May there be a soul in an empty shell? Rumors are terrifying
Rumeurs. Affligeantes rumeurs. Rien n’arrête la pensée des uns qui devient la parole des autres. Amusante réaction, humaine en tout terme, qu’est l’inconscient qui crée l’histoire, la façonne pour qu’elle en soit d’autant plus fascinante. Ridicule, perte de temps outre mesure d’intérêt, car les spéculations vont bons trains et vérités inventées se perdent, se déforment au point même où l’on ne peut les qualifier de mensonges. Se fier à ces dernières, quand bien même aime-t-on soi-même en lancer, est loin d’être une bonne idée. Néanmoins, les on-dit ne sont pas toujours inventés de toute pièce. L’authenticité n’en est que d’avantage aisé à vérifier lorsque la majorité des personnes rapportant les ragots semblent tous façonner l’histoire autour d’une même base. Yelena ne se fie pas aux racontars, retiens certains informations pour les vérifier ultérieurement, mais ne s’intéresse pas aux exagérations. Pourtant, certains ne semblaient en rien avoir dramatisé, miracle quelque peu inquiétant. L’ancienne élève de la Chambre Rouge ne se fie pas non plus aux documents écrit de la main d’un homme, -ou d’une femme-, incapable de garder l’objectivité tant recherchée. Même ses sources habituelles, pourtant objectives, ne donnent d’informations qu’elle considère acceptable.
Contrariée, sa curiosité finit par vaincre tout raisonnement. Comme c’est irritant. D’autant plus que dans l’heure, Yelena parcours les rues du Bronx, habillée d’un jean foncé et d’un sweat-shirt à capuche gris. L’impression de s’avancer en terrain inconnu, loin d’être agréable et qu’elle doit surmonter avant d’arriver à la station-service. Car elle ne connaît pas l’homme qu’elle compte rencontrer. Si en temps normal elle s’informe, ici, ce qu’on lui avait dit ou ce qu’elle avait appris semblait dérisoire. Présentement, il représente le mystère en toute sa splendeur, pas seulement pour la russe mais pour l’organisation en elle-même. La pieuvre ensanglantée qui ne connaît pas tout ce qu’il y a à savoir sur l’un de ses agents, s’en est amusant. Tout autant qu’ignorer la réaction de cet être qui d’après les on-dit reste imprévisible. Devrait-elle craindre cet homme ? Non. La peur ne lui vient pas, jamais, c’est un sentiment des plus pratiques pour certains, poussant à survivre. Les sentiments sont la preuve même de la vie, mais en être totalement dénué n’est pas impossible. Danger qu’est d’être une coquille vide. La russe n’en est pas une. Peut prétendre l’être, disparaître dans un monde qu’elle seule connaît et laisser son corps subir ce que son esprit sait éviter. La seule appréhension vient du fait qu’elle n’y a pas réellement prêtée attention. Intriguée, méfiance égarée. Elle qui ne se permet pas d’erreurs là où elle peut et sait les éviter s’avance vers l’inconnu. L’ironie. Peu importe les dires, l’homme est tatoué, l’homme n’est pas forcément ce qu’il semble être. Qui a donc cru bon d’ajouter cela ? Rassurant n’est pas le mot qu’elle utiliserait. Naïf. On est ce qu’on veut être et peu importe l’apparence, peu importance l’action et la réaction. Tous les uns contre les autres, humains en particulier, s’inquiétant de leur piètre existence sans jamais comprendre qu’ils ne sont que des pions à utiliser. Narciso Hernandez est arrivé en Amérique il y a quelques années. Couverture qui sied à celui qui l’emploi. Chacun ses loisirs, en dehors d’HYDRA l'Adaptoid se contente de faire ce qu’elle fait de mieux. Espionnage, infiltration, trafics d’armes, de drogues ou de gamines exportées d’on sait où. Ce ne sont pas des loisirs, elle n’y trouve pas plus d'amusement qu’une nuit tranquille devant le téléviseur. Peut-être que der Totengräber aime être pompiste ? À en voir la station-service, la russe se demande si c’est là que réside la réponse. Si le personnage ne lui invoque pas un ennui profond ou l’envie d’un bain de sang, elle le lui demandera. Car c’est bien censé de demander une telle chose.
