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 Dear Deadpool, I’m your biggest fan | Wared

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Il pédale. Fort. Il se lance dans une danse dangeureuse avec les voitures autour de lui. Taxis et particuliers ont pour mission de l’empêcher de passer, tandis que lui use de techniques de valse pour passer à côté d’eux. Il trouve les espaces parfaits pour s’y glisser et poursuivre sa route, sans égratignures ou frayeurs. Il a les écouteurs enfoncés dans les oreilles. La musique à fond. AC/DC hurle dans ses oreilles pour parler d’une autoroute de l’enfer. Ses lèvres formulent les paroles. Il ne fait pas attention si il prononce les paroles ou non. Les passants vous confirmeront que leurs oreilles le savent, elles. Des oreilles agressées et blessées. Des oreilles prêtes à porter plainte, si seulement elles en étaient capables. Mais tant pis ! Jared n’en a pas conscience. Il poursuit sa route, la tête remuant au rythme de la chanson. Il se tortille sur sa selle. Les épaules dansent. Il est bien là. Tout simplement. Il se sent libre, aux côtés des buildings qui défilent. Et d’un coup tout s’arrête. Le silence dans ses oreilles. Mais encore la musique dans sa tête. “I'm on the highway to hell hiiiiiighwaaaaaaay to heeeeeell. Don't stop meeeeee.” Il sursaute. Bon sang, qui est l’abruti qui assassine cette chanson mythique ? Les gens devraient mourir pour ça. Mauvaise foi quand tu nous tiens. Le rythme endiablé laisse place à la sonnerie de son téléphone. Bordel de crotte de caniche. Il lâche le vélo pour trouver son téléphone portable. L’attention se tourne vers cette recherche, tandis qu’il file toujours vers sa prochaine destination. Les klaxons fusent. Les regards assassins se succèdent. Mais peu importe, il a trouvé son téléphone. Il accepte l’appel, après avoir grimacé devant le nom de l’appelant, “Le big boss tyrannique”. “Yep, chef ? Que puis-je faire pour vous aujourd’hui ? Vous voulez que je vous ramène un café, un film X, de la drogue ?” Fier de ses propositions, un sourire s’épanouit sur ses lèvres. Il n’y a pas d’employés plus dévoués et attentifs aux besoins de son supérieur. L’employé modèle, en somme ! Étrangement, son dévouement n’est jamais apprécié à sa juste valeur. Employé modèle, mais incompris. “Putain Hemingway, je te jure que… !” La voix furieuse de son patron résonne dans son oreille. Moins agréable qu’AC/DC, mais tout aussi expressive. Jared évite une poussette et une grand-mère avec sa colonie de bichons. Rouler sur le trottoir, c’est ce qu’il adore. Tellement plus rapide et facile de circuler au milieu des piétons que sur la route. “Je sais, je sais. Trop d’amour en vous, tout ça, tout ça.” “Fais le malin, vas-y ! Tu sais qu’on a encore eu une plainte ? Paraît que tu as cassé une table chez un client, c’est vrai ?” Aïe. Il pensait que l’histoire se tasserait. Il était parti en adressant toutes ses excuses, ses pires grimaces désolées et ses excuses. Finalement, ça n’a pas fonctionné. Les gens, aujourd’hui, ne sont plus sensibles. Il s’arrête au pied d’un immeuble. Son regard s’est perdu dans la contemplation d’une silhouette rouge qu’il pense avoir reconnu.

