let me come home

Jemma, Jemma, Jemma. Cinq lettres. Un prénom. C'était la seule chose à laquelle Daisy était capable de penser depuis que cette dernière lui avait passé un coup de fil quelques jours plus tôt. Ainsi ne l'avait-elle pas oubliée, n'avait-elle pas rayé son numéro de téléphone de sa liste de contact. Jemma. Cinq lettres aux allures si familières et pourtant si lointaines. Comme si elle n'avait plus vu ces dernières s'afficher sur l'écran de son téléphone portable depuis une éternité. Elles avaient été occupées. Ils avaient été occupés, à vrai dire. Elle, Jemma, Fitz, Coulson, May. Même Bobbi, Mack et Hunter. Ça faisait mal de penser combien ils avaient été proches les uns des autres et pire encore, comment leur équipe avait implosée aussi rapidement. Démantelée de toute pièce. Daisy ne pouvait en blâmer aucun d'entre eux, Jemma encore moins. Pourtant, c'était elle qui avait mis les distances entre elles, c'était elle qui s'était refermée comme une huître après ce qui lui était arrivée. Encore une fois, comment aurait-elle pu la blâmer ? Peut-être aurait-elle dû insister, aller vers elle encore et encore, forcer les remparts un peu trop solides que Simmons avait dressé autour d'elle. Et peut-être pas. C'était ça l'ennui : elle ne pouvait jamais être sûre de rien. Brusquer Jemma ou la laisser seule ? Lui laisser du temps ou l'étouffer ? Et puis, dans un élan de sagesse qu'elle ne savait même pas elle-même qu'elle possédait, elle avait décidé que le mieux était de la laisser respirer, de lui donner le temps dont elle avait besoin. Après tout, elle devait savoir, ressentir même que peu importait le moment, l'heure, le jour, Daisy serait toujours là. Était-elle sentimentale ? Totalement. Comment ne pas l'être, alors que cette équipe avait été tout ce qui se rapprochait le plus d'une famille à ses yeux ?

« Qu'est-ce que tu fais ? » Son téléphone glissa aussitôt d'entre ses fins doigts. Le coeur battant le chamade, elle releva le regard en direction de Lincoln qui arborait un sourire amusé. L'impression d'être une petite fille prise la main dans le sac, elle releva le menton et se racla la gorge, comme pour se donner plus de contenance. Contenance, ah. Surtout se donner le temps de chercher une excuse. « Tu stalkes encore le compte de Jemma, sérieux Daisy ? » Elle se figea, puis soupira et planta son regard dans celui du jeune homme avant de hausser les épaules, l'air de rien. « Pas du tout, je t'envoyais un message pour te rappeler de ne pas oublier la... » Il ne lui laissa pas le temps de terminer sa phrase. De la besace qui traînait sur son épaule, il sortit une bouteille de vin et boîte de cookies qu'elle avait fait plus tôt dans la journée. Première et dernière fois qu'elle ne brûlait pas de fournée, vous pouviez en être certains. Il tendit la boîte et la bouteille à Daisy qui haussa un sourcil. « Et bah tu vois, même pas besoin que je termine d'écrire mon message. » Il leva les yeux au ciel, cherchant à se donner un petit air exaspéré tandis qu'elle glissait la bouteille dans son propre sac. Il la suivit à l'extérieur des bâtiments du Shield, s'arrêta devant sa voiture, s'appuyant contre le capot de celle-ci. Elle ouvrit la portière du côté passager, y déposa son sac, puis fit le tour. Avant même qu'il ne se décide à ouvrir la bouche pour lui poser la question, elle savait déjà qu'il allait le faire. « T'es stressée ? Enfin, ça fait un sacré bail que tu ne l'as plus vue. » Daisy se planta alors devant lui, les bras croisés. C'était la posture qu'elle prenait chaque fois qu'elle cherchait à se donner des allures confiantes, May le lui avait fait remarquer quelques temps plus tôt. Elle changea aussitôt de position, s'appuya sur un pied, puis sur l'autre. « Stressée ? Pfff. » Elle laissa un léger rire lui échapper et une boule se forma dans sa cage thoracique, l'empêchant bien vite de respirer correctement. « Pas du tout. » Et si Jemma ne l'appréciait pas ? (ou plus, du moins). Après tout, elles étaient tout ce qu'il pouvait y avoir de plus opposé sur terre. Le coeur et la raison. L'insubordination et la discipline. La déraison et la sagesse. Elle n'avait jamais compris comment ça avait si bien fonctionné entre elles et s'en fichait un peu jusqu'à présent. Elle s'était toujours dit que leur force à elles, c'était la différence. Jusqu'à-ce que l'idée que Jemma se soit fait de nouveaux amis chez Stark qui avaient bien plus de points en commun avec elle que Daisy ne lui traverse l'esprit. Des biochimistes, par exemple. Au fond, elle ne savait pas trop si elle espérait que Jemma se soit épanouie là-bas et ouverte aux autres ou qu'à l'inverse, elle n'ait pas trouvé chaussure à son pied, qu'elle regrette l'équipe qu'ils étaient au Shield. C'était égoïste. Et horrible. Elle chassa bien rapidement ces pensées négatives de son esprit.

La voiture garée, Daisy jeta un coup d'œil à l'heure avant d'éteindre le gps dans lequel elle avait entrée l'adresse de Simmons envoyée par mail. Elle avait l'impression d'être aussi stressée qu'un jour de rencart. Pour peu, elle se moquerait presque d'elle-même et de l'état dans lequel elle se mettait. Ses doigts se liaient et se déliaient nerveusement sur la bandoulière de son sac alors qu'elle se trouvait devant la porte de Jemma, jetant de fréquents coups d'œil autour d'elle, puis faisant la navette entre le petit bout de papier et le numéro de l'appartement. Qu'allait-elle bien pouvoir lui dire ? Daisy recula aussitôt d'un pas. Se pinçant la lèvre inférieure à l'aide de ses doigts, elle énuméra une liste des sujets qu'elle pourrait évoquer avec Jemma et... Et depuis quand était-elle devenue si méticuleuse ? C'était absurde. Elle devenait ridicule. Elle appuya sur la sonnette d'un geste brusque, se jetant presque dessus. Les secondes s'écoulèrent, le ventre de Daisy se noua. Pourquoi se mettre dans un tel état pour si peu ? Laisse-moi réfléchir... Peut-être parce que Jemma s'est détournée de vous pendant des mois ? Elle devenait folle, avec cette impression de s'être divisée en deux : la Daisy confiante et celle remettant tout en question. Alors qu'elle était en pleine dualité intérieure, la porte s'ouvrit, laissant apparaître dans l'encadrement de cette dernière Jemma. « Jemma. » Sa voix était calme, plus qu'elle ne l'avait imaginé. Peut-être était-ce dû à ce sentiment de plénitude qu'elle ressentait maintenant qu'elle se trouvait face à son amie. Elle ne s'était pas réellement rendu compte combien elle lui avait manqué, jusqu'à-ce qu'elle se retrouve face à face avec elle. « Je... Tu... » Elle laissa un léger rire lui échapper, puis un soupire, comme si toute sa nervosité qu'elle avait en elle s'en allait avec lui. « Je suis tellement heureuse, tu peux pas savoir. » Elle déposa son sac au sol, puis s'avança d'un pas, oubliant toute la liste de recommandations qu'elle s'était faite pour elle-même. En tête de cette dernière trônait le fait de ne pas étouffer Jemma. Elle enroula ses bras autour de cette dernière et la serra contre elle. Elle se fichait bien qu'elle réponde à son étreinte ou non, au final peut-être en avait-elle plus besoin qu'autre chose. Parce qu'elle n'avait pas seulement perdue une amie, une meilleure amie, elle avait perdu une soeur qu'elle cherchait à retrouver.