Tout comme cela coule de source de ramener une boisson chaude à celui qu’on appelle le Fossoyeur. Évidemment, c’était ça ou un véhicule, une station-service n’offre pas tant de possibilités. Si. Il y a d’innombrables possibilités pour s’accaparer le temps du pompiste, sauf qu’elle est venue sur un coup de tête et que pour une fois, la facilité lui semble tout aussi faisable. Il n’a plus qu’à choisir entre le café et le lait chaud, l’espionne jouant bien de ce choix qui pourrait sembler étrange de sa part. Aujourd’hui brune et non blonde, elle n’a pas de mal à repérer sa cible, son futur interlocuteur, la source même qui accapare sa curiosité maladive pour l’instant. Depuis des heures. Fallait-il qu’elle succombe au mystère et qu’elle aille chercher des réponses ? N’aurait-elle pas pu attendre de le croiser autre part qu’en publique pour parler librement sans à craindre son environnement ? Non. D’un pas assuré, tel une personne qui s’avance vers une ancienne connaissance, l’Adaptoid se rapproche du Fossoyeur. « J’espère ne pas déranger. » Yelena ignore la sensation qui la parcoure, ne souhaite absolument pas copier quelconque capacité à cet instant, n’hésitera pas à le faire si les choses se déroulent comme l’un des scénarios qu’elle s’est déjà imaginé. Non pas qu'il prendrait le risque de perdre ce faux-semblant, néanmoins chaque situation mène à de nombreuses réflexion. Un coup de tête ne l'a pas plus mené vers cette station-service qu'un chaton en détresse ne l'arrêterait en pleine rue. Bien sûr qu’elle dérange, ignorant s’il a le droit à un quart d’heure de pause ou si elle vient réellement prendre de son temps alors qu’il travaille. Dans les deux cas, difficile de savoir si tel est le but avec Yelena. « Café ou lait chaud ? » lui demande-t-elle en lui tendant les deux mug en carton, un sourire aux lèvres en posant son regard sur son futur interlocuteur. Aux yeux des humains les entourant, elle donne l’impression d’être une jeune femme qui connaît Narciso, ultime but pour l’espionne qui souhaite d’emblée s’imposer. Le tact ne lui convient pas quand elle n’est pas en mission, elle n’en fait donc pas usage et risque de se surprendre dans l'art de l'improvisation.
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Rien n’est réel, rien n’est éternel. Quoique. Mais Yelena n’a pas de croyances, celles qui lui ont été inculquées sont déconcertantes. Elle sait, ignore par simple volonté mais y est toutefois confronté. Si seulement elle pouvait prétendre être aussi docile qu’un agneau. Plus facile. Moins fatiguant qu’est d’obéir aux ordres sans s’attarder à y réfléchir. Entrainée par des instructeurs qui exigeaient la perfection, c’est naturellement impossible d’en arriver là. Là à n’être qu’un soldat, sans âme ou pensées. Ce n’est pas plus mal, à ce qu’il se dit, car un soldat qui ne se pose pas de questions finit tôt ou tard par se faire tuer. Trop s’en poser n’est pas une bonne idée, trop est trop et les supérieurs ont souvent ce problème qu’est être égocentrique à souhait. Venant d’elle, c’en est presque hilarant. Yelena se surestime souvent, s’oblige à le faire par conséquent. La preuve en est, elle sait qu’elle n’est pas la meilleure, pas exactement. En certains points sans doute, en d’autres moins. La perfection n’existe pas, pourtant, c’est une bataille sans fin. On ne niera pas cette condition, ancrée dans son esprit par simple entrainement, tel un vulgaire chien qu’on dresse pour en faire une bête de foire. Ne le sont-ils pas tous ? À le voir, elle comprend la réticence de certains à ne fusse que prononcer deux mots à son sujet. Les plus faibles, ceux qui craignent la mort mais prétendent le contraire, ont à y gagner. Les plus forts eux ont vu les atrocités dont l’homme est capable, connaissent la différence entre être et devenir. Elle n’arrive pas à placer cela chez lui, même en sachant ce qu’elle sait, en s’avançant vers ce sentiment qui s’installe, qu’elle n’apprécie guère.