Une table… laissez-moi réfléchir…” Son esprit a déjà oublié la raison de l’appel. Il jette un coup d’oeil à sa montre. Il est en retard. Un peu plus, un peu moins, les clients ne verront rien. Jared pèse le pour et le contre. Il fait rapidement son choix : la chasse aux super-héros. Si il parvient à récupérer un autographe, il pourrait bien se faire pardonner par son chef. “Hemingway…” Le ton se fait menaçant. Jared revient sur Terre. Il reprend conscience qu’il est au téléphone avec l’homme qui lui verse son salaire. Il soupire et se remet à rouler. Il prend un ton plus sérieux et gêné. “Effectivement, c’est possible que…” “HEMINGWAY ! TU VAS RAMENER TON PETIT CUL ICI, T’AS BIEN COMPRIS ?” Le message est clair. Il a même dû perdre l’ouïe de son oreille droite. Il croise le regard amusé d’un homme qui passait par-là. Tout ça parce qu’il a cassé une table par mégarde. Quelle idée de mettre ce truc en verre en plein milieu du passage, sur un tapis ? C’est le piège typique pour que les gens trébuchent et chutent ! “Allô ? Allô ? Je ne vous entends plus, j’passe sous un tun… briejdojcobriju.” Il raccroche. Il va rentrer, oui, mais pas tout de suite. Pas encore. Il revient sur la route, pourchassant sa cible du jour. Un homme tout de rouge vêtu. Une silhouette musclée. Un humour dont seul lui à le secret. Le héros facile à aborder, en somme. Et non, il ne s’agit pas de Spiderman. Ce n’est plus la course comme la montre dans laquelle il se lance, mais la course contre le super-héros. Il ne peut pas le louper. Hors de question. Avoir rencontré Thor il n’y a pas longtemps, puis Daredevil, lui donne envie d’agrandir sa “collection” de rencontres. Sur son vélo, il file jusqu’au dernier point où il a vu l’homme. La musique reprend son cours. Il fait encore moins attention aux voitures et aux piétons. Il se préoccupe encore moins de sa sécurité. Il a un objectif, il compte bien l’atteindre. La détermination n’est pas ce qui lui fait défaut. Ce serait plutôt la conscience des dangers. Mais ça, il n’est pas prêt à l’acquérir. Il est bien trop insouciant. Finalement, c’est dans une ruelle du Bronx qu’il se retrouve. Il abandonne son vélo à l’entrée, sans se soucier des possibilités de vol. Qui voudrait d’un vélo hideux au nom d’une entreprise de livraison ? Sûrement pas les trois quart de la population de New-York. Jared retire ses écouteurs. Il éteint la musique. Il retire son casque qu’il pose sur la selle du vélo. Il a le stress qui monte. L’appréhension qui vrille dans son estomac. L’anxiété du fanboy qui s’apprête à rencontrer sa célébrité préférée. Même si la sienne a des cheveux blonds et un marteau à la main, Jared est tout de même impressionné à l’idée d’être en tête à tête avec un super-héros.

Il veut faire bonne impression. Alors, il retire son affreuse veste qu’il délaisse sur son vélo. Il n’y a plus qu’à y aller. Il sort son téléphone portable, sait-on jamais qu’il ait le droit de prendre une photo. Il prend une inspiration. Il saute sur place, tel le boxeur s’apprêtant à monter sur le ring. Il secoue ses bras. Il bascule la tête de droite à gauche, sans obtenir de craquement effrayant - déception. C’est ti-par ! Il avance dans la ruelle. Le regard déterminé. La démarche de vainqueur. Là, dans la rue, il y a la silhouette rouge aperçue tout à l’autre. Il sourit, lève une main et... “HEY Deadpool ! Salut, je m’appelle Jaaaaaaah...” Il trébuche et s’étale par terre. Bonne impression, on avait dit ? il a la langue en sang. Les genoux douloureux. Mais dans l’ensemble, il sent encore tout son corps. Point plutôt positif. Il lève la tête vers Deadpool, grimace accrochée visage. “C’est bien aussi de discuter par terre.” C’est bien, mais pas confortable. Il faudrait qu’il se relève, mais il a le tournis. Le choc n’a pas été délicat. Ils pourraient au moins installer des matelas dans les rues, au cas où les gens tomberaient. Ce serait bien plus sécurisant, non ? Il se promet d’écrire une lettre au maire pour lui soumettre cette suggestion. “J’aurais besoin d’aide, si vous voulez bien.” Il lui tend une main. Il ignore ce que Deadpool fichait ici, mais le héros est face à une injustice humaine. Il doit venir en aide au citoyen en besoin, non ?