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Daisy était heureuse, sincèrement. De la voir, premièrement, mais pas que. Contente qu'elle ait décidé elle-même de chercher à la voir, justement. Contente de pouvoir la serrer entre ses bras, contente d'entendre le son de sa voix. Douce et rassurante, comme elle s'en souvenait. Toutes ses peurs s'envolèrent bien avant que Jemma n'ait eu le temps de lui répondre, le simple contact avec elle suffit. Comme la présence apaisante d'une soeur. Parce que depuis qu'elle l'avait rencontrée, c'est ce qu'elle avait été, ce qu'elle était, ce qu'elle, Daisy l'espérait, serait toujours. « Moi aussi, je suis heureuse. », lui confia-t-elle finalement d'une petite voix fluette. Aussitôt leur étreinte terminée, la jeune femme remarqua combien ses yeux étaient embués de larmes, mais ce n'était pas grave. Parce que les siens l'étaient. Jamais elle n'avait imaginé que des retrouvailles avec son amie pourrait lui procurer ce genre de sentiment, douce tristesse mêlée à la plénitude. Pour tout dire, ça n'avait pas été facile ces derniers temps : Jemma travaillait dans un endroit, Daisy travaillait dans un autre. Elle se surprenait parfois à penser à elle, à ce qu'elle faisait, mais surtout si elle appréciait sa situation. Elle ressentait un pincement au coeur, tout au plus. Mais être confrontée de la sorte était une chose bien différente. C'était comme se prendre une claque. Elle se rendait compte plus que jamais combien l'absence de sa meilleure amie était douloureuse, mais elle savait que ça ne serait pas le pire. Non, le pire serait quand elle retournerait travailler et qu'elle ne la verrait pas. « Entre, le salon/salle à manger est sur ta gauche », lui proposa-t-elle tandis que Daisy attrapait son sac et entrait dans l'appartement, jetant un regard circulaire autour d'elle. C'était joli, elle n'allait pas mentir. Mais ça lui semblait tout aussi terne et dénué de vie. Elle lui aurait bien volontiers fait un compliment sur la décoration, mais qu'aurait-elle pu dire ? "oh, c'est... Mignon ?" Non, définitivement, c'était hors de question qu'elle se mette à discuter de ça. Et puis, connaissant la maladresse dont elle était capable de faire preuve par moments, elle finirait très certainement par froisser la jeune biochimiste. Comme si elle lisait dans ses pensée, Jemma lui expliqua : « Cet appartement est petit mais… Il me suffit. C'est toujours plus grand que nos cabines dans le bus. » Et elle réussit à arracher un petit rire à Daisy qui se remémora combien les cabines du bus étaient étroites. C'est vrai qu'à côté, son appartement semblait bien plus confortable, malgré la tristesse de lieux. Toutefois, à l'image de la Jemma qu'elle connaissait, à savoir méticuleuse, son domicile était impeccable. « Après les cabines du bus, je te rassure, je ne trouve plus rien petit », tenta-t-elle de plaisanter en lui lançant un regard amusé. « Ton appartement est très beau », se surprit-elle pourtant à dire, malgré la petite voix intérieure qui lui avait ordonné de tenir sa langue quelques instants plus tôt. C'était vrai, elle ne mentait pas. C'était beau, mais froid. Mais son amie posa une main sur son bras, la tirant brusquement de ses pensées. « J'espère que ce n'a pas trop été compliqué pour toi, de prendre une soirée de libre... » Elles échangèrent un regard, Daisy secoua la tête de façon négative avant de lui attribuer un sourire qu'elle voulait rassurant. « Tu rigoles ? Ne dis pas de bêtises, j'attendais ce moment depuis... » Elle marqua une pause, sembla réfléchir pendant quelques instants. « Une éternité. » Nouveau sourire. Elle glissa sa main sur celle de Simmons, la serrant doucement. « J'avais vraiment, vraiment envie de te voir. » Son coeur se réchauffa un peu plus. Au son de sa voix, elle comprit que c'était vrai. Qu'elle ne mentait pas ou ne tentait pas d'enrober les choses pour qu'elles paraissent plus douces ou pour ne pas la froisser. Tout ça devenait trop émotionnel. Si elles continuaient comme ça, Daisy allait finir par éclater en sanglots, comme un enfants qu'on aurait empêché de voir sa soeur à laquelle il tenait énormément.

Jemma toussota pour reprendre contenance, Daisy lâcha l'emprise qu'elle exerçait sur sa main et haussa les épaules quand elle lui proposa quelque chose à boire. En croisant son regard, elle se rendit compte combien cette dernière semblait maussade et ça lui fit mal au coeur. Il était hors de question qu'elle reste dans cet état alors qu'elles étaient à deux. Elle voyait bien qu'elle n'était pas heureuse et si elle ne chercha pas à lui en parler directement, elle pensa à tout ce qu'elle pourrait faire pour lui remonter le moral. Pendant un instant, elle ne dit donc rien et puis, un éclair lui traversa le regard. « Oh ! » Elle sursauta presque, se remémorant la bouteille de vin que Lincoln avait été cherchée spécialement pour ses retrouvailles avec Jemma et les cookies qu'elle avait cuisiné avec Hunter et Bobbi. Cookies qui serviraient plus de dessert qu'autre chose, mais c'était la seconde fois qu'elle en cuisinait et qu'elle ne les faisait pas brûler, alors elle en était fière. « J'ai apporté des trucs », se contenta-t-elle d'expliquer en agitant les mains, le sourire jusqu'aux oreilles. Des trucs, c'était vague, mais Daisy était à présent euphorique : si elle devait puiser toute son énergie pour qu'un vrai sourire se dessine sur les lèvres de son amie, alors elle le ferait. Et les cookies lui redonnerait de la force, dans tous les cas. « Alors, j'ai ceci », lui dit-elle en sortant une bouteille de vin de son sac, relevant le regard pour le plonger dans celui de son interlocutrice. « C'est Lincoln qui a choisi, j'y connais rien, mais il m'a juré qu'il était très bon. » Elle se racla la gorge, lui confia la bouteille et plongea une nouvelle fois la main dans son sac. Elle en sortit une boîte qu'elle agita légèrement avant de se rendre compte qu'elle risquait d'émietter sa préparation.« J'ai fait ça pour toi. Non, on a fait ça pour toi », lui dit-elle en dégainant la boîte sous son nez, un sourire victorieux à nouveau dessiné sur son minois. « La seule raison pour laquelle ils ne sont pas brûlés, c'est parce qu'Hunter me hurlait dessus toutes les cinq minutes pour que je surveille la cuisson », lui confia-t-elle en levant les yeux au ciel, se remémorant les ordres qu'il n'avait cessé de lui donner et les remontrances reçues parce qu'elle avait dépassé le temps de cuisson d'à peine une minute. « C'était l'idée de Bobbi. Et puis quand Hunter a entendu qu'on voulait cuisiner, il s'est mis en tête qu'on allait mettre le feu aux cuisines du Shield et... Bref. » Elle haussa les épaules, balaya tout ce qu'elle venait de dire d'un geste de la main. « Pourquoi on ne se verrait pas tous une fois ? Ils seraient tellement heureux de te voir. » C'était maladroit. Très maladroit. Alors qu'elle avait essayé de glisser ça de façon subtile. Sauf que Daisy et la subtilité, c'était comme Daisy et la cuisine : c'était la pire des combinaisons possible. Mais quoiqu'elle réponde, au moins elle ne pourrait pas se reprocher de ne pas avoir essayé.

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« Je serais très heureuse de les voir aussi. » Elle n'en doutait pas une seule seconde. Elle le ressentait bien au son de sa voix, elle la connaissait assez pour ça. Pourtant, elle savait aussi que si elle avait mis autant de temps pour la voir elle, elle en mettrait d'autant plus pour accepter de voir le reste de l'équipe. De l'ancienne équipe, nuance. Ce qui ne les empêchait pourtant pas de se voir dès que l'occasion se présentait. Pour préparer des cookies, en l'occurrence. « Un jour, peut-être. » Daisy hocha positivement la tête, comme pour marquer son accord. Elle devait prendre son temps, rien ne servait de la brusquer. Elle lui rendit alors son sourire : celui de Jemma était gêné, alors que celui de son amie était encourageant. Elle ne souhaitait qu'une chose, c'était qu'elle parvienne à s'épanouir à nouveau. Rien ne lui ferait plus plaisir, sincèrement. « Quand tu seras libre, fais-moi signe et j'arrangerais ça », lui confia-t-elle en fixant sur elle ses prunelles noisettes. Jemma comprendrait le sous-entendu, elle saurait interpréter ses paroles : dis-moi quand tu es prête et je dirais aux autres que tu l'es. C'était clair, elle n'avait pas besoin d'autres paroles pour exprimer sa pensée. Suivant les signes de son amie, elle se dirigea vers le canapé et y prit place, prenant le verre de vin qu'elle lui tendait. Elle n'était pas une grande connaisseuse, mais elle jeta un coup d'œil au liquide avant d'un boire une petite gorgée, comme si elle le testait. « Il est plutôt pas mal, Lincoln a bien choisi », fit-elle remarquer en haussant un sourcil, puis en déposant le verre sur la table basse qui lui faisait face, avant de se laisser légèrement glisser dans le dossier du canapé, prenant petit à petit ses aises. Daisy ne restait jamais mal à l'aise bien longtemps : d'ici quelques heures, elle serait certainement étalée dans le canapé comme si elle était dans le sien. Après tout, c'était Jemma. Et elle aurait trouvé ça normal qu'elle en fasse de même chez elle. C'était étrange, d'être séparée de la sorte d'elle et pourtant de s'en sentir tout aussi proche. En jetant un coup d'œil autour d'elle, une idée lui traversa l'esprit. La prochaine fois qu'elle viendrait, elle ferait encadrer le plus de photos possible. De Jemma et d'elle. De l'équipe. De Fitz, même. Et elle lui apporterait. Non seulement ça donnerait plus de vie à l'appartement, mais ça lui permettrait de rappeler à la jeune femme qu'ils étaient là, peu importait quand.

