’attarde sur les détails qui auraient pu éviter à nombreux une mort assurée.

Pour ne pas s’aventurer d’avantage dans ses pensées et ne pas s’apitoyer sur le sort des trois prisonniers, elle ne pourrait les nommer autrement, Yelena détache son regard de ces derniers. L’horizon ne peut lui apporter de distractions, aucune lumière, seul le silence de la nuit et l’obscurité qui s’y prête. Agacée, un soupir lui échappe alors qu’elle s’adresse à sa partenaire. « Ils n’étaient pas censés déjà être là ? » dit-elle en observant sa montre, faisant mine de s’intéresser aux chiffres y étant affichés. Ils ne sont pas en retards, loin de là, encore cinq petites minutes et ils devraient arriver. Néanmoins, elle a un mauvais pressentiment. Il y a intérêt qu’on des trois mutants ne se réveille pas, car si elle se considère agacée, son acolyte semble avoir un caractère bien plus trempé. Et bien évidemment, c’est à ce moment-là que ça tourne mal. Un bruit, une silhouette et tout ce que l’Ukrainienne à le temps de voir est l’insigne de l’UPH, cette bande de crétins qui était déjà sur leurs traces au début de la mission. L’unité les a retrouvé mais elle n’a pas le temps de s’attarder sur leurs nombres qu’un d’eux lui tire déjà une fléchette d’Eraser dans le flanc droit, entre deux côtés. Si le produit n’a heureusement aucun effet sur elle, cela n’empêche en rien la douleur que provoque l’aiguille, ses mains se portent à son flanc alors qu’une douleur lui parcours l’abdomen. L’A.I.M. n’a jamais cherché à savoir ce que serait l’effet de l’Eraser sur l’ukrainienne. Hors au vue de la douleur qui se propage soudainement et très rapidement, il semblerait que son corps ne réagisse pas si bien au produit. La réaction de l’Adaptoid est immédiat, un simple réflexe et elle copie le pouvoir d’un des agents, un champ de force qui pourrait lui être utile s’il elle ne venait pas de s’enfermer elle-même dans ce dernier. « Un d’entre eux peux générer des champs de forces ! » fait-elle remarquer à Lydia derrière sa prison invisible.

Yelena et elle formaient un duo des plus « efficaces ». L’une attaquait au corps-à-corps, pendant que l’autre apportait un soutien non négligeable à distance avec les armes à feu. Imaginez dès lors la situation suivante : Yelena qui brisait les mutants récidivistes, et Lydia qui les affaiblissait avec ses armes à feu – ou endormant quelques fuyards. L’idéal était qu’ils ne dorment pas, car elle n’était pas « très » volontaire à porter des sacs d’os et de chair. Tout allait bien pour le meilleur des mondes. Cependant, s’il fallait refaire, Lydia refuserait. L’autre blonde était extrêmement talentueuse – la « presque » quadragénaire ne pouvait le nier – mais elle était bien trop différente, psychologiquement parlant. Yelena était la stabilité et l’assurance « incarnée » si on la comparait aux humeurs inégales et à l’insécurité constante ressentie par Lydia. Ajoutons à cela que depuis qu’elle avait retrouvé Braiden, elle prenait de moins en moins plaisir à effectuer les missions d’HYDRA sans ce partenaire du passé : ils se complétaient au combat, tantôt avec leur spécialité qu’avec leur pouvoir. En dehors de lui, elle avait l’impression d’être qu’un morceau mal casé à un autre.

- Hm, je ne sais pas, répondit-elle en haussant les épaules à la réponse de Yelena. Elle savait seulement qu’il fallait les amener à cet endroit, et qu’il fallait attendre le moyen de transport. HYDRA respectait « toujours » cette promesse-ci, non pas par respect pour les agents, mais par intérêt pour ce que ces derniers apportaient à la sueur de leur front, ou de leur sang.

Elle allait vite regretter cette « insouciance » car au loin, elle vit les premières lueurs de ce qui allaient être discorde et chaos. Les agents HPU apparurent, et un premier lancé déjà une première fléchette vers Yelena. Il toucha en plein dans le mille … mais vains efforts car Yelena n’était pas une mutante. L’Eraser l’affectait que très peu. Quoique. Elle générait un champ de force … et se trouvait bloqué dedans, mais en projetant la blondinette non loin d’elle un peu plus loin. Lydia se releva, en poussant un juron digne d’un charretier, en lançant tantôt un regard assassin à Yelena, tantôt à l’agent.

« Putain, maîtrises que ce que tu connais ! » s’insurgea la blonde qui, sans perdre son Nord et son Sud fonça tout droit vers l’un des mutants capturés et endormis pour y mettre un bon pistolet sur la tempe. De souvenir, les HPU doivent protéger les mutants recensés au sein du District X. A voir s’ils respectaient les serments passés devant quantité de gens en costard et cravate et uniforme, à n’en point douter.

- Baissez vos armes. Encore un tir et je shoote la cervelle du gentil petit gars ici, promit-elle en lançant un sourire à chacun, mais attentive à chaque geste et mouvement. Elle espérait également que Yelena se débarrasse de cette « profonde connerie » de champ de force, pour utiliser les minutes « éventuellement gagnées » afin d’assommer ou tuer ces parasites humaines, dont un était mutant.

