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 Past, present, future. - [OS/Monde à l'envers]

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Naerendil
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Past, present, future.
Dans le Monde à l'envers


Je m'observais. Je scrutais chaque poil, chaque pore, chaque petit vaisseau rouge dans le blanc de mes yeux bleus. Je me tenais face au miroir de la salle de bain du petit appartement dans lequel je vivais depuis déjà plusieurs mois et je me faisais face. L'homme dans le miroir, il était moi, j'étais lui. Nous étions. Il m'observait, je souriais, il se grattait la tête et mon sourire n'en était que plus amusé. Ici, on dit des dieux qu'ils sont narcissiques, égocentriques. Je ne peux pas vraiment contredire ces idées reçues. Mes frères et sœurs en étaient des illustrations parfaites et je ne dérogeais pas à la règle. Pourtant ce qui m'avais toujours plu dans mon reflet c'était qu'il avait sa volonté propre. Il me répondait. Il vivait une vie identique et pourtant indépendante. Il était mon image, et mon image me répondait. Je le scrutais, il était gêné. Pourquoi? Je descendais mon regard le long de notre cou et entamais l'observation du haut de son torse, ses trapèzes saillants, ses pectoraux dessinés. Il rougissait alors que je détaillais chacun de ses tatouages. Je descendais encore, laissant mes yeux bleus doucement dériver le long des reliefs de ses abdos sculptés. Sa peau était fébrile, son teint coloré. Je suivais une veine le long du V de son bas ventre et passais mon index sous l’élastique de son boxer sans aller plus loin. Sa vision se troublait, sa respiration plus rapide. Le miroir vibrait. Je serrais ma main gauche sur le rebord du lavabo devant moi et tirait doucement sur son boxer, révélant une peau plus claire sous le tissus. Le miroir se fissurait. Je relâchais l’élastique du sous-vêtement. Il était moi. J'étais lui. J'étais le reflet. J'étais mon reflet. Je disparaissais.

Un miroir ne se fissure pas seul sans raison, jamais. Vous pouvez le briser, le laisser tomber, répandre ses débris sur la terre: une faille n’apparaît jamais sans raison. Pire. Une faille dans le reflet, c'est impossible. Mais pas pour moi. Je me nourrissais de l'impossible et m'engouffrais dans la faille. Mon reflet était un relais, un pont entre ce monde et le mien. Mon univers. Je voyais chaque image, chaque reflet de cet univers en un couloir lumineux qui me transportait à ma destination. C'est un genoux à terre que j'apparaissais, ma peau posée sur les dalles marbrées de mon temple. Dans mon dos s'élevait le miroir des âges, grande stèle plate de cristal. Son reflet m'offrait la vue sur tout, ici, là-bas, ailleurs. Je me redressais, sentant sur ma peau nue la brise légère d'un début de soirée d'hiver. Dans un âtre, un feu crépitait, doux, chaud et au dehors la nuit régnait. Maîtresse ombrageuse. Face à moi une silhouette, un homme, voûté. Son visage était tiré et ridé, ses yeux fatigués. Pourtant dans le fond de son regard une lumière scintillait, celle de l'éternité. Je me redressais en le jaugeant. - Et bien mon ami, quelle est donc la raison de ton tourment? - Il soupirait longuement. - Althéon, parle-moi. - Sa voix était à l'image de son physique, usée, éraillée. - « Ils ont réuni l'assemblée, Naerendil. Une faille est apparue ici. »

Mon regard perdait de sa superbe et une inquiétude profonde l'étiolait. Je soupirais à mon tour et constatait qu'à cette simple annonce, le visage d'Althéon perdait quelques unes de ses rides. Cet homme était mon protégé. Cet enfant qui m'avait trouvé dans cette rue, qui m'avait parlé du grand Naerendil, qui m'avait redonné goût à l'espoir dans une époque ou la pénombre me gagnait. Des années, des siècles durant il m'avait secondé. Je lui avais fait le cadeau de l'immortalité. Son âge n'avait plus aucun sens et sa vie était à jamais illimité. Il paraissait l'âge que son esprit voulait bien se donner. Et comme à cet instant, bien souvent, c'était son état d'esprit qui régissait son âge physique. L'anxiété le vieillissait, l'amusement le rajeunissait. En de rares occasions je l'avais revu enfant mais cette apparence de vieillard m'inquiétait presque autant que l'annonce qu'il m'avait faite. Une faille. Un passage à double sens vers le plan chimérique. Cette faille que j'avais moi-même ouverte à l'époque du Moyen-âge sur Terre. Le phénomène gagnait désormais les autres univers. Avais-je ouvert leur boite de Pandore? Avais-je entamé la fin des univers? Étais-je ce monstre là? Je partais en avant, passant Althéon, mon regard perdu dans mes songes. - « Monsieur? » - Je me retournais, croisant son regard qui m'observait. - Ah oui.