« Bon alors... Je veux tout savoir ! » Daisy sursauta presque, perdue dans ses pensées, cherchant ce qui pourrait aider Jemma à aller mieux. Elle se contenta d'hausser un sourcil, puis d'incliner légèrement la tête, comme pour l'inciter à continuer de parler. Lui dire ce qu'elle voulait savoir, exactement. « Comment tu t'en sors, en chef d'équipe ? Brillamment, j'en suis certaine. Tu as trouvé de nouveaux inhumains ? Vous arrivez à fonctionner tous ensemble ? On sait toutes les deux que les débuts d'équipes sont parfois difficiles... » Léger rire. Daisy se redressa légèrement, puis s'éclaircit la voix. « Olaaa, doucement Sherlock », se moqua-t-elle légèrement, un sourire taquin dessiné sur les lèvres. « A vrai dire, je... C'est vrai que les débuts d'équipe ne sont jamais faciles. » Elle marqua une pause, prit une profonde inspiration avant d'hausser légèrement les épaules. Elle hocha positivement la tête, comme pour appuyer ses dires. « On a trouvé pas mal d'inhumains, c'est vrai. Mais très peu acceptent de rester, beaucoup veulent continuer une vie normale, tu sais... » Elle pinça les lèvres, ses mains se mirent à jouer ensemble et ses doigts à danser. « Il y en a une qui est restée et il y a Lincoln. J'ai bataillé sévère pour qu'il accepte de rejoindre le shield. Entre nous, je crois que c'est l'effet May, elle a dû l'effrayer une fois », plaisanta-t-elle, se laissant à nouveau glisser dans le dossier du canapé sans s'en rendre réellement compte. Une chose était sûre, il était moelleux comme Daisy les aimait. Sans dire un mot de plus, elle observa le visage de Jemma s'assombrir, puis s'éclaircir à nouveau. Comme le soleil chassant le mauvais temps. « Mais et toi ? », finit-elle par lui demander en haussant un sourcil, réellement préoccupée par son amie et son quotidien au sein des industries Stark. « T'as déjà rencontré le big boss ? Tu bosses pour Iron Man quoi ! La grande classe. Et Pepper Potts ? Il paraît qu'elle est incroyable. Et...  » Elle se pinça les lèvres à nouveau, hésitant quelques instants à poser la question. « Jemma, est-ce que tu t'es fait des amis ? » Pour ne pas dire "j'ai stalké ton compte instagram et je n'y ai vu que des photos de livres." « Les livres, c'est cool hein, mais les êtres humains le sont tout autant des fois, tu sais. » Parce qu'elle se doutait bien qu'elle devait passer sa vie entre son job et les bouquins de Jane Austen. Ce n'était pas sain. Pas pour Jemma qui était une personne tellement chaleureuse de nature et qui pourrait se faire de nouveaux amis en un claquement de doigts. A moins que quelque chose ne la freine. « J'ai vu des photos sur ton Instagram... Comment les choses avancent entre May et Coulson ? J'espère que vous avez un plan. » Les yeux de Daisy s'illuminèrent soudainement. Elle plaça aussitôt la main devant sa bouche, comme pour masquer son excitation. Pire qu'un enfant, parfois. « Alors ces deux-là... » La réponse était brève, mais la jeune femme avait besoin de remettre se idées au clair pour pouvoir les exposer à son amie qui avait loupé un paquet de choses les concernant. « May est partie pendant un bout de temps. Elle s'est arrangée pour que je ne parvienne pas à la tracer, d'ailleurs », lui confia-t-elle, légèrement mauvaise de s'être fait duper aussi aisément, alors qu'elle se savait si douée avec l'informatique. « Mais j'ai cuisiné Coulson et crois-moi, il se passe un truc. Il n'est pas très bavard, mais son regard parle pour lui. » Elle marqua une pause, le temps de reprendre son souffle, avant d'enchaîner. « Oh t'inquiète, avec Ava on est sur le coup ! Et on a l'agent Carter de notre côté. L'aînée, Sharon, tu la connais ? » Daisy esquissa un nouveau sourire, le coeur léger. Elle n'avait plus parlé à quelqu'un avec autant de facilité depuis... Un très long moment. Bon, elle avait Mack et Hunter, mais ce n'était pas pareil. Non seulement ils étaient des hommes, mais en plus, elle n'aurait jamais un lien avec eux comme elle en possédait un avec Jemma.

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« Je suis contente que Lincoln soit resté, même si je me doute que ce n'est pas pour le Shield qu'il est là. » Le rouge lui monta aussitôt aux joues, elle se stoppa dans ses mouvements, le verre de vin à quelques centimètres de sa joue, avant de chasser ce que son amie disait d'un geste de l'autre main. « Lincoln et moi on est amis. » Pourquoi se sentait-elle obligé de le préciser, alors ? C'était vrai qu'ils passaient beaucoup de temps ensemble quand il n'était pas le nez plongé dans ses bouquins. Et même lorsqu'il l'était, elle trouvait toujours le moyen de l'en détourner. Avant que Jemma ne soulève le fait, elle n'y avait pas réfléchi plus que ça. Elle savait que Lincoln n'aimait pas le Shield, mais qu'elle avait réussi à le convaincre. Là s'arrêtait sa réflexion. Aussi s'empressa-t-elle de changer le sujet, de le dériver sur la jeune scientifique et la chance flagrante qu'elle possédait de bosser pour Stark. Une chance dont n'importe qui ne pouvait pas bénéficier. En même temps, ça n'avait rien d'étonnant. Jemma Simmons était la personne la plus intelligente qu'il lui ait été donné de rencontrer, en dehors de Leopold Fitz. Que Stark l'ait dans son camp ne pouvait qu'être un avantage non-négligeable, elle apporterait beaucoup de choses aux industries de ce dernier. Moins au Shield, en revanche. C'était triste. Elle respectait le choix de son amie, vraiment et elle la soutenait, même si ce n'était pas de façon directe. Pourtant, ça lui restait en travers de la gorge. Qu'elle soit partie, comme une voleuse. Elle passerait au-dessus, c'était évident. Elle passait déjà au-dessus, à vrai dire. Elle n'était pas rancunière et elle s'avérait incapable d'en vouloir à Simmons plus de cinq minutes. Pareil pour Fitz. Pareil pour tout le reste de l'équipe, en fin de compte. Elle tenait trop à ces derniers pour risquer d'abîmer leur relation en n'était pas assez tolérante ou quelque chose dans le genre.