Il semble souffler un mot qu’elle n’entend pas, loin de vouloir savoir. C’est étrange d’en arriver là, encore s’attarde-t-elle à penser l’espace d’un instant. Tout ceci n’est qu’un jeu, une partie sans fin et les pions sont incompréhensibles en soit. Les faux-semblants prennent place et alors qu’elle scrute le moindre geste, la moindre lueur dans son regard, lui ne participe pas. Déconcertant. Ce mot lui revient en l’observant, calme, trop. « Bonjour. » Simple mot, un sourire qui semble plus honnête que le sien. Yelena ressent un soupçon de jalousie, c’est tellement facile de l’être quand quelqu’un arrive à faire aisément ce qu’il lui a mis des années à maîtriser. Lui aussi, vient presque lui souffler une petite voix. Parce que lui n’est pas ce qu’il prétend être, ce que d’autres croient voir et si elle en connaissait la vérité, même elle ne serait pas ici à ses côtés. « Peut-être que tu cherches à réchauffer quelqu’un, chica ? » Qu’est-ce que.. ? Oh. Il n’est pas dupe, elle s’en doutait, c’est ridicule de croire le contraire. Mais ça ne lui plait pas, car il ne rentre pas dans son jeu et qu’elle reste là, deux boissons chaudes à la main. Ce n’est pas inné mais ça n’enlève en rien le côté déplaisant de cette situation, car l’Adaptoid a les deux mains occupé et pas par des armes. Énervant. L’homme fait dès lors une autre chose tout aussi étonnante, vraiment, elle n’aurait pas dû imaginer le déroulement de cette rencontre, elle n’en serait pas à sauter de surprise en surprise. Elle souhaite lui répondre, manque le mouvement de sa main à force de se perdre dans ce regard qu’elle n’arrive pas à déchiffrer. Se fige l’espace de quelques secondes au contacte inattendu. En règle générale, Yelena n’a pas de mal à se montrer tactile où à accepter ce trait chez les autres. Rien de normal à cette situation, à l’individu devant elle et sa curiosité en est tout aussi bien la cause. Et son sourire disparaît, lentement mais sûrement, bien qu’elle remarque qu’il est réellement glacial. Étrange. Encore. « Tu peux mieux faire. » Narciso Hernandez l’énerve par cette sincérité à laquelle elle ne croit pas. Elle sait qu’elle ne le cache pas, son regard se voile et se plisse en analysant la situation. La femme qu’elle est aujourd’hui déteste ne pas avoir l’avantage et pire encore, ne pas savoir si le but de celui qui se tient en face d’elle et de la faire vaciller dans le néant. C’est aussi conflictuel que ça la pousse à laisser toute réalité l’entourer, oubliant le voile, mensonge perpétuel. Son sourire lui revient mais se redessine mielleux car cela reste un jeu. « Tu crois ? » Et c’est à son tour de jouer la carte de l’innocence, frêle mais mensongère. Elle ne sait pas ce qu’elle fait à cet instant, ce qu’elle cherche exactement. Ses nouvelles capacités semblent suivre leur propre chemin quand elle détecte les premiers changements, ses propres cellules qui semblent la trahir et contre lesquelles elle se doit de faire pression. L’ignorance peut coûter cher et l’espionne en connaît le prix à payer, trop pour que cela soit digne d’intérêt à ses penchant suicidaires. Ils en ont tous en ce bas monde. Une voiture arrive, elle a l’impression que l’espace d’un instant, trop court pour qu’elle n’arrive à le comprendre, l’attention de Narciso ne se concentre pas sur le véhicule. Mais tout cela n’a pas d’importance, elle qui se tient encore là et qui met trop de temps à réagir finit par enfin s’en rendre compte. « Alors je vais réchauffer quelqu’un d’autre, en attendant. » Elle s’éloigne, frustrée mais amusée, car il ne risque pas d’en profiter et de partir. Ce faux-semblant qu’être employé lui convient suffisamment pour tenir le rôle. Au vue des informations qu’elle avait obtenu de l’homme lui faisant office d’employeur, la russe fût surprise de l’apprendre. Elle-même pouvait prétendre à de nombreux actes, mais toute forme de racisme semblait toucher son côté le plus sombre. Il serait déjà six pieds sous terre, de préférence vivant plutôt que mort. Elle n’entre pas dans la boutique, peu intéressée à réellement se fondre dans la masse. Mais son regard s’attarde sur ceux qui s’y trouvent, sachant qu’au moins elle ne va pas perdre son temps, une demi-heure tout au plus. Yelena n’est pas aussi bien informée qu’elle aimerait l’être. Prétendrait l’être si on venait à lui poser la question. Coup de tête impromptu.