Un claquement, mes doigts se séparaient et la lueur de mon corps s'accentuait. Dans une vague de clarté pure mon physique changeait. Je grandissais, dépassant bientôt de quatre bons mètres terriens le sommet du crâne du vieillard. Ma peau retrouvait ses nombreuses tâches bleutées caractéristiques, mes yeux reprenaient leur halo doré. Mais au-delà de ça, plus apparaissait. Mon boxer se fondait dans mes chairs alors qu'une toge blanche à la coupe exotique prenait place sur ma peau. Elle prenait ses origines dans le creux de ma nuque et descendait dans mon dos se nouer a ma taille avant de finir sa chute au sol, traînant derrière mes pas. Je reprenais ma marche dans les couloirs du temple. Comme une ombre rajeunissante Althéon me suivait, paraissant déjà dans la force de l'âge, dans les dédales de mon domaine dont il connaissait chaque recoins et jusqu'à la sortie. Par delà la forêt, par delà les champs étincelant et les roches luisantes le haut temple s'élevait. Structure de cristal et de verre, la lueur de son apogée reflétant les étoiles et la lumière de l'univers. J'approchais mes pieds nus d'une petite étendue d'eau et les laissais pénétrer dans le liquide frais. Dans le haut temple je voyais les lumières vacilles et les flammes du doute s'élever. Je me retournais vers mon plus grand fidèle en soupirant. - Ces assemblées m'ennuient tellement. - « Ils y sont déjà depuis des heures. » - Ça ne m'aide pas vraiment ça. Je passerais certainement la nuit ici... - Mais il me coupait et je lui souriais. - « Je tiendrais donc la table prête. » - Dans un dernier regard je baissais les yeux sur l'eau et y observais mon reflet vrillé par les vaguelettes que je dessinais. Elles s'étiraient, douces, grandissantes, bien rondes. Elles s'entrecroisaient et je m'y perdais.

Dans le haut temple, au sommet de l'apogée, dans la salle des songes une assemblée se tenait. C'était une salle circulaire pourvues de nombreux fauteuils somptueux et dont la taille et le nombre d'assises s'adaptaient toujours au nombre de présences. En son centre une table légèrement courbée en une infime creux empli d'un liquide clair et lumineux, emplissant la salle de sa lueur douce et blanche. Mais le calme de ce paysage était bafoué par les voix et les cris. L'inquiétude, la perplexité. La peur pour certains. Pour beaucoup. Quelques uns étaient debout, incapables de tenir assit dans ce grand débat qui faisait même vibrer les panneaux de verres et de cristal. Parmi l'un d'eux, un homme était debout au plus au centre de la salle, au plus proche de la table. Il était grand et massif, viril, la mâchoire carrée et le muscle saillant sous son armure de cuir. Il était mon frère. Il était mon premier frère. Il était le maître du réel. - « N'entendez-vous donc pas ce que je dis? C'est une menace! Une déchirure de notre monde! Ces failles sont un fléau! » - Des voix lui répondaient. D'autres répondaient à ces voix. Et d'autres encore émettaient d'autres idées couvertes par tout ce brouhaha. Assises dans deux des plus magnifiques fauteuils, les Soeurs observaient en silence. Elles étaient la neutralité absolue, la dualité de l'existence. La vie et la mort. La première, les cheveux de paille, les yeux d'un bleu parfait, était l'instigatrice de la vie. La seconde, sa chevelure sombre, ses yeux d'un gris sans fin, était l'accompagnatrice des morts. Elles étaient jumelles et silencieuses mais j'avais toujours soupçonnés que leurs pensées, elles, s'animaient.