Elle se mit à la questionner. Peut-être un peu trop abruptement, pensa-t-elle en la voyant paniquer. Même un aveugle aurait vu la tension qu'elle éprouvait, alors que les questions de Daisy étaient anodines. Du moins c'était ce qu'elle pensait jusqu'à-ce qu'elle pose le regard sur Jemma. Elle fronça alors les sourcils et se redressa légèrement, sa curiosité piquée à vif. « Je sais. » D'accord. C'était bref et direct au moins. Nouvelle tentative. « Jemma, dis-moi... C'est plein de gens comme toi là-bas. Qu'est-ce qui te dérange ? » Elle voulait savoir, elle voulait comprendre comment c'était possible, que quelqu'un comme elle ne parvienne pas à se lier. « Et bien sûr que j'ai rencontré le big boss. J'ai même rencontré d'autres personnes fascinantes. Tu vas être la plus jalouse du monde quand tu sauras que... J'ai vu Thor. En vrai. De mes propres yeux. » Les yeux de Daisy s'agrandirent, elle se mit à gesticuler comme une enfant qui ne tenait plus en place. Thor. Oh mon Dieu. Ah, c'était le cas de le dire. « T'as pris des photos ? Dis-moi que t'en as pris, que tu puisses me les passer et que je puisse les faire encadrer dans ma chambre. » Elle ferma les yeux quelques secondes, s'imaginait la silhouette parfaite du Dieu de la foudre. « C'était génial. J'ai collaboré plusieurs fois avec le docteur Banner. Le docteur Banner Daisy! Il est brillant, et bien plus sympathique que j'aurais pu l'imaginer. D'ailleurs, Tony Stark est plutôt agréable aussi, de ce que j'en ai vu. J'ai travaillé avec eux exceptionnellement une ou deux fois. Ils avaient entendu parler de ma carrière au Shield et du fait que je suis familière avec certaines... Missions impliquant des éléments extraterrestres donc.. Bref. J'aimerais te dire que je fais ça tous les jours mais non, c'est vraiment arrivé une ou deux fois. Le reste du temps, j'essaie de faire en sorte de ne pas m'ennuyer dans les laboratoires de Stark Industries.. » Une fois le moulin à paroles mis en route, impossible de l'arrêter. Sur ce point, Jemma ressemblait terriblement à Daisy. Sauf que généralement, elle parlait en blabla scientifique et la jeune inhumaine décrochait au bout de deux phrases. Souvent même avant, en fin de compte. Au final, ça ne l'étonnait pas le moins du monde, qu'elle parle de Banner et Stark avec des étoiles dans le yeux. Et ça lui faisait même plaisir. Tellement plaisir. De voir que dans son malheur, elle avait rencontré deux des esprits les plus brillants que la terre ait porté. Qu'elle ait rencontré des personnes à la hauteur de son talent. C'était certain qu'à côté de tout ça, le Shield devait lui sembler bien minable. Malgré la boule qu'elle avait dans l'estomac, la jeune femme sourit avec enthousiasme à la scientifique, tentant d'avoir l'air le plus sincère possible. « Tu t'ennuies dans les laboratoires de Stark ? J'y crois pas une seule seconde. » C'était vrai que c'était étrange de l'entendre dire ça, alors qu'elle avait senti l'euphorie dans le ton de sa voix, lorsqu'elle avait parlé de Banner et Stark. Quoique, comme elle l'avait si bien précisé, cela n'était arrivé qu'à quelques reprises. « J'suis sûre que Fitz serait aux anges, s'il pouvait rencontrer Stark », glissa-t-elle avec un sourire en coin, avant de poser son regard sur la jeune brune pour voir la réaction qu'elle allait adopter. Elle ne cherchait pas à la blesser, ni à ce qu'elle se braque. Elle aurait juste souhaité qu'elle se confie à elle. « Et ne crois pas que je n'ai pas remarqué que t'avais changé de sujet. Jemma, si tu t'es pas fait d'amis chez Stark, c'est pas grave. » Dommage, mais pas grave. Elle marqua une légère pause, aussi les sourcils et releva le menton, adoptant un petit air taquin, espérant détendre l'atmosphère. « Tu sais quoi ? Au moins, ça te donne l'occasion de m'inviter plus souvent. J'voudrais pas que mon statut d'amie soit remplacé par un petit laborantin de chez Stark. »

Elle se mit finalement à dériver de sujet, s'étendant sur Coulson et May. Les yeux de Jemma s'écarquillèrent lorsqu'elle évoqua son alliance avec Ava et l'agent Carter. Une entente non-négligeable, c'était une chose certaine. Dès que l'une d'entre elles entendait quelque chose d'intéressant, elle s'empressait d'en faire part aux autres et inversement. C'était pratique, d'avoir six oreilles à la place de deux. D'avoir trois cerveau à la place d'un seul. « Tu... Tu as réussi à te mettre les agent Moriarty et Carter dans la poche ? Mon dieu Daisy ! Tu es géniale ! Mais comme quoi, ça prouve bien que nous n'inventons rien. Tout le monde le voit, même si eux ne s'en rendent pas encore compte. Ces deux-là vont finir par se trouver, je te le dis. » Elle lui lança un regard en coin, sa dernière phrase résonnant quelques instants dans son cerveau. En boucle, comme une longue litanie incessante. Ces deux-là vont finir par se trouver, je te le dis. Mouais. Elle en connaissait deux autres qui allaient se trouver et si elle devait les pousser au fond d'un trou à deux pour qu'ils arrangent les choses, alors elle le ferait. Ou les enfermer à deux dans une pièce. Ou les bloquer à deux dans un ascenseur. Le coup de l'ascenseur fonctionnait toujours. Dans tous les cas, ce n'était pas les idées qui manquaient. Pour ce genre de situation, elle s'avérait particulièrement douée. Elle aimait voir les gens heureux. Elle aimait qu'ils aient leur happy end. Jemma et Fitz aurait la leur. Tout comme May et Coulson. Bien qu'elle soupçonne sérieusement qu'ils n'aient pas besoin d'elle. « C'est certain. Tu sais, y'a des regards qui ne trompent pas », lui fit-elle remarquer en attrapant son verre de vin, buvant quelques gorgées. Phrase à double signification. « Et avec Ava et l'agent Carter, ça ne peut que fonctionner. » Ses yeux brillèrent. Elle admirait Carter et l'entente avec Moriarty était géniale. Elle l'adorait. « S'il y a quelque chose que je peux faire d'où je suis... N'hésite pas, je serai un soldat discret et efficace. On va presque pouvoir créer une équipe spéciale, en fait. » Elle tenta de prendre un air sérieux, releva le menton quelques instants, puis hocha la tête. « S'il y a quelque chose que vous pouvez faire, je vous transmettrai la mission, soldat. » Elle pinça les lèvres, essayant de rester sérieuse le plus longtemps possible. « Mission : Philinda. » Mais elle laissa échapper un rire franc. Simmons lui a terriblement manqué. « J'ai entendu Coulson nous surnommer le trio invincible. Ou infernal. En fait, ça dépend de son humeur, je crois. Du coup, si tu nous rejoins, on sera le quatuor invincible, la grande classe. » Et dire que fût une époque elle refusait de suivre Daisy dans ses plans. Généralement foireux, certes, comme quand elle avait réussi à la convaincre de lui faire confiance au hub. Et qu'elle avait assisté à une scène qui lui semblait complètement irréelle : Jemma perdant ses moyens et tirant sur un agent. Et puis, Daisy l'avait envoyée quémander l'aide de May qui, après maintes rouspétances, l'avait tirée d'affaire. Oui, définitivement, les plans de la jeune inhumaines étaient toujours déficients.

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Lincoln. Dériver sur ce sujet n'est pas la meilleure idée qui soit, Daisy n'aime pas particulièrement en discuter. La seule fois où elle l'a fait, c'était avec Fitz et elle ne sait toujours pas comment il a fait pour qu'elle parvienne à se confier à lui aussi facilement. « Bien sûr, que vous êtes amis. » Elle aperçoit l'étincelle dans le regard de son amie, c'est impossible à rater, un aveugle ressentirait le malice qu'elle lit dans ses yeux. Elle est un peu perdue, mais elle se rend compte qu'elle pourrait en parler avec Jemma. Qu'elle devrait. Elle est son amie, celle qui s'avère être la plus à même de la conseiller. Et il y a aussi ce petit détail de plus qui la pousse à s'ouvrir à Simmons : comment Daisy ose-t-elle demander à la scientifique de se confier si elle-même se referme comme une huître lorsqu'elles abordent sa vie sentimentale ? Oh, elle sait que c'est toujours plus facile d'écouter que de se confier, certes. Mais elle fait un pas, quand même. Elle ouvre une porte et elle espère que son interlocutrice en fera de même, à un moment ou un autre. « En fait, je suis un peu perdue », lui avoue-t-elle d'une petite voix, presque inaudible. Elle dépose son verre sur la table basse, force un léger sourire. Elle n'a parlé de Lincoln a personne et elle évite même d'y penser, cherchant à s'éloigner du sujet qui porte à confusion ses sentiments. « Il est très proche d'Erin. » Elle ne sait pas trop pourquoi elle dit ça. Si c'est de la jalousie, si c'est une observation ou autre chose. Depuis Ward, elle ne s'est plus réellement ouverte à un homme, la douleur et la déception étaient encore trop fraîches. Mais Lincoln... C'est différent. Tellement différent. A côté, Ward n'a plus aucune importance. La douleur s'évapore, la haine se dissipe et il n'y a plus que l'inhumain.