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Dear Deadpool, I’m your biggest fan

Un autre jour, un autre crime impuni. Telle l'ombre en plein jour, le super-héros surveille de sa corniche les rues de sa ville, prêt à intervenir face à toutes les injustices que le monde créé contre les pauvres gens qui ne peuvent pas se défendre. « I am the night... I'M BATMAN ! » Voyant une altercation entre deux personnes en dessous de lui, Deadpool étendit ses ailes – ou le drap de fortune tâché de sang qu'il avait trouvé dans l'appartement d'un gars qu'il était venu tué pour une mission quelconque – avant de s'élancer dans la ruelle en contrebas, s'écroulant contre le pauvre bougre qui était entrain de se faire agresser par un petit truand du coin. Il se releva avec difficulté, le drap n'aidant pas  (« C'est pas un drap ! C'est ma cape de super-héros ! » ; « Tu es autant un super-héros que le Punisher » ; « Hé ! Ce mec est génial ! Il fait du super-boulot » ; Deadpool se pencha intérieurement vers son autre moitié ; « Super-boulot, super-héros, tu piges ? Haha » ; « T'es un sacré comique, toi ! » ; « Ouais, je sais ! Que veux-tu ? L'homme parfait avec que des qualités, pourquoi tu crois que toutes les femmes me veulent ? » ; « Qu'est-ce qu'il faut pas entendre comme conneries... »). D'un bond, il se retrouva devant la « victime » – ou tout du moins le pensa-t-il – avant de mettre ses poings sur ses hanches, bombant le torse avant de prendre la parole comme il aimait si bien le faire. « Gentilhomme, vous êtes maintenant sauf ! Vous pouvez remercier votre sauveur, le BATMAN ! » Il leva ses mains, utilisant ses index pour se faire des cornes – ou plutôt oreilles, selon son poing de vue – sur le sommet de sa tête. Il se pencha vers l'homme en face de lui et murmura, comme pour le mettre dans la confidence. « Je sais que la ressemblance est flagrante, mais je suis pas vraiment Batman, mais je viens quand même de te sauver les miches aloooors... » Il se redressa en tendant la main vers la « victime ». « J'accepte les chèques et les cartes bleus mais j'avoue que je préfère le cash alors, allez hop hop hop ! Un sauvetage pareil, ça mérite au moins une centaine de dollars mon gars. » Il ne remarqua pas ses guenilles. Cet homme n'était en fait qu'un SDF en manque qui cherchait à voler un pauvre mec qui s'était trouvé dans la mauvaise ruelle au mauvais endroit (« Hé, qui te dit que c'est pas le pauvre SDF qui a été agressé par l'homme en costard chicos ? » ; « Oui, bien sûr. C'est vrai que l'homme riche a de quoi être jaloux du SDF. » ; « Ben peut-être qu'il était jaloux du... Magnifique blouson rapiécé de ce brave homme ! » ; « Oulah, t'es con... » ; « Hé ! Je ne te permets pas ! » ; « Je me permets tout seul et vu que je suis ton copain le cerveau, je pense que tu me permets aussi. » ; « Stop, ça demande trop de réflexion ta phrase là... »).

Mais alors qu'il a toujours la main tendu vers le pauvre bougre qui commence à fouiller la personne à terre, une voix se fait entendre. “HEY Deadpool ! Salut, je m’appelle Jaaaaaaah...” Il se retourne d'un coup, sur le qui-vive et prend une pause ninja qu'il a vu dans un film de kung fu quelconque (« C'est la position de la mante religieuse tueuse ! Même si bon, je vais pas coucher avec la personne avant de lui bouffer la tête. » ; « Mec... T'es dégueulasse. »). Mais il ne voit qu'un jeune homme la face écrasée par terre, un portable téléphone à la main. Le SDF en profite pour filer avec le porte-feuille du pauvre businessman qui a toujours la tête dans les poubelles après le saut vertigineux de Deadpool (« Je volais tel le cygne gracieux ! J'étais magnifique ! » ; « Ouais, au moins tout ça... »). Le jeune homme se redresse la bouche et les genoux en sang mais il n'a pas l'air d'y faire attention alors qu'une grimace est accroché à son visage.  “C’est bien aussi de discuter par terre.” Wade lève un sourcil, perplexe (« Étrange comme garçon. » ; « Et c'est TOI qui dit ça ? » ; « Sache que je suis parfaitement équilibré ! » ; « Dixit le mec qui parle avec son cerveau et se prend pour batman... »). Le jeune homme n'a pas l'air en forme mais le « héros » continue de le regarder comme s'il était une bête curieuse. “J’aurais besoin d’aide, si vous voulez bien.” Il lui tend une main que Deadpool attrape avant de le relever d'un coup sec. Le jeune homme est légèrement surpris par l'action assez violente et se retrouve contre le torse de l'homme en costume. « Eh ben... Habituellement, ce sont plutôt les femmes qui se jettent dans mes bras mais je peux comprendre que tu ne puisses pas résister à mon charisme et mon corps de rêve. » Il