Elle attend, patiente telle qu’elle ne l’a jamais réellement été, boissons oubliés et simplement jetées. L’observe et il doit s’en douter, ressentir son regard qui s’attarde, vraiment, en d’autre circonstances l’espionne douterait de ses propres intentions. Chasser le naturel et il revient au galop, car elle ne voit ni homme ni agent, seulement un potentiel adversaire dont elle doit repérer les faiblesses, juste au cas où. Le même refrain qui revient, inlassable et omniprésent. Une femme vient cependant la déranger, sa question lui échappe dans ses pensées et elle s’oblige à lui adresser la parole. La quarantenaire a fait le choix de lui demander un briquet au lieu d’accoster un des hommes, qui statistiquement parlant ont plus de chance d’être des fumeurs. Yelena aurait fait pareil, du moins celle qu’elle était avant sa rencontre avec Starkovsky. Les femmes sont faibles, plus faibles et peu importe son sentiment de supériorité, la vérité reste et s’accroche au fil des siècles. Entre sa cible, -il faut qu’elle retrouve l’état d’esprit qu’elle possédait avant son accident-, et la distraction qui est venue l’accoster, l’espionne fait le choix de s’intéresser à tout autre. La femme la remercie et lui rend son briquet avant de reprendre son chemin. Ne se doutant pas une seule seconde que ce même briquet avait servi à faire brûler vif un constructeur il y a de cela quelques jours.
L’innocence humaine. Un jour, elle aussi en avait été capable. Peut-être même Victor. Son regard le cherche, se pose à nouveau sur lui et le temps s’écoule, le remplaçant commence à travailler et quelques minutes plus tard, ses jambes la guident à nouveau vers cet homme, mystérieux, dangereux. Magnétisme soudain, temporaire mais fragile. « Dis, tu ne m’en veux pas d’être venu te déranger quand même ? » Une petite voix qui lui souffle qu’elle joue avec le feu, aime se brûler et voir les autres périr dans les flammes. Innocence qu’elle empreint, lueur qui promet sincère amusement s’il vient à lui dire qu’effectivement, elle aurait dû s’abstenir. Encore un faux-semblant pour les oreilles qui trainent, jusqu’à poser sa main gauche sur l’avant-bras du Fossoyeur, pseudonyme qu’elle trouve plus effrayant que celui qu’elle était supposée avoir hérité à présent. Et son bras enlace celui de Victor, Narciso, peu importe son nom, cherchant sans doute à s’attiser les regards, comment ça, une brune avec le mexicain. C’est qu’elle aime attirer l’attention, bonne ou mauvaise, réprimandes oubliées, la brune s’est assurée d’attendre suffisamment près et assez longtemps pour prétendre être proche de ce dernier. Et maintenant elle s’avance, s’éloigne, contacte physique prolongé qu’elle sait étrange quand aucune chaleur ne se dégage de ce bras, ni des doigts qui lui avaient précédemment effleurés les lèvres. « Vous êtes facilement traçable, cela pourrait vous causer des problèmes un jour. » lui dit-elle, maintenant éloignés des oreilles qui trainent, lâchant l’avant-bras qu’elle avait enlacé, sourire retombant et laissant place à une expression plus distante, froide en tout terme, car il voyait et qu’elle n’allait pas jouer d’avantage la comédie. « Vous ne refuseriez pas de venir boire un verre en ma compagnie, Victor ? » Si sa voix s’adoucit pour lui demander cela, c’est qu’elle ne souhaite autre que satisfaire sa curiosité.