« Dommage que je ne puisse pas utiliser les capacités mutantes de mes zombis mutants … » soupira-t-elle. Quoique, elle ne se plaignait avec son pouvoir actuel. Que l’HPU baisse ou non son arme, elle allait avoir un prochain zombi dans les minutes qui suivent. La question serait de savoir de quelle côté. Quant à HYDRA, elle savait que l’organisation risquait de ne pas aimer si elle perdait un mutant mais c’était soit la perte de l’un, soit la perte des trois.

Et elle attendit la décision, ou les mouvements, de chacun.

Réagir trop vite, dans la précipitation, telle une débutante, voilà ce que Yelena venait de faire. Bien qu’ici, il ne s’agisse pas réellement d’une erreur, elle ne peut contrôler pleinement ces aptitudes d’Adaptoid. Dans le cas présent, c’est une catastrophe. L’Eraser lui fait un drôle d’effet, elle craint un court instant une réaction allergique, car ne serait-ce là pas fantastique ! Lydia fût projetée alors même que l’ukrainienne ne se rende compte qu’elle s’était elle-même fait prisonnière. Une petite pensée bien négative, l’affront même que serait être capturé par ces abrutis munis d’armes et prétendant défendre les mutants. Une grimace s’affiche sur son visage, soit dû au regard noir de Lydia, soit par la douleur qui envahit son abdomen. Réflexe totalement inutile, Yelena pose les mains sur le champ de force, use de cette paroi invisible pour se redresser. La flèche retirée, l’espionne sent la colère l’envahir. Elle déteste être interrompue dans ses missions, il n’y a rien de pire à ses yeux. Avant, après, oui, mais pendant ? Non. Elle a mieux à faire et paraître incapable aux yeux d’HYDRA n’est pas une solution. Elles le savent toutes les deux, quand bien même Lydia vient-elle pointer son arme sur l’un des mutants capturé. Et c’est au tour de l’Adaptoid de lancer un regard noir à sa coéquipière, car vraiment, elle a tout intérêt à bluffer. Si elle tue un des trois mutants, Yelena risque de lui faire la peau à son tour. La mission n’est pas de ramener leur cadavre, même s’ils crèvent plus tard, sous les mains expertes des scientifiques.

Et les agents hésitent. C’est leur métier, après tout, de faire en sorte que tout le monde soit sain et sauve, dites ça donc aux millions de recensés qui tôt ou tard se feront buter. Mais l’hésitation ne dure pas longtemps, forcément, ils sont trois à tenir des armes et Lydia n’a qu’une balle à offrir à l’un des mutants. Le compte vite fait bien fait, ils ont plus de chance de sauver deux mutants et de tuer les deux agents d’HYDRA que de sauver les trois. Yelena est peut-être encore prisonnière pour les cinquante-huit prochaines secondes, mais ça ne change en rien ses facultés. Les trois agents sont à quelques mètres de distance des uns des autres, le plus proche réajuste sa prise sur son arme et l’espionne sait qu’il compte tirer. Le pouvoir de l’agent est présent, tout comme celui de son acolyte du soir, inutile à cet instant, ou à tout moment si on devait lui demander son avis. Ses mains viennent pousser la paroi invisible, un geste qui pourrait paraître inutile si ce n’est le champ de force qui vient à l’encontre des trois agents. Le plus proche, celui ayant l’arme à la main, se prend un véritable mur en pleine face, un craquement retentit même avant qu’il ne soit repoussé en arrière, que son corps ne heurte le sol. Les deux autres agents ont plus de chance, la barrière ayant perdue en puissance et ils ne font que tous deux tomber en arrière.

Ils se relèvent aussi tôt, le mutant semble surpris que son pouvoir soit utilisé contre lui, sans doute se demande-t-il aussi pourquoi l’Eraser ne fonctionne pas. L’agent le plus proche ne se relève pas mais n’est pas mort, Yelena n’aura pu rendre ce petit service à sa co-équipière. Mais dès qu’elle est libérée de cette petite prison improvisée, elle compte bien en découdre avec ce dernier. En attendant, c’est Lydia qui a le plus de libertés. Elle n'a qu'à utiliser son arme, vu qu'elle est douée avec cette dernière.

Les paris risqués sont souvent ceux que rapportent le plus. Yelena venait de repousser les trois agents à l’aide du champ de force, ignorant si cela fonctionnerait réellement. Néanmoins, il n’y qu’un certain nombre de possibilités quand il s’agit de ce pouvoir t fort heureusement, l’Adaptoid avait déjà eu à faire à cela auparavant. Même si elle est un tantinet agacée, il faut avouer que Lydia est remarquable. Elles forment une bonne équipe, le renier est inutile. Le bouclier qui tient Yelena prisonnière disparaît enfin et elle s’avance vers l’agent au sol alors que Lydia tire sur le mutant, qui crée directement une barrière de protection, la balle faisant ricochet et touchant son collègue au genou. Yelena ne peut s’empêcher un ricanement en récupérant l’arme de poing de l’agent, parce que franchement, quels amateurs. C’est ça, qui doit assurer la protection des mutants ? Cette bande de gamins qui se croît capable de s’en prendre à des agents d’HYDRA surentraîné ? Par pitié, qu’on sauve se monde de tels abrutis et qu’on leur offre au mieux une pièce dans les laboratoires de l’A.I.M. Au moins ils pourront peut-être être utiles.