relève le visage du jeune homme vers le sien et l'observe quelques instants. « Tu pourrais presque être mignonne avec une perruque et une robe. Mais, les mecs c'est pas mon délire. À part mon Spidey-chan en fait. » Il se recule d'un coup avant de se retourner. Le mec a disparu. Il lève les bras aux ciel avant de pousser un cri de rage. « Pourquoi me fais-tu ça destin ? » Il les baisse avant de soupirer, observant le mec au sol. Il s'en approche de manière accroupie et fouille le businessman qui respire toujours. Il se relève d'un coup, une montre cher en main. « Aaaah ben voilà ! Je savais qu'un petit sauvetage, ça rapportait. » Il observe l'objet quelques instants avant de le ranger dans une de ses poches. Il allait grimper à nouveau en haut du bâtiment avec le batgrappin qu'il avait piqué à son pote Batou quand il remarque un mouvement vers la droite. Il tourne la tête et voit le jeune homme de tout à l'heure. « Ah, t'es en encore là ? » Il range le grappin et se rapproche de lui. « Bon, je vois que t'es pas une demoiselle en détresse : t'as pas assez de poitrine et beaucoup trop de machin entre les jambes pour ça. Alors qu'est-ce que je peux faire pour toi ? Tu t'es perdu ? Tu veux que je te ramène chez ta môman ? » Un éclair de génie (« Disons plutôt de folie. » ; « Hé ! ») le prend. « Elle est comment ta mère ? T'aurais pas une photo ? Tu crois qu'elle serait reconnaissante que je ramène son pauvre petit garçon perdu chez elle ? » Des films dégueulasses se font déjà dans l'esprit de ce mec malade. Dans quoi ce pauvre garçon s'est-il fourré...

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Deadpool. C’est deadpool. Genre, le Deadpool. Celui qui s’habille en rouge et noir. Celui qui manie l’humour aussi bien que ses sabres. Il va s’évanouir. Il va s’effondrer. Il va… de toute manière, il est déjà par terre. Il ne tombera pas plus bas. Même depuis le sol, Deadpool est impressionnant. Tout en muscle. Tout en force. Un héros de plus qu’il peut approcher, qu’il peut sentir. Il lui parle. Bon sang, il lui parle. Et même qu’il lui demande de l’aide. Chose inexplicable. Il ignore dans quoi il a débarqué, mais il s’en fout. Parce qu’il n’est pas devant n’importe qui. Quand il le dira à Jazz. Quand il lui racontera. Elle ne va pas en revenir. A moins qu’elle ne le connaisse déjà. Elle a l’air de connaître la moitié des super-héros et elle refuse de les lui présenter. Injustice totale ! Il faut qu’il se relève. Il ne peut décemment pas discuter depuis le sol. Ce n’est pas assez confortable. Alors, il tend la main en direction du mercenaire. En espérant que l’homme n’y voit pas une invitation pour lui trancher la main. Ce serait con. Mais non, Deadpool le soulève. Jared n’a pas le temps de retrouver son équilibre qu’il se trouve contre le torse de Deadpool. Contre son torse. Tout contre lui. Nom d’un petit bonhomme. Il a les yeux grands ouverts. Des yeux qui vont de son torse jusqu’au visage du héros. De son visage à son torse. Ils sont tout près. Vraiment très près. Jared pourrait en profiter pour découvrir la matière utilisée pour son costume. Il pourrait en profiter pour vérifier la taille des muscles. Il est trop tétanisé pour faire quoi que ce soit. Il est quand même collé à Deadpool. Alors, okay, il aurait préféré être dans cette situation avec Thor, mais il ne va pas cracher sur cette situation. “Eh ben... Habituellement, ce sont plutôt les femmes qui se jettent dans mes bras mais je peux comprendre que tu ne puisses pas résister à mon charisme et mon corps de rêve.” Son charisme et son corps de rêve. C’est exactement ça. Comment ne pas succomber à l’humour brut de Deadpool ? Ils pourraient devenir amis, tous les deux. Ils iraient boire ensemble. Ils se trouveraient des conquêtes ensemble. Ils feraient tout ensemble. Jared est sûr et certain qu’ils peuvent s’entendre. D’abord, lui aussi aime le rouge. Ensuite, ils aiment tous les deux profiter de la vie. Il ne bouge toujours pas. Il est bien contre lui. Au moins, il ne risque pas de tomber. “Tu pourrais presque être mignonne avec une perruque et une robe. Mais, les mecs c'est pas mon délire. À part mon Spidey-chan en fait.” Le visage de Jared s’illumine. L’homme connaît Spider-Man. Il le connaît. Est-ce que ce serait trop demandé de les présenter ? Jared serait tellement heureux de pouvoir lui serrer la main, de le voir en action ou même de lui payer un café, un de ces jours. Est-ce qu’ils peuvent boire avec leur cagoule ? Il fronce les sourcils. Il n’y a pas d’ouverture pour la bouche, pourtant. Faudra qu’il en discute avec les autres. Faudra qu’il lance le débat. Un débat existentiel.