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Il y a longtemps, elle n’aurait jamais cru à toutes ces histoires, toutes ces choses si étranges et inexplicables. Survivre plutôt que vivre, se souciant peu du monde l’entourant. Petite fille innocente qui grandit et finir dans les mains de ceux qui en font une tueuse impitoyable. Dès lors il ne s’agit plus de survie mais d’obéir. Aux instructeurs, aux hommes de mains, aux généraux.. Temps lointain, oublié sous tant d’informations diverses et plus qu’effrayantes. Un monde où seul l’homme, et ce dans toute sa simplicité, aurait existé, voilà une chose à laquelle elle s’était attendue. Pas à ça. Pas aux scientifiques, aux nouveaux gènes et autres sources de créations. Vint les êtres modifié génétiquement, rats de laboratoires, expériences réussie et d’autres moins. Vint les mutants, homo sapiens né avec un gène différent qui fait d’eux des êtres exceptionnels et craints à la fois. Qu’était donc l’homme à ses côtés ? Un mutant ? Un être génétiquement modifié ? Seul lui le sait. Peut-être même Shmidt, Yelena n’est pas naïve et ne croît pas trouver toute la vérité dans de simples dossiers et dires de tiers personnes. Elle ne croît pas non plus qu’on peut cerner un être humain, ce même en le connaissant par cœur. Tous restent imprévisibles dans certaines situations. On ne se connaît jamais soi-même, pas totalement, alors les autres encore moins.
Victor est étrange, un mystère qu’elle aimerait comprendre avant d’y porter jugement. Ce qui l’interpelle d’avantage alors qu’il lui demande si elle est de ces problèmes qui pourraient venir à sa rencontre, c’est que ses capacités semblent s’embrouiller. Un duplicata, voilà ce qu’elle devient en présence d’un être doté de ses propres capacités. Ici c’est différent et le froid ne vient guère du temps, c’est elle qui refroidi et elle ne s’en rend pas encore compte. « Je l’ignore. » dit-elle en toute honnêteté, ils sont du même côté, plus au moins, servent la même cause, bien que, alors il n’y a aucune raison qu’elle soit un problème pour lui. Qu’elle représente un quelconque danger, que lui-même peut représenter pour elle. Il semble pourtant que quelque chose le fait tiquer, son prénom, qu’il corrige et il en revient à Narciso. Et l’espionne note le moindre détail, le moindre changement, retiens et classe dans sa mémoire. Il lui est impossible de faire face aux gens et de ne pas noter leurs faiblesses, leurs forces et tout ce qu’il y a entre, défaut de fabrication.
« J’ai pensé que si vous ne souhaitiez pas avoir l’un, l’autre vous tentera peut-être plus. Et puis, qui dit que je ne voulais pas passer au froid ? » Bien évidemment, c’est une question sans en être une. Ils savent tous deux qu’elle ne proposait pas cela par simple politesse et encore moins parce qu’elle-même est tiraillée par la soif. Et les quelques paroles qu’il lui adresse sont révélatrices en soit. Néanmoins, rien n’est plus réel que certaines façades et n’est-ce pas ce que Narciso représente ? Pour le meilleur ou le pire. Sans doute est-ce nécessaire, doit-il savoir être ce qu’il n’est pas pour ne plus se perdre dans ce monde. Elle connaît ça, même si c’est différent et que ça le sera toujours. Aucun être n’en est un autre, comprendre, étudier, le savoir d’un comportement qui s’efface avec le temps. Peut-être n’est-ce pas si mal de ne plus jouer à ce jeu interminable, néanmoins, si lui ce le permet elle aussi. Évidence totale, Yelena n’offre pas si on ne lui rend pas la pareille, jamais.
Elle reprend son chemin, lance un regard au fossoyeur et l’invite ainsi à la suivre, la destination inconnue, deux êtres qui parcourent un chemin sans savoir où ils finiront. Il lui dit quelque chose en espagnol et ces faibles notion de cette langue ne lui permettent pas de tout comprendre, pourtant, elle sait à peu près ce qu’il en est. « Je peux ne pas faire semblant mais craint fort ignorer comment. Et puis, c’est injuste, à qui ais-je réellement à faire, ne fais-tu pas semblant toi aussi ? » C’est dangereux, elle aime passer de l’un à l’autre et ne savoir à quoi s’en tenir, vit chaque jour dans cet ultime but. Et le froid la gagne d’avantage, jusqu’à ce que le premier frison lui parcours l’échine. Connaître cet homme, par curiosité, une erreur qu’elle répète. À croire qu’un mystère est une étape importante, une question évidente. Qu’elle ne peut simplement accepter que certaines choses le resteront à jamais, n’auront d’explication si ce n’est une croyance quelconque. Ce sera sa perte. Une voyante lui dirait qu’un jour ça va la mener droit vers la mort et elle ne l’écoutera pas. Croire toujours savoir mieux que les autres, au final ce n’est pas la curiosité qui viendra sonner sa fin mais son égo. Elle qui s’amuse à dire que seuls les hommes en possèdent.