Jemma préfère passer outre les sujets délicats, elle aussi. Pourtant, elle doit savoir que Daisy n'abandonnera pas aussi facilement. Elle la ménage un petit peu, étouffe sa curiosité depuis qu'elle a été recrachée par le monolithe, comme tout le monde au Shield. Elle a entendu des agents parler du départ de Simmons à plusieurs reprises, mais deux abrutis sont sortis du lot. Deux idiots aussitôt remis à leur place par une Daisy ayant volé le regard noir de May. Celui contre lequel on n'ose pas se dresser, celui qui en dit long, celui qui terrifie. Elle ne savait même pas qu'elle était capable d'effrayer jusqu'à ce matin-là, mais quand elle les a vu détaller comme des lapins, elle a compris qu'avoir May pour os avait été plus que bénéfique. C'était comme ça que cela se passait : Jemma, c'était sa famille. A l'instar de toute la bande, certainement, mais elle et Fitz possédaient une place réellement particulière. Si Coulson et May s'apparentaient aux figures parentales, les deux génies étaient considérés comme le frère et la soeur qu'elle n'avait jamais eu la chance d'avoir. « Ça va peut-être te surprendre de ma part, mais je n'ai pas osé... Mais je suis sûre que je peux arranger ça... Le Dr. Banner est très sympa, et il pourra peut-être faire le médiateur. Qui sait, tu pourras même venir avec moi ? » La flamme dans les yeux de Daisy est aussitôt rallumée. C'est un peu comme si Jemma lui promettait la lune. Les superhéros ont toujours passionnés la jeune femme, l'ont toujours captivée. Thor, la Veuve Noire, Iron Man, elle n'en est pas moins fan qu'auparavant. Elle a juste appris à mieux le dissimuler. « Tu crois que ça serait possible ? » Sa voix part légèrement dans les aigus, elle est aussi excitée qu'une gamine la veille d'un départ pour Disney World. « Ne t'inquiètes pas pour ça. Ils sont ennuyeux à mou-rir! » Daisy tente de masquer un sourire satisfait qui étire petit à petit ses lèvres. Elle ne se réjouit pas du malheur de Jemma, elle est même triste qu'elle ne se soit pas liée avec quelqu'un de Stark, sincèrement. Mais ses paroles réconfortantes ont l'effet escompté et Daisy ne doute pas une seule seconde de sa parole. « Personne n'arrivera à te remplacer, de toute manière, c'est impossible. Il n'y a qu'une seule Daisy Johnson, ils ne t'arrivent même pas à la cheville. » Cette fois, c'est un rire qui s'échappe de ses lèvres, elle a l'égo flatté, les chevilles enflées. En d'autres circonstances, elle aurait certainement trouvé une petite blague à faire. Mais c'est une envie de la serrer dans ses bras qui la prend. Une envie de lui dire qu'elle s'ennuie d'elle, au Shield. Qu'elle se complet dans son équipe, qu'elle rigole beaucoup à cause des bêtises qu'Hunter enchaîne et qu'elle adore passer des soirées à jouer aux jeux vidéos avec Mack. Elle a envie de lui dire que sa relation avec Fitz a déraillé l'espace de quelques instants, mais qu'à présent, ils sont à nouveau aussi proches qu'un frère et une soeur, que May s'ouvre un peu plus à elle chaque jour. Et elle a envie de lui dire qu'au milieu de tout ça, il manque pourtant quelque chose. Quelqu'un, plus précisément. Alors, elle s'approche d'elle, lui saisit sa main libre et la serre doucement. Pour peu, elle la supplierait presque : reviens Jemma, reviens, s'il te plaît. « On aura qu'à faire plus de soirées à deux », lui propose t-elle à la place, envoyant balader toutes les pensées qui se sont bousculées dans son esprit quelques secondes plus tôt.

Elle finit par lâcher sa main, mais ne réduit pas la distance qu'elle a franchit. Elle a le coeur léger, quand elle évoque le sujet de Coulson et May. Elle aimerait tellement que la jeune scientifique soit au Shield, pour qu'elles puissent manigancer ensemble. Avec Ava, avec Sharon. Elles formeraient un quatuor formidable et Coulson deviendrait très certainement fou. Mais l'idée lui plaît. Elle lui plaît tellement. Elle s'accrocher toujours aux visions idylliques, Daisy. A cette image de famille qu'elle reconstitue, cette sorte de fratrie dont elle est dépendante, qu'elle a toujours souhaité avoir. « J'aimerais beaucoup. » Alors reviens. Reviens, pense t-elle encore une fois. Elle ne dit rien pourtant. Elle recule légèrement pour pouvoir saisir son verre qu'elle a déposé sur la table basse quelques instants auparavant, dos à Jemma. Quand elle se retourne, son regard se pose aussitôt sur le verre de son amie, sur le tremblement de sa main et sur le vin qui vient tâcher son jeans. Elle hausse un sourcil, ouvre la bouche pour lui demander si tout va bien, mais est prise de court. « Je suis maladroite, ce n'est pas possible. Je vais changer de jean, je reviens, n'hésite pas à te resservir un verre. » Elle hoche la tête positivement, reste muette. Ses yeux suivent le parcours de son amie jusqu'à sa chambre et ses yeux se froncent. Quand Jemma ressort, la jeune inhumaine se lève du canapé, sceptique. Elle n'est pas certaine de ce qu'elle voit. Elle fait quelques pas, oubliant toute politesse et juste au moment où elle s'apprête à entrer dans la chambre, la scientifique se glisse devant elle pour en fermer la porte. « Tu n'étais pas supposée voir ça. » Voir quoi, au juste ? Qu'est-ce qu'elle peut bien cacher et afficher en même temps dans sa chambre ? Est-ce qu'elle fait des recherches spéciales pour Stark ? Quelque chose qui doit demeurer secret ? Daisy plonge son regard dans celui de son amie et comprend que ça n'est pas en lien avec son job, elle a ce petit regard qui le lui indique. Elle la connait assez bien pour la comprendre sans avoir besoin de mots, maintenant. Pas autant que Fitz, elle n'atteindra certainement jamais ce niveau-là, mais tout de même. « Jemma ? » Elle voit les larmes dans ses yeux, n'en est que plus confuse. Elle s'avance vers son amie, pose une main sur son avant-bras. « Est-ce qu'il y a quelque chose que tu voudrais me dire ? » Elle a l'impression que Jemma est sur le point de se briser en mille morceaux. Elle ne veut pas lui forcer la main, pourtant cette fois-ci, elle comprend qu'elles ont atteint un point de non-retour et que la clé pour aider Jemma à aller mieux, à avancer, c'est cette chambre. « Viens », lui dit-elle en glissant sa main dans la sienne, ouvrant la porte de la chambre. Elle s'y engouffre, ne lâche pas l'étreinte sur les doigts de sa meilleure amie. Doucement, elle observe le mur face auquel elle s'arrête. Les photos et notes de Simmons montent jusqu'au plafond, c'est complètement dingue. Elle s'approche légèrement, observe un cliché épinglé au mur attentivement. « C'est là ? C'est l'endroit où tu te trouvais ? »

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« Ne t'en formalise pas trop », conseille Jemma lorsque Daisy se décide enfin à s'ouvrir à cette dernière, peu certaine de ce qu'elle avance, de ce qu'elle ressent. « Déjà, c'est normal qu'il ait des amies. Et Erin peut être géniale, il est évident qu'elle ne peut pas t'arriver à la cheville. » Elle marque un point. Lincoln a le droit de se lier d'amitié avec les membres du Shield et techniquement, Erin et lui sont arrivés approximativement au même instant, ce qui les a définitivement liés et rapprochés. Alors, elle se surprend à secouer positivement la tête, comme pour marquer son accord avec les dires de son amie, mais elle lui lance aussi un petit regard réprobateur quand elle entend la seconde partie de sa phrase. Daisy, c'est un peu comme maître Yoda avec Erin, mais en beaucoup moins sage. Et moins verte. Qu'elle ne lui arrive pas encore à la cheville, ça lui semble normal, même si elle se débrouille un peu mieux chaque jour, qu'elle l'épate un peu plus à chaque entraînement. Comme Lincoln. Elle a de quoi être fière. Pourtant, même si elle réprimande silencieusement les paroles de Jemma, un petit sourire étire ses lèvres, sa poitrine s'affaisse et elle se sent légèrement rassurée. Elle ne sait pas trop si c'est la voix aussi calme qu'apaisante de son amie ou les mots qui s'échappent d'entre ses lèvres, mais elle se sent moins nerveuse et plus confiante. « Lincoln et toi vous avez partagé des choses qui n'ont rien à voir. Il t'a vue grandir, si on peut dire ça ainsi, passer de Skye à Daisy... Tu sais, c'est quelque chose qui n'est pas négligeable. » Aussitôt, ses pensées vogues jusqu'à l'Afterlife et un paquet de souvenirs lui reviennent en mémoire. Certains plus heureux que d'autres. « Je n'ai pas eu la chance d'apprendre à la connaître autant que j'aurais voulu mais... Tu sais, j'ai bien remarqué cette relation spéciale entre vous. Et puis n'oublie pas que maintenant, techniquement, tu es sa supérieure! Parfois ça donne une impression de distance alors qu'en fait vous êtes toujours les mêmes. » Elle a sans doute l'air un peu surpris. Elle avait presque oublié combien Jemma pouvait s'avérer bonne conseillère et surtout, elle avait oublié combien ça faisait du bien de ne pas se sentir seule. D'être épaulée, aiguillée. De pouvoir partager les choses la rendant incertaine, la faisant douter. « Tu l'aimerais beaucoup », lui dit-elle en relevant dans sa direction un regard pétillant de malice. Elle l'espère. Elle en est persuadée, en fait. Elle ne sait pas trop à quoi ressemblait la Jemma Simmons de l'Académie, mais elle connaît bien celle avec qui elle a fait équipe, elle connaît ses goûts. Alors, elle ne peut pas s'empêcher de penser que oui, le courant passerait entre eux deux. « Je suis certaine que si t'étais encore au Shield, il passerait énormément de temps avec toi », lui avoue-t-elle en retroussant le nez. « La bio, c'est son truc aussi. Et il dit que je le martyrise pendant les entraînements. » Daisy lève les yeux au ciel, comme si c'était absurde. Alors que c'est la stricte vérité. Faut dire qu'avec May, elle a été à bonne école. Il n'empêche que plusieurs scènes se dessinent déjà dans son esprit : elle imagine Lincoln dans le labo de Simmons, tellement occupé qu'il ne verrait pas le temps passer. Elle s'imagine venir le chercher de force dans le labo, après avoir attendu des heures. Elle voit d'ici Jemma le couvrir, alors qu'il se cacherait derrière une armoire pour ne pas se faire disputer comme un enfant de cinq ans : "Lincoln ? Non, pas vu de la journée. T'es sûre qu'il n'est pas dans la salle d'entraînement ? Ou avec Mack ?" Parce que le pire, c'est qu'avant Jemma était tout simplement incapable de mentir. Elle la revoyait encore au HUB. La catastrophe ambulante qu'elle avait été, bien que si elles en discutait à l'heure actuelle, Daisy était sûre qu'elles hurleraient de rire.