Un groupement de dieux s'étaient formés au centre de la salle, discutant, criant, leur son s'élevant au delà du nécessaire. Ma lueur alors s'élevait. Dans l'eau mon reflet puis dans la clarté mes formes. J'apparaissais sans un son, sans un mot et dans le regard des Sœurs déesses je lisais l’engouement. - « Il faut frapper vite! Il faut attaquer tant que notre monde est encore sûr! » - Encore et toujours si prompt à frapper, n'est-ce pas? - Ma voix claquait dans le vent, comme un échos raisonnant dans les milliers de recoin des parois de verre. L'attroupement s'écartait d'un coup, surpris. Ils n'avaient pas peur non, ils me connaissaient tous et ce n'était pas la première fois que j'apparaissais ainsi. Il se retournait d'un bond, la main portée à la garde de d'une dague qu'il portait toujours sur lui. Son regard me fixait un instant, sa lueur n'était pas dorée comme la mienne, elle était plutôt rougeoyante comme le feu qui l'animait.

Nathélias, mon frère, pourquoi ne pas prendre le temps de réfléchir à tout ça? - Sa colère me jaugeait et dans cette salle immense ma voix avait intimé le silence. - « Tu daignes donc faire une apparition? As-tu déjà planifié ton départ? Ne devrais-tu pas déjà t'enfuir? » - Un léger sourire étirait mes lèvres. J'acceptais le reproche comme la légitimité qui le nourrissait. Je faisais quelques pas et gagnais l'espace qui m'était dû. Certains retrouvaient le chemin de leurs fauteuils, d'autres simplement s'éloignaient de quelques pas, laissant au centre de la salle son envergure. Je contournais la table de pierre, laissant sur sa surface aqueuse courir le bout de mes doigts. Comme les Sœurs déesses, Nathélias et moi étions proche. Très. C'était comme un duo symbiotique. Je connaissais chacun de ses regards, chacune de ses mimiques. Je percevais chacun des changements qui animaient son caractère et il en faisait de même avec moi. Nous étions les dieux originels, nous étions millénaires, nous étions le réel et l'irréel, la vie et la mort. Nous étions le début et la fin. Je cherchais à gagner du temps et il le savait. Un goutte chutait du bout de mon index et dans la surface liquide s'échouait. Ce qui aurait dû n'être qu'un cercle dans l'eau devint une vague de glace qui alla frapper chaque bordure de pierre et révéla la réalité.

Dans la glace une silhouette puis une image. J'y voyais la forme d'un homme, un B'alméen. Sa carrure était impressionnante, son regard intense mais ses cornes étaient aussi incroyable que les deux bras supplémentaires qui ornaient son torse musclé à outrance. Je croisais les bras en l'observant. C'était une entité des rêves, certainement le cauchemars de l'un de nos fidèles. Je devrais me rendre à lui pour le conjurer mais mon regard se perdait dans les reflets glacés et sa voix me rappelait. - « As-tu quelque chose à dire, Naerendil? » - Mais certainement. Ne le sais-tu pas? J'ai toujours quelque chose à dire. Il est tard mes amis, la nuit est déjà avancée, les étoiles nous cernes. Des heures durant vous avez discutez le sujet sans tomber d'accord. Je pense qu'il serait temps d'une pause. Prenez le temps de vous reposer, de vous détendre. Vous savez tous très bien faire ça, je le sais. - Une vague de rire s'élevait brièvement. - Allez. Nous nous retrouverons demain. Ne dit-on pas que la nuit porte conseil? - Proverbe humain. Ce n'était pas la première fois qu'on pensait que j'inventais de jolies phrases et ce ne serait certainement pas la dernière. - Nathélias restait silencieux mais d'un regard valida mes propos. Aussitôt, les pas se joignaient et tous s'en allaient. Mieux valaient l'accord des deux que le désaccord de l'un.