Ils ne vont pas bien loin, le petit café qu’elle avait précédemment repéré semblait encore tranquille malgré l’heure. Malgré le quartier, elle sait que ça ne va pas durer. Alors en s’en rendant compte, elle croise le regard de Victor, -Narciso-, dans ce qui pourrait être considéré un geste de bonne volonté. « Dans une demi-heure ce sera bondé, ça ne te dérange pas ? » Elle avisera bien, il y a d’autres endroits ou prendre un verre et tant qu’il ne refuse pas totalement son offre elle compte bien s’installer devant un verre de vin. Quelque chose lui dit qu’elle va en avoir besoin, car elle ne sait sur quel pied danser et Victor mène la danse, même si elle tente à reprendre les devants.
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Si elle ne s’en rend pas compte, du froid qui s’installe dans chaque parcelle de son être, c’est sans doute parce c’est l’Adaptoid qui subit et non l’humaine. Différence étrange, encore plus quand il faut mettre les mots là où aucune description ne peut faire honneur à la réalité. Aujourd’hui encore, il lui arrive d’ignorer si elle peut encore se prétendre un tant soit peu humaine. Ses cellules ne font en sommes rien de particulier, rien qu’un porteur du gêne X ne pourrait pas effectuer. Sauf que tout cela n’est pas venu le plus naturellement au monde. N’aurait jamais dû être si ce n’était pour sa chute, sa fin écrite à l’encre de ses veines. Tout cela n’a pas d’importance alors qu’ils semblent jouer au jeu du chat et de la souris. Ce qui ne plaît guère à la blonde, c’est qu’elle n’est en aucun cas le prédateur tant redouté. Victor mène la danse, encore, quand bien même elle tente de reprendre les devants. « En êtes-vous certain ? » Loin de là l’idée de l’offusquer, mais elle ne se souvient pas l’avoir vu accepter son présent. Certes, une boisson chaude ne peut être nommée de la sorte mais c’est ainsi qu’elle voit la chose. Elle ferme les poings, le bout de ses doigts gelés effleurant ses paumes. Son regard s’attarde sur des passants, son métabolisme s’adapte sans qu’elle n’y prête attention.
Elle ignore cet avertissement, il comprend ce qu’elle met de côté, sous l’illusion d’un simple frison. Ce n’est qu’en voyant ce sourire après s’être inquiétée, bonne volonté loin d’avoir ses racines dans l’innocence oubliée, que l’espionne comprend à son tour. Et tente d’arrêter le processus, ses cellules cessent de reproduire avant que cela ne recommence, sans que la blonde puisse intervenir. Que faire quand c’est votre corps qui vous trahit et non votre esprit ? Faire comme si de rien n’était, visiblement.
À l’intérieur, l’ukrainienne ne laisse pas son regard évaluer les clients déjà présents. Elle sait déjà où se trouvent les sorties, ainsi que chaque cachette stratégique en cas d’attaque. C’est en ces moments qu’elle cherche à comprendre le mystère, alors que Victor semble absent, perdu là où personne ne pourra jamais l’atteindre. Yelena s’adresse à la serveuse, les tonalités bien trop mélodieuses, fin espoir qu’elle se concentre d’avantage sur elle et non le fossoyeur dont le comportement se prouve d’avantage surprenant. La serveuse semble être une jeune femme banale et elle ne voit pas ce qu’il voit. Devrait peut-être ne pas le souhaiter, car un nouveau frisson la parcours et sa maitrise semble rudimentaire. Se rendre compte que ses capacités sont hors de contrôles, s’asseoir dos au comptoir sans pouvoir voir arriver la serveuse, deux points qui l’agaceraient normalement. Maintenant, ce n’est point une touche agacée mais la curiosité qui gagne en puissance. Il cherche quelque chose, ose-t-elle espérer que c’est peut-être même là quelqu’un qu’il tente à retrouver. Intriguant, captivant, au point d’en oublier le retour de l’innocente humaine. Pourtant cette fois il ne semble pas l’observer, ni s’intéresser à elle. L’espionne soutient le regard, ne cille pas alors qu’elle commande un simple gin, ce au lieu d’une bouteille de vin dont elle compte profiter plus tard. Quand ses pensées ne seront pas exclusivement tournées vers l’aboutissement d’une curiosité mal placée. Et sa question n’a aucun sens, car elle n’a pas fait ces efforts pour partir aussi facilement.