Vous connaissez Spider-Man ? C’est vrai de vrai ? Vous pouvez me le présenter ? Je rêverais de le prendre en photo et de lui poser quelques questions. Il a tellement de swag dans son costume. Attention, pas autant que vous !” Encore concentré sur sa question, Jared n’anticipe pas le recul de Deadpool. Il manque de retomber par terre. Il trouve son équilibre après avoir battu les airs avec ses bras. C’est bon. Il est bien ancré dans le sol. Ses deux jambes sont solides. Il est stable. Plus jamais il ne lavera ses vêtements. Plus jamais il ne portera d’autres vêtements aussi. Il les adore. Il les chérit. Il va en prendre soin. Il va les chouchouter. Heureusement qu’il ne l’a pas touché avec son uniforme, Jared n’aurait pas voulu rendre la veste de coursier. Il l’aurait gardée à vie, protégée dans une vitrine. “Pourquoi me fais-tu ça destin ?” Il profite que l’homme ait le dos tourné pour prendre une photo. Hop ! Une photo pour les réseaux sociaux. Une photo pour le plaisir. Il l’envoie aussitôt sur Twitter. Sa communauté va devenir folle. Il s’en doute. Il range son téléphone. Il tentera un selfie tout à l’heure. Peut-être que Deadpool est un pro de la bouche en cul de poule. Ils pourront faire un concours, tiens. L’idée lui plaît. Il lui proposera. Le temps que Jared range son téléphone, le mercenaire se relève. Le coursier remarque seulement la présence d’un homme assommé. Le pauvre est mal en point. “Aaaah ben voilà ! Je savais qu'un petit sauvetage, ça rapportait.” Deadpool est en train de voler la victime. Y a un truc qui cloche. En même temps, ce vieux croûton rouge n’est pas un vrai super-héros. Il a toujours une idée derrière la tête lorsqu’il aide gratuitement. Il espère toujours récupérer quelque chose. Jared s’est un peu laissé emporter par son enthousiasme. Il en a oublié la différence entre mercenaire et héros. Tant pis. Il l’aime toujours autant. Sauf que la conversation semble tourner court. Sauf que le mercenaire est déjà en train de sortir son attirail pour se casser. Il part déjà. Nooooon. Ils ont encore tellement de choses à se dire. Ils doivent apprendre à se connaître, partager leurs passions, découvrir leur routine, devenir des frères de coeur. Deadpool ne peut pas déjà partir ! “Dites, j’suis pas sûr que ce soit sympa pour lui. Vous voulez pas lui rendre sa montre ? Je vous donne mes baskets en échange.” Ses baskets. Quelle bonne idée. Il pédalera et livrera ses colis en chaussettes. On ne fait pas mieux en matière de professionnalisme. Il aura le mérite de lancer une mode. Enfin, il faut espérer. Mais il préfère encore que Deadpool lui prenne ses sneakers que de le laisser dépouiller un homme qui n’a rien demandé. “Ah, t'es en encore là ?” Jared hausse les épaules et écarte les bras. Il n’a pas de super-vitesse. Il n’a pas de pouvoir. Il n’a que ses jambes et son admiration. Alors, il ne compte pas partir. Il va rester sagement ici. Même si son téléphone vibre dans sa poche. Sûrement son chef qui tente de le rappeler. Sûrement son patron qui va faire une crise cardiaque à l’autre bout de New-York. “Où voulez-vous que j’aille ?” Il lui répond simplement. Après tout, il a quand même le mercenaire le plus connu de tous les temps devant lui. Il ne compte pas mettre fin à cette discussion. Il ne compte pas être le premier à s’en aller. C’est avec soulagement qu’il le voit ranger son grappin. Deadpool va rester plus longtemps. Bonne nouvelle ! Enfin, il croit.

