Ils sont nombreux à avoir rejoint la x-mansion, depuis quelques semaines. Personne ne s’attendait à un tel afflux, ici. Mais chaque jour, des mutants sont arrivés, cherchant un refuge, un endroit qui leur garantirait la sécurité dans un monde où ils ne peuvent plus évoluer librement sans être pointés du doigt. Fort heureusement pour eux, des places se sont libérées dans les dortoirs, ces dernières semaines. Kitty a vu avec un sourire amer de nouveaux pensionnaires envahir les chambres qui appartenaient à ses amis, ses camarades de classe. Elle aimerait se réjouir de cette affluence. Vraiment. Mais il n’y a rien de réjouissant dans ce qui est en train de se passer. Si des chambres sont vides, c’est que d’autres sont partis. Si des mutants arrivent, c’est qu’ils ne peuvent aller nulle part ailleurs qu’ici, parce que le monde est de plus en plus cruel. Kitty a toujours rêvé que l’institut soit plein de vie, rempli à craquer. Cet endroit représente tout ce en quoi elle a toujours cru, tout ce qu’elle a toujours défendu. Elle voulait qu’il se développe, oui, mais pas comme ça. Il n’y a que du déchirement dans les yeux des nouveaux pensionnaires. Que de la tristesse et souvent, aussi, beaucoup de colère. Ce n'est pas facile à gérer, pour eux comme pour tous les habitants originels de l’institut. Tout est devenu plus sombre, plus… adulte, ici.
Kitty pensait avoir franchi un cap en intégrant les x-men, elle pensait qu’une nouvelle page de sa vie commençait. Mais aujourd’hui, elle se rend compte que la page ne s’est tournée sur son enfance que quand Magneto et ses compagnons se sont introduit dans l’institut pour lui arracher une partie de cet espoir et de cette famille qu’elle s’était construits. Tout a changé, tout est différent. Pendant quelques jours, elle a eu du mal à croire à ce qui s’était passé. Elle avait l’absurde impression que Malicia allait surgir au détour d’un couloir, que son voisin de classe, Rupert, viendrait encore frapper à la porte de son dortoir pour qu’elle lui rappelle les devoirs à faire. Elle n’a pleinement réalisé qu’ils ne reviendraient pas quand, il y a quelques jours, on a attribué la chambre de Danny à un nouveau pensionnaire. C’est Ororo qui a accompagné l’homme, que Kitty connaissait de vue parce qu’il était membre de l’équipe du Shield responsable des contacts avec la x-mansion, dans ses nouveaux appartements. Mais la jeune étudiante était là, à observer dans l’angle du couloir, les sourcils froncés. Elle ne s’est rendue compte que quand le goût du métal s’est répandu sur sa langue qu’elle se mordait la lèvre. Elle n’est pas restée plus longtemps, incapable de rester plus longtemps à contempler la scène.
On ne lui a pas donné le choix. On ne lui a pas donné de temps. Il a fallu qu’elle s’adapte, qu’elle accepte, qu’elle surmonte. Que pouvait-elle faire d’autre, de toute manière ? On compte sur elle, à la x-mansion. Plus même qu’elle ne l’aurait imaginé. On lui demande d’accueillir, de guider, et avec les esprits les plus jeunes, de conseiller et d’écouter. Et elle le fait, parce qu’elle doit le faire, parce qu’elle doit être un modèle, un pilier pour ceux qui ont perdu tous repères, comme Ororo l’a été pour elle. Et depuis quelques jours, on lui a confié une mission : Raphaël Avery. L’homme qui dort dans la chambre de Danny, le comparse de Sacha. Et elle sait déjà que ça ne va pas être une partie de plaisir.
Quand elle arrive dans la cuisine, l’homme est devant une tasse de café, le visage un peu fermé. Mais Kitty arrive comme d’habitude, avec son sourire et sa démarche de lutin, passe à travers l’ilot central parce que pourquoi le contourner quand on est intangible ? et commence à farfouiller dans la boîte à thé. « Bien dormi ? » demande-t-elle gentiment. « Je peux m’asseoir à côté de vous, ou vous préférez que je vous laisse seul ? » Après plusieurs années à côtoyer Logan, Kitty sait bien qu’il vaut mieux demander la permission…

Il ne pensait pas qu'il se retrouvait un jour héberger à la X-Mansion. Il pensait avoir trouvé sa place au sein de l'équipe BRAVO. Malgré quelques désaccords avec Sacha, il s'y sentait bien. Il avait de quoi ouvrir son esprit à d'autres choses afin d'en apprendre toujours tout en aidant les autres. Jusqu'ici, il avait d'ailleurs réussi à cacher sa condition de mutant à toutes les personnes qu'il côtoyait - exceptions faites du professeur Xavier et sa fidèle bras droit, Ororo Munroe. Ces deux-là prenaient un malin plaisir à lui rappeler son pouvoir mais surtout le fait qu'ils pourraient l'aider à le maîtriser. Ce qu'ils ne comprenaient pas, c'est qu'il ne voulait pas maîtriser son pouvoir. Il ne voulait pas en parler, ne voulait pas l'utiliser. Il souhaitait juste l'oublier et qu'il disparaisse à jamais.