Pourtant c’est un sourire sincère qui vient d’abord lui répondre, trop doux, teint d’une touche de tristesse dont seules les âmes tourmentées ont le secret. « Je ne souhaite pas mourir de froid. » lui répond-elle brièvement. Est-ce un don quelconque, mutation dont tant de documents manquent quelconque notation. Ou peut-être est-ce autre chose, ce même détail qui l’empêche de suivre la direction proposée, de poser son regard sur deux ombres que lui distincte bien mieux qu’elle. Le prochain frison n’est pas dû au froid. Quant à Yelena, elle se contente de croiser les bras en faisant mine de s’appuyer légèrement sur la table, l’unique but est une question de volonté. Faire cesser ces satanées cellules, les obligées à s’arrêter. Autant demander à l’énigme en face d’elle de se dévoiler au grand jour. « Pourquoi me suivre si tu sais ce pourquoi je suis là ? » Chacun son tour. Elle ne peut le faire parler, pas plus qu’il ne pourrait lui tirer quelconque information sur son passé. Ils ont peint une image cruelle, dangereuse pour ceux qui ont dû la supporter. Sans doute plus suicidaires que braves, dans ce cas, car elle ne voit de monstre sous les traits de Narciso. Seulement le regard d’un mort, animé par une lueur enfantine qui beaucoup interpréteraient d’une autre façon.
Elle revient vers eux et ce n’est pas sa présence qui interpelle ni le ton de sa voix quand elle pose les verres devant eux. L’Adaptoid ignore ce qui en est, l’observe attentivement pour ensuite poser ses prunelles sur une autre silhouette. C’est la Veuve Noire en elle qui est capable de discerner le vrai du faux. Ce qui est, ce qui n’est pas. Et lorsque son regard se pose sur son interlocuteur, elle semble lui poser une question à laquelle il ne risque pas de lui répondre. À moins de lui expliquer le triste sort des jumeaux. « Ma curiosité me perdra. » Fait.« Mais en es-tu seulement encore capable ? Peux-tu rencontrer un mortel et vouloir savoir, du plus profond de ton être, qui il est, et non ce que la vie a fait de lui ? » On pourrait croire que ça ne rime à rien, mais c’est le but. Sans doute cherche-t-elle à lui insuffler la confusion. Ou l’appétence dont tous sont capable mais peu résistants. Il l’a voulu sincère, elle l’est.
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« Une mort est un cadeau. » Le regard de Victor semble une nouvelle fois se fixer sur quelque chose, ou plutôt quelqu’un, que d’autres ne voient pas. L’espionne s’attarde autant sur ce vain détail que sur les paroles de son interlocuteur. Ils ne sont certainement pas du même avis, côtoient la mort d’une tout autre façon malgré le fait que c’est loin d’être le cas. « J’espère que tu sauras apprécier celle qu’on t’offrira. » Elle penche légèrement la tête, l’observe attentivement sans chercher à savoir s’il la menace. Car ce n’est en aucun point une menace, il n’en fait pas à l’instant et cet intention elle peut la reconnaître. « J’en doute. » lui dit-elle d’une voix douce. Yelena veut vivre, a toujours aimé vivre et ce même quand elle se lève le matin en ayant l’impression de n’être qu’une coquille vide. Un pion parmi d’autres qui aime se croire plus. C’est peut-être là sa plus grande erreur, il peut sans doute le voir, l’interpréter, qui sait. « …mais ce n’est pas le froid qui te tuera. » Non. Bien évidemment que non. Son sourire précédemment sincère s’efface lentement, laisse place à l’hésitation avant que ça aussi ne disparaisse. Après tout, elle reste une Veuve Noire et la mort sera au final sa seule récompense. C’est le regard de Victor qui l’intrigue à nouveau. Les couleurs qui semblent se présenter, il peut les voir bien mieux qu’elle et s’en rendre compte est inquiétant. L’Adaptoid devrait lui aussi voir, tout est reproduit, sans exception.