Nous restions pourtant là. Lui, moi, Elles. Les autres retournaient à leurs temples, retournaient à leur nourriture et à leur fin, à leurs nuits d'ivresse ou de dépravation. De sommeil ou de culture. Mon attention n'était qu'ici. Nathélias s'était appuyé sur la table de pierre et comme son reflet je l'imitais. De quelques pas léger, comme flottantes, les Sœurs nous rejoignaient et chacun prit place à la droite de l'autre. Dreanitia, déesse de la vie, était vêtue d'une longue toge blanche qui épousait ses formes sans trop les révéler, son col tenue d'une plaque d'or. En face Diëtia portait une toge plus sombre, grisonnante, moulant presque chacun de ses reliefs, ses cheveux de jais enserrés dans un anneau de métal aux reflets clairs. - « Bien des nuits nous t'avons guetté. » - « Bien des jours nous t'avons attendu. » - Mais sa voix était plus vive et animée. - « Bien des années surtout. » - Je sais. Mais ne vous avais-je pas prévenu de mon départ? Nous étions d'accord. Nous en avions discuté. - « Tu avais discuté. » - Je prenais le silence. Le laissais vivre un instant. - Tu as raison Diëtia. - « Est-ce Althéon qui t'a ramené? » - Oui, il m'a prévenu.

Mes doigts frôlaient à nouveau les cristaux de glace et une nouvelle vague les secouait pour former une nouvelle image. Celle de la faille. D'une faille. - Car il sait ce qui se passe ici. Et il le sait parce que je le sais. - Leurs regards se faisaient plus pressants. Le givre suintait et en une seconde la glace retombait en eau liquide au fond de la table de pierre. Je faisais quelques pas. - La faille que vous avez vu. Cette créature. Je suis responsable de leur apparition. - « Que dis-tu? » - Il y a bien des années j'ai fais une erreur. J'ai ouvert un passage vers le plan chimérique. - Au regard de mon frère, qui n'avait d'ailleurs jamais réussi à saisir l'essence de mon pouvoir, je reformulais. - Le plan d'existence des rêves. Je pensais pouvoir en contrôler les conséquences et je suis parvenu à refermer le passage une fois mon office faites mais plus tard j'ai constaté que j'avais été bien naïf. En ouvrant ce passage j'ai créé une faille entre ce plan d'existence et le plan chimérique. Une faille qui s'agrandit. - « Alors tout est de ta faute?! » - La main de Dreanitia se posait sur son avant bras et il se contenait. - Je travaille sans relâche depuis toutes ces années à compenser cette erreur, à réparer mes torts.

Nathélias soufflait vivement par le nez avant de s'éloigner à pas enflammés. Draenitia le regardait faire avant de revenir à moi. Diëtia, elle, ne m'avait pas lâché du regard. - Je peux conjurer ce cauchemars et refermer cette faille, mais d'autres s'ouvriront. Vous n'avez pas conscience d'une chose: j'ai ouvert le premier passage dans l'autre univers. Si une faille est apparue ici, ça veut dire que ce phénomène agit au delà des frontières des univers. C'est un problème... - « ... autrement plus grave. » - J’acquiesçais. Il nous arrivait en de rares occasions d'acquérir ce même degrés de partage que les Sœurs et j'appréciais toujours ces quelques moments. - Je ne connais pas encore le moyen ultime de refermer la famille originelle. Je tente de fermer autant de ses filles que je le peux mais le processus semble tout de même se poursuivre. - « Si les failles vers le plan chimérique s'ouvrent partout, l'univers risque d'être déchiré. Les univers. » - « La réalité s'étiolerait. » - Draenitia levait les yeux vers moi. - « Et l'irréalité aussi. » - J’acquiesçais à nouveau, confirmant sa théorie. Le plan chimérique était un plan d'existence aux possibilités bien plus infini que celui-ci car la physique, la magie, la science ou la religion, tout ça n'y existait pas. Tout y était mélangé, mué, muté. C'était un tout où l'imaginaire s'animait. L'infini et le néant. L'absolue.