Il savait qu'il se voilait la face. Il l'avait toujours fait. C'est d'ailleurs ce maudit pouvoir qui avait précipité sa venue à la X-Mansion. Le gouvernement avait décrété que chaque membre de chaque organisation gouvernementale devrait passer un test afin de déterminer s'ils possédaient le gêne mutant ou non. Raphaël savait très bien que cette décision allait amener à bien d'autre choses, beaucoup moins réjouissantes. Que ferait les hommes de pouvoirs quand ils se rendraient compte des possibilités de son pouvoir et, surtout, du fait qu'il ne le maîtrisait pas du tout ? Ce ne serait sûrement pas bon pour lui... Alors quand Sacha avait déterminé qu'il irait se réfugier à la X-Mansion, il n'avait pas hésité un seul instant à le suivre. Xavier leur avait jeté un regard doux, compréhensif, quand il les avait vu débarqué chez lui et leur avait simplement ouvert la porte, leur montrant leur nouvelle chambre. Il avait aussi jeté un regard concerné et insistant au génie qu'il avait pris soin d'ignorer. Il n'était pas là pour maîtriser sa malédiction, loin de là...

Et ce matin ne faisait pas exception à la règle, malgré la tentative d'Ororo de lui parler de tout ça, il l'avait simplement ignoré, se dirigeant vers la cuisine afin de prendre une bonne tasse de café. Il n'était pas prêt à discuter ou à écouter un discours moralisateur sur le « bonheur d'être un mutant », surtout pas alors qu'il venait de se lever et qu'aucune caféine ne coulait dans ses veines. Il avait pu entendre le soupire désabusé de la jeune femme mais elle avait fini par partir sans un mot.
Une fois son sucre mit dans son café, il s'installa devant l'ilot central sur une chaise haute afin de le boire tranquillement. Alors que la première gorgée passa la barrière de ses lèvres, il lâcha un soupir de soulagement en essayant d'oublier les objets personnels qui se trouvait dans la chambre qui lui avait été attribuée. Il avait bien vu que le dortoir avait été vidé avec hâte mais il ne voulait pas poser des questions sur la photos de ce garçon sombre qu'il avait trouvé en présence de Kitty Pryde, la jeune protégée d'Ororo Munroe. En parlant du loup, Raphaël la vit traversée à l'aide de son pouvoir d'intangibilité l'ilot central avant de farfouiller dans une boîte. Les rares fois où il l'a croisé, Raph l'a trouvé rayonnante et accueillante - peut-être même trop. Il devait falloir un sacré courage pour contenir une telle énergie.

« Bien dormi ? » Son ton est doux, gentil, et le génie ne veut pas être impoli mais il aurait préféré que le silence reste en place. Il n'a pas la force pour une discussion mais il ne peut pas non plus ne pas répondre, non ? Il sait qu'il n'a aucune connaissance niveau relation humaine mais quand même... « Je peux m’asseoir à côté de vous, ou vous préférez que je vous laisse seul ? » Raphaël observe d'un oeil vague la chaise que désigne la jeune femme avant d'avaler une autre gorgée. « Le siège est libre. » Sa réponse peut paraître brusque pour quelqu'un qui ne le connaît pas, mais c'est son ton naturel. Le fait que son visage reste en plus inexpressif ne doit pas aider. Il hésite pendant quelques instants, jette un regard incertain à la jeune femme avant de se tourner légèrement vers elle pour mieux l'observer. « J'ai bien dormi merci, et toi ? » Le tutoiement n'est pas un manque de respect pour lui, c'est juste une manière de lui faire savoir qu'elle peut le tutoyer. « Tu es Kitty Pryde, c'est bien ça ? La petite protégée d'Ororo munroe ? » Ça pourrait paraître condescendant dit de cette manière, mais ce n'est pas le cas à nouveau. Il se retient d'ailleurs difficilement de parler du dossier de la jeune femme qu'il a lu et mémorisé, comme tous les dossiers des résidents présents à la X-Mansion. Il avale distraitement une gorgée du doux breuvage, en attendant la réponse de la jeune femme.