« Dans le mesure du possible, oui. » La peur est plus facile à manier, à provoquer qu’un sentiment de loyauté. Ce dernier peut facilement disparaître alors que la crainte d’un être pour un autre reste toujours présente. Diminué, dans certains cas, mais tout de même présents. Elle ne daigne pas répondre à sa question lui ayant également ignoré la sienne. Pourtant elle se la pose elle-même, sait d’avance qu’aucune réponse ne pourra lui être apportée. Chaque énigme qui en reste une doit toutefois avoir le mérite d’avoir intéressé quelqu’un. Et l’ukrainienne se sent mal-à-l’aise, l’impression d’être observée la fait tiquer mais personne ne s’intéresse d’aussi près à eux. Si ce n’est l’homme en face d’elle et les deux ombres à ses côtés. Ce ne sont pourtant pas des ombres à proprement parler, elle distincte des formes qui leurs donnent un air humain. Quelques couleurs qui n’ont pas leur place dans ce qui est sans doute l’autre monde. Elle qui ne croît en rien ni personne si ce n’est la vie et le néant qui suit.
Il a bien plus froid qu’elle et son regard se pose un court instant sur ce point de contact. Tout ce qu’elle croyait savoir est faux. C’est encore pire et l’espionne se rend compte que ça ne l’effraie pas. Ce qui en soit est une véritable révélation. Leurs regards se croisent alors qu’ils abandonnent tous les deux leur contemplation. Une question, une autre, dont elle ignore réellement la réponse. Une part d’elle sait que la petite fille aux yeux bleu qu’elle fût il y a bien longtemps lui aurait répondu ce qu’elle considère aujourd’hui totalement absurde. Se perdre dans le regard de ce qu’elle sait à présent être plus qu’un mutant et en être brusquement arraché par un murmure qu’elle ne devrait entendre. Il n’y rien et soudainement ils sont là. Deux visages, mystère incohérent. Pendant que l’Adaptoid les observe, Victor s’éloigne, semble partir aussi loin que la banquette le lui permet. Le prochain murmure est tout aussi incompréhensible mais lui fait l’effet d’un coup de marteau à la tempe. C’est une douleur qui s’installe, progressivement mais sûrement. La peur des jumeaux est un mystère insondable. Lui sait, elle ignore. Parfois, il vaut mieux s’en tenir à son propre domaine et ne pas chercher à comprendre celui des autres.
« Si tous les mystères venaient à être résolu, nous n’aurions plus grand-chose à découvrir. Donner un nom à ce que tu es serait tout aussi désolant. » L’on veut parfois connaître la vérité et découvrir que les mensonges étaient une solution plus acceptable. Moins pénible dans ce monde construit de peine et de sang. D’autres, comme Yelena, n’ont jamais vécu loin des mensonges et de la tyrannie des puissants. Si son regard s’attarde sur ce qui aurait pu devenir une jeune femme ravissante, c’est sans doute parce que dans sa tourmente, elle a toujours été attirée par ce qui lui est le plus semblable. « Certains disent que ce qui permet d’avoir pitié est un sentiment inné. Il semblerait qu’on ait oublié de m’en informer. » Ses prunelles croisent une dernière fois celle de Victor, du moins sciemment. Yelena n’est pas certaine de vouloir voir au-delà de ce qui est absent. « Ta réalité semble plus douce que l’image qu’on lui a donné. » Il est étrange, certes, dans ce monde où les morts semblent attirés par sa personne, n’est-il pas plus sage d’admettre qu’il n’est pas dément ? Fou, voilà le mot que certains n’hésitaient pas à braver. Eux qui n’ont aucune idée de ce qu’est réellement la folie, car même ça, les enfants et leur bienfaiteur au milieu, ce n’est en rien une folie mais une illusion éphémère.
L’ukrainienne vide son verre, quelques gorgées qui ne l’aident en aucun cas à revenir en ce lieu. Quelque chose souhaite l’entraîner à le quitter, à s’éloigner rapidement et contre son gré. C’est amusent car elle se fie énormément à son instinct mais peu en de tels occasions l’ignorer complètement. « Viendras-tu me rendre visite ? » Quand je ne serais plus que matière organique. Quand la terre ou l’un ou l’autre scientifique fou aura décidé de tenter une nouvelle expérience. Nul besoin de le préciser, il sait qu’elle ne parle pas d’un lendemain ou d’un prochain rendez-vous inattendu.