Draenitia soupirait. - « Mes frères, passons donc la nuit. Laissons la nous porter. Le problème se posera toujours demain et sa solution ne nous apparaîtra certainement pas ici et maintenant. » - Elle faisait le tour de la table pour rejoindre sa sœur et joignais sa main dans la sienne. - « Et par pitié... » - « ... tâchez de vous tenir. » - Elles disparaissaient alors dans un tornade de vent et de flammes et je portais mon regard sur le dos d'armure de Nathélias. Le silence avait à nouveau gagné la salle des songes et j'attendais ses mots. - Pourquoi ne te suffit-on pas? - Mon regard se faisait plus faible. Je le baissais, coupable de ma propre personnalité. Je me rapprochais de lui en quelques pas, ma peau frôlant le sol de verre. - Tu sais que c'est dans ma nature. - Je traversais la distance jusqu'à lui et passais mon bras atour de ses épaules. - Comme il t'appartient de fulminer et de voir clair en le monde et ses terres, il m'appartient de voir loin et de vouloir découvrir toujours plus et au delà. - Je sentais sous mon bras la tension de ses muscles se dissiper et sous ma peau le cuir de son armure se muer en une peau chaude. Elle disparaissait au profit d'une grande toge plus classique que la mienne, et dans une discrète lueur orangée révélait à l'air libre son torse velu et musclé et ses tout aussi nombreuses tâches bleutées. Il tapotait sur ma poitrine de sa grande main et un sourire étirait ses lèvres. - « Tu m'as manqué mon frère. » - Tu m'as manqué aussi.

Dans la pénombre étoilée nous marchions. Nous sortions du Haut temple et descendions les marches vers les rouges pâturages. Nous longions une petite rivière qui se jetait dans le vide de l'espace et rejoignions les temps. L'espace divin, l'Olympe b'alméens si vous voulez, est un plan d'existence accolé au plan commun. Nos fidèles, les humains, la vie, se perpétrait juste là, en dessous. Mais notre domaine s'élevait au dessus, loin et pourtant prêt. Des bordures du vide de nos terres nous pouvions observer B'almaar d'en haut, comme si nous étions dans son ciel, comme si nous étions loin ou prêt. Mais nous n'y étions pas vraiment. Nous pouvions sauter dans ce vide et rejoindre les terres, nous pouvions nous y transporter grâce à nos pouvoirs. Pour l'heure nous passions devant la petite étendue d'eau que j'avais emprunté pour me rendre au Haut temple et nous entrions dans ma demeure. Althéon était là, patientant pour mon retour. - Althéon, tu n'avais pas à attendre tu sais? - « Je sais mon seigneur, j'en avais seulement envie. » - Je délaissais un instant mon frère et approchais du B'alméen, posant mon imposante main sur son épaule tout en posant un genou à terre devant lui pour réduire la distance entre nos visages. Il était le seul à qui j'offrais ce genre de considération, de quoi régulièrement agacer Nathélias d'ailleurs. - Je suis content de te voir Althéon, sois en sûr, mais il est déjà très tard. Merci de m'avoir appelé, mon ami. - Je sentais le frisson sous ma paume et il s'inclinait. Je lui souriais et il faisait demi-tour pendant que je me relevais, mon regard doré se tournant vers l'air impatient de mon frère. - Ne sois donc pas si pressé. Le nectar ne disparaîtra pas par magie. - Je le rejoignais et le taquinais d'une main dans ses cheveux. - Enfin, si tu es bien sage en tout cas!