« Bien sûr que ça serait possible. » Nouveau regard pétillant. Daisy est de retour en enfance, elle a à nouveau cinq ans. Finalement, elle l'aura trouvé, ce côté positif à ce que Jemma soit partie bosser chez Stark. Parce que pendant son absence, l'inhumaine a tourné et retourné la question dans son esprit quand elle était incapable de dormir la nuit pour diverses raisons, mais elle n'a jamais été capable d'y trouver la réponse. « Je peux toujours te faire passer pour une collaboratrice, ou mon assistante... » Pour peu, elle se mettrait à sautiller sur place. Elle a aucun mal à imaginer Jemma lui prêter une blouse blanche, pour faire un peu plus vrai et se fondre dans le décor. Quand finalement elle enchaîne en lui proposant (de façon la plus anodine au monde, évidemement) qu'elles pourront passer plus de soirées ensemble et donc ne plus laisser Jemma isolée du monde, parce que maintenant qu'elle a renoué le contact avec Simmons, elle se sent presque incapable de s'en éloigner à nouveau (de la laisser s'éloigner à nouveau, nuance) et qu'elle lui répond un : « Ce serait vraiment super. » en plantant son regard dans le sien, elle est incapable de masquer son enthousiasme. Elle est heureuse, non seulement pour elle, même si c'est un peu égoïste, mais aussi pour son amie. Parce qu'elle a bien compris qu'en quittant le Shield, elle s'est refermée comme une huître et elle espère (elle en a l'ambition, du moins) pour l'aider à s'ouvrir à nouveau. Un petit peu plus à chaque fois. Elle essayera d'être délicate, même si ce n'est pas gagné.

L'ambiance légèrement tendue du début s'est rapidement transformée. Si Daisy était anxieuse quant à renouer avec son amie, ses doutes se sont envolés un à un sans qu'elle ne s'en rende réellement compte. Elle ne sait pas quand, encore moins comment, mais c'est le cas. Elle est heureuse et détendue. Jusqu'à-ce qu'elle jette un regard par la porte de la chambre de Jemma. Distrait, d'abord. Puis plus appuyé. Curieux, sans l'ombre d'un doute. Elle s'avance pour y jeter un coup d'oeil, mais la porte se referme sous son nez, avant qu'elle n'ait eu l'occasion d'y voir quelque chose. Un tas d'idées lui passent par la tête. C'est qu'elle a une imagination débordante, quand il s'agit de se faire des films sur une situation quelconque. Et juste au moment où elle essaye de relativiser, de se convaincre qu'elle s'imagine des trucs, Jemma a ce regard. Celui qui la trahit, qui fait comprendre à son amie que finalement, elle n'est peut-être pas une si bonne menteuse que ça, qu'elle a encore beaucoup à apprendre. Quelques paroles de sa part et elle a l'impression que la scientifique va se briser en mille morceaux, plus fragile qu'un morceau de sucre. Elle lui saisit délicatement la main et ouvre la porte pour se poser face au mur aperçut quelques minutes plus tôt. Pour ne pas changer, Daisy pose des questions, elle est incapable de tenir sa langue. Mack lui dit toujours que le jour où elle ne posera pas de question, c'est qu'ils pourront se faire du soucis à son sujet. Et il a certainement raison. « Oui. Ce n'est pas une véritable photo, c'est... J'ai essayé de reconstituer sur ordinateur. Mais je ne suis pas très douée avec ces trucs-là. » Donc, elle n'en a pas parlé à Fitz. La dernière fois qu'elle lui a parlé, il était encore légèrement remonté contre Jemma, même si elle sait que leur discussion le fera réfléchir. « Je n'ai pas énormément de souvenirs de tout ça. Parfois des images remontent mais je ne sais jamais... » Daisy hoche positivement la tête, comme si elle connaissant déjà la réponse. Elle devine la réponse, en fait. Enfin, elle s'imagine que son amie ne sait jamais si ce sont des rêves ou la réalité, elle se doute que cela doit être une notion assez floue dans son esprit embrumé. Elle est loin de s'imaginer que, comme si tout cela n'était pas suffisant, elle était touchée par des visions en plus. Finalement, elle se décide à lâcher la main de la scientifique pour arpenter la partie recouverte du mur, examiner les photos reconstituées, les notes, post-it et autres gribouillis. Elle comprend que Jemma essaye de rétablir une certaine chronologie de sa vie, des événements écoulés. Le coeur de Daisy se serre dans sa poitrine, elle tourne vers son amie un regard où se mêlent l'anxiété et la confusion. « Je... Je ne savais pas », se contente-t-elle de dire d'une petite voix. Elle a honte, quand elle y pense. Quand elle imagine Jemma seule, complètement perdue, essayant de reconstituer des moments de sa vie comme si elle était occupée à assembler un puzzle. « Je suis désolée. » La seule chose qu'elle est capable de faire, c'est secouer la tête de droit à gauche. Désolée de quoi ? C'est elle. Elle qui devrait être désolée. Désolée de l'avoir laissée tomber au moment où elle avait le plus besoin d'être entourée. De savoir qu'elle n'était pas seule. De la honte, elle passe à la colère en un claquement de doigts. Elle s'en veut tellement. « Je suis désolée. » Jemma est tournée dans sa direction, totalement désemparée. Ça lui brise un peu plus le coeur. Faut dire qu'elle a toujours vu Simmons comme une femme forte et indépendante, mais là... Là, pour la centième fois en un court laps de temps, elle a l'impression qu'elle va s’effondrer. « Je suis complètement perdue, je... » Elle lâche un sanglot. Daisy s'avance vers elle, rompant la distance qui les sépare l'une de l'autre. « Il y a tellement de choses que je ne comprends pas, dont je ne me souviens pas, je suis perdue. » Elle éclate en sanglots et Daisy se surprend à glisser les mains ses mains sur les joues de Jemma pour essuyer les larmes qui parlent sur ces dernières, comme une soeur le ferait. « Tout va s'arranger. » Elle hoche la tête positivement, comme pour essayer de se convaincre elle-même. « Parfois je ne sais même plus qui je suis, Daisy... » Nouveaux pleurs qu'elle essuie à nouveau. « Je suis effrayée. » Sans réfléchir plus longtemps, elle la prend dans ses bras, elle entoure son cou de ses bras et la serre contre elle très fort. Elle a des larmes dans les yeux et bat des cils pour qu'elles partent, parce qu'elle sait que si elle se met à pleurer, elle n'arrêtera pas. C'est pas son genre de se lamenter, mais là, elle sent le sanglot dans sa poitrine. Elle s'en veut tellement, bon sang. « Tout va bien se passer », répète-t-elle en la serrant un peu plus. « Je vais t'aider. Et tout va s'arranger, je te le promet. » Sa voix aussi, est étouffée par l'émotion. Daisy ferme les yeux, pince les lèvres. Elle reprend petit à petit contenance. Quand elle se sent suffisamment forte pour pouvoir soutenir moralement Jemma en plus d'elle-même, elle se détache de l'étreinte qu'elle exerce sur cette dernière. « Premièrement, je ne veux plus jamais que tu dises que tu es désolée. Jamais. Ce n'est pas de ta faute et c'est moi qui suis désolée. J'aurais dû... » J'aurais dû être là, t'épauler. Elle s'arrête, pince à nouveau les lèvres pour ne pas pleurer. « Ça n'a plus aucune importance, de toute façon. » S'il y a bien une leçon qu'elle a appris depuis qu'elle est au Shield, c'est que le passé appartient au passé. Inutile de le ressasser. Un sourire étire ses lèvres, légèrement forcé, mais qu'elle veut rassurant. « Est-ce que tu veux bien me parler de tout ça ? » Lui demande-t-elle en désignant le mur d'un vaste geste de la main. Elle ne veut pas la brusquer, pas après l'avoir vu éclater en sanglots de la sorte. Mais elle n'est pas prête à abandonner pour autant : si elle ne veut pas parler aujourd'hui, Daisy reviendra demain. Et le lendemain. Et le surlendemain. Simmons doit savoir qu'elle est déterminée, quand elle le veut, presque entêtée. « Je pourrais peut-être t'aider à fixer certaines parties manquantes ? Ou dont tu doutes. » Elle marque une courte pause. « Mais je ne pourrais pas t'aider si tu ne me parle pas. »