Bon, je vois que t'es pas une demoiselle en détresse : t'as pas assez de poitrine et beaucoup trop de machin entre les jambes pour ça. Alors qu'est-ce que je peux faire pour toi ? Tu t'es perdu ? Tu veux que je te ramène chez ta môman ?” Le ramener chez sa mère ? Deadpool est vexant ! Il n’a pas une trnche de gamin, d’abord. Même que si on le regarde de près, il a quelques ridules qui apparaissent au coin de ses yeux. C’est bien la preuve qu’il a dépassé l’âge de dormir chez sa mère et de dépendre d’elle. Il n’est pas si jeune que ça. Mais il est vrai que lorsque l’on atteint un certain âge, tous les gens qui ont dix ans de moins ont l’air d’adolescents. C’est ce que son grand-père lui a dit, un jour. Peut-être que Deadpool a atteint ce stade. D’ailleurs, il a quel âge ? Ce n’est pas avec sa cagoule qu’on peut le déceler. “Elle est comment ta mère ? T'aurais pas une photo ? Tu crois qu'elle serait reconnaissante que je ramène son pauvre petit garçon perdu chez elle ?” Il grimace. Ah non, c’est répugnant. Il ne veut pas imaginer sa pauvre mère dans les bras de Deadpool. Son admiration a ses limites. Il admire le mercenaire tant qu’il reste loin de sa maman. Et puis, franchement, Deadpool en père, c’est la chose la plus ridicule du monde. Les photos de famille seraient horribles. Ses grands-parents mourraient de désespoir et seraient choqués à vie (non pas qu’ils aient encore de nombreuses années qui les attendent). C’est affreux. “AH NON ! On ne touche pas aux mères ! En plus, elle vit au Nouveau-Mexique, vous auriez trop chaud avec votre costume...” Il plisse le nez. Les costumes ont cet inconvénient. Il faut laisser le corps respirer. Mais depuis le temps que les super-héros existent, ils ont dû trouver une manière d’arrêter la transpiration ou de laver/sécher/repasser rapidement leur costume. A moins qu’ils ne les lavent jamais. “Ça vous arrive de l’enlever et de le laver ? Parce qu’avec les combats, vous devez transpirer et ça doit puer, non ?” Soudain, il est inquiet. Il vient quand même d’avoir la face collée au torse de Deadpool. Si sa tenue n’est jamais lavée, qui sait ce qu’il vient de toucher ? Il va avoir des boutons. Il va attraper le sida. Il va choper des maladies incurables. Il va mourir. Au secours. Adieu. Maman, papy, mamie, il vous aimait. Jazz, il t’appréciait vraiment. Mais le destin en a décidé autrement. Le destin a dessiné de le faucher au milieu de sa jeunesse. Déjà, Jared pense à autre chose. Il est conscient qu’il n’aura pas de seconde chance de retomber sur Deadpool. A moins de lui demander son numéro de téléphone. Alors, il veut lui dire tout ce qu’il pense, tout ce qu’il a toujours rêvé de lui dire. “Je profite de vous avoir devant moi pour vous l’dire : j’adore vos techniques de combat. J’admire votre habilité et votre talent. Surtout quand vous faites ça….” Il se lance dans un mouvement qu’il a vu sur une vidéo. Sauf que dans son geste, son poing frappe le mur. AOUCH. Bobo. La peau est légèrement déchirée. Le poing est rouge. Il devrait arrêter de gesticuler. Il devrait vraiment se calmer. Il examine sa main avec une grimace. Il est vraiment trop con. “Comment vous faites pour vous battre comme ça ? Vous êtes trop doué !” Il aimerait bien être aussi doué que tous ces super-héros. Sauf que sa maladresse l’empêche de coordonner le moindre de ses gestes. Il se casserait une jambe avant même d’arriver devant son adversaire. Forcément, il idéalise le mercenaire. Lui arrive à survivre à tout et n’importe quoi. Il arrive à se battre et à être drôle. Le héros parfait.

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