Cette nuit-là, le nectar coula à flot, liquide nacré et scintillant d'une faible lueur claire éclairant les calices de verre d'une aura apaisante. Je lui racontais quelques anecdotes de mon voyage sur la Terre, rien de bien révélateur mais de quoi rassasier ses curiosités. De son côté il me faisait un rapide résumé des années qui s'étaient écoulées. Un an pour cinq ans. Voilà l'échelle qui régissait le temps. Pour un an dans mon univers d'origine, cinq ans se déroulaient dans le monde à l'envers. A ses yeux, j'avais quitté B'almaar depuis plus de quatre ans, et c'était long. Je pouvais le comprendre. Nous passions la nuit à discuter, les dernières heures à dormir ou du moins à somnoler et finalement c'est lorsque une aurore mystique se levait que mes yeux dorés s'ouvraient. Ce paysage m'avait manqué. L'herbe rouge, les feuilles des arbres argentées, la rivière d'une transparence parfaite, le bois nervuré d'or. Je me levais et passais ma main sur Nathélias pour le réveiller. Il ouvrait les yeux et je sortais sur le parvis du temps, voyant d'un œil nostalgique la Vie déverser le contenue d'une jarre de métal dans la petite étendue d'eau. Elle faisait ça tous les jours, dés le réveil. Draenitia était l'incarnation de la vie et cette étendue d'eau? C'était l'eau originelle, le lien physique du domaine divin et des terres en dessous. Ce que nous déversions dans cette eau influençait toutes les eaux de B'almaar. Un jour, le dieu de l'ivresse dans l'une de ses folles journées de fête avait versé dedans le contenu d'un pichet de nectar. Imaginez bien, chaque océan, chaque rivière, chaque verre d'eau de B'almaar agrémenté d'une dose de l'alcool le plus fort et le plus doux que l'existence n'avait jamais connu? L'ivresse avait touché la planète toute entière durant trois longs jours avant que les effets ne s'estompent.

Bonjour, Draenitia. - « Effectivement, Naerendil. » - Je souriais alors qu'elle terminait son rituel. Elle offrait au monde le don de la vie. Tous les jours, une dose de pure énergie vitale qui donnait aux hommes, à la nature, la vie qu'elle méritait. Sans ça, plus rien ne pousserait, plus rien ne vivrait sur ces terres. Si un jour Draenitia venait à disparaitre, la vie s'éteindrait. - « T'occuperas-tu du cauchemars? » - Oui. Je m'en occupe immédiatement. - Je faisais mine de m'éloigner mais sa main me retenait, douce et claire. - « Resteras-tu? » - Je me retournais mais mon visage était limpide. Elle comprenait. - « Tu sais, Nathérias a mal vécu ton départ. Ne pourrais-tu pas rester cette fois? » - Je me retournais alors complètement et posais main sur sa joue, sa main rejoignant la mienne. - Tu connais déjà la réponse à cette question, ma sœur. J'aime mon frère. Il peut être impétueux, égoïste, mais je l'aime. Il me connait, il sait mon besoin d'aller et venir. Il doit simplement l'accepter et je ne peux le faire pour lui en nourrissant ses besoins superficiels. - Un léger sourire amusé étirait ses lèvres fines. - « Parfois j'ai l'impression que tu nous considères comme tes enfants. » - Nous sommes des dieux, n'est-ce pas ce qui nous caractérise le plus au final? - Elle riait et je lâchais sa joue. - « Alors adieu, mon frère. »

Je m'éloignais de l'eau originelle et de la Vie pour rejoindre les prisons du domaine divin. Là, dans les souterrains immenses et creusés se trouvait l'une des plus grandes cellules jamais battis. A l'intérieur le cauchemar fulminait, ses bras frappant la pierre, ses cornes fumantes. Ces murs étaient impénétrables, je lui souhaitais bien du courage et à la vu du sang sur ses mains, je constatais son entêtement. J'étais le seul à avoir le pouvoir de révoquer les chimères et si sur Terre j'avais besoin de les combattre, ici mon pouvoir était à son plein potentiel. Ici, je n'avais qu'à claquer des doigts. J'entrais dans la fausse, jaugeant mon adversaire aux yeux de sang. - Et bien? - J'écartais les bras en signe de provocation. - J'attend! - Et son courroux lui ne se fit pas attendre. Son cri assourdissant, ses pas lourds, sa sueur acide et fumante. Il chargeait, corne devant. Je pouvais sentir leur chaleur cuisante mais jamais elles ne m'atteindraient. Je levais une main et stoppait sa course en un instant comme si un mur invisible venait d’apparaître sur son passage, invisible et inviolable. Il s'effondrait en arrière. Ses cornes étaient brisées. - Tu n'as pas choisi le bon endroit pour apparaître, cauchemars. - Je l'enveloppais de cette barrière inviolable pour l’empêcher de se relever et dans simple geste, claquais des doigts. Alors son corps s'éleva, son essence s'étiola, dans les secondes sa poussière s'envola et dans une lueur sombre disparue. Que la noirceur retourne à l'infini. - « Égoïste et impétueux, c'est ça? »