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« Je n'en doute pas une seule seconde. » Daisy arque doucement un sourcil, lui lance un regard accusateur. Elle est son amie, c'est de son côté qu'elle doit se trouver et non du côté de Lincoln. C'est du n'importe quoi, c'est scandaleux, c'est... « En même temps, May était ton SO. » C'est totalement véridique. C'est sans le moindre mal que la jeune inhumaine se souvient des séances d'entraînements passées avec May et des nombreuses courbatures et ecchymoses qui en témoignaient. Bon, d'accord. Peut-être qu'elle martyrise un peu Lincoln et Erin, quand l'occasion se présente. Mais qui est à blâmer dans cette histoire ? Question purement rhétorique, puisqu'ils savent tous qu'il s'agit de May.  « Oui, bon, j'admets avoir été à bonne école », concède-t-elle en laissant un sourire amusé se dessiner sur ses lèvres. Elle se souvient de la fatigue éprouvée, de la lutte menée pour ne pas s'endormir devant son assiette ou à la moindre occasion se présentant. Soudainement, ça la frappe de plein fouet. Ses yeux s'agrandissent comme des soucoupes et elle tourne un regard à la fois surpris et amusé vers Jemma. « Tu sais quoi ? Je crois que je reproduits exactement le même schéma que May avec Lincoln et Erin. » Elle marque une pause et observe son amie du coin de l’œil en ajoutant : « Je frappe quand même beaucoup moins fort qu'elle. » Elle croise les bras, se laisse légèrement glisser contre le dossier du fauteuil et lâche avec une ironie non masquée. « Rien que pour ça, ils devraient me vénérer. »

Et puis, c'est la chute. Les événements s'enchaînent trop rapidement pour que Daisy puisse en saisir chaque parcelle. Il lui fait quelques minutes pour apercevoir ce qui se trame dans la chambre de Simmons et beaucoup moins pour l'avoir dans ses bras secouée de sanglots. L'espace de quelques mots, à peine, ses pleurs s'accentuent et la jeune inhumaine se maudit intérieurement. A part lui répéter que tout vas s'arranger, qu'elle va l'y aider, elle n'est pas bonne à grand chose. Elle voudrait tellement être ce genre de personne, faire partie de ceux qui trouvent toujours les mots pour apaiser les esprits tourmentés. Pourtant, c'est pas à défaut d'essayer et d'en avoir envie. Elle voudrait bien réussir à la rassurer et sécher ces vilaines perles salées qui coulent sur ses joues à l'aide de quelques mots bien choisis, de sages paroles. Pourtant, vient un moment où Daisy se dit que si Jemma pleure si fort et autant, c'est qu'elle en a foncièrement besoin. Et que peut importe les mots qu'elle choisira, rassurants ou non, cela ne l'arrêtera pas. Tout ce qu'elle peut faire, c'est la serrer contre elle très fort pour lui montrer qu'elle n'est pas seule et qu'elle ne l'a jamais été, même si elle s'est évertuée à se couper du monde. Finalement, quand Jemma a pleuré toutes les larmes dans son corps et qu'elles se séparent de leur étreinte, Daisy lui demande de lui parler, de lui expliquer. Parce que si sa motivation première est de l'aider, de la soutenir et de la faire avancer, voir toutes ces choses sur le mur de sa chambre a bel et bien piqué sa curiosité à vif. Elle a un peu peur de ce qu'elle va entendre, aussi. Mais ça, elle se garde bien d'en parler à Jemma qui doit certainement avoir assez de mal à s'ouvrir de la sorte, elle qui s'est refermée comme une huître tout ce temps. « J'ai arrêté de chercher à savoir ce qui s'est passé là-bas. » Daisy l'observe s'avancer vers le mur, remettre en place les post-it qui commencent à se décoller. Elle hoche la tête, mais ne dit rien et se contente de l'écouter attentivement. « Des images reviennent très vite fait de temps en temps, mais elles sont si rares que j'ai laissé tomber. Finalement ça n'a plus beaucoup d'importance maintenant. »  Inconsciemment, les sourcils de Daisy se froncent. Elle est premièrement mitigée sur cet avis, mais préfère se taire. Elle a si peur de brusquer Simmons, maintenant, alors qu'elle sait qu'elle ne devrait pas. Pourtant, d'un autre côté, elle se dit qu'elle a raison, aussi. Que se concentrer sur ce qui se passe ici, essayer de rassembler des faits, des souvenirs doit déjà être suffisamment compliqué. « Je me souviens de ce qui s'est passé avant en gros. Ce sont les petits détails que j'oublie, et quelques moments qui m'ont personnellement touchée. » La scientifique pince les lèvres, des larmes dans les yeux et le cœur de Daisy se serre. « Je me suis souvenue du coma de Fitz et des quelques mots qu'il m'a dit avant de nous sauver il y a deux mois seulement, alors que c'est quelque chose de très important dans ma vie. Avant ça, je savais que Ward nous avait fait quelque chose d'horrible, mais j'étais incapable de me rappeler quoi. » Ward, Fitz. Elle tente d'arborer une certaine forme de neutralité. « Il m'a dit... » Daisy se coupe, pince les lèvres et réfléchit. « Il m'a dit qu'avant... Avant que tu sois aspirée par le monolithe, vous aviez rendez-vous. » Elle observe les post-it quelques instants, puis coule un regard vers Jemma. Elle ne sait pas si elle s'en souvient, c'est difficile à dire, maintenant qu'elle sait que sa mémoire lui a fait défaut pour certaines choses. Un sourire étire ses lèvres à la pensée de la conversation qu'ils ont eu en tête-à-tête quelques semaines plus tôt. « Tu sais, il m'a dit qu'il avait établi une liste de restaurants dans lesquels vous pourriez vous rendre », continue-t-elle en pivotant pour lui faire face, cette fois-ci. « Il sait combien tu adores les listes. » Elle ne sait pas pourquoi elle lui dit ça, peut-être que Fitz ne voudrait pas qu'elle lui répète. Pourtant, elle espère que ça éveillera quelque chose chez la jeune femme, même si elle ne sait pas exactement quoi. « Tu t'en souviens ? » Elle marque une pause, puis finit par poser la question qui lui brûle les lèvres depuis le début : « Est-ce qu'il est au courant ? » Ça l'étonnerait, mais sait-on jamais, après tout. Ils peuvent s'être vu sans que Daisy ne soit au courant.