Elle remarque aussi que sa coéquipière semble peu s’inquiéter des flèches d’Eraser. Toutefois, son don est inutile ici et l’ukrainienne est agréablement surprise en voyant que Lydia puisse faire un tel choix. Ainsi que de prendre la décision qu’elles pourraient très bien rapporter le mutant avec les trois autres. Yelena part souvent sur le principe que tuer vaut mieux que capturer, quel qu’en soit le résultat final. Et sa décision est vite prise, même si pour annuler les pouvoirs de ce mutant il faudra que Lydia lui tire une dose d’Eraser, il faut d’abord qu’il soit assez distrait pour ne pas user de son champ de force. Sans ciller, l’Adaptoid pointe l’arme empreintée sur l’agent à ses pieds et l’achève, one down, two to go. « Je m’occupe du mutant en attendant, l’autre ne fera pas long feu. » Il a beau avoir ses fléchettes et son arme, blessé et face à Lydia, elle ne lui donne pas deux minutes. Quant à l’agent mutant, il semble comprendre que Yelena peut copier son pouvoir et n’hésite dès lors pas à lui tirer dessus alors qu’elle fonce vers lui, bouclier défensif en place. C’est au corps à corps qu’elle excelle et une fois assez proche du mutant, c’est d’un coup de pied qu’elle le désarme avant qu’ils n’en viennent aux mains.

Elle ressentit un terrible choc au niveau de l’abdomen. Un râle de douleur, et rage, s’échappa d’entre ses pulpeuses lèvres. En parallèle, elle fournit un regard des plus noirs à son assaillant, ce stupide agent HPU qui avait retrouvé un brin trop de courage suite à la mort de son coéquipier pour venir asséner un coup à une agent de l’HYDRA. Pour cette dernière, il fallait admettre que ce coup de poing était davantage un coup contre sa fierté qu’un coup véritablement déstabilisant et mortel.

- Qu … ?

L’agent gouvernemental « supposé » protéger les mutants était paralysé de terreur. Son coéquipier qui avait été tué par Yelena – une mort certaine au vu de la courte portée – s’était relevé, et se dirigeait tout droit vers ce duo improbable d’une démarche raide et bancale. Lydia profita de cet instant de surprise pour s’éclipser et se mettre à l’abri d’un quelconque coup, encore. Elle allait laisser dans un premier temps son zombie faire le travail.

Comment la chose s’était-elle déroulée, vous diriez-vous ? Là où Yelena n’avait vu qu’un travail fini, et les coéquipiers qu’un macchabé à enterrer, pour Lydia ce n’était que le commencement de sa domination sur ce combat improvisé et inattendu. Elle avait dirigé son pouvoir sur ce mort pour qu’il s’éveille – du moins, pour qu’on corps puisse bouger. Ses doigts avaient tressailli, son corps avait été secoué d’un léger soubresaut et ses lourdes paupières avaient tremblé … tant de signe indiquant que Lydia s’était mise en marche. Tant de signe ignoré constamment par les ignorants de ses pouvoirs. Evidemment, déclencher ce pouvoir et soulever un premier zombie nécessitaient une concentration de quelques secondes, dites secondes dont l’agent HPU avait profité pour s’approcher et lui asséner ce fameux coup de poing.

Par contre, sa rage se calma bien quand elle vit la mâchoire tremblante du vivant, l’hésitation et le dégoût dans son regard, et son incapacité d’agir comme il le souhaiterait. Il ne savait pas s’il avait « droit » de tirer ou non sur cet homme avec qui il avait tant partagé d’aventures. Enfin, et plus important, il était déchiré entre deux pensées : il était « mort » et pourtant, il était debout. Son ami était-il vivant, ou mort ? La question que bien des hommes se posaient. Puis, invariablement, une autre peur les tenaillait : s’il mourrait à son tour, allait-il devenir un simple jouet entre les mains d’une femme aux pouvoirs morbides ?

Stupidement, il dirigea son arme sur ce corps, le criblant d’Eraser mais qu’importe. Le Zombie avançait, encore et encore. Dans sa panique, le vivant tentait de donner un coup de poing mais rien à faire. Le dit Zombie l’esquiva avec aisance. IL ne faut pas oublier qu’il était « presque » dirigé par Lydia : quand elle n’avait pas à combattre par elle-même, elle avait plus de facilité à diriger ses macchabés pour leur faire réaliser bien des prouesses, ou pour éviter des dégâts stupides. Car oui, aussi insensibles soient-ils à la douleur, il n’en restait pas moins qu’un corps restait un corps. S’il était trop abîmé, elle ne pourrait pas le bouger si aisément … malheureusement.

Et non, ce n’était pas cool de se battre avec des bouts de corps. Ce n’était pas suffisamment puissant.