Je me retournais. Dans l'embrasure de la grille un spectateur, Nathélias. - Tu connais tes défauts mon frère, aussi bien que je connais les miens. - Je frottais mes mains entre-elles. Les derniers grains de poussière chimérique s'estompaient et je revenais vers la sortie. - Tu fais seulement le choix de les laisser te gouverner. - « Tu es le seul qui est capable de les gouverner. » - J'approchais de lui et saisissais ses bras, posant mon front contre son front. - "Tu" est le seul capable de les gouverner. Comprend cela et tu ne seras plus jamais leur instrument. - Je déposais sur sa joue un baiser fraternel et tapotait son épaule tout en le contournant. Mon office ici était terminé, pour le moment. L'assemblée se réunirait dans la journée, pleine de nouveaux cris et de nouveaux débats. Je n'avais jamais aimé ça, la discussion futile. Et pourtant j'étais son maître. Nathélias m'accompagnais jusqu'à mon temple et au miroir des âges où Althéon patientait. Je ne lui avais jamais offert la clairvoyance et pourtant ce simple B'alméen avait toujours vu les choses, compris les choses. Il me connaissait. Il aurait fait un dieu somptueux et sage. Son visage était celui d'un homme d'une trentaine d'années et il attendait assit sur un fauteuil à côté du miroir.

Althéon, bonjour. - « Bonjour et au revoir, n'est-ce pas? » - Oui, mon ami. - « Votre passage m'a semblait une seconde. » - Je sais. Mais je promet de revenir. - Je passais de lui à mon frère, assurant mon regard. - Cette fois je promet de revenir plus souvent. - « Ou il te rappellera. » - Le sourire d'Althéon s'étirait alors. - « Oui, je fissurerais votre reflet jusqu'à ce que vous nous reveniez. » - Je savais que Nathélias n'appréciait pas vraiment la présence d'Althéon, mais il avait toujours fait l'effort de le tolérer, pour moi. Althéon était mon élu, autorisé à vivre parmi nous, à propager ma parole et mes avis. Si sa présence dans la salle des songes était impossible, il y aurait été mon représentant de confiance, j'en étais certain. Je claquais des doigts et dans la lueur dorée de mon essence mon corps changeait à nouveau. La toge blanche s'effaçait pour laisser apparaître ma peau et mes tatouages, ma taille diminuait, mes yeux reprenaient leur teinte de bleu. Mes précieuses tâches s'estompaient. Le boxer qui couvrait mon intimité lors de mon arrivée réapparaissait alors. - « Qu'est-ce que c'est que ce vêtement? - » Es-tu sûr de vouloir le savoir, mon frère. - Il relevait le regard sur mon visage et me fixait un instant avant d'abdiquer devant mon sourire malicieux. - « Non, je suppose... Ils ont l'air si fragiles... » - En apparence seulement, je peux te l'assurer.

Je leur souriais et me retournais face au miroir, face à l'antique cristal. - Et bien au revoir, soyez sage durant mon absence. - Dans le reflet je les observais. Aucun ne répondait, aucun ne répondrait. Je leur faisais confiance, une confiance aveugle et je reportais mon attention sur mon propre reflet. Ce corps, ces yeux. Ses yeux. Mes yeux. Je basculais. Les reflets de l'univers me parvenaient alors et dans le lumière je volais. Je traversais le passage, visualisais ma destination et un genou à terre j'apparaissais face au miroir de ma salle de bain. Je me redressais et observais une dernière seconde l'écho du monde à l'envers qui s'estompait. La fissure avait disparu, le miroir était comme neuf. J'avais passé l'équivalent d'une journée dans le monde à l'envers aussi je ne m'étais absenté qu'un peu moins de deux heures et au dehors la journée commençait encore. Je me laissais tomber dans le sofa du salon, observant par la fenêtre le soleil s'élever et la ville. Ça ne vaudrait jamais les rouges pâturages de B'almaar... mais c'était tout de même plaisant. Ici bas une force mystique était à l'oeuvre. Les chimères s'agitaient et je devrais trouver une solution avant que les univers ne soient consumés. Tant que le phénomène était encore discret. Tant que je pouvais encore y faire quelque chose.
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