Daisy observe Jemma aller s'asseoir au bord du lit et soupirer doucement. « Je suis désolée de n'avoir rien dit. Je me sentais si idiote. » La jeune inhumaine fait quelques pas dans sa direction, secoue légèrement la tête. « Mais pourquoi ? » S'enquit-elle en lui lançant un regard perdu. Elle ne comprend pas pourquoi elle n'en a pas parlé, ne serait-ce qu'à elle. Elle se fiche bien, que sa mémoire flanche,  qu'elle ne parvienne pas à assembler certaines pièces du puzzle de sa vie. Elle l'aurait aidée. « Vous parliez sans cesses de choses dont je ne me souvenais pas, parliez d'une Jemma à laquelle je n'arrivais pas à m'identifier. J'ai pris peur. » Daisy ferme les yeux, se pince l'arrête du nez. Qui est-elle pour la blâmer, au fond ? Sans doute aurait-elle réagi exactement de la même façon, elle aurait pris ses jambes à son cou. « J'ai cru que vous ne voudriez plus rester à mes côtés quand vous auriez compris que la Jemma d'avant s'était effacée. J'avais peur que vous ayez l'impression d'être avec une étrangère, que plus rien ne serait jamais pareil. Depuis, je me suis un peu retrouvée, mais à l'époque... Je ne savais plus du tout qui j'étais. Il y avait un monde entre la Jemma dont vous parliez et celle à qui vous parliez. » Elle a un peu de mal à imaginer la situation dans laquelle s'est retrouvée Jemma, ne l'a pas vécue. Ça l'attriste de l'imaginer s'être retrouvée seule contre le monde, alors qu'elle aurait pu être soutenue. Daisy se contente d'hausser doucement les épaules. « Je me suis persuadée qu'il valait mieux que je m'en aille plutôt que vous ayez cette déception. J'ai pensé que ce serait mieux pour vous.. » Elle vient s'asseoir à ses côtés, lui prend la main et secoue la tête. « On est ta famille, on aurait compris. » C'est peut-être un peu cliché, mais pourtant tellement véridique. Elle cherche ses mots l'espace de quelques instants, puis laisse échapper un long soupire. « Tu te souviens, quand mes pouvoirs se sont déclenchés ? » Daisy regarde droit devant elle, croise les jambes, puis les décroise tout aussi vite, sans doute un peu nerveuse d'aborder ce sujet de conversation qu'elle n'apprécie pas particulièrement. « Quand on m'a isolée dans cette cabane ? Je me suis jamais sentie aussi seule et pourtant j'ai passé ma vie seule. » Elle glisse un regard vers Jemma, laisse un petit rire lui échapper. « Je pensais que c'était la meilleure solution, tu vois. J'avais peur de ce que je pouvais faire, de vous blesser. C'est peut paraître absurde, mais je crois que c'est à ce moment-là que je suis réellement devenue Daisy. » Elle marque une nouvelle pause, plante son regard dans celui de son amie. « Y'a un monde de différence entre Skye et Daisy. Entre celle que j'étais et celle que je suis. » Elle n'est pas certaine que Jemma la suive, alors elle décide d'abréger un peu, d'arrêter de faire la sage aux conseils avisés. « Ce que je veux dire, même si c'est pas très clair, c'est que parfois, le changement ne fait pas de tort et surtout... Surtout qu'on doit l'accepter. Et aussi que s'ouvrir aux autres et les laisser nous aider, ça ne peut qu'être positif. Ah, et que la solitude est néfaste. » Elle lève le regard en l'air, réfléchit pour être certaine de ne rien avoir oublié de ce qu'elle avait à lui prodiguer comme conseils. Il n'empêche qu'elle sent bien que Jemma ne lui a pas tout dit, qu'elle lui cache un dernier petit truc. Elle ne sait pas comment, mais elle le sait.

let me come home

« Non. » Bon, d'accord. Même si elle s'y attendait, maintenant qu'elle a la réponse, c'est vrai que ça l'étonne un peu et ça doit même se lire sur son visage, parce que sa mâchoire se décroche quelques secondes. Elle cherche ce qu'elle pourrait dire, mais il n'y a qu'un petit : « D'accord » qui lui échappe. « Je l'ai vu, il y a quelques semaines. Ça s'est mal passé. Très mal passé. Il... - » Daisy passe une main sur son front et retient son souffle l'espace de quelques secondes, le temps que la réponse de Jemma finisse par tomber. « Il m'a fait comprendre qu'il ne pouvait pas m'attendre éternellement. Ça avait l'air plutôt définitif. J'ai compris le message. » C'est pas comme si elle n'était pas au courant, mais elle hésite tout de même à feindre la surprise. Ca lui fait bizarre de savoir qu'elle se retrouve prise entre deux feux comme ça, qu'elle a eu une conversation avec Fitz sur le sujet avant d'avoir celle-ci avec Jemma. Qu'elle ne peut pas prendre parti, même si elle le fait sans doute involontairement, parce qu'ils sont tous les deux ses amis. Ses meilleurs amis. Elle réfléchit quelques instants supplémentaires, ça change de son habituelle façon de se comporter, celle qui consiste à foncer tête baissée dans le tas et de se soucier des conséquences une fois qu'elles sont tombées, seulement. « Il est blessé Jemma, laisse-lui du temps. » Elle pose un regard presque bienveillant sur elle, hausse doucement les épaules. « Du temps, toi aussi tu en as eu besoin, non ? » C'est à peu près tout ce qu'elle peut lui dire. « Je ne comprends pas.. J'ai toujours pu lui parler, mais à chaque fois que je me suis retrouvée face à lui depuis que je suis rentrée... C'est comme si tout bloquait. Je n'arrive pas à lui dire, je n'arrive pas à lui parler. » Ca lui fait mal au coeur, de les voir se séparer comme ça, alors qu'elle a si souvent eu l'impression qu'il s'agissait presque d'un même esprit divisé dans deux corps. Ca doit être cette histoire d'âme-soeur. Elle sait, est persuadée qu'ils en sont. « Tu y arriveras à nouveau, je te le promets. » Même si elle est certaine, c'est un peu risqué de s'aventurer sur ce terrain qui ressemble bien plus à une pente glissante qu'autre chose. « Je pense que tu dois juste arrêter d'avoir si honte d'être partie. C'est peut-être pas facile et je ne suis pas à ta place, je ne sais pas vraiment ce que tu ressens, mais... » Elle hausse à nouveau les épaules. « J'ai l'impression que c'est ce qui te bloque. En partie, du moins. Cette honte, tu ne dois pas... Vraiment. Il comprendra, je t'assure. Mais laisse-lui du temps. »
« C'était très clair. » Ah ? Elle ignore comment Jemma a compris le charabia qu'elle vient de débiter, mais elle ne va pas chercher la petite bête et se contente de sourire. Tant mieux si, aussi brouillon puisse-t-elle être, elle est parvenue à partager le fond de sa pensée avec son amie. C'est qu'elle a jamais été fine psychologue, rares sont les fois où elle ose s'aventurer et donner quelques conseils. « Je pense que je ne savais pas vraiment comment réagir. C'est la première fois que quelque chose comme ça m'arrive. Jusqu'à ça... Les choses ont toujours été simples, évidentes. Et puis soudain je me suis retrouvée dans une situation sur laquelle je n'avais plus aucun contrôle et... » Elle hausse les épaules et Daisy hoche légèrement la tête, comme pour lui démontrer qu'elle comprend la situation. « Tu me connais, j'ai toujours eu peur du changement. » C'est certain, comment l'oublier ? Elle se souvient de Fitz falsifiant ses propres résultats pour ne pas alarmer Jemma, c'est dire. « C'est pas toujours mauvais tu sais. » Mais elle ne peut pas la blâmer non plus. A bien y réfléchir, elle se demande si un jour, elle pourrait blâmer Jemma pour quelque chose ? Elle a la terrible impression qu'elle pourrait passer au-dessus de tout, lui pardonner un nombre de choses inimaginables. C'est un peu comme l'amour inconditionnel qu'on éprouve envers une soeur, non ? Elle ne l'a jamais expérimenté, alors elle ne sait pas trop bien, mais elle se dit que ça doit être ça. Définitivement, oui. Du coin de l'oeil, elle aperçoit Jemma baisser les yeux vers ses genoux et il y a quelque chose qui vient lui murmurer au creux de l'oreille, comme une force invisible, qu'elle va seulement assister au clou du spectacle. Elle a presque envie de la devancer, de lui demander ce qui cloche, mais la jeune femme finit par ouvrir la bouche : « il y a autre chose. » Et c'est à l'inhumaine d'arquer un sourcil, comme pour l'inciter à poursuivre. « La planète sur laquelle j'ai vécu... Eh bien elle a profondément changé mon ADN. Je pensais que ça allait se rétablir au bout de quelques mois de retour ici mais... Non, il semble que c'est définitif. » L'information met un certain temps à parvenir au cerveau. Ou c'est le cerveau qui met un certain moment à l'analyser, elle ne sait pas trop, parce que la seule chose qu'elle est capable de prononcer, c'est : « Quoi ? » C'est une blague ? Pourquoi est-ce qu'elle a mis aussi longtemps à lui dire quelque chose comme ça ? A elle, bon sang. « Depuis que je suis rentrée, j'ai... Comment dire ça? » Elle ne le fait pas exprès, mais elle pose un regard insistant sur Simmons, comme pour la presser à lâcher la bombe. Pour peu, elle la secouerait presque. « Tu te souviens de Raina? De ses visions du futur? » Daisy hoche la tête de façon positive, puis son visage s'éclaire aussi sûrement qu'un feu d'artifice. Non ? « Tu... » Il y a un silence, puis Jemma se prononce finalement, vient confirmer ce qu'elle sait déjà. « J'ai la même chose. » Un silence un peu pesant s'installe dans la chambre, Daisy reste silencieuse quelques instants, les yeux rivés sur le mur face à elle, comme si elle réfléchissait de façon intense. Puis, elle bondit sur ses pieds et commence à faire les cent pas. Elle croise les bras et s'arrête face à Jemma, vrillant ses pupilles pétillantes sur elle. « Et tu m'as rien dit ?! » Elle marque une pause, secoue légèrement la tête. C'est un scandal. « Comment est-ce que tu as pu ne rien me dire ? Bon sang Jemma ! » Elle lui lance un long regard qui parle pour elle, qui dit quelque chose du genre : dis m'en plus, je veux des détails. « Mais tu.. » Elle fronce légèrement les sourcils. « Tu le sais depuis quand ? C'est comment ? Quand est-ce que ça te vient ? Je veux dire... c'est aléatoire je